CCE, 7 juin 1995, n° 95-524
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Aide accordée par le Gouvernement italien à l'entreprise Iritecna SpA
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 93 paragraphe 2 premier alinéa, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 62 paragraphe 1 point a), Après avoir donné aux parties intéressées, conformément aux dispositions des articles précités, la possibilité de présenter leurs observations, Considérant ce qui suit :
I
Par lettre du 23 août 1994, la Commission a informé le Gouvernement italien de sa décision du 27 juillet 1994 d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2 du traité à l'égard de l'aide accordée à Iritecna SpA (ci-après dénommée " Iritecna ").
Iritecna (actuellement Iritecna in liquidazione) était une sous-holding contrôlée à 100 % par le holding public italien IRI, qui chapeautait elle-même plusieurs entreprises opérant dans divers secteurs et principalement ceux de l'ingénierie industrielle, l'ingénierie conseil, la construction et l'entretien d'autoroutes, les équipements urbains et les travaux publics, les ouvrages généraux de génie civil, la construction d'infrastructures et la gestion des équipements. Cette société, depuis sa création en 1991, a vu son capital restructuré à plusieurs reprises, avant d'être finalement mise en liquidation en février 1994. Au même moment, une nouvelle société, Fintecna, a été créée dans le cadre de la restructuration de ce secteur et elle a repris certaines activités d'Iritecna (en liquidation). Son capital a été apporté par IRI.
Après un premier examen, la Commission a conclu, sur la base des informations dont elle disposait, que les apports en capital en cause pouvaient constituer une aide d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité et de l'article 61 paragraphe 1 de l'accord sur l'EEE. Elle a estimé en outre que ces mesures ne pouvaient être jugées compatibles avec le Marché commun ni avec le fonctionnement de l'accord sur l'EEE. Elle a donc décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2 du traité et invité le Gouvernement italien à lui faire part de ses observations et à joindre des informations sur le processus de restructuration. Cette décision, par laquelle les autres États membres et les tiers intéressés étaient également invités à présenter leurs observations, a été publiée au Journal officiel des Communautés européennes (1).
Après une première réunion, le 23 septembre 1994, entre les représentants de la Commission et de l'entreprise, le Gouvernement italien a officiellement présenté ses observations par écrit le 21 décembre 1994 et apporté des précisions au sujet du plan de restructuration d'Iritecna comme le souhaitait la Commission.
De nouvelles réunions ont été tenues avec les représentants d'IRI et d'Iritecna le 15 mars et le 7 avril 1995. Elles ont permis à la Commission de clarifier certains points concernant les informations déjà transmises et de demander des explications et des renseignements supplémentaires.
Le Gouvernement italien a adressé à la Commission une nouvelle lettre en date du 5 mai 1995, qui a fourni toutes les informations manquantes.
Iritecna fait partie du groupe d'entreprises dont le processus de désendettement doit être surveillé jusqu'à la fin de 1996 conformément à l'accord relatif à certaines entreprises publiques d'Italie conclu entre le Gouvernement italien et la Commission en juillet 1993 (2). Cet accord prévoit toutefois que l'on puisse procéder, pour les opérations susceptibles de comporter une aide d'État, à un examen individuel au regard des dispositions de l'encadrement communautaire des aides d'État.
II
La Commission n'a pas reçu d'observations de tiers au cours de la procédure.
Le Gouvernement italien a répondu officiellement à la Commission par les deux lettres précitées. D'autres éclaircissements ont en outre été fournis à la Commission lors de trois réunions organisées avec les représentants de l'entreprise. Les réponses du Gouvernement italien contenaient un certain nombre de remarques visant à prouver la rationalité, d'un point de vue industriel, des interventions d'IRI destinées à financer la restructuration de sa filiale Iritecna et à lui permettre de poursuivre ses activités.
Les diverses restructurations du capital d'Iritecna depuis sa création en 1991 ont été effectuées, a-t-il été souligné, sur les ressources propres d'IRI (l'État n'ayant fourni aucun apport direct); l'objectif était de permettre à long terme à IRI de rester présent dans un secteur confronté à une situation particulièrement difficile, tant au niveau national qu'international. À cet effet, une réorganisation et un nouveau positionnement de l'entreprise sur le marché étaient nécessaires pour lui permettre de s'adapter à l'évolution des conditions de concurrence.
Dans ce contexte, il a été prévu, par décision du Gouvernement italien du 30 décembre 1992, qu'IRI élaborerait un plan de restructuration pour Iritecna afin d'abandonner et de liquider les activités non stratégiques et de créer une nouvelle sous-holding coiffant les activités principales. Cette dernière devait coordonner des sous-groupes homogènes d'entreprises dans le but de maximiser les profits et de rechercher des partenaires et/ou des acheteurs. Cette opération visait, entre autres objectifs, à répondre à la nécessité d'alléger au maximum la charge financière pesant sur IRI. Une liquidation soudaine et totale de l'ensemble du groupe aurait entraîné des pertes bien plus lourdes pour l'actionnaire, compte tenu de la dépréciation générale des activités destinées à la fermeture, en particulier pour les contrats en cours.
Iritecna a donc été mise en liquidation selon ces dispositions et la sous-holding financière Fintecna, nouvellement constituée et entièrement dotée en capital par IRI, a été chargée de mener la restructuration et la privatisation consécutive des activités qui étaient saines.
Ce processus est à présent en cours; il entraîne des compressions importantes de personnel et l'abandon de plusieurs activités. Les recettes provenant de la cession des actifs et des entreprises par Fintecna doivent compenser une partie des coûts que doit supporter IRI pour la liquidation d'Iritecna.
Enfin, les autorités italiennes ont fait valoir que, dans la mesure où Iritecna a été mise en liquidation, les apports de capitaux d'IRI ne doivent servir qu'à couvrir les pertes dues à la liquidation et par conséquent ne faussent pas la concurrence.
Un plan de restructuration détaillé résumant les interventions effectuées avant la liquidation d'Iritecna en février 1994 et précisant les investissements et les opérations à réaliser en vue de cette liquidation ainsi que de la réorganisation et de la privatisation de Fintecna a été officiellement présenté à la Commission dans les lettres précitées.
