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Décisions

CA Paris, 8e ch. B, 25 mai 2000, n° 1999/21349

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Lectiel (SA), Groupadress (SA)

Défendeur :

France Télécom (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Anquetil

Conseillers :

Mmes Prevost, Baland

Avoués :

SCP Teytaud, SCP Hardouin-Herscovici

Avocats :

Mes Soffer, Rosenfeld.

TGI Paris, du 17 sept. 1999

17 septembre 1999

Rappel de la procédure antérieure:

Par jugement contradictoire rendu le 17 septembre 1999, le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de Paris a, sur la demande de la société France Télécom, rétracté les ordonnances des 17 et 23 août 1999 prises à la requête des sociétés Groupadress et Lectiel, qui avaient assorti d'une astreinte les injonctions prononcées par un arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 29 juin 1999 rendu en matière de concurrence; il a condamné les sociétés Groupadress et Lectiel à payer 5 000 F à la société France Télécom en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi que les dépens;

La procédure devant la cour:

C'est de ce jugement que les sociétés Groupadress et Lectiel sont appelantes; elles soutiennent que le moyen de l'incompétence du juge de l'exécution a été soulevé tardivement et n'est donc pas recevable; qu'en tout état de cause ce juge est compétent pour prononcer une astreinte; qu'elles ont qualité pour agir; que les ordonnances prises sont justifiées et motivées; Elles soutiennent encore que le juge saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête est investi des attributions du juge qui l'a rendue et doit après débat contradictoire, statuer sur les mérites de la requête; Elles demandent d'infirmer le jugement entrepris et rétablir la validité des deux ordonnances rendues sur requête les 17 et 23 août 1999; elles sollicitent 30 000 F pour leurs frais irrépétibles;

La société France Télécom intimée, rappelle le contexte et soutient qu'elle a exécuté l'arrêt en cause; elle soutient avoir dans son assignation à jour fixe contesté in limine litis le défaut de pouvoirs du juge de l'exécution, les sanctions en matière de concurrence relevant de dispositions spécifiques prises par le Conseil de la concurrence; elle conteste de même la procédure suivie, sur requête, qui viole l'article 32 du décret du 31 juillet 1992 le principe contradictoire et le droit à un procès équitable; elle soutient que les sociétés appelantes ne disposent pas d'un titre exécutoire, l'arrêt du 29 juin 1999 ne les rendant créancières ni d'une obligation de payer ni d'une obligation de faire; elle rappelle les mécanismes sui generis de sanction applicable en matière de concurrence; elle soutient encore que le juge sur requête aurait violé l'article 8 du décret du 31 juillet 1992; en tout état de cause, elle considère avoir exécuté l'arrêt et qu'il n'y avait lieu à astreinte; elle sollicite 100 000 F pour ses frais irrépétibles;

Sur ce, LA COUR,

Considérant qu'avant de contester le bien fondé de l'astreinte prononcée, la société France Télécom a soulevé les moyens tirés de la compétence et de la régularité de la saisine du juge de l'exécution; qu'elle est donc recevable en ces moyens;

Considérant que l'astreinte étant une sanction, son prononcé est subordonné à la possibilité donnée à celui contre qui l'astreinte est demandée, de faire valoir sa défense;que la procédure sur requête est donc, même en cas d'urgence, radicalement inadéquate à la matière, seule une assignation, à bref délai éventuellement, étant régulière;qu'ainsi, les ordonnances rendues les 17 et 23 août 1999 sont entachées de nullité; que c'est donc à bon droit que le premier juge les a rétractées;

Considérant que le juge sur requête n'ayant pas été saisi régulièrement, il n'appartient pas au juge saisi de la rétractation, et même après débat contradictoire, de statuer sur le mérite de la demande d'astreinte.., à supposer de plus que ce juge puisse statuer sur une telle demande, l'astreinte sollicitée en l'espèce devant assortir des injonctions prononcées en matière de concurrence pour lesquelles il existe un régime juridique spécifique de sanction;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de France Télécom ses frais irrépétibles d'appel, à hauteur de 30 000 F;

Par ces motifs, et ceux non contraires du premier juge, Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions; Condamne en outre les sociétés Lectiel et Groupadress à payer à la société France Télécom la somme de 30 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Rejette toutes autres demandes des parties; Condamne les sociétés Lectiel et Groupadress aux dépens d'appel dont le montant pourra être recouvré directement par la SCP Hardouin-Herscovici , avoué, dans les conditions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.