CA Paris, 5e ch. B, 3 juin 2004, n° 2002-05038
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Socogar Automobiles (SARL), Detroit Motors (EURL), Espace Lyonnais (SA), Inter Auto (SA)
Défendeur :
Daimler Chrysler France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Main
Conseillers :
MM. Faucher, Remenieras
Avoués :
SCP Bommart-Forster, SCP Duboscq & Pellerin
Avocats :
Mes Bertin, Urion, Ponsard
LA COUR est saisie de l'appel interjeté par les sociétés Socogar Automobiles, Detroit Motors, Espace Lyonnais et Inter Auto du jugement contradictoire rendu le 20 décembre 2001 par le Tribunal de grande instance de Paris qui dans le litige les opposant à la société Daimler Chrysler France, a déclaré irrecevables leurs demandes additionnelles en nullité fondées sur les dispositions de la loi Doubin, a constaté le respect de la procédure de résiliation des contrats de concession en litige par la société Chrysler France et la nécessité de réorganisation du réseau, a débouté en conséquence les appelantes du surplus de leurs demandes et les a condamnées outre aux dépens, à payer à l'intimée 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la société Daimler Chrysler France étant déboutée de sa demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Inter Auto.
Dans ses dernières conclusions du 5 mars 2004 la société Socogar Automobiles prie la cour d'infirmer le jugement déféré et,
- à titre principal, de surseoir à statuer jusqu'au prononcé d'une décision définitive de la Cour d'appel de Versailles dans les litiges opposant divers concessionnaires à la société Daimler Chrysler France,
- à titre subsidiaire, de constater la nullité du contrat de concession conclu entre elle et la société Sonauto et de dire que, faute de convention écrite, l'intimée se devait de respecter le préavis de résiliation ordinaire de 24 mois édicté par l'article 5.2 du règlement n° 1475-95,
- à titre subsidiaire et/ou au surplus, de dire que la procédure de résiliation collective mise en place par la société Daimler Chrysler France le 30 septembre 1997 est intervenue en violation des dispositions de l'article 5.3 du règlement n° 1475-95,
* en conséquence, et pour les causes sus-énoncées, de condamner l'intimée à lui payer,
- la somme de 349 105 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à une année de marge brute calculée en référence à la marge brute moyenne réalisée au cours des trois dernières années précédant la résiliation.
- la somme de 72 730 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à deux mois 1/2 de marge brute perturbation lors du préavis.
- de dire et juger pour parfaire que la résiliation du contrat de concession est intervenu de façon abusive en violation de l'article 1134 al. 3 du Code civil et de condamner la société Daimler Chrysler France à lui payer 349 105 euro correspondant à une année de marge brute en réparation du préjudice lié à l'impossibilité dans laquelle l'intimité l'a indûment placée de pouvoir céder tout ou partie de ses actifs et à la spoliation de la valeur incorporelle de son fond de commerce qu'elle a favorisé en transférant ce fonds à son successeur qui s'est trouvé ainsi dispensé d'en payer le prix,
- de condamner la société Daimler Chrysler France, outre aux dépens, à lui payer 7 623 euro HT au titre de ses frais irrépétibles.
L'appelante demande subsidiairement de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice des Communautés européennes sur renvoi préjudiciel pour un certain nombre de questions relatives à la résiliation prévue par les dispositions de l'article 5.3 et 5 du dernier alinéa du règlement CEE n° 1475-95.