Le montant global de l'aide a également été indiqué; il diffère de la somme qui figurait dans la décision de la Commission d'ouvrir la procédure. Il était fait état, à l'époque, d'un apport d'argent frais de 1 090 milliards de lires italiennes (590 millions d'écus) par IRI entre 1991 et 1993, d'une annulation de dettes de 602 milliards (325 millions d'écus) en 1993 et d'un montant de 3 400 milliards (1 840 millions d'écus) destiné à couvrir les pertes dues à la liquidation. Il a été précisé que l'annulation de dettes d'un montant de 602 milliards était déjà incluse dans la couverture des pertes dues à la liquidation. Cette somme ne doit donc pas être comptée dans l'aide, qui se monte en définitive à 4 490 milliards (2 430 millions d'écus).
III
1. Restructuration avant la liquidation
Plusieurs mesures ont été prises pendant la période 1991-1993 afin de restructurer et de réorganiser le groupe; elles ont entraîné des pertes importantes, qui ont été couvertes par les apports de capitaux. Certaines filiales notamment ont été dissoutes et mises en liquidation en raison de leur mauvais résultats, avec pour corollaire des compressions de personnel importantes. Au niveau du groupe, ces licenciements ont touché 2 712 personnes (- 11 %). Si l'on ne considère que les filières en voie de restructuration (ce qui exclut par conséquent le secteur autoroutes), ces compressions sont encore plus importantes et concernent 3 172 personnes (- 22 %). On trouvera dans les paragraphes qui suivent de plus amples détails sur l'évolution des effectifs.
Les 1 090 milliards de lires italiennes d'argent frais fournis par IRI à Iritecna de 1991 à 1993 ont servi à couvrir les pertes qui étaient dues essentiellement à ces liquidations et cessations d'activité. Les entreprises concernées sont les suivantes:
>EMPLACEMENT TABLE>
Iritecna a en outre supporté durant cette période le coût des mesures d'incitation au départ visant le personnel (environ 49 milliards).
D'autres entreprises ont été mises en liquidation pendant la même période, parmi lesquelles Nuova Mecfond (presses industrielles), Nuova Saip (sidérurgie), Forus (biens agricoles), FMI (outils), Ifagraria (ingénierie agricole).
2. Plan de restructuration de Fintecna et plan de liquidation d'Iritecna
Conformément au plan arrêté, Fintecna a repris d'Iritecna en liquidation les activités qui seront finalement privatisées, lesquelles ont été réorganisées autour de quatre pôles: autoroutes, ingénierie industrielle, ouvrages de génie civil et infrastructures, ingénierie conseil. La participation de 40 % détenue par IRI dans la société de services aéroportuaires Aeroporti di Roma a également été cédée à Fintecna, en vue d'une privatisation ultérieure.
IRI a doté Fintecna d'un capital initial de 1 500 milliards de lires italiennes (810 millions d'écus) afin de financer les coûts administratifs de démarrage de cette entreprise (150 milliards) ainsi que l'acquisition et la réorganisation par celle-ci des participations en question (1 350 milliards).
Ces participations ont toutes fait l'objet d'une évaluation par des experts indépendants tels que des banques d'affaires ou des établissements financiers italiens et internationaux afin de déterminer leur prix de cession. Leur valeur totale a finalement atteint 1 653 milliards de lires italiennes (895 millions d'écus). C'est ce montant qui a été retenu comme prévision du prix de vente pour la privatisation; il contribuera à compenser en partie les coûts supportés par IRI pour la liquidation d'Iritecna.
Les activités saines de la filière autoroutes et la participation dans Aeroporti di Roma ont été cédées en l'état par Iritecna à Fintecna puisqu'elles ne nécessitaient pas de restructuration spécifique. La cession des autres branches d'activité a nécessité en revanche une restructuration et un réaménagement importants, dus essentiellement à la sélection des actifs sains et rentables qui a été opérée, tandis que ceux qui étaient déficitaires étaient laissés à Iritecna dans le cadre du processus de liquidation. Compte tenu de son activité spécifique de fourniture de services et de travaux à forte intensité de main-d'œuvre, Iritecna n'a pas consenti de gros investissements dans des équipements techniques; aussi le coût de la restructuration est-il dû essentiellement à la réduction de valeur d'éléments d'actif incorporels, financiers et réalisables ainsi qu'au dégraissage des effectifs. Le processus de liquidation comporte la vente de tous les actifs trouvant acquéreur et l'amortissement des actifs non vendables, en vue de maximiser les recettes et de rembourser le plus de dettes possible. Toutes les filiales continuant de faire partie d'Iritecna sont donc mises sur le marché, en totalité ou en partie et tout ce qui n'est pas vendu sera démantelé. La liquidation d'Iritecna représente l'essentiel de la restructuration; par conséquent, seules quelques mesures de restructuration devront encore être exécutées et financées par Fintecna. La filière " travaux de génie civil et infrastructures " nécessitera notamment de nouvelles interventions, tandis que les autres secteurs d'activité - à savoir l'ingénierie conseil, l'ingénierie industrielle et la construction - opèrent désormais exclusivement sous le contrôle de Fintecna, les opérations utiles de fermeture et de liquidation étant effectuées par les liquidateurs d'Iritecna. On examinera brièvement ci-après la situation des quatre secteurs prévus par le plan de restructuration.
3. Autoroutes
Comme indiqué précédemment, ce secteur ne devrait connaître aucune restructuration de grande envergure; il n'a bénéficié d'aucune aide et aucun projet d'aide n'est prévu. Il s'agit du principal secteur d'Iritecna (environ 43 % de son chiffre d'affaires en 1993), dans lequel opèrent plusieurs entreprises sous la direction d'Autostrade SpA. Celle-ci dispose d'une concession de droit public pour la construction et l'entretien de plusieurs autoroutes en Italie. Autostrade international, Autostrade finance et Pavimental sont d'autres entreprises importantes de ce secteur.
Ce secteur est rentable et son activité s'exerce dans une quasi-indépendance par rapport à Iritecna. La société Autostrade est en partie cotée en Bourse et doit être intégralement privatisée. Il s'agit de l'un des principaux projets de privatisation d'IRI et du Gouvernement italien, qui sera réalisé dès que seront adoptées certaines dispositions juridiques et administratives, permettant de régler les questions suivantes encore en suspens:
- prolongation de la concession de 2018 à 2033,
- détermination du mécanisme de fixation des péages autoroutiers,
- création d'une autorité de réglementation des services publics.
