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Décisions

Cass. com., 10 mai 2000, n° 97-17.472

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Man VW camions et bus (SA)

Défendeur :

Bail équipement (Sté), Laroppe (ès qual.), Morin, Snavi (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Grimaldi (faisant fonctions)

Rapporteur :

M. de Monteynard

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

Me Jacoupy, SCP Guiguet, Bachelllier, Potier de La Varde

T. com. Paris, 12e ch., du 30 nov. 1993

30 novembre 1993

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 27 mars 1997), qu'un tracteur routier d'occasion, qui a été vendu par la société Man VW camions et bus (société Man) à la société Bail équipement (le bailleur) et donné par cette dernière en crédit-bail à M. Morin, a été endommagé accidentellement, puis réparé par le garage Snavi à la demande de M. Morin, qui n'a pu le récupérer, faute d'être en mesure de payer le prix des réparations ; que M. Morin a été placé en redressement puis liquidation judiciaires ; que la société Man a été assignée par le crédit-bailleur en résolution de la vente et par M. Morin en paiement du coût des réparations et de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que la société Man reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à rembourser au bailleur la valeur de vente du tracteur routier et d'avoir dit qu'elle fera son affaire de la reprise par ses soins du tracteur routier retenu par le garagiste, alors, selon le pourvoi, d'une part, que dans le cas de résolution d'une vente, la restitution du prix par le vendeur est la contrepartie de la remise de la chose par l'acquéreur ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui constatait que le bailleur se trouvait dans l'impossibilité de restituer le tracteur à la société Man, ne pouvait condamner cette dernière à lui en rembourser le prix et a violé l'article 1644 du Code civil ; et alors, d'autre part, que si le droit de demander, au cas de vice caché de la chose vendue, soit la résolution de la vente, soit une réduction du prix, n'exclut pas la faculté pour l'acheteur d'en demander réparation en conservant la chose, l'acheteur ne saurait tout à la fois demander la résolution de la vente et la réparation de la chose aux frais du vendeur ; qu'ainsi, la cour d'appel, après avoir prononcé la résolution de la vente du tracteur ne pouvait décider qu'il appartenait à la société Man de prendre en charge les frais de réparation dudit tracteur sans violer les articles 1644 et 1645 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que la société Man est à l'origine de l'impossibilité de restitution du véhicule et que cette absence de restitution ne fait pas obstacle au remboursement du prix ;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt énonce que la société Man est tenue, outre la restitution du prix, de tous les dommages-intérêts envers l'acheteur et retient que les frais de réparation consécutifs à l'accident font partie du préjudice subi ; d'où il suit que la cour d'appel ayant légalement justifié sa décision, le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen, pris en ses quatre branches : - Attendu que la société Man reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à. M. Morin la somme de 716 000 francs, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le tracteur, accidenté le 21 février 1990, avait été réparé par le garage Snavi courant mars 1990 et se trouvait en état de marche à la fin de ce mois ; qu'ainsi, la cour d'appel ne pouvait décider que le dépôt de bilan de M. Morin et la perte de revenus qu'il disait avoir subi pendant trois ans, et chiffrait à 216 000 francs, était la conséquence directe de l'accident, sans violer l'article 1382 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'en imputant en faute à la société Man son refus de prendre en charge "rapidement" le coût de réparations effectuées de manière non contradictoire, sans relever aucun fait de nature à faire dégénérer en abus le droit qu'avait cette société de contester sa responsabilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; alors, en outre, qu'il n'existait, en toute hypothèse, aucun lien de causalité directe entre la faute imputée à la société Man et le préjudice dont il était demandé réparation qui, outre qu'il n'était pas prévisible, était uniquement imputable à l'impécuniosité de M. Morin, entrepreneur de transports qui ne disposait ni des fonds, ni de crédit lui permettant de faire face aux frais de réparation de son unique tracteur ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; alors, enfin, qu'en se bornant à énoncer que le dépôt de bilan de M. Morin, lui aussi conséquence directe des fautes de la société Man, justifiait l'octroi d'une indemnité complémentaire de 500 000 francs, sans préciser la nature du préjudice qu'elle entendait réparer, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de vérifier que cette somme ne représentait pas, en tout ou en partie, le passif de M. Morin antérieur à l'accident et, partant, d'exercer son contrôle, tant sur le lien de causalité entre la faute et le préjudice que sur l'adéquation de la réparation accordée au préjudice subi, violant ainsi l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient que la société Man, professionnel de la vente, avait livré un véhicule présentant un degré d'extrême usure d'organes essentiels de direction et de freinage ; qu'il retient encore que M. Morin venait de prendre en crédit-bail ce véhicule, qu'il ne disposait que de celui-ci pour exercer son activité, et que devant l'impossibilité de régler la facture de remise en état dont le coût se monte à la moitié du prix du véhicule, il s'est trouvé privé de ressource ; qu'il retient enfin que la brusque cessation d'activité de M. Morin, "conséquence immédiate" de l'accident, a "rendu inéluctable le dépôt de bilan" de celui-ci, d'autant que la société Man, bien que "consciente de sa responsabilité, a refusé de prendre en charge rapidement les frais de remise en état du camion" ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a caractérisé tant les fautes de la société Man que le lien de causalité entre ces fautes et les préjudices ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses quatre branches ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.