Dans les ultimes écritures du 5 mars 2004 la société Detroit Motors demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et,
- à titre principal, de surseoir à statuer jusqu'au prononcé d'une décision définitive de la Cour d'appel de Versailles dans les litiges opposant divers concessionnaires à la société Daimler Chrysler France,
- à titre subsidiaire de constater la nullité du contrat de concession conclu entre elle et la société Sonauto et de dire que, faute de convention écrite, l'intimée se devait de respecter le préavis de résiliation ordinaire de 24 mois édicté par l'article 5.2 du règlement n° 1475-95,
- à titre subsidiaire et/ou au surplus, de dire que la procédure de résiliation collective mise en place par la société Daimler Chrysler France le 30 septembre 1997 est intervenue en violation des dispositions de l'article 5.3 du règlement n° 1475-95 du 28 juin 1995,
* En conséquence, et pour les causes sus-énoncées, de condamner l'intimée à lui payer,
- la somme de 267 171 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à une année de marge brute calculée en référence à la marge brute moyenne réalisée au cours des trois dernières années précédant la résiliation,
- la somme de 55 661 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à la marge brute dont elle a été privée durant deux mois 1/2 en raison de la réduction de la durée utile de préavis de résiliation.
- de dire pour parfaire que la résiliation du contrat de concession est intervenue de façon abusive en violation de l'article 1134 alinéa 3 du Code civil et de condamner la société Daimler Chrysler France à lui payer 267 171 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à une année de marge brute en réparation du préjudice lié à l'impossibilité dans laquelle l'intimée l'a indûment placée de pouvoir céder en tout ou partie ses actifs et à la spoliation de la valeur incorporelle de son fonds de commerce,
- à condamner la société Daimler Chrysler France, outre aux dépens, à lui payer 7 623 euro HT en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
L'appelante demande subsidiairement de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice des Communautés européennes sur renvoi préjudiciel sur un certain nombre de questions relatives à la résiliation prévue par les dispositions de l'article 5-3 et 5 du dernier alinéa du règlement CEE n° 1475-95.
Dans ses dernières conclusions du 5 mars 2004 la société Espace Lyonnais prie la cour d'infirmer le jugement déféré et,
- à titre principal, de surseoir à statuer jusqu'au prononcé d'une décision définitive de la Cour d'appel de Versailles dans les litiges opposant divers concessionnaires à la société Daimler Chrysler France,
- à titre subsidiaire, de constater la nullité du contrat de concession conclu entre elle et la société Sonauto et de dire que, faute de convention écrite, l'intimée se devait de respecter le préavis de résiliation ordinaire de 24 mois édicté par l'article 5.2 du règlement n° 1475-95,
- à titre subsidiaire et/ou au surplus de dire que la procédure de résiliation collective mise en place par la société Daimler Chrysler France le 30 septembre 1997 est intervenue en violation des dispositions de l'article 5.3 du règlement n° 1475-95,
* En conséquence, et pour les causes sus-énoncées, de condamner l'intimée à lui payer,
- la somme de 604 335 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à une année de marge brute calculée en référence à la marge brute moyenne réalisée au cours des trois dernières années précédant la résiliation,
- la somme de 327 348 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à la marge brute dont elle a été privée durant six mois 1/2 pour perturbation lors du préavis,
- de dire et juger pour parfaire que la résiliation du contrat de concession est intervenue de façon abusive en violation de l'article 1134 alinéa 3 du Code civil et de condamner la société Daimler Chrysler France à lui payer 604 335 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à une année de marge brute en réparation du préjudice lié à l'impossibilité dans laquelle l'intimée l'a indûment placée de pouvoir céder tout ou partie de ses actifs et à la spoliation de la valeur incorporelle de son fonds de commerce,
- de condamner la société Daimler Chrysler France, outre aux dépens, à lui payer 7 623 euro HT au titre des ses frais irrépétibles.
L'appelant demande subsidiairement de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice des Communautés européennes sur renvoi préjudiciel sur un certain nombre de questions relatives à la résiliation prévue par les dispositions de l'article 5.3 et 5 du dernier alinéa du règlement CEE n° 1475-95.