4. Ingénierie industrielle
Cette activité concerne essentiellement la société Italimpianti, qui a été par le passé une des entreprises italiennes les plus importantes de ce secteur. Sa situation s'est détériorée ces cinq dernières années en raison de l'ouverture du marché et de la baisse du nombre de contrats attribués régulièrement par l'administration publique italienne, à la suite des restrictions budgétaires et des enquêtes sur la corruption.
Italimpianti avait été intégrée dans Iritecna en 1991. Une " nouvelle " Italimpianti a maintenant été constituée. Elle a repris des employés d'Iritecna ainsi que les actifs valables de cette dernière, consistant en certains contrats et certaines offres en attente, ainsi qu'en participations dans certaines entreprises (Innse, Innse Engineering, Tagliaferri, Nitco, Italimpianti Deutschland, Italimpianti of America, Castalia).
Les activités de la " nouvelle " Italimpianti seront centrées autour de trois pôles: ingénierie métallurgique, gestion de l'environnement (assainissement et décharges) et logistique (engins de manutention). L'entreprise détient dans ces secteurs un grand nombre de contrats déjà en cours. En revanche, Iritecna, placée en liquidation, conservera une grande partie des activités " anciennes " dont la filière infrastructures ainsi qu'un certain nombre d'activités secondaires telles que la fabrication d'outils et de presses, la production d'acier et la maintenance industrielle. Iritecna garde également certains contrats dont la réalisation est déjà bien avancée, qui se traduisent par l'accumulation de créances à haut risque sur des clients confrontés à des problèmes financiers, tels que la Russie, le Brésil et l'Iran. Les entreprises concernées du groupe sont soumises au processus de liquidation [Mgs, Italimpianti Sud, CMF (3)].
Les compressions de personnel dues à la restructuration dans ce secteur sont importantes: elles ont touché plus de 50 % des effectifs depuis 1991. De 1991 à 1993, environ 500 emplois (sur 2 600) ont été supprimés et, en 1994, 800 autres personnes ont été écartées lors de la cession de ces activités à Fintecna. Selon les prévisions, le chiffre d'affaires devrait s'établir aux alentours de 900 milliards de lires italiennes, soit une baisse d'environ 45 % par rapport à 1992.
Italimpianti a été mise en vente en juin 1994; la procédure se trouve maintenant à un stade avancé et devrait être close d'ici la fin du premier semestre de 1995.
5. Ingénierie conseil
Ce secteur se compose de plusieurs entreprises qui s'occupent de la planification technique pour les contrats qu'obtiennent des entreprises externes ou d'autres entreprises du groupe, concernant essentiellement la construction d'ouvrages de génie civil, de routes et d'infrastructures. Certaines entreprises (Bonifica, Svei, Italeco et Sotecni) restent dans Iritecna et participent au processus de liquidation. D'autres entreprises ont vu leur organisation rationalisée; elles ont été fusionnées en deux sociétés avant d'être cédées à Fintecna. Il s'agit de Servizi Tecnici (soutien à des programmes de travaux publics, dans le cadre d'une concession de droit public) et de Spea (ingénierie conseil pour la filière autoroutes). Compte tenu de son activité spécifique, Servizi Tecnici réduira encore et cessera ses activités, une fois réalisés les contrats en cours. La privatisation de Spea sera liée à celle d'Autostrade du fait des liens qui existent entre leurs activités.
Le chiffre d'affaires de ces deux entreprises en 1995 devrait s'établir à 585 milliards de lires italiennes, soit une réduction de 30 % par rapport à 1992 et 1993. Les effectifs, réduits de 25 %, s'élèvent à environ 700 personnes. Cette réduction, toutefois, est beaucoup plus forte si l'on prend en compte les entreprises, en voie de dissolution ou de liquidation, qui continuent de faire partie d'Iritecna. Au total, ce secteur subira une baisse de 55 % en termes de chiffre d'affaires et de 65 % en termes d'effectifs.
6. Ouvrages de génie civil
Il s'agit de la filière d'Iritecna la moins homogène et, avec l'ingénierie industrielle, de la plus déficitaire. Elle se compose d'un certain nombre d'entreprises qui opèrent dans divers domaines, avec des objectifs différents: plusieurs bénéficient de concessions de droit public ou se voient régulièrement attribuer des marchés publics.
Le plan prévoit que la majorité de ces entreprises (Garboli, Isa, Mantelli Estero, Cidonio, Panedile, Solius, Sebi, Medetil, Sotea, Infratecna, Idrotecna, Sistemi Urbani, Ponteggi Dalmine, Italinpa, Tono, Svei, Valim, Palacio Italia) demeureront dans Iritecna et participeront au processus de liquidation.
Les entreprises cédées à Fintecna sont Metroroma, Italstrade et Condotte. Elles sont soumises à un processus de restructuration complet devant leur permettre de renouer avec la rentabilité et d'être privatisées, en particulier Italstrade et Condotte qui ont bénéficié ces dernières années d'une aide importante. Leur activité sera centrée sur les infrastructures civiles (barrages, routes, chemins de fer - Italstrade fait partie du consortium italien TAV spécialisé dans les trains à grande vitesse), domaine dans lequel elles détiennent déjà un nombre considérable de contrats, tandis que les activités relevant du bâtiment et de la construction seront complètement abandonnées. Plusieurs activités mineures en rapport avec ce secteur, telles que la production de préfabriqués et la gestion de biens agricoles, seront également abandonnées. Dans cette perspective, 466 employés permanents ont été licenciés de 1992 à 1995 (- 46 %) et le chiffre d'affaires a chuté d'environ 40 % (pour s'établir à 1 500 milliards de lires italiennes) en 1995.
La procédure de vente a déjà été enclenchée pour les entreprises restructurées et on recherche des partenaires ou des acheteurs.
7. Autres entreprises/participations
7.1. Aeroporti di Roma
Fintecna détient une participation de 40 % dans cette grande entreprise qui fournit des services à l'aéroport de Rome et dégage des bénéfices. La privatisation de cette entreprise, qui est prévue à la fois par le plan de restructuration d'Iritecna et par le plan général de privatisation établi par le Gouvernement italien, dépend de l'adoption par les autorités italiennes de certaines dispositions législatives et administratives (comme dans le cas d'Autostrade); il s'agit de:
- la suppression de l'obligation pour IRI de détenir la majorité des actions de l'entreprise,
- la suppression de la limite fixée pour la distribution des dividendes, qui était jusqu'à présent de 8 % du capital social,
- la création d'une autorité de réglementation des services publics.
