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Décisions

CCE, 12 mai 2004, n° 2005-173

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Aide d'État mise à exécution par l'Espagne à titre de nouvelle aide à la restructuration des chantiers navals publics

CCE n° 2005-173

12 mai 2004

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a), vu le règlement (CE) n° 1540-98 du Conseil du 29 juin 1998 sur les aides à la construction navale (1), vu le règlement (CE) n° 1013-97 du Conseil du 2 juin 1997 sur les aides à certains chantiers navals en cours de restructuration (2), après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément auxdits articles (3) et vu ces observations, considérant ce qui suit:

I. PROCÉDURE

(1) Sur la base du règlement (CE) n° 1013-97, la Commission a autorisé, par décision du 6 août 1997 (4), une aide à la restructuration d'un montant d'environ 1,9 milliard d'euro en faveur des chantiers navals publics espagnols. Conformément aux dispositions dudit règlement, l'autorisation de l'aide était subordonnée à la condition qu'aucune autre aide ne soit accordée à des fins de restructuration.

(2) La Commission a appris par la presse que plusieurs transactions qui ont affecté les chantiers navals publics espagnols de caractère civil avaient eu lieu pendant les années 1999 et 2000. Par lettres des 27 janvier et 29 mars 2000, la Commission a demandé des informations sur cette affaire. L'Espagne n'a répondu à aucune des deux lettres.

(3) Par décision du 12 juillet 2000, la Commission a ouvert la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité (ci-après dénommée "la décision d'ouverture") concernant la transaction par laquelle la société de portefeuille publique Sociedad Estatal de Participaciones Industriales (SEPI) a acheté à Astilleros Españoles SA les deux chantiers navals Juliana et Cádiz et l'usine de moteurs de Manises, en tant qu'entreprises séparées. Les autorités espagnoles ont été informées de la décision d'ouverture par lettre de la Commission du 1er août 2000.

(4) Par lettres des 18 mai et 24 septembre 2001, l'Espagne a présenté ses observations concernant l'ouverture de la procédure. Elle a aussi informé la Commission que la SEPI avait décidé, en juillet 2000, de regrouper tous les chantiers navals publics d'Espagne au sein d'un groupe.

(5) Le 28 novembre 2001, la Commission a décidé d'étendre la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité (ci-après dénommée "la première décision d'extension") aux transactions supplémentaires réalisées entre, d'une part, la SEPI et Bazán et, d'autre part, AESA et Bazán, dans le but de créer le nouveau groupe IZAR. Par lettre du 28 novembre 2001, la Commission a informé l'Espagne de l'extension de la procédure et a demandé toute information utile qui pourrait l'aider à évaluer l'élément d'aide des transactions. Par lettre du 29 novembre 2002, la Commission a indiqué que pour pouvoir procéder à une appréciation correcte, elle avait besoin des comptes annuels des chantiers navals concernés et d'AESA, ainsi que de tout autre document clarifiant la manière dont les entreprises ont été évaluées au moment du transfert de propriété.

(6) Par lettre du 31 janvier 2002, l'Espagne a présenté ses observations sur la première extension de la procédure. La Commission a rappelé à l'Espagne, par lettre datée du 28 février 2002, qu'elle devait encore transmettre les rapports annuels des entreprises. L'Espagne a fourni des informations complémentaires par lettre du 29 juillet 2002, sans toutefois communiquer les rapports annuels demandés.

(7) Comme l'Espagne n'a pas fourni les rapports annuels, la Commission a arrêté, le 12 août 2002, conformément à l'article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 659-1999 du Conseil portant modalités d'application de l'article 93 du traité CE (5), une décision lui enjoignant de fournir les renseignement requis. L'Espagne a été informée par lettre du 12 août 2002. La Commission soulignait que si elle ne recevait pas les données demandées, elle prendrait une décision finale en se basant sur les informations disponibles. Par lettre du 16 octobre 2002, l'Espagne a répondu à l'injonction mais n'a pas fourni les rapports annuels demandés.