Dans ses ultimes écritures du 5 mars 2004 la société Inter Auto demande à la cour d'infirmer pour partie le jugement déféré et,
- à titre subsidiaire, de constater la nullité du contrat de concession conclu entre elle et la société Sonauto et de dire que, faute de convention écrite, l'intimée se devait de respecter le préavis de résiliation ordinaire de 24 mois édicté par l'article 5.2 du règlement n° 1475-95,
- à titre subsidiaire et/ou au surplus, de dire que la procédure de résiliation collective mise en place par la société Daimler Chrysler France le 30 septembre 1997 est intervenue en violation de l'article 5.3 du règlement n° 1475-95,
* En conséquence, et pour les causes sus-énoncées, de condamner l'intimée à lui payer la somme de 394 136 euro à titre de dommages-intérêts correspondant à une année de marge brute calculée en référence à la marge brute moyenne réalisée au cours des trois dernières années précédant la résiliation,
- de dire et juger pour parfaire que la résiliation du contrat de concession est intervenue de façon abusive en violation de l'article 1134 alinéa 3 du Code civil et de condamner la société Daimler Chrysler France à lui payer 394 136 euro correspondant à une année de marge brute en réparation de préjudice lié à l'impossibilité dans laquelle l'intimée l'a indûment placée de pouvoir céder tout ou partie de ses actifs et à la spoliation de la valeur incorporelle de son fonds de commerce,
- de condamner la société Daimler Chrysler France, outre aux dépens, à lui payer 7 623 euro HT en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
L'appelante demande subsidiairement de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice des Communautés européennes sur renvoi préjudiciel sur un certain nombre de questions relatives à la résiliation prévue par les dispositions de l'article 5.3 et 5 du dernier alinéa du règlement CEE n° 1475-95.
Dans ses dernières conclusions du 11 mars 2004 la société Daimler Chrysler France conclut à la confirmation du jugement dont appel et sollicite, à titre incident, la condamnation de la société Inter Auto à lui payer 8 000 euro à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et des appelantes, outre aux dépens, à lui payer 8 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Sur ce:
Considérant à titre liminaire, que dans leurs écritures, les appelantes demandent de surseoir à statuer jusqu'au prononcé, par la Cour d'appel de Versailles, d'une décision définitive concernant un litige opposant la société Daimler Chrysler France à divers autres concessionnaires;
Mais considérant qu'il ne peut être fait droit à cette prétention dans la mesure où celle-ci n'est pas motivée et où les sociétés Socogar Automobiles, Detroit Motors, Espace Lyonnais et Inter Auto ne sont pas parties à ces procédures pendantes devant la Cour de Versailles;
Considérant, ceci étant, que la société Sonauto, importateur exclusif en France de voitures et de pièces de rechange fabriquées par la société Chrysler, a conclu le 20 février 1996 avec les sociétés Detroit Motors et Inter Auto et le 6 mars 1996 avec les sociétés Espace Lyonnais et Socogar Automobiles des contrats à durée indéterminée;
Qu'elle a, le 22 mai 1996, cédé à la société Chrysler France ses fonds de commerce ainsi que les contrats de concession liés à celui-ci, ce dont les concessionnaires ont été informés par une lettre du 19 avril 1996;
Considérant que la société Chrysler France a, le 26 septembre 1997, dans une lettre circulaire, avisé ses concessionnaires de la mise en place de " changements structurels de représentation Chrysler/Jeep en France " avec un " plan de développement en trois points " s'articulant de la manière suivante:
- octobre 1997: résiliation du contrat de concession,
- octobre/novembre 1997: présentation des normes et standards,
- novembre/décembre 1997: " plan d'actions concession par concession suivi par lettre d'intention pour les concessionnaires ayant mis en place un plan d'action, entraînant la signature du nouveau contrat ";
Qu'elle a, par lettres recommandées avec demande d'avis de réception du 30 septembre 1997, informé les appelantes que leur contrat de concession " Sonauto/Chrysler " serait " résilié à l'issue d'un délai d'un an à compter de la réception de cette lettre ",