7.2. Stretto di Messina
Cette entreprise qui, dans le cadre d'une concession de droit public, mène une étude préliminaire (analyse et planification générale) d'aménagement de la liaison routière et ferroviaire entre la Sicile et la Calabre, arrive au terme de ses travaux et attend l'approbation de son projet. Elle continue de faire partie d'Iritecna et sera donc vendue ou dissoute dans le cadre du processus de liquidation.
7.3. Italsanità
Cette entreprise a été constituée en 1988 dans le but de développer, concevoir, réaliser et gérer des infrastructures dans le domaine de la santé. Jusqu'en 1990, elle s'est surtout occupée de promotion, en cherchant à obtenir des marchés publics. Après certaines opérations nébuleuses et malheureuses en 1990, portant sur la location de locaux qui devaient être restructurés et adaptés en vue de la création de maisons de santé, l'entreprise a été mise en liquidation en 1992 et plusieurs procédures civiles et pénales, dont certaines sont toujours en instance, ont été engagées pour déterminer les responsabilités et régler des demandes de dommages-intérêts en souffrance. Cette entreprise n'a en fait jamais exercé d'activité commerciale; elle s'occupe uniquement de la gestion de ce lourd contentieux. Certaines dettes importantes risquent encore d'apparaître et devront être couvertes par Iritecna, ce qui pourrait alourdir le coût final de la liquidation. Ces sommes n'ont pas été incluses dans le plan financier accompagnant la restructuration et ne sont pas comptées dans les 3 400 milliards de lires italiennes correspondant au coût total de la liquidation (point 11).
8. Réductions d'activités d'Iritecna découlant de la restructuration (synthèse)
Étant donné la nature des activités d'Iritecna, qui consistent essentiellement en des services et travaux à forte intensité de main-d'œuvre, sans équipements fixes, il est difficile de prendre la " capacité de production " comme critère fiable de l'importance de l'entreprise. Dans les entreprises de production industrielle, cette capacité dépend dans une large mesure du rythme de production des équipements. Mais le potentiel de production d'Iritecna repose sur d'autres facteurs; on ne peut donc pas apprécier l'effet de distorsion de l'aide reçue sur le marché et sur les concurrents potentiels en se fondant sur ce paramètre. En revanche, le niveau des effectifs est en rapport direct avec la production de l'entreprise et sa part de marché. Il est donc utile d'examiner l'évolution des effectifs et de la production afin d'apprécier le changement intervenu dans la position concurrentielle de l'entreprise sur le marché avant et après sa restructuration. À cet égard, le nombre considérable d'activités qui ont été abandonnées à la suite de la liquidation d'entreprises entières est d'une grande importance.
Aussi les autorités italiennes ont-elles été invitées à présenter pour la période de restructuration des chiffres détaillés sur l'évolution des effectifs et du chiffre d'affaires.
9. Compressions de personnel
Les autorités italiennes ont présenté un document qui résume l'évolution des effectifs du groupe sur la période 1990-1994. On rappellera d'abord qu'Iritecna est issue de la fusion en 1991 de deux ex-filiales d'IRI, Italimpianti et Italstat. Toutefois, les mesures de rationalisation et de restructuration avaient déjà commencé auparavant. C'est pourquoi les chiffres concernant ces deux sous-groupes d'entreprises pour l'année 1990 ont été pris en compte; ils sont comparables avec ceux d'Iritecna.
Le nombre de personnes licenciées sur l'ensemble de cette période s'élève donc à 5 426, soit 21 % des effectifs au 31 décembre 1990 (25 298 personnes). Étant donné toutefois que l'aide et la restructuration ne touchent pas le secteur des autoroutes, qui est le plus important du groupe et se situe quelque peu à part (tout comme Aeroporti di Roma), il ne sera pas pris en compte dans le calcul, afin que les chiffres reflètent mieux la restructuration entreprise. Les compressions de personnel, dans ces conditions, sont beaucoup plus importantes [-33 % pour des effectifs de départ de 15 214 personnes (4)].
En outre, 2 863 autres personnes (-19 %) ont quitté le groupe à la suite de la vente d'entreprises ou d'activités à des tiers. Au total, les effectifs du groupe (hors filière autoroutes), réduits de 52 %, s'élevaient à 7 297 personnes au 31 décembre 1994. 575 d'entre elles émargent à la caisse d'indemnisation (Cassa Integrazione Guadagni) ou à d'autres services similaires et se trouvent donc en position d'inactivité.
On notera que ces compressions ont touché davantage le personnel technique que les administratifs: si l'on considère les entreprises du groupe qui étaient toujours en activité au 31 décembre 1994, on constate que le personnel technique ne représentait plus que 71 % du total des effectifs au 31 décembre 1994 contre 77 % au 31 décembre 1990.
S'agissant des entreprises qui restent dans Iritecna en liquidation, les compressions jusqu'à présent ont été spectaculaires et le personnel encore en activité au 31 décembre 1994 quittera le groupe dans les prochaines années, au rythme du processus de liquidation. On trouvera ci-dessous les chiffres concernant les entreprises du groupe encore en activité:
>EMPLACEMENT TABLE>
Pour ce qui est des entreprises cédées à Fintecna (uniquement le secteur industriel, hors filière " autoroutes "), leur restructuration sur la période 1990-1994 a entraîné une réduction de 38 % des effectifs (-3 081 personnes), comme le montre le tableau ci-dessous.
>EMPLACEMENT TABLE>
De nouvelles compressions sont prévues en 1995 pour les entreprises Italstrade et Condotte avant leur mise en vente [environ 200 employés émargent déjà à la caisse d'indemnisation (CIG.)]. Une diminution progressive des effectifs est également prévue pour les années à venir chez Servici Tecnici en raison de la baisse d'activité.
À l'issue de la procédure de liquidation/restructuration, le secteur industriel de l'ensemble du groupe aura été amputé d'environ 70 % de ses effectifs, qui ne s'élèveront plus qu'à environ 4 500 personnes.