(8) Le 27 mai 2003, la Commission a décidé d'étendre à nouveau la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité (ci-après dénommée "la seconde décision d'extension"), de manière à y inclure une aide d'État qu'elle venait de découvrir et qui paraissait illégale. Il s'agissait d'une aide liée à des transactions entre la SEPI et AESA ainsi que ses chantiers navals. Par lettre du 27 mai 2003, la Commission a informé l'Espagne de l'extension de la procédure et a demandé toutes les informations nécessaires pour évaluer l'aide suspecte. Par lettre du 10 juillet 2003, l'Espagne a réagi à la seconde décision d'extension. Par lettres des 16 octobre et 11 novembre 2003, la Commission a demandé des précisions. L'Espagne a répondu par lettre du 25 novembre 2003 et a envoyé un complément d'information par lettre du 14 avril 2004.

(9) Après l'ouverture de la procédure, la Commission a reçu des observations du Danemark, par lettre du 18 décembre 2000, et après la première décision d'extension, elle en a reçu du Royaume-Uni, par lettre du 22 février 2002. Après la seconde décision d'extension, elle a reçu des observations respectivement de Royal Van Lent Shipyard, par lettre du 24 septembre 2003, d'un tiers qui a sollicité l'anonymat par lettre du même jour, et d'IZAR, par lettre du 6 octobre 2003. Ces observations ont été envoyées à l'Espagne par lettres des 14 février 2001, 6 mars 2002 et 13 octobre 2003. L'Espagne a présenté ses observations par lettres datées des 14 mars 2001, 4 avril 2002 et 10 novembre 2003. Le 14 novembre 2003, IZAR a formé un recours (6) contre la Commission devant le Tribunal de première instance, en demandant l'annulation de la seconde décision d'extension de la procédure.

II. DESCRIPTION DÉTAILLÉE DE L'AIDE

Bénéficiaires

(10) Les entreprises concernées sont Astilleros Españoles SA (AESA), EN Bazán de Construcciones Navales Militares SA (Bazán), IZAR Construcciones Navales (IZAR), Astilleros de Cádiz SRL (Cádiz), Astilleros de Puerto Real SRL (Puerto Real), Astilleros de Sestao SRL (Sestao), Astilleros de Sevilla SRL (Sevilla), Juliana Constructora Gijonesa SA (Juliana), Fábrica de motores diésel de Manises SA (Manises), y Astilleros y Talleres del Noroeste (Astano, rebaptisé par la suite Fene).

Transactions couvertes par la présente procédure

(11) Depuis 1998 tous les chantiers navals publics espagnols appartiennent à la structure de la société de portefeuille publique SEPI. Avant 1998, tous les chantiers navals civils, à l'exception d'Astano, qui était déjà détenue directement, étaient des entreprises indépendantes, propriété de la société de portefeuille AESA, filiale de la SEPI. En tant que société de portefeuille, AESA n'exerçait pas elle-même d'activités de construction navale, mais gérait activement ses chantiers navals. La SEPI était aussi propriétaire de Bazán, une entreprise qui comprenait principalement trois chantiers navals militaires (pas en tant qu'entreprises indépendantes). Au début de 1998, la structure de propriété des chantiers navals publics était la suivante:

<emplacement tableau>

(12) Dans le cadre d'une première série de transactions (ci-après dénommée "transmission 1"), le 28 décembre 1999, la SEPI a acheté à AESA les chantiers navals Cadiz et Juliana et l'entreprise de moteurs de Manises pour un prix de 15,3 millions d'euro (7). Les chantiers navals Barreras et Astander ont été privatisés et ils ne font plus l'objet de la présente affaire. Ces opérations ont abouti à la structure suivante:

<emplacement tableau>

(13) En juillet 2000, la SEPI a décidé de regrouper tous les chantiers navals publics au sein d'un groupe. La fusion a été réalisée par le biais de deux opérations principales. Par la première ("transmission 2"), le groupe de chantiers navals militaires Bazán, propriété de la SEPI, a acheté les trois chantiers navals qui restaient à AESA (Puerto Real, Sestao et Sevilla) pour une peseta espagnole chacun.