Qu'elle a, par ailleurs, d'une part, le 13 novembre 1997, donné son accord à la société Inter Auto pour que celle-ci cesse son activité le 31 décembre 1997 comme concessionnaire Chrysler France et, pour une durée de six mois renouvelable par tacite reconduction, conclu avec elle le 19 février 1998 un contrat de service, d'autre part, le 15 décembre 1997, confirmé aux sociétés Socogar Automobile et Detroit Motors, sa décision de mettre un terme définitif à ses relations contractuelles le 28 octobre 1998, enfin, le 10 avril 1998, après lui avoir fait part le 30 mars 1998 que son projet ne retenait pas son attention, confirmé à la société Espace Lyonnais sa décision de mettre un terme définitif à ses relations contractuelles le 30 octobre1998;
Considérant que les appelantes prétendent tout d'abord que la résiliation de leurs contrats est irrégulière du fait,
- de l'absence de contrat écrit entre les parties, en sorte que la société Daimler Chrysler France ne pouvait selon elles, recourir à la procédure de résiliation extraordinaire pour cause de restructuration de son réseau,
- de sa non-conformité au règlement d'exemption catégorielle n° 1475-95 du 28 juin 1995;
Considérant, concernant le premier point, à savoir l'inexistence d'un contrat écrit, que les sociétés Socogar Automobiles, Detroit Motors, Espace Lyonnais et Inter Auto se prévalent du fait, tout d'abord que la société Daimler Chrysler France ne pouvait invoquer à son profit les contrats conclus entre elles et la société Sonauto, ce en raison de la violation des articles 22-6 et 8-4 desdits contrats, ensuite, comme l'a jugé la Cour d'appel de Versailles dans un arrêt du 27 janvier 2000, que leur consentement a été vicié par la société Sonauto qui n'a pas respecté les dispositions de la loi Doubin:
Considérant que pour s'opposer à ces prétentions la société Daimler Chrysler France soutient que la demande additionnelle en nullité du contrat est tant irrecevable au regard des dispositions de l'article 70 du nouveau Code de procédure civile que mal fondée;
Considérant, en ce qui concerne leur transfert, que les contrats de concession conclus avec la société Sonauto prévoyait, certes, en leur article 22-6, qu' " en cas de résiliation, de résolution ou d'expiration dudit contrat d'importation exclusive, entre le constructeur de produits de la marque et Sonauto le présent contrat prendra aussitôt fin... " mais contenaient aussi, en leur article 8-4, la disposition suivante: " A tout moment, Sonauto pourra se substituer dans ses droits et obligations découlant du présent contrat une autre société qui sera seule responsable de la continuation du présent contrat. Pour le cas où Sonauto entend se prévaloir de cette faculté de substitution, elle devra et avertir par lettre recommandées avec avis de réception le concessionnaire trois mois avant ";
Que, comme l'a retenu dans la présente affaire la Cour de Versailles statuant sur contredit le 22 février 2000, la société Sonauto a, en l'espèce, cédé à la société Chrysler France son fonds de commerce avec, parmi ses actifs, les droits et obligations résultant des contrats de concession, exercé sa faculté de substitution et informé ses concessionnaires en respectant la forme prévue sous la seule réserve du délai sans susciter cependant la moindre observation de leur part;
Qu'au surplus les appelantes ont manifesté de manière non équivoque leur volonté d'accepter la transmission des contrats en poursuivant sans réserve l'exécution de ceux-ci avec la société Chrysler France à laquelle elles ont commandé des véhicules et réglé les factures y afférentes;
Considérant, en ce qui concerne la nullité de ces contrats pour violation, par la société Sonauto, des dispositions de la loi Doubin, que force est de constater:
- qu'une telle demande est inopérante dans la mesure où, comme l'observe l'intimée, la nullité d'un contrat entraîne la disparition rétroactive des relations contractuelles entre les parties et ne peut avoir pour effet de faire naître un contrat verbal qui se substituerait au contrat écrit, ce que prétendent les appelantes,
