Cass. 3e civ., 13 novembre 2003, n° 00-22.309
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Ramès
Défendeur :
Méhaux (Epoux), Mutuelles de Seine-et-Marne (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
Mme Nési
Avocat général :
M. Bruntz
Avocats :
SCP Piwnica, Molinié, Me Le Prado, SCP Vincent, Ohl
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 septembre 2000), que les époux Méhaux ont acquis de M. Ramès, marchand de biens, une maison d'habitation qui a présenté des désordres dus à de graves défauts de la charpente et de la couverture ; qu'ils ont assigné M. Ramès en paiement du coût des travaux de réparation et en dommages-intérêts ; que celui-ci a demandé la garantie de son assureur en responsabilité civile professionnelle, les assurances Mutuelles de Seine-et-Marne (MSM) ;
Sur le premier moyen : - Attendu que M. Ramès fait grief à l'arrêt de le condamner à payer des dommages-intérêts aux époux Méhaux, alors, selon le moyen : 1°) qu'aux termes de l'article 1645 du Code civil, seul le vendeur qui est tenu de connaître les vices de la chose, a l'obligation de payer à l'acheteur des dommages-intérêts en sus du prix reçu ; que le marchand de biens, professionnel de l'immobilier, n'est pas tenu de connaître le vice de conception et d'exécution de la charpente et de la couverture d'un immeuble à la construction duquel il n'a pas lui-même participé et qu'il a acquis par adjudication, ce qui limite les investigations ; qu'en se bornant à constater que M. Ramès avait vendu une maison d'habitation aux époux Méhaux en sa qualité de marchand de biens, la cour d'appel qui en a déduit qu'il ne pouvait ignorer les vices affectant la chose vendue dont il lui appartenait de vérifier l'état, mais qui s'est abstenue de constater des désordres que l'expert avait décrits comme difficilement décelables, a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée ; 2°) que M. Ramès qui a acquis aux enchères publiques le 25 juin 1993 la maison individuelle vendue le 8 avril 1994 aux époux Méhaux, et qui, à défaut, pour lui, de pouvoir, par une compétence spécifique en matière de charpente, déceler les désordres affectant la toiture que l'organisme désigné par le futur acquéreur n'avait pas lui-même décelé, et à défaut, encore, pour lui d'avoir habité personnellement les lieux et ainsi les connaître, ne pouvait, en considération de sa seule qualité de marchand de biens qui ne suffit à disposer d'une compétence technique supérieure à celle de l'organisme requis par le futur acquéreur, être condamné au paiement de dommages-intérêts ; qu'en le décidant néanmoins, la cour d'appel a violé l'article 1645 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que M. Ramès exerçait la profession de marchand de biens et qu'il avait traité en cette qualité avec les époux Méhaux, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante et qui n'était pas demandée, en a déduit, à bon droit, qu'il ne pouvait, en tant que marchand de biens, prétendre ignorer les vices de la chose vendue et qu'il devait indemniser les acquéreurs du préjudice qui en était résulté ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen : - Attendu que M. Ramès fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en garantie formée contre la MSM pour la condamnation prononcée contre lui au titre du coût de réparation de l'immeuble vendu, alors, selon le moyen : 1°) que M. Ramès faisait valoir, dans ses conclusions devant la cour d'appel, que la MSM avait écrit à l'agent d'assurance qu'elle acceptait sa garantie ; que M. Ramès produisait une lettre de la MSM du 28 avril 1995 par laquelle l'assureur déclarait : "après réexamen du contrat", accepte sa garantie dans cette affaire ; qu'en déboutant M. Ramès de sa demande en garantie formée contre son assureur, sans s'expliquer sur ce moyen dont il résultait que la MSM s'était engagée à garantir M. Ramès pour le sinistre litigieux, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ; 2°) que l'assureur ayant déclaré à M. Ramès lors de la formation du contrat être "en mesure de vous assurer en responsabilité civile professionnelle pour toutes les opérations d'achat, vente, échange et toutes transactions ressortant de la profession de marchand de biens... seule n'entrant pas dans cette assurance au titre de cette police les opérations soumises à l'obligation d'assurance décennale des entrepreneurs ou de dommages à l'ouvrage", la cour d'appel, qui a constaté que M. Ramès avait traité en qualité de marchand de biens la vente de l'immeuble litigieux et qu'en tant que tel, il devait connaître les vices de la chose dont il lui appartenait de vérifier l'état, devait admettre que l'assureur qui n'avait exclu de sa garantie que l'obligation d'assurance décennale des entrepreneurs ou de dommages à l'ouvrage, était tenu de garantir l'assuré à raison du vice caché de la chose vendue ; qu'en libérant la MSM de ses obligations de garantie, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; 3°) que M. Ramès ayant formé avec la MSM un contrat d'assurance dite de responsabilité civile générale auquel se sont ajoutées des conditions personnalisées et des conditions particulières énonçant, sans exclusion, que l'assuré, au titre de sa responsabilité civile professionnelle, est garanti "lorsqu'il se livre ou participe à des opérations d'achat, de vente, d'échange , de location, etc..." la cour d'appel ne pouvait méconnaître ces conditions particulières de la police d'assurance et retenir que l'article 2-7-44 des conditions générales de la police excluait la garantie de l'assureur pour remboursement total des produits, fournitures, matériels ou appareils vendus ainsi que pour l'ensemble des frais entraînés par leur remise en état ; qu'en statuant ainsi et en se déterminant par une clause des conditions générales de la police d'assurance que les conditions particulières négociées entre les parties, pour s'adapter à la nature de l'activité de l'assuré avaient écartées, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu, à bon droit, que la condamnation prononcée contre M. Ramès au titre du coût des travaux de réparation de l'immeuble trouvait son fondement non dans les règles de la responsabilité civile, contractuelle ou délictuelle, mais dans l'obligation légale propre au vendeur de garantir l'acquéreur des vices cachés de la chose vendue, et ayant constaté que l'article 1 des "conditions personnalisées" de la police "multirisques professionnelle" souscrite par M. Ramès garantissait celui-ci contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qu'il pouvait encourir dans l'exercice de son activité professionnelle du fait des dommages incorporels causés à autrui, par suite d'erreurs, omissions ou négligences commises, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche sur la teneur d'une lettre relative à cette police que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire que la condamnation dont la garantie était demandée était étrangère à l'objet de l'assurance souscrite auprès de la MSM ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.