Il est souligné en outre, pour illustrer le fait que Fintecna est moins présente sur les marchés en cause, que le nombre de sites sur lesquels les entreprises opèrent dans le cadre des contrats en cours a diminué de 25 % sur la période considérée. On constate également une baisse similaire du nombre de consortiums auxquels participe Iritecna/Fintecna (-20 %, au moment de la liquidation), lesquels représentent le cadre habituel de passation et d'exécution des contrats d'ingénierie et de construction.
10. Diminution du chiffre d'affaires
Les documents adressés par les autorités italiennes retracent l'évolution du chiffre d'affaires sur les années 1991-1994, avec une ventilation par entreprise du groupe Iritecna en liquidation et de Fintecna. Ces données sont reprises dans le tableau ci-après.
Iritecna in liquidazione
>EMPLACEMENT TABLE>
Fintecna (Secteur industriel uniquement)
>EMPLACEMENT TABLE>
Au total, le chiffre d'affaires du groupe (Iritecna + Fintecna, à l'exclusion de la filière autoroutes) a chuté de 47 % sur la période considérée.
On notera que le chiffre d'affaires pour 1994 des entreprises du groupe Iritecna qui sont déjà en liquidation (204 milliards de lires italiennes) correspond à la période de réduction de leur activité. Il connaîtra un nouveau recul au cours de la période de liquidation.
À l'issue du processus de liquidation/restructuration, le chiffre d'affaires du secteur industriel de l'ensemble du groupe aura enregistré une baisse d'environ 60 %, il s'établira alors aux alentours de 2 800 milliards de lires italiennes seulement.
11. Pertes dues à la liquidation
Le plan prévoit que le total des pertes découlant de la liquidation d'Iritecna s'élèvera à 3 400 milliards de lires italiennes, en tenant compte des recettes provenant de la privatisation intégrale de Fintecna. Le calcul de ce montant est présenté dans le tableau ci-dessous qui résume les flux financiers liés à la liquidation.
>EMPLACEMENT TABLE>
Le tableau ci-dessus a été établi à partir des estimations les plus précises possibles concernant la situation financière d'Iritecna au 31 décembre 1994 et des prévisions sur les frais qu'entraînera la liquidation. Les charges exceptionnelles qui pourraient apparaître du fait des procès en suspens contre l'entreprise Italsanità n'ont pas été incluses dans la mesure où cette entreprise n'a jamais exercé d'activité commerciale.
On notera que les estimations concernant les recettes escomptées de la vente des actifs d'Iritecna sont prudentes, comme le prévoient les nouvelles règles comptables italiennes applicables aux entreprises en liquidation, fixées par la CONSOB, la commission italienne des opérations en Bourse (directive du 24 février 1995).
En ce qui concerne le produit de la privatisation de Fintecna, on l'a supposé égal au prix payé pour les entreprises cédées par Iritecna en liquidation. Ce prix a été établi d'après les estimations d'experts indépendants (FIP, Credit Merchant, KPMG, Morgan Stanley, Salomon Brothers).
IV
1. Confirmation de l'existence d'aides
Afin de déterminer si les mesures précitées comportent des éléments d'aide, la Commission appliquera le principe de l'investisseur en économie de marché pour l'évaluation des transferts financiers entre l'État/propriétaire et les entreprises publiques, tel qu'il a été défini dans la communication de la Commission relative aux entreprises publiques du 28 juillet 1993 (5).
Selon ce principe, largement confirmé par la jurisprudence de la cour et la pratique de la Commission, il y a aide dès lors que l'opération en cause n'aurait pas été entreprise par un investisseur privé opérant dans les conditions normales d'une économie de marché.
Sur la base des informations transmises à la Commission et comme cela a été dit précédemment, les fonds investis par l'État italien dans la restructuration d'Iritecna - par le biais de sa holding IRI - s'élèvent en fin de compte à 4 490 milliards de lires italiennes.
Les divers apports de capitaux, qui ont déjà été en partie effectués, sont rappelés dans le tableau ci-dessous.
>EMPLACEMENT TABLE>
À l'argument avancé par les autorités italiennes selon lequel IRI n'a fait que puiser dans ses ressources propres sans qu'il y ait apport direct de l'État, la Commission objecte qu'IRI est une holding industrielle contrôlée à 100 % par le ministère italien des finances. En conséquence, toute décision de cette holding d'investir dans ses filiales et tout défaut de rendement de cet investissement produit un effet négatif équivalent sur les dividendes que la holding est censée distribuer à ses actionnaires. Même si IRI n'a bénéficié d'aucun apport pour la restructuration d'Iritecna, le coût de cette restructuration a été financé sur des recettes qui auraient pu servir à réduire l'ensemble des pertes du groupe IRI ou profiter à son actionnaire, l'État, sous forme de dividendes ou d'une augmentation de la valeur en capital du groupe. Or, IRI n'a pas distribué de dividendes à l'État - actionnaire ces dix dernières années; aussi les fonds qu'il a placés à la disposition de ses filiales doivent-ils être considérés comme des ressources d'État. De même, IRI n'aurait pas pu choisir de recapitaliser sans cesse Iritecna, en dépit de la détérioration constante de ses résultats et de ses comptes, s'il n'avait eu l'approbation tacite ou formelle de son actionnaire public.
Il ne faut pas escompter à l'avenir de rendement satisfaisant pour la totalité des investissements consentis par l'État dans la restructuration d'Iritecna. Les apports de capitaux effectués sur la période 1991-1993, avant la mise en liquidation de l'entreprise, avaient clairement pour objectif de permettre l'exécution des premières mesures de restructuration les plus urgentes. Ces fonds n'ont été investis que pour couvrir les pertes dues à la liquidation et à la restructuration de certaines filiales d'Iritecna, sans qu'il y ait la moindre perspective de rendement. Compte tenu des mauvais résultats d'Iritecna sur l'ensemble de cette période, il convient de les considérer comme s'inscrivant dans un processus qui a débouché sur la décision des actionnaires de liquider Iritecna et de démanteler entièrement ses activités. Aucun actionnaire privé ne se serait accommodé aussi longtemps de ces mauvais résultats. Il aurait procédé bien plus tôt à une liquidation ou à une restructuration de l'entreprise. Ces fonds doivent donc être considérés comme une aide.