- que, en tout état de cause, celle-ci n'établissent pas que l'inobservation des dispositions de la loi Doubin par la société Sonauto, laquelle, au demeurant, n'est pas dans la cause, a vicié leur consentement, ce d'autant que les contrats litigieux ne sont pas poursuivis au même conditions qu'avec le précédent concédant, que les concessionnaires avaient connaissance du constructeur ou du marché dans leur zone d'activité et que rien ne démontre que la restructuration du réseau par la société Chrysler France à la fin de l'année 1997 était alors connue;
Considérant, concernant le second point, à savoir la résiliation du contrat en violation des dispositions du règlement d'exemption catégorielle n° 1475-95 du 28 juin 1995, que les sociétés Socogar Automobiles, Detroit Motors, Espace Lyonnais et Inter Auto invoquent tout d'abord " la mise en échec de la procédure de consultation du tiers-expert " en se prévalant à cet égard de l'interprétation qui, contenue dans une brochure de la Commission européenne, " constitue, selon elles, à ce jour, l'unique interprétation téléologique du règlement d'exemption par son auteur " et prévoit que " la nécessité d'une réorganisation est établie d'un commun accord entre les parties ou, si le distributeur le demande par un tiers-expert ou par un arbitre " et qu'" en toute hypothèse, le constructeur doit parvenir à un accord entre les parties ou, si le distributeur dont le contrat de distribution sera réalisé, sans les autres distributeurs indirectement affectés aient à être consultés ",
- ensuite, un détournement de procédure de la société Chrysler France qui, au moment de la notification de la résiliation, n'avait pas encore arrêté le redécoupage des territoires concédés et la nouvelle carte de réseau;
Considérant que l'article 5-3 du règlement n° 1475-95 dispose que " les conditions d'exemption prévues aux paragraphes 1 et 2 ne préjugent pas "
- du droit du fournisseur de résilier l'accord moyennant un préavis d'au moins un an en cas de nécessité de réorganiser l'ensemble ou une partie substantielle du réseau....
" Dans chaque cas, les parties doivent, en cas de désaccord, accepter un système de règlement rapide du litige, tel le recours à un tiers-expert ou à un arbitre, sans préjudice du droit des parties de saisir le tribunal compétent conformément aux dispositions du droit national applicable ";
Que l'article 22.2 des contrats de concession liant les parties au présent litige prévoyait la possibilité pour le concédant, de les résilier " par lettre recommandée avec avis de réception moyennant un préavis d'un an en cas de nécessité de réorganiser l'ensemble ou une partie substantielle du réseau ";
Que leur article 22.3 stipulait: " afin de permettre le règlement rapide de tout litige éventuel résultant de la mise en œuvre de l'un ou l'autre des articles 22.1 ou 22.2 ci-dessus, l'une ou l'autre pourra, si elle le désire, saisir le juge des référés su Tribunal de grande instance de Paris afin de faire désigner un expert, étant observé que cette faculté ne constitue aucune dérogation à la clause de compétence figurant à l'article 25 ";
Considérant que l'article 5.3 du règlement reconnaît au fournisseur le droit de résilier l'accord moyennant un préavis d'au moins un an en cas de nécessité de réorganiser l'ensemble ou une partie substantielle du réseau sans subordonner l'exercice de ce droit à la conclusion ou même à la recherche d'un accord préalable sur la nécessité ou les modalités de la réorganisation, avec les distributeurs concernés ou, à défaut d'accord entre les parties, au recours à un tiers expert ou à un arbitre;que la brochure explicative ne saurait modifier la portée du règlement;qu'au demeurant, ce document - lequel rappelle qu'il est " non juridiquement contraignant "- ne contredit pas, sur ce point, le règlement d'exemption; que la sorte de demande tendant à obtenir, à titre subsidiaire, la saisine de la Cour de justice des Communautés européennes sur renvoi préjudiciel n'est pas fondée;