(14) Dans le cadre de la seconde opération ("transmission 3"), Bazán a acheté trois chantiers navals (Juliana, Cadiz et Astano) et l'usine de moteurs de Manises directement à la SEPI, également pour une peseta espagnole chacun. Toutes les entreprises ont été dissoutes et regroupées au sein de Bazán, qui a été rebaptisée IZAR. La structure actuelle des chantiers navals se présente de ce fait comme suit:

<emplacement tableau>

Décision d'ouvrir la procédure formelle d'examen

(15) À l'ouverture de la procédure, la Commission a déclaré qu'elle soupçonnait l'existence d'une aide d'État dans la transmission 1, dans le cadre de laquelle la SEPI avait payé à AESA, pour les entreprises Juliana, Cadiz et Manises, un prix dont il a été indiqué à l'époque qu'il s'élevait à 60 millions d'euro.

(16) La Commission doutait également de la compatibilité d'une telle aide avec le Marché commun, car cette mesure ne semblait pas conforme à la décision de la Commission de 1997 autorisant le dernier paquet d'aides à la restructuration en faveur des chantiers navals publics et constituait, par conséquent, une aide à la restructuration incompatible en application de l'article 5, paragraphe 1, deuxième alinéa, premier tiret, du règlement (CE) n° 1540-98. Cette conclusion se fondait plus particulièrement sur les arguments suivants:

(17) Premièrement, cette "vente" ne semblait pas être une opération authentique, mais plutôt un apport de capitaux devant permettre à AESA et aux chantiers navals qui restaient sa propriété (Puerto Real, Sevilla et Sestao) de rester en activité dans l'immédiat.

(18) Deuxièmement, étant donné leurs performances antérieures et leurs résultats apparemment médiocres, il semblait probable qu'aucun investisseur commercial ne soit disposé à acheter les chantiers navals dans de telles conditions.

Première décision d'étendre la procédure formelle d'examen

(19) Le 25 novembre 2001, la Commission a décidé d'étendre la procédure de manière à couvrir aussi les transmissions 2 et 3, qui ont été réalisées pour regrouper tous les chantiers navals publics espagnols au sein d'un même groupe. Lors de l'extension de la procédure, la Commission a observé l'existence d'une contiguïté entre les transactions qui ont eu lieu entre 1999 et 2000 et qui ont abouti en définitive à la création d'un groupe rassemblant tous les chantiers navals publics. La procédure devait par conséquent être étendue à toutes les transactions qui ont conduit à la fusion pour permettre une évaluation complète et correcte de l'éventuelle aide d'État en faveur des chantiers navals civils contenue dans les diverses transactions réalisées par le groupe SEPI.

(20) Dans ce contexte la Commission a souligné que l'apport de capitaux à des entreprises publiques devait avoir lieu aux conditions du marché pour exclure l'existence de toute aide d'État. Elle doutait par conséquent que le prix de vente de une peseta espagnole par chantier naval et pour l'usine de moteurs puisse être considéré comme le prix du marché et soulevait la question de savoir si un avantage économique tiré de l'aide d'État avait été conféré à IZAR dans le cadre de ces transactions.

(21) Comme les dispositions communautaires applicables ne permettaient pas l'octroi aux chantiers navals civils publics de nouvelles aides au sauvetage et à la restructuration, la Commission doutait de la compatibilité de ces transactions avec le Marché commun.

Seconde décision d'étendre la procédure formelle d'examen

(22) Dans le cadre de son enquête ultérieure, la Commission a découvert que, en 1999, la SEPI avait prêté 194,4 millions d'euro aux trois entreprises qu'elle venait d'acheter, Cádiz, Juliana et Manises. Comme ces prêts ont apparemment été accordés à des entreprises en difficulté, la Commission a considéré qu'ils pouvaient constituer une aide d'État.

