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Décisions

CA Besançon, 2e ch. com., 10 décembre 1992, n° 1362-91

BESANÇON

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Société Française de Factoring (Sté)

Défendeur :

Duband (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bougon

Conseillers :

MM. Gauthier, Bangratz

Avoués :

SCP Leroux Meunier, Me Economou

Avocats :

Mes Moeglen, Hertz

TGI Lure, du 31 déc. 1990

31 décembre 1990

Faits et prétentions des parties :

Par jugement en date du 31 décembre 1990, auquel la cour se réfère expressément pour l'exposé des faits et de la procédure, le Tribunal de grande instance de Lure, statuant commercialement, a :

- condamné la SA Duband à verser à la Société Française de Factoring la somme de 18 900 F ;

- condamné la Société Française de Factoring à verser à la SA Duband la somme de 1 500 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

- débouté du surplus ;

- laissé les dépens à la charge de la Société Française de Factoring.

La Société Française de Factoring a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Elle demande à la cour de l'infirmer ; de déclarer irrecevable et mal fondée la demande reconventionnelle en résolution de vente de la société Duband ; en conséquence, de condamner celle-ci à lui payer la somme de 62 763,12 F, avec intérêts de droit à compter du 4 décembre 1985, la somme de 10 000 F à titre de dommages-intérêts, la somme de 5 000 F en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile très subsidiairement, de condamner la société Duband au paiement de la somme principale de 31 381,56 F, avec les intérêts de droit depuis le 4 décembre 1985.

Elle fait valoir que les 1er août et 12 septembre 1985, la chaîne européenne a passé commande pour le compte de son adhérent, la société Duband, à la Société Nouvelle de Diffusion du Meuble et du Combine "SNDMC" de vingt-huit téléviseurs, type 4210 de marque Sandra Color pour un prix de 62 763,12 F TTC ; que la livraison a eu lieu le 19 septembre 1985 ; que ce n'est que le 29 novembre 1985, soit deux mois et demi après la livraison, que la société Duband a émis des doutes sur la fiabilité des appareils ; que les vices constatés par l'huissier dans son procès-verbal en date du 29 novembre 1985 étaient visibles par l'acheteur lui-même, puisqu'il suffisait de mettre en marche lesdits appareils.

Elle ajoute que la société Duband est irrecevable à invoquer la garantie des viches cachés, celle-ci n'ayant demandé l'annulation de la vente, pour la première fois, qu'en 1986, après avoir été assignée en paiement ; que la société Duband est tout autant mal fondée en sa demande de résolution de la vente de vingt-huit postes, l'expertise n'ayant porté que sur vingt postes, dont six fonctionnaient normalement.

La SA Duband demande à la cour de confirmer le jugement déféré ; et de condamner la Société Française de Factoring à lui payer une somme de 2 500 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'elle entend opposer à la Société Française de Factoring la non conformité des téléviseurs à l'usage auquel ils étaient destinés, et subsidiairement seulement, le fait que les téléviseurs litigieux seraient atteints de vices cachés ; que l'expert a noté en conclusion que six téléviseurs sur vingt sont conformes à leur usage et qu'un nombre important soit 50 % sont en panne en état neuf qu'ainsi dix-huit téléviseurs au moins sur 28 étaient défectueux.

Elle ajoute que le rapport de l'expert démontre qu'il s'agit d'un matériel défectueux inutilisable et impropre à la vente; qu'elle n'avait pas à prendre l'initiative d'une procédure quelconque tant que le demandeur principal ne lui réclamait pas le paiement des objets litigieux.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 juillet 1992.

Discussion :

Bien que la société intimée ait invoqué le défaut de conformité des téléviseurs livrés par la société SNDMC, aux droits de laquelle se trouve la société appelante , il convient de constater que celle-ci n'invoque aucun élément de fait permettant de conclure que les postes en cause n' étaient pas dans leur type et leur nature conformes au contrat de vente.

Vingt-huit postes de télévision couleur type 4210 de marque Sandra Color ont été commandes a la société SNDMC. Ceux-ci ont été effectivement livrés à la société Duband.

Celle-ci ne s'est d'ailleurs pas mépris sur le défaut affectant les postes puisque dans la lettre recommandée adressée le 29 novembre 1985 à la SNDMC, à laquelle était joint le constat d'huissier, le responsable de la société Duband met la société destinataire en demeure d'annuler la vente en précisant "dans le cas contraire, nous vous assignerons en vice caché".

Il résulte au surplus du rapport d'expertise judiciaire daté du 4 juillet 1988, que les quatorze postes, non conformes à leur usage selon l'expert, présentent tous des défectuosités entraînant diverses pannes.

Ils sont bien ainsi atteints de vices cachés.

En application des dispositions de l'article 1648 du Code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur, dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires, et l'usage du lieu où la vente a été faite.

En l'espèce, il est constant que ce n'est qu a la suite de l'assignation en paiement qui lui a été délivrée le 16 avril 1986, que la société Duband a demandé, par conclusions notifiées le 3 juin 1986, l'annulation de la vente des vingt-huit téléviseurs, en invoquant la défectuosité de trois appareils, alors que dès le 29 novembre 1985, elle avait connaissance de l'existence des vices cachés affectant ces téléviseurs.

La société Duband n'a pas ainsi agi à bref délai.

Pour le surplus, les observations liminaires de la société intimée quant au prix des vingt-huit appareils conduisent à conclure qu'elle ne doit pas supporter la TVA, qu'elle est pourtant autorisée à récupérer en déduction de la TVA exigible sur ses ventes

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré et de condamner la société Duband au paiement de la somme principale de 62 763,12 F.

En ce qui concerne les intérêts, la société appelante ne produit aux débats aucune mise en demeure adressée à la société intimée antérieurement à l'assignation. Les intérêts au taux légal courront ainsi sur la somme de 62 763,12 F, à compter du 16 avril 1986, date de l'assignation, conformément aux dispositions de l'article 1153, alinéa 3, du Code civil.

La société appelante ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice que lui aurait causé la société intimée par son retard à payer. Elle sera déboutée de sa demande en dommages-intérêts.

Il serait, en revanche, inéquitable de laisser à sa charge le montant de ses frais irrépétibles. Il convient de lui allouer la somme de 5 000 F en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société Duband, qui succombe, n'a droit à aucune indemnité au titre des dispositions précitées. Elle sera déboutée de sa demande correspondante et condamnée aux dépens de première instance, incluant les frais de l'expertise judicaire, et d'appel.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré, déclare les appels recevables en la forme ; infirme le jugement rendu le 31 décembre 1990 par le Tribunal de grande instance de Lure, statuant commercialement ; et statuant à nouveau ; condamne la SA Duband à payer à la Société Française de Factoring la somme de soixante deux mille sept cent soixante trois francs et douze centimes (62 763,12 F), avec intérêts au taux légal à compter du 16 avril 1986, et la somme de cinq mille francs (5 000 F), en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; deboute les parties pour le surplus ; condamne la SA Duband aux dépens de première instance, incluant les frais de l'expertise judiciaire, et aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct dont distraction au profit de la SCP Leroux-Meunier, avoués associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.