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Décisions

Cass. 1re civ., 7 mars 2000, n° 97-17.511

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Mercedes Benz France (SAS)

Défendeur :

MDC (SARL), SAA (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Renard-Payen

Avocat général :

M. Roehrich

Avocats :

SCP de Chaisemartin, Courjon, SCP Guiguet, Bachellier, de la Varde

T. com. Avignon, du 19 mai 1995

19 mai 1995

LA COUR : - Attendu que la société Michel de Chabannes (MDC) a acheté à la Société automobiles avignonaises (SAA) un véhicule Mercedes, qui a été mis en circulation le 6 février 1991 ; que MDC s'est plainte de l'existence d'un bruit anormal dans le pont arrière qui persistait malgré l'intervention du garage vendeur, puis celle du technicien de Mercedes ; qu'un expert a été commis par une ordonnance de référé ; qu'après le dépôt de son rapport, MDC a saisi le juge du fond ; que l'arrêt attaqué (Nîmes, 15 mai 1997) a prononcé la résolution de la vente, ordonné la restitution du véhicule à SAA, condamné SAA à reverser à MDC la somme de 246 705 francs, correspondant au prix facturé du véhicule, et condamné la société Mercedes Benz France (Mercedes) à relever et garantir SAA des condamnations prononcées à son encontre ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches : - Attendu que la société Mercedes fait grief à l’arrêt de lui avoir déclaré opposable le rapport d’expertise, et d’avoir rejeté sa mise hors de cause, alors, selon, le moyen, que, d’une part, en se fondant uniquement sur les conclusions d’un expertise à laquelle elle n’avait pas été partie et dont elle avait expressément soulevé l’inopposabilité, la cour d’appel a violé l’article 16 du nouveau Code de procédure civile; alors que, d’autre part, l’arrêt manque de base légale au regard des articles 113 et 117 de la loi de 1966, et de l’article 1984 du Code civil, la cour d’appel s’étant bornée à déclarer que la société Mercedes avait été représentée par son préposé aux opérations d’expertise sans rechercher s’il avait reçu une délégation de pouvoirs; alors qu’enfin, il manque également de base légaie au regard de l’article 90 du décret du 23 mars 1967, la cour d’appel s’étant bornée à énoncer que la société Mercedes avait été “représentée” par la société SAA, concessionnaire, sans rechercher si celle-ci disposait d’un pouvoir quelconque de représentation à cette fln;

Mais attendu qu’en retenant que les opérations d’expertise avaient eu lieu en présence d’un inspecteur technique de la société Mercedes qui avait pu être entendu par rexpert et faire valoir ses observations et que le rapport avait été régulièrement communiqué à cette société, qui avait pu le critiquer dans ses écritures, l’arrêt n’encourt pas les griefs du moyen;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société Mercedes reproche à l’arrêt d’avoir déclaré SMC recevable en son action rédhibitoire alors, selon le moyen, que le délai de l’action résultant des vices rédhibitoires court à compter de la découverte du vice par l’acquéreur, et que la cour d’appel n’a pas recherché si, comme elle l’avait soutenu, SMC avait eu connaissance de la nuisance sonore du pont arrière de la voiture avant le mois de juin 1991, de sorte que l’arrêt manque de base légale au regard de l’article 1648 du Code civil;

Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain que la cour d’appel, qui s’est livrée à une analyse précise de la chronologie des événements, a fixé le point de départ et le délai de l’action récursoire; que le moyen n’est pas fondé;

Sur le troisième moyen : - Attendu que la société Mercedes reproche à la cour d’appel d’avoir prononcé la résolution de la vente du véhicule, en se bornant à énoncer que le vice allégué diminuait tellement l’usage de la chose que l’acheteur ne l’aurait pas acquise s’il l’avait connu, sans préciser en quoi ce défaut était d’une gravité suffisante pour entraver l’utilisation normale du véhicule, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l’article 1641 du Code civil;

Mais attendu qu’en retenant que la nuisance sonore dans le rapport le plus élevé, dont la réalité et le caractère irréparable étaient établis par les constatations de l’expert, caractérisait pour le véhicule, “haut de gamme et d’une marque de prestige”, un vice caché générateur d’une atteinte grave au confort de conduite et des conditions d’utilisation désagréables, et que l’usage du véhicule s’en trouvait tellement diminué que l’acheteur ne l’aurait pas acquis s’il l’avait connu, la cour d’appel a ainsi légalement justifié sa décision;

Mais, sur le quatrième moyen : - Vu l'article 1644 du Code civil ; - Attendu que, pour condamner la société Mercedes à garantir SAA de la condamnation à la restitution du prix de vente du véhicule prononcée à son encontre au profit de MDC, l'arrêt retient que la société Mercedes est responsable du défaut du véhicule en sa qualité de constructeur ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que SAA ne pouvait obtenir la garantie d'un prix auquel, du fait de la résolution de la vente et de la remise consécutive de la chose, elle n'avait plus droit, et dont la restitution ne constituait donc pas pour elle un préjudice indemnisable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs : Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Mercedes Benz France (MBF) à relever et garantir la Société automobiles avignonaises (SAA) de la condamnation à la restitution du prix de vente du véhicule prononcée à son encontre, l'arrêt rendu le 15 mai 1997, entre les parties, par la Cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Nîmes, autrement composée.