(23) La Commission a en outre observé que le 18 juillet 2000, AESA a reçu de la SEPI un apport de capitaux d'un montant de 252,4 millions d'euro, qui pourrait constituer une aide d'État. Il est apparu que les chantiers navals Puerto Real, Sestao et Sevilla avaient reçu presque simultanément d'AESA des apports de capitaux d'un montant comparable. Cet apport de capitaux d'AESA à ses trois chantiers navals a eu lieu seulement deux jours avant leur transmission à Bazán.

(24) Enfin, Bazán a apparemment été indemnisée d'une perte de 68,2 millions d'euro en rapport avec son acquisition des chantiers navals Astano, Cadiz, Juliana et Manises. La Commission s'est par conséquent demandé si la SEPI pouvait avoir injecté ce montant dans les quatre entreprises dans le contexte de leur transmission à Bazán.

(25) Sur la base de ces nouvelles informations, directement en rapport avec les transmissions qui ont conduit à la création d'IZAR, la Commission a décidé d'étendre la procédure le 27 mai 2003, car elle nourrissait des doutes sur la compatibilité de ces prêts et de ces apports de capitaux avec le Marché commun.

(26) On peut finalement observer que, dans la seconde décision d'extension, la Commission a souligné que, au cas où les doutes relatifs à l'octroi d'aides supplémentaires émis dans la décision d'ouverture de la présente procédure se confirmeraient, l'aide accordée en 1997 pour la nouvelle restructuration des chantiers navals publics espagnols pourrait être considérée comme incompatible et devant être récupérée.

III. OBSERVATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES

Observations reçues à l'ouverture de la procédure

(27) À l'ouverture de la procédure, la Commission a reçu des observations du Danemark, qui estimait que la transaction entre AESA et la SEPI devait être considérée comme un apport illégal de capitaux effectué en violation du paquet d'aides autorisé en 1997 en faveur d'AESA. Le Danemark soutenait par conséquent la décision de la Commission d'ouvrir la procédure.

(28) Le Danemark faisait également valoir que puisqu'une aide avait été accordée à Bazán en 1998 à condition qu'elle renonce à la construction navale commerciale, l'achat par Bazán de plusieurs chantiers navals civils ne respectait pas cette condition. Enfin, le Danemark ajoutait que les chantiers navals danois avaient souffert de la concurrence des chantiers navals espagnols qui avaient reçu des aides d'État.

Observations reçues à la première extension

(29) La Commission a reçu des observations du Royaume-Uni concernant l'extension de la procédure. Le Royaume-Uni partage les doutes de la Commission sur la compatibilité de la restructuration des chantiers navals publics espagnols avec les principes du marché. Il souligne que le traitement des dettes de l'entreprise publique AESA, qui était, selon ses informations, importantes au moment de la transaction, constitue un aspect essentiel. Le Royaume-Uni considère que la fusion des groupes commerciaux et navals au sein d'une même entité, IZAR, offre davantage de possibilités de tourner les règles applicables aux aides d'État.

(30) Selon le Royaume-Uni, l'opinion est largement répandue, dans les milieux industriels britanniques, que les chantiers navals espagnols obtiennent d'importants contrats de construction et de transformation navales non pas du fait de leur compétitivité, mais grâce aux aides mises à leur disposition. Le Royaume-Uni fait valoir qu'il existe des exemples concrets d'attribution à ces chantiers navals, dans des conditions difficilement explicables dans un contexte commercial normal, de contrats pour lesquels des chantiers navals britanniques avaient également soumissionné. Le Royaume-Uni considère aussi que le transfert constant de propriété des chantiers navals déficitaires est utilisé comme mécanisme pour permettre l'octroi permanent de subventions à un secteur qui évite une restructuration pourtant essentielle.