Les pertes dues au processus de liquidation constituent, de par leur nature même, une aide. Il s'agit de dettes qui sont garanties et finalement honorées par l'actionnaire en vertu de l'article 2362 du Code civil italien, suite à la mise en liquidation volontaire de l'entreprise. Cette garantie existe depuis la création d'Iritecna en 1991; or, l'entreprise n'a pas cessé d'être lourdement déficitaire depuis. Dans un tel cas, un investisseur privé aurait essayé de limiter ses engagements vis-à-vis de sa filiale en difficulté, en décidant de la mettre en liquidation à compter du moment où il ne pouvait plus raisonnablement escompter qu'elle redevienne rentable et alors que son bilan dégageait encore un excédent. IRI n'ayant pas adopté ce comportement rationnel et n'ayant décidé que bien plus tard de liquider Iritecna afin d'annuler les pertes et dettes de cette société et de soutenir ainsi le redémarrage de ses activités confiées à Fintecna, le financement de cette opération doit être considéré comme une aide. Le coût final de la liquidation, qui s'élève à 3 400 milliards de lires italiennes, tient compte du produit qu'IRI espère tirer de la vente de Fintecna.
Compte tenu des considérations qui précèdent, ainsi que des caractéristiques de l'entreprise et de son secteur d'activité, la Commission conclut que l'apport total de 4 490 milliards de lires italiennes fausse le commerce intracommunautaire et qu'il s'agit donc d'une aide d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité et de l'article 61 paragraphe 1 de l'accord sur l'EEE.
Iritecna a affecté une partie de cette aide à ses filiales CMF Sud (actuellement en liquidation) et CMF. Cette aide, qui avoisine 281 milliards de lires italiennes (dont 182 - estimation partielle - pour l'apurement des dettes de CMF Sud à la suite de la liquidation), a été approuvée par la Commission au titre de l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité en mars 1995 (6).
La Commission considère par ailleurs, sur la base des explications fournies par les autorités italiennes, que la couverture par IRI des dettes pouvant résulter des actions intentées contre l'entreprise Italsanità (chapitre III point 7.3) ne constitue pas une aide d'État, dans la mesure où cette entreprise n'a jamais exercé d'activité commerciale et n'a donc jamais pu fausser la concurrence.
2. Compatibilité de l'aide avec le Marché commun
L'article 92 du traité, dans ses paragraphes 2 et 3, énumère certains type d'aides qui sont ou peuvent être compatibles avec le Marché commun.
Compte tenu de la nature de l'opération considérée, l'article 92 paragraphe 2 et paragraphe 3 point b) ne sont pas applicables aux aides en cause.
Compte tenu de la diversité des opérations et des implantations du groupe, et du fait que les mesures ne poursuivent pas d'objectif régional, seule la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point c), dans la mesure où elle concerne des aides destinées à faciliter le développement de certaines activités économiques, pourrait être prise en considération.
Comme on l'a dit précédemment, les mesures en question apparaissent comme des aides ayant pour objectif spécifique de permettre à Iritecna de poursuivre ses activités et de financer un projet de restructuration visant à rétablir sa compétitivité. Il convient donc d'apprécier ces mesures au regard des règles spécifiques en la matière.
Les critères sur la base desquels la Commission apprécie les aides à la restructuration des entreprises en difficulté sont exposés dans les lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté qu'elle a adoptés le 27 juillet 1994 (7).
La Commission a souligné dans ces lignes directrices qu'elle se montre stricte dans son appréciation de la compatibilité de ce type d'aides, qui peuvent aboutir à ce que les problèmes industriels et sociaux soient déplacés de manière injustifiée d'un État membre à un autre, notamment en transférant une part inéquitable de la charge de l'adaptation structurelle et des problèmes sociaux y afférents à des producteurs qui font face sans aucune aide.
Aussi, pour que la Commission puisse approuver une aide spécifique à une entreprise en difficulté est-il nécessaire que son plan de restructuration satisfasse aux conditions de base suivantes: il doit permettre de rétablir dans un délai raisonnable la viabilité à long terme de l'entreprise, il ne doit pas fausser indûment la concurrence et, enfin, l'aide doit être proportionnée aux coûts et avantages de la restructuration. Ce n'est que si ces conditions de base sont remplies que l'aide peut être considérée comme n'altérant pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun au sens de l'article 92 paragraphe 3 point c).
C'est dans cette optique que la Commission a examiné les documents et le plan de restructuration présentés par les autorités italiennes, en s'intéressant en particulier aux éléments suivants: rétablissement de la viabilité de l'entreprise, évolution de sa position concurrentielle sur le marché, proportionnalité de l'aide, contribution du bénéficiaire de l'aide au financement du plan de restructuration et plans de privatisation de l'entreprise.
3. Rétablissement de la viabilité et privatisation
En règle générale, la condition indispensable de tout plan de restructuration est qu'il doit rétablir dans un délai raisonnable la viabilité à long terme de l'entreprise, sur la base d'hypothèses réalistes en ce qui concerne ses conditions d'exploitation futures.
Comme expliqué plus haut, la restructuration d'Iritecna repose sur la scission de cette entreprise en deux entités distinctes, chacune d'elles étant chargée d'une tâche spécifique. La première sous-holding, Iritecna (en liquidation) coiffe un groupe d'entreprises qui doivent être démantelées ou liquidées dans un avenir proche, ce qui rend superflu tout examen de leur viabilité.
La seconde sous-holding, Fintecna, est une société de participation financière à effectifs restreints, chargée de préparer et de conduire la privatisation finale des entreprises cédées par Iritecna. Cette nouvelle société fonctionne déjà sur une base complètement restructurée.
La nature spécifique des secteurs en cause fait qu'il est difficile d'élaborer des prévisions précises concernant les ressources et les interventions, dans la mesure où l'attribution d'un seul marché peut modifier radicalement la position et les perspectives de l'entreprise. Ce plan toutefois semble raisonnable et propre à remettre Fintecna sur la voie de la rentabilité. Si l'on excepte la filière " autoroutes ", qui n'a pas besoin d'être restructurée, les divers secteurs ont été réorganisés, strictement rationalisés en ce qui concerne leurs effectifs, et les activités déficitaires ont été supprimées. Dans certains cas, la restructuration se poursuit et devrait être achevée d'ici 1995. Les entreprises restructurées peuvent tabler sur un carnet de commandes initial bien garni qui garantira un niveau suffisant de production et de revenus pendant la période de démarrage.