Considérant que, conformes à la lettre et à l'esprit du règlement n° 1475-95, les articles 22-22 et 22-3 des contrats litigieux prévoient, en cas de différend entre les parties sur la " nécessité de réorganiser l'ensemble ou une parties substantielle du réseau ", le recours au juge des référés pour obtenir la désignation d'un tiers expert;
Considérant en l'espèce que, avant même le 30 septembre 1997, les concessionnaires étaient informés de la " résiliation à un an des contrats actuels, suivie de la mise en place d'un plan d'action concession par concession " avec cette précision: " il y aura place dans cette nouvelle structure pour tous les concessionnaires qui seront prêts, en partenariat avec Chrysler, à développer les normes et standards constituant la personnalité de Chrysler et de Jeep ", que le plan de développement du réseau du 26 septembre 1997 prévoyait un calendrier précis pour mener à bien la restructuration envisagée; que les intéressés n'ont en aucun cas saisi, comme prévu, le juge des référés, alors que, au vu de ce qui précède, rien ne les empêchait de recourir à cette procédure contractuelle et ont attendu environ 18 mois pour contester la résiliation à eux notifiée le 30 septembre 1997;
Considérant en outre, comme le relève le tribunal, que la réorganisation du réseau Chrysler France est justifiée par les pièces produites qui établissent qu'en raison d'une concurrence accrue les constructeurs d'automobiles ont, dans leur ensemble, été conduits à s'orienter vers une réduction du nombre de concessionnaires accompagnée d'une extension des territoires concédés et de l'exigence d'investissements accrus destinés à valoriser l'image des marques et, partant, à favoriser la commercialisation des véhicules;
Que la réorganisation intervenue a présenté un caractère substantiel puisque tous les contrats de concession du réseau Chrysler France ont été résiliés pour réduire de 100 à 62 le nombre des concessionnaires;
Que de la sorte les moyens développés par les appelantes mal fondés;
Considérant que les sociétés Socogar Automobiles, Detroit Motors, Espace Lyonnais et Inter Auto invoquent enfin le caractère abusif de la résiliation des contrats en insistant sur le fait que leur préavis ayant été indûment raccourci, leur conversion a été paralysée;
Mais considérant que chacun des concessionnaires avait été, avant même la résiliation des contrats qui, au demeurant, leur permettrait de vendre des véhicules neufs à d'autres marques, avisé du processus suivi par l'intimée pour réorganiser son réseau et choisir, à la suite de négociations, ses nouveaux partenaires;
Considérant que rien ne prouve que lors de ces pourparlers, qui s'inscrivaient dans la perspective de reconversion des appelantes, la société Chrysler France ait agi envers elles avec déloyauté en les laissant croire à la conclusion probable d'un nouveau contrat de concession ou en entravant d'autres négociations;
Considérant en outre que rien ne justifie que l'intimée ait procédé de manière discriminatoire dans le choix de nouveau concessionnaires;
Considérant en conséquence que les demandes des appelantes doivent être rejetées;
Considérant par ailleurs que, comme l'a jugé le tribunal, il n'est pas prouvé que la société Inter Auto a commis une faute dans le droit d'agir en justice, en sorte que la société Daimler Chrysler France, qui au demeurant ne justifie pas d'un préjudice, doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive;
Considérant en revanche que l'équité justifie la condamnation de chacune des appelantes à payer à l'intimée une indemnité complémentaire de 1 600 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Par ces motifs : Rejette les demandes de sursis à statuer formées par les sociétés Socogar Automobile, Detroit Motors, Espace Lyonnais et Inter Auto, Confirme le jugement déféré en ajoutant que ces sociétés ne sont pas fondées à invoquer la violation des dispositions de l'article 1er de la loi Doubin du 31 décembre 1989, devenu l'article L. 330-3 du Code de Commerce, Condamne chacune des appelantes à verser à la société Daimler Chrysler France une indemnité complémentaire de 1 600 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne chacune des appelantes aux dépens d'appel et admet la SCP Duboscq & Pellerin, avoué, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.