Observations reçues à la seconde extension

(31) La Commission a reçu des observations de trois parties. La première, qui a demandé l'anonymat, a présenté des observations communes concernant cette affaire et l'affaire d'aide d'État C-38-03 (ex NN 10-03) (8). Il observe qu'IZAR se consacre à la construction, à la réparation, à l'entretien et à la transformation de bateaux de plaisance, en particulier des yachts de luxe, et souligne que l'aide en cause a créé une distorsion grave sur le marché des bateaux de plaisance et que les installations des chantiers navals militaires d'IZAR à Carthagène et San Fernando sont utilisées à cette fin. Royal van Lent Shipyard Royal BV, entreprise spécialisée dans la construction de mégayachts, a également présenté des observations communes concernant cette affaire et l'affaire C-38-03. L'entreprise affirme que les aides accordées par le Gouvernement espagnol ces dernières années ont été extrêmement préjudiciables pour beaucoup des concurrents sur ce marché.

(32) La Commission a aussi reçu des observations d'IZAR, qui allègue, en premier lieu, que les fonds fournis par la SEPI ne doivent pas être considérés comme des ressources d'État. En ce qui concerne un prêt 194,4 millions d'euro de la SEPI à AESA, IZAR affirme qu'il ne s'agissait pas d'un nouveau prêt mais seulement de la prise en charge par la SEPI d'un prêt qu'AESA avait accordé à ses chantiers navals. En ce qui concerne l'apport de capitaux d'un montant de 252,4 millions d'euro de la SEPI à AESA, IZAR allègue que celui-ci a eu lieu en septembre 2000, à un moment où AESA ne possédait aucun chantier naval, et qu'il ne peut par conséquent pas être considéré comme une aide aux chantiers navals. Pour ce qui est de la couverture de pertes à concurrence de 68,2 millions d'euro par la SEPI, IZAR affirme n'en avoir jamais bénéficié, comme le montre son rapport annuel. Elle ajoute qu'une base juridique incorrecte a été utilisée et qu'il n'est pas envisageable de récupérer des aides accordées aux chantiers navals espagnols publics en 1997.

IV. OBSERVATIONS DE L'ESPAGNE

Observations reçues à la suite de l'ouverture de la procédure

(33) Dans ses observations concernant l'ouverture de la procédure, l'Espagne a précisé que le montant que la SEPI avait payé à AESA pour les deux chantiers navals et l'usine de moteurs était sensiblement inférieur à celui mentionné dans la décision d'ouverture. De fait, le prix payé pour les trois entreprises était de 15,3 millions d'euro (au lieu des 60 millions d'euro mentionnés dans la décision d'ouverture), soit 8,054 millions d'euro pour Cadiz, 5,235 millions d'euro pour Juliana et 2,013 millions d'euro pour Manises.

(34) L'Espagne a, en outre, présenté à la Commission des arguments à l'appui de sa thèse selon laquelle la transmission 1 ne comportait pas d'aide d'État. Le principal argument était que les transactions ont été réalisées pour préparer la privatisation des trois entreprises. La SEPI étant spécialiste des privatisations, il était nécessaire de lui céder les trois entreprises. Toutefois, il est apparu très rapidement qu'on ne pourrait trouver aucun acheteur intéressé. Telle est la raison pour laquelle les entreprises ont ensuite été cédées à Bazán.

(35) Comme l'objectif supposé des transactions était de préparer les trois entreprises à la privatisation, l'Espagne considère que la SEPI n'avait pas besoin de se comporter en acteur du marché lorsqu'elle a acheté les entreprises. Elle devait simplement payer un prix raisonnable et, en pareilles circonstances, la valeur comptable semblait être la meilleure solution.

Observations reçues à la suite de la première extension

(36) Après la première extension de la procédure, l'Espagne a présenté à la Commission les arguments suivants pour démontrer que les transmissions 2 et 3 ne comportaient pas d'aides d'État, et donc que le prix de une peseta espagnole par entreprise était correct.

(37) Selon l'Espagne, la SEPI, en tant qu'actionnaire à 100 % de toutes les entreprises concernées, s'est comportée en acteur du marché lorsqu'elle a décidé de rassembler toutes les activités de construction navale au sein d'un même groupe, dans le but d'obtenir des synergies. Il était aussi nécessaire d'augmenter la capacité de production militaire, étant donné l'importance du carnet de commandes et le développement prévu de ce secteur.