Des estimations sur les résultats financiers des sous-secteurs de Fintecna pour la période 1995-1997 ont été présentées à la Commission. Ces chiffres montrent qu'un résultat réellement positif est déjà attendu pour 1995 et que des bénéfices satisfaisants seront réalisés d'ici 1997. Ces résultats positifs dépendent essentiellement de mesures de rationalisation et de modernisation internes, sans s'appuyer sur de futures augmentations globales d'activités ou de ventes sur lesquelles Fintecna n'aurait pas de prise.
Les autorités italiennes se sont engagées en outre à privatiser dans les prochaines années tous les sous-secteurs. Pour le moment, les filiales se trouvent à différents stades de la procédure de privatisation:
- Italimpianti se trouve à un stade avancé: sa vente devrait intervenir d'ici la fin de 1995,
- la procédure de vente d'Italstrade et de Condotte (secteur du génie civil) a été enclenchée en coopération avec la Banca di Roma; une étude de marché est en cours concernant les acheteurs ou partenaires potentiels,
- une offre publique de vente est prévue pour Autostrade dès que les dispositions législatives et administratives mentionnées plus haut auront été adoptées (chapitre III point 3),
- le cas d'Aeroporti di Roma pose des problèmes juridiques et administratifs semblables à ceux que connaît Autostrade; ils devront être résolus avant que la procédure de privatisation puisse débuter (chapitre III point 7.1),
- les entreprises du secteur d'ingénierie conseil achèveront pour certaines leur mandat dans les prochaines années (Servizi Tecnici) ou bien seront probablement vendues avec Autostrade (Spea).
L'engagement de procéder à un démantèlement total et définitif des activités de Fintecna va dans le sens du programme général de privatisation adopté par le Gouvernement italien. Il a également été confirmé dans le cadre du plan de réduction de dettes présenté par IRI à la Commission, conformément aux dispositions de l'accord conclu entre le Gouvernement italien et la Commission en juillet 1993. La Commission contrôle l'exécution de ce plan par le biais de rapports et de réunions périodiques avec les représentants d'IRI et du Gouvernement italien.
La décision de privatisation aura pour conséquence que l'entreprise ne pourra plus compter sur une aide publique accordée à des conditions privilégiées, étant donné que ses liens directs avec l'État seront définitivement rompus. Dans ce contexte, il appartiendra au nouveau propriétaire de faire en sorte que l'entreprise soit viable à long terme sans nouvelle aide de l'État.
4. Évolution de la position concurrentielle de l'entreprise sur le marché
Une autre condition pour l'autorisation des aides à la restructuration est que des mesures soient prises pour atténuer leurs effets négatifs éventuels à l'égard des concurrents. Ces aides seraient sinon " contraires à l'intérêt commun " et ne pourraient pas bénéficier d'une dérogation au titre de l'article 92 paragraphe 3 point c). Dans les secteurs où existent des surcapacités structurelles, il faudra ainsi prévoir la réduction irréversible des capacités de production de l'entreprise. De façon plus générale, la position concurrentielle de l'entreprise sur le marché après restructuration ne doit pas se trouver renforcée de manière indue, au détriment de ses concurrents.
Comme on l'a déjà souligné, la nature spécifique des secteurs considérés fait qu'il est difficile de se livrer à cet examen en s'appuyant sur un paramètre tel que la capacité de production. Néanmoins, la concurrence entre producteurs est vive au niveau européen comme au niveau mondial et cette concurrence pourrait être affectée tout particulièrement par l'octroi d'aides d'État. Aussi est-il nécessaire d'examiner la position concurrentielle de Fintecna après la restructuration.
Ce plan représente un effort considérable pour réduire les activités du groupe dans tous les secteurs déficitaires. Toutes les activités secondaires sont en vente ou en liquidation et les activités centrales confiées à Fintecna sont fortement réduites: ne restent plus que les filières pouvant s'appuyer sur une expérience solide et un carnet de commandes bien garni pour les années à venir.
La taille initiale de l'ensemble du groupe, à l'exclusion de la filière autoroutes, sera réduite de plus de moitié en termes de chiffre d'affaires (-60 %) et la réduction sera encore plus forte en termes d'effectifs (- 70 %). Même si l'on ne considère que les mesures de rationalisation, les activités abandonnées et celles qui ont été liquidées, la réduction (estimée à 35 %) est importante et a clairement un effet bénéfique sur la concurrence.
La réduction des effectifs, en particulier, est extrêmement importante dans le secteur considéré. La production d'une entreprise est fonction de son capital humain, lequel dépend notamment du nombre d'employés et des compétences intellectuelles et techniques de ceux-ci. La réduction significative de l'un de ces facteurs, associée à une baisse correspondante du chiffre d'affaires et au nombre considérable d'activités abandonnées dans le cadre de la liquidation d'entreprises entières, montre clairement que la part de marché de l'entreprise est structurellement réduite.
Compte tenu des considérations qui précèdent, la Commission est en mesure de conclure que la restructuration d'Iritecna et la position concurrentielle qu'occupera Fintecna sur le marché n'affecteront pas la concurrence dans une mesure contraire à l'intérêt commun.
5. Proportionnalité de l'aide
Comme il ressort des informations présentées par le Gouvernement italien et par Iritecna, les apports de capitaux effectués par IRI sur la période 1991-1993 ont servi à couvrir les pertes dues à la fermeture et à la liquidation d'entreprises du groupe ainsi qu'à l'amortissement d'actifs. En outre, la couverture des pertes dues à la liquidation d'Iritecna telles qu'elles sont prévues dans le plan financier accompagnant la restructuration, est également directement liée par définition aux mesures de fermeture et de restructuration.
On peut donc considérer que l'aide accordée ne fournit pas à l'entreprise des liquidités excédentaires, que celle-ci pourrait consacrer à des activités agressives susceptibles de provoquer des distorsions sur le marché et sans rapport avec la restructuration, et qu'elle ne sert pas non plus à financer de nouveaux investissements non requis par la restructuration. De plus, à en juger par le montant des dettes transférées à Fintecna, les charges financières futures de l'entreprise ne seront pas réduites de façon excessive.
La Commission note également que Fintecna ne bénéficiera d'aucun crédit d'impôt lié aux pertes couvertes par l'annulation de dettes que finance l'aide.
