CA Angers, ch. com., 27 avril 2004, n° 03-00931
ANGERS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Gascoin
Défendeur :
BNP Paribas (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Ferrari
Conseillers :
Mme Lourmet, M. Mocaer
Avoués :
SCP Chatteleyn, George, SCP Gontier-Langlois
Avocats :
Mes Guillou, Chanteux.
Exposé du litige
Propriétaire d'un fonds de commerce de peinture, vitrerie, revêtements de sol et de murs exploité à Ernée (53), Rémi Gascoin l'a donné en location-gérance à Vincent Guérin par acte authentique du 9 décembre 1997.
Le 20 janvier 1998, la BNP Paribas a prêté à Vincent Guérin la somme de 142 000 F destinée, selon les termes de l'acte, au "financement d'un programme d'investissements selon les indications fournies à la banque".
Par jugement du Tribunal de commerce de Mayenne en date du 9 avril 1999, Vincent Guérin a été placé en liquidation judiciaire. La BNP Paribas a déclaré au représentant des créanciers une créance de 113 292,53 F.
Sur le fondement de l'article 8 de la loi du 20 mars 1956 devenu article L. 144-7 du Code de commerce qui rend le loueur du fonds de commerce solidairement responsable des dettes du locataire-gérant jusqu'à l'expiration un délai de 6 mois à compter de la publication du contrat de location-gérance, la BNP Paribas a mis en demeure Rémi Gascoin de lui régler cette somme le 6 avril 2000.
Elle l'a assigné en paiement le 26 mai 2000 devant le Tribunal de grande instance de Laval qui s'est déclaré incompétent par jugement du 12 mars 2001 au profit du Tribunal de commerce de Mayenne.
Par jugement du 14 février 2003 le Tribunal de commerce de Mayenne a condamné Rémi Gascoin à payer à la BNP Paribas les sommes de 18 410,29 euro avec intérêts au taux de 6,54 % l'an à compter du 6 avril 2000 et 762,25 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Rémi Gascoin en est appelant et demande à la cour de débouter la BNP Paribas de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
La BNP Paribas demande à la cour de confirmer le jugement déféré sauf à ordonner la capitalisation des intérêts et de condamner Rémi Gascoin à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Motifs de la décision
Selon l'article L. 144-7 du Code de commerce, le loueur est solidairement responsable des dettes de son locataire-gérant "contractées par celui-ci à l'occasion de l'exploitation du fonds" jusqu'à l'expiration un délai de 6 mois à compter de la publication du contrat de location-gérance.
La date de la publication du contrat de location-gérance n'est pas connue, mais le délai ne pouvait être expiré lors de la conclusion du contrat de prêt.
Selon Rémi Gascoin, la BNP Paribas ne rapporte pas la preuve de ce que le prêt a été consenti pour les besoins de l'exploitation du fonds loué. Pourtant Rémi Gascoin est intervenu à l'acte de prêt pour confirmer son engagement solidaire et permettre le nantissement du fonds à titre de sûreté, il a ainsi reconnu expressément que la dette contractée par son locataire gérant était liée à son exploitation du fonds.
L'imprécision des mentions de l'acte quant aux biens que celui-ci voulait acquérir ne lui est pas alors apparue s'opposer à l'application de l'article L. 144-7 du Code de commerce, ce qui démontre qu'il avait de ceux-ci une parfaite connaissance.
La BNP Paribas produit de plus un document intitulé "Passeport pour entreprendre", réalisé par Vincent Guérin et contenant une étude des besoins de trésorerie pour le démarrage de son activité de peinture-décoration. Les besoins de financement prévus sont de 142 000 F, destinés principalement à l'acquisition de matériel de bureau et d'un véhicule et à la constitution d'un fond de roulement.
Ce document a été à l'évidence utilisé pour obtenir le prêt et était connu de Rémi Gascoin, et il démontre que la dette de Vincent Guérin à l'égard de la BNP Paribas a eu pour objet le financement du démarrage de son commerce, c'est-à-dire l'exploitation du fonds.
La BNP Paribas produit encore une facture d'une société SDP démontrant que Vincent Guérin a acheté le 13 janvier 1998 pour 20 580,39 F de matériel informatique, et une lettre de la SA Mallecot du 21 janvier 1998 selon laquelle Vincent Guérin lui doit une somme de 16 706,59 F, solde de l'achat d'un véhicule professionnel.
Il est donc établi que le prêt, accordé pour financer des besoins professionnels connus et acceptés par Rémi Gascoin, a de plus été effectivement utilisé à cette fin, au moins dans ces limites.Ces acquisitions ne paraissent, contrairement aux dires de Rémy Gascoin, ni inutiles ni superflues pour l'exploitation du fonds.
Le jugement déféré qui a condamné Rémi Gascoin à payer à la BNP Paribas la somme de 18 410,29 euro avec intérêts au taux contractuel de 6,54 % l'an à compter du 6 avril 2000 sera donc confirmé.
Les intérêts seront capitalisés à compter de la demande qui en a été faite par la BNP Paribas le 5 décembre 2003.
L'équité commande de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Rémi Gascoin à payer à la BNP Paribas une indemnité de 762,25 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, et de condamner, en cause d'appel, Rémi Gascoin à payer à la BNP Paribas une somme de 800 euro sur le même fondement.
Rémi Gascoin, qui succombe en son appel en supportera les dépens.
Par ces motifs: Statuant publiquement et contradictoirement, Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré; Ajoutant, Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1154 du Code civil à compter du 5 décembre 2003; Condamne Rémi Gascoin à payer à la BNP Paribas la somme de 800 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en cause d'appel; Condamne Rémi Gascoin aux dépens recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.