(38) L'Espagne a aussi souligné qu'il n'y avait aucun lien entre le premier groupe de transactions auquel ont participé AESA et la SEPI et le second groupe, qui a conduit à la création d'IZAR. Les premières avaient pour but la privatisation des trois entreprises, tandis que les deuxièmes visaient la création d'un grand groupe de construction navale espagnol.

(39) L'Espagne allègue que le fait que le prix des mêmes entreprises (Cádiz, Juliana et Manises) a baissé, dans un court laps de temps, de 15,3 millions d'euro à 3 pesetas espagnoles montre simplement que les deux transactions avaient des objectifs différents.

(40) La transmission des chantiers navals à Bazán, avec tous leurs éléments d'actif et de passif, n'accorde aucun avantage à aucun chantier naval. En outre l'Espagne soutient que l'on n'a pas utilisé de ressources publiques dans les transactions.

(41) L'Espagne soutient également que même s'il pouvait être prouvé que Bazán a retiré un quelconque avantage de la transmission 2, le caractère militaire de l'entreprise amène à mettre en doute l'applicabilité de l'article 88, paragraphe 2, du traité, étant donné l'exception prévue à l'article 296 du traité.

(42) L'Espagne considère aussi que le prix utilisé dans une transaction réalisée à l'intérieur d'un groupe ne doit pas nécessairement se baser sur celui du marché. Elle affirme, en outre, que dans les transactions en cause, les prix appliqués (une peseta espagnole) étaient parfaitement raisonnables et reflétaient la valeur des chantiers navals concernés. Un investisseur du marché n'aurait pas payé plus et il n'aurait pas été indiqué, dans cette situation, d'utiliser un prix correspondant à la valeur comptable.

(43) L'Espagne soutient que, d'une manière générale, la réorganisation des activités à l'intérieur d'un même groupe n'affecte pas la situation concurrentielle de l'entreprise nouvellement créée ou de celles qui y sont intégrées. Sur ce point, l'Espagne fait référence à la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes dans ses arrêts du 27 mars 1980 dans l'affaire 61-79, Denkavit Italiana (9), du 15 mars 1994 dans l'affaire C-387-92, Banco Exterior de España (10) et du 1er décembre 1998 dans l'affaire C-200-97, Ecotrade contre Altiformi (11).

(44) À titre subsidiaire, au cas où la Commission considérerait le prix trop faible et par conséquent constitutif d'une aide à Bazán/IZAR, l'Espagne se réfère à une décision de la Commission (12) du 27 juillet 1994, dans laquelle, tout en considérant que le prix payé pour la transmission d'une usine automobile entre deux entités de la Treuhand était probablement trop faible, la Commission a estimé que cela n'entrait pas en ligne de compte étant donné qu'il s'agissait d'une transaction interne à la Treuhand.

(45) L'Espagne a également fait valoir qu'il n'existait aucun prix du marché raisonnable et que la Commission n'avait de ce fait pas pu déterminer l'aide d'État en cause, comme l'exigent le règlement (CE) n° 659-1999, la jurisprudence et la pratique de la Commission elle-même.

(46) L'Espagne a en outre fourni des informations sur la valeur comptable des chantiers navals concernés et les risques économiques calculés pour chacun d'eux. Les risques se subdivisent en trois éléments: risque économique inhérent aux contrats existants, risque économique de sous-utilisation des capacités et autres risques économiques (commerciaux, sociaux et fiscaux). L'Espagne a fait valoir que, en utilisant la valeur comptable comme élément de référence et en déduisant les risques calculés, le prix de une peseta espagnole par entreprise reflète la valeur réelle et qu'il n'existe par conséquent aucun avantage pour l'acheteur Bazán/IZAR (tableau 1).