Elle constate aussi que le bénéficiaire de l'aide contribuera de façon significative au plan de restructuration en réinvestissant le produit de la privatisation de Fintecna, lequel a été jugé équivalent au prix de cession payé par Fintecna à Iritecna en liquidation. Il semble que cette estimation soit raisonnable et qu'elle ait de grandes chances d'être confirmée, non seulement parce que ce prix a été obtenu à partir des évaluations d'experts indépendants, mais aussi parce que plus de 90 % de ce produit proviendra de la vente de l'entreprise Autostrade et de la participation de 40 % dans l'entreprise Aeroporti di Roma. Ces deux entreprises ont régulièrement fait des bénéfices, tirant de surcroît avantage de ce que leur activité était relativement " protégée ", puisqu'elles opéraient dans le cadre d'une concession de droit public pour la fourniture de services au public.
L'engagement pris par les autorités italiennes de procéder à la vente de Fintecna dans un délai raisonnable est mis comme condition à l'approbation du plan de restructuration. Si cette vente n'intervenait pas et que par conséquent IRI n'utilisait pas les recettes pour réduire les dettes d'Iritecna en liquidation, la contribution du bénéficiaire au financement du plan serait inexistante. En outre, une vente par privatisation permet davantage d'escompter qu'une entreprise sera viable, c'est-à-dire qu'elle opérera à un niveau de rentabilité normal.
La Commission note enfin que l'estimation du coût final de la liquidation, soit 3 400 milliards de lires italiennes, n'est pas définitive et qu'elle pourra être modifiée au cours de la procédure de liquidation. Elle estime toutefois, vu l'importance de la réduction de la part de marché d'Iritecna/Fintecna, qu'une majoration de 15 % au maximum de ce coût n'affectera pas l'appréciation positive qu'elle porte sur cette affaire.
6. Contrôle et rapports
La Commission contrôlera la mise en œuvre du plan de restructuration et de liquidation. Les autorités italiennes lui adresseront à cet effet des rapports périodiques rendant compte des progrès du programme de restructuration, de liquidation et de privatisation.
La Commission aura également la possibilité de suivre l'exécution de ce plan au cours de ses réunions régulières avec les autorités italiennes, organisées dans le cadre de la surveillance prévue par l'accord conclu avec le Gouvernement italien en juillet 1993,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
1. L'aide en faveur d'Iritecna qui fait l'objet de la présente décision (soit les apports de capitaux effectués durant la période 1991-1993 pour un montant total de 1 090 milliards de lires italiennes et le coût final de la liquidation d'Iritecna estimé à 3 400 milliards, ainsi que toute majoration de 15 % au maximum de ce dernier montant pendant la durée du plan de restructuration) remplit les conditions prévues dans les " lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté " du 27 juillet 1994. Cette aide ne tombe donc pas sous le coup de l'interdiction énoncée à l'article 92 paragraphe 1 du traité et à l'article 61 paragraphe 1 de l'accord sur l'EEE et peut donc être considérée comme compatible avec le Marché commun au titre de l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité et de l'article 61 paragraphe 3 point c) de l'accord sur l'EEE, sous réserve que les conditions et exigences prévues aux paragraphes 2 à 5 et à l'article 2 soient remplies.
2. L'entreprise bénéficiaire exécute toutes les mesures figurant dans le programme de liquidation, de réorganisation et de privatisation du groupe Iritecna/Fintecna qui a été présenté à la Commission.
3. L'Italie respecte l'engagement qu'elle a pris de privatiser Fintecna et/ou ses filiales en se conformant aux délais indiqués à la Commission et au plan financier concernant la réduction des dettes d'IRI qu'elle a adressé à la Commission dans le cadre de la surveillance instituée par l'accord conclu entre le Gouvernement italien et la Commission en juillet 1993. Cette privatisation est en tout état de cause menée dans un délai raisonnable.
4. Le produit de la vente d'entreprises et d'actifs des groupes Iritecna et Fintecna, même s'il est plus élevé que le prévoyait le plan présenté à la Commission, est utilisé intégralement pour réduire le niveau d'endettement devant être couvert par les aides autorisées. Il n'est pas investi de manière à aider davantage d'autres entreprises du groupe en difficulté qui n'ont pas encore été vendues.
5. La privatisation n'est pas financée par de nouvelles aides d'état. Elle ne doit pas être assortie de conditions particulières et toutes les parties intéressées doivent pouvoir y prendre part.
Article 2
1. L'Italie coopère pleinement en respectant les dispositions suivantes:
a) elle fournit à la Commission des rapports semestriels qui indiquent notamment:
- les progrès de la liquidation, en précisant l'état financier actualisé d'Iritecna en liquidation, avec des informations spécifiques sur la vente ou la dissolution de ses actifs et de ses filiales,
- l'état d'avancement de la restructuration et de la privatisation de Fintecna et/ou de ses filiales;
b) elle informe la Commission en temps utile des principales phases de la procédure de privatisation de Fintecna et de ses filiales.
2. Le premier rapport présente la situation financière d'Iritecna en liquidation au 31 décembre 1994 et doit parvenir à la Commission d'ici le 30 juillet 1995. Les rapports suivants sont adressés tous les six mois à compter du 31 décembre 1995 et contiennent les données financières mises à jour des six derniers mois.
Article 3
La République italienne est destinataire de la présente décision.
(1) Communication aux autres États membres et autres intéressés publiée au JO n° C 328 du 25. 11. 1994, p. 2.
(2) Annexe 3 de la communication de la Commission concernant les aides d'État à l'entreprise EFIM, publiée au JO n° C 349 du 29. 12. 1993, p. 2.
(3) Après la liquidation d'Iritecna, Coinfra, une entreprise créée à cette fin et détenue par Fintecna, ne reprendra que les activités (appartenant initialement à CMF) qui portent sur l'achèvement du pont danois de Storebaelt. Le reste de CMF sera soumis à la procédure de liquidation.
(4) Le personnel travaillant encore dans les entreprises déjà mises en liquidation a été compté parmi les personnes licenciées.
(5) JO n° C 307 du 13. 11. 1993, p. 3.
(6) Voir la note du tableau du chapitre III point 1 et celle du chapitre III point 4.
(7) JO n° C 368 du 23. 12. 1994, p. 12.