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Décisions

CA Angers, ch. soc., 20 avril 2004, n° 03-00619

ANGERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

LTR Industries (Sté)

Défendeur :

Monnier

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bothorel

Conseillers :

Mme André, M. Jegouic

Avocats :

Mes Schrebier, Lalanne.

Cons. prud'h. Le Mans, du 25 oct. 2002

25 octobre 2002

Exposé des faites, procédure, objet du recours

Le 18 décembre 2002, la (seule) société "LTR Industries (Paris)" (la société LTR), comme il l'a été précisé à l'audience à la demande de la cour, a formé appel d'un jugement rendu le 25 octobre précédent par le Conseil de prud'hommes du Mans qui, saisi à l'initiative de son ancien salarié, Michel Monnier, l'a notamment condamnée à verser à celui-ci la somme principale de 44 997 euro "au titre de la contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence" (soit plus exactement en réparation du fait de cette clause de non-concurrence, telle qu'elle avait été imposée à Michel Monnier du temps où il était au service de cette société LTR était assortie d'une contrepartie financière contractuelle);

Elle entend en effet obtenir:

- à titre principal, l'annulation de la clause de non-concurrence ainsi insérée dans le contrat de travail de Michel Monnier (?) (et, en conséquence, le rejet des prétentions de son ancien salarié ?);

- subsidiairement, qu'il soit jugé que "Michel Monnier (ne peut) prétendre à une indemnisation au titre de sa clause de non-concurrence (dès lors) que celle-ci ne peut être fixée selon les dispositions conventionnelles de l'article 42, alinéa 2, de la convention qui ne concernent que les salariés licenciés";

- et, en tout état de cause (et notamment), la condamnation de Michel Monnier à lui rembourser la somme qu'elle a été contrainte de lui verser en vertu de l'exécution provisoire attachée à la décision déférée.

Michel Monnier conclut au contraire, toujours à titre principal, à la confirmation de la décision déférée.

Moyens proposés par les parties

Considérant qu'après avoir notamment rappelé à compter de quelle date et en quelle qualité elle avait initialement embauché Michel Monnier, puis quelle a été l'évolution de la carrière de celui-ci, et enfin quelles ont été les sommes versées à l'intéressé à l'occasion de sa mise à la retraite, la société LTR a fait, en substance, valoir à l'appui de son recours:

- que la clause de non-concurrence qu'elle reconnaît avoir imposée à son ancien salarié serait nulle pour les motifs exposés dans ses écritures d'appel (ce qui est d'ailleurs - au mieux - paradoxal);

- que Michel Monnier ne peut utilement solliciter la réparation du prétendu préjudice que lui aurait occasionné l'inclusion dans son contrat de travail d'une telle clause de non-concurrence, dès lors que les conditions d'application de l'article 42, alinéa 2, de la convention collective nationale de la "production de papiers, cartons et celluloses (ingénieurs et cadres)" ne vise que "les salariés congédiés", ce qui n'aurait pas été le cas, selon elle, de Michel Monnier;

- et qu'en tout état de cause, Michel Monnier n'apporte pas la preuve, toujours selon elle, du préjudice que lui aurait occasionné l'existence d'une telle clause dans son contrat de travail;

Considérant que Michel Monnier adopte au contraire pour l'essentiel, et là encore à titre principal, les motifs de la décision déférée;

Motifs de l'arrêt

Considérant qu'il résulte de l'article 1134 du Code civil que toute convention légalement formée tient lieu de loi à ceux qui l'ont faite;

Considérant dès lors que les moyens invoqués par l'appelante au soutien de son recours ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont le tribunal a connu et auxquels il a répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation;

Considérant en effet tout d'abord que la société LTR n'a pas qualité pour solliciter l'annulation de la clause de non-concurrence litigieuse, en ce que celle-ci ne lui imposait le devoir d'indemniser son ancien salarié soumis à cette clause que dans l'hypothèse du "congédiement" de celui-ci, puisque seul Michel Monnier aurait pu éventuellement contester la validité de la même clause, en ce qu'elle portait atteinte cette fois-ci, ne serait-ce que partiellement, au libre exercice de son activité professionnelle, peu important à cet égard qu'à la date de son "congédiement", Michel Monnier "ait pu prétendre partir (à la retraite) à taux plein";

Considérant en second lieu que c'est par de justes motifs, qui sont adoptés, qu'après avoir constaté, d'abord que Michel Monnier avait l'obligation de respecter la clause de non-concurrence incluse dans un avenant à son contrat de travail en date du 18 janvier 1991 (et non du 18 janvier 2001) "pour le cas où (il) viendr(ait) à quitter (la société LTR), et ce pour quelque cause que ce soit", et ensuite qu'en contrepartie de cette obligation, la société LTR avait pour sa part celle d'indemniser Michel Monnier, dans les termes du même contrat, "si (le) départ (de Michel Monnier) résult(ait) d'un congédiement", les premiers juges en ont déduit que la société LTR devait verser à Michel Monnier l'indemnité contractuelle prévue en une telle hypothèse, étant seulement ajouté:

- que la société LTR ne conteste à aucun moment être à l'origine de la mise à la retraite de Michel Monnier(cf. notamment la page 2, paragraphe 7, de ses propres écritures d'appel);

- que le terme "congédier" est défini par les propres sources documentaires dont fait état la société LTR elle-même comme le fait "d'inviter quelqu'un à se retirer, à s'en aller", de sorte que le fait, pour un employeur, de mettre unilatéralement l'un de ses salariés à la retraite constitue bien un tel "congédiement";

- que la référence faite par la société LTR à l'ancienne convention collective de la production des papiers, cartons et celluloses (dans sa "rédaction initiale de 1972"), outre qu'elle ne correspond plus - par hypothèse - à l'état actuel de ce texte, est en tout état de cause sans intérêt, dès lors que, comme il l'a été vérifié, rien n'exclut, dans cette convention, dont la rédaction est il est vrai parfois approximative, le cumul d'une "indemnité de départ à la retraite" et d'une indemnité liée au respect, par le salarié concerné, de la clause de non-concurrence incluse dans son contrat de travail (mais seulement le cumul entre une telle indemnité de départ à la retraite et une indemnité de licenciement);

- que, d'ailleurs, ce n'est pas un hasard si la société LTR n'a jamais cru devoir "lever" la clause de non-concurrence ainsi imposée à son ancien salarié "dans le délai de huit jours (suivant) la rupture effective de son contrat";

- et que, quoiqu'elle en dise, la société LTR est bien incapable de justifier de la nature de la somme de 1 421,85 euro versée à Michel Monnier le 28 mars 2002, soit près de six mois après la mise à la retraite de l'intéressé, à titre de "rappel imposable";

Qu'abstraction faite de moyens ou d'arguments qui restent à l'état de pures allégations (et/ou qui sont sans intérêt dans le cadre du présent litige), il convient en conséquence de confirmer la décision déférée;

Considérant enfin qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Michel Monnier les nouvelles sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens;

Qu'il lui sera donc alloué à ce titre celle de 2 500 euro;

Décision

Par ces motifs, et ceux non contraires ayant déterminé les premiers juges, qu'elle adopte, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Confirme la décision déférée, Y ajoutant, Condamne la société LTR à verser à Michel Monnier la somme de 2 500 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Rejette toute autre demande. Condamne la société LTR aux dépens d'appel.