Valeurs comptables et risques liés aux différentes transactions de juillet 2000

<emplacement tableau>

(47) En réaction aux observations du Danemark, l'Espagne a estimé que celles relatives à l'aide à Bazán sortaient du champ d'application de la présente procédure et qu'elles étaient par conséquent dénuées de pertinence. L'Espagne a nié, en outre, les allégations selon lesquelles les transactions entre AESA et la SEPI constituaient des aides, en faisant valoir qu'elles n'avaient comporté aucun flux injustifié de fonds. Enfin, l'Espagne déclare que les problèmes auxquels sont confrontés les chantiers navals danois ne sont pas dus à la concurrence des chantiers navals espagnols mais à la concurrence déloyale de la Corée.

(48) En ce qui concerne les observations reçues du Royaume-Uni, l'Espagne se déclare surprise par les allégations de subventions croisées entre la production militaire et la production civile puisque le Royaume-Uni dispose, selon elle, d'un grand nombre de chantiers navals où la production est mixte, civile et militaire. Elle nie aussi que les chantiers navals espagnols aient profité d'une quelconque mesure non autorisée par la Commission européenne.

Observations reçues à la suite de la seconde extension

(49) Après la seconde extension de la procédure, l'Espagne a présenté à la Commission les arguments suivants pour étayer son point de vue selon lequel les prêts et les apports de capitaux examinés par la Commission étaient exempts d'aides d'État.

(50) En premier lieu, l'Espagne allègue que la SEPI a agi comme un investisseur privé dans une économie de marché, qui vise à obtenir les bénéfices les plus élevés, et que la Commission n'a pas prouvé que les ressources de la SEPI proviennent de l'État ou soient imputables à ce dernier.

(51) En ce qui concerne les prêts accordés par la SEPI à Cadiz, Juliana et Manises, l'Espagne déclare que lorsque la SEPI a repris les trois entreprises le 22 décembre 1999, celles-ci avaient des dettes envers AESA de respectivement 120,8 millions d'euro (Cádiz), 47,2 millions d'euro (Juliana) et 24,1 millions d'euro (Manises). Ce qu'a fait la SEPI, c'est de reprendre à son compte les créances d'AESA. Cela ne peut pas être considéré comme une nouvelle aide aux chantiers navals. En outre, les taux d'intérêt appliqués étaient similaires au taux du marché (MIBOR plus 8 points).

(52) En ce qui concerne l'apport de capital d'un montant de 252,4 millions d'euro de la SEPI à AESA, l'Espagne déclare, premièrement, que cette opération n'a pas été réalisée le 18 juillet 2000, comme il est indiqué dans la décision d'ouverture, mais en septembre de la même année. À cette époque, AESA n'exerçait aucune activité puisqu'il avait déjà vendu ses derniers chantiers navals à Bazán. Cette contribution n'a par conséquent pu provoquer aucune distorsion de concurrence et elle était destinée à organiser la fermeture sans heurt d'AESA. L'Espagne fait référence, à cet égard, à l'arrêt de la Cour de justice du 21 mars 1991 dans l'affaire C-303-88, Eni Lanerossi (13).

(53) En ce qui concerne les apports de capitaux suspects à Astano, Cádiz, Juliana et Manises, l'Espagne indique que le rapport annuel 2000 d'IZAR fait état de pertes de 68,2 millions d'euro en rapport avec l'acquisition des quatre chantiers navals concernés. Selon l'Espagne, les chantiers navals n'ont reçu aucune aide de la SEPI avant leur cession à Bazán.

(54) L'Espagne développe en outre une longue argumentation pour réfuter la possibilité qu'une partie de l'aide autorisée en 1997 devienne incompatible au cas où la Commission déclarerait que des aides supplémentaires ont été accordées illégalement aux chantiers navals publics espagnols.

(55) En réaction aux observations des tiers, l'Espagne a indiqué qu'elle souscrivait entièrement aux déclarations d'IZAR. En ce qui concerne le problème de la production de yachts de luxe, mentionné par les deux tiers intéressés, l'Espagne soutient, premièrement, que ces bateaux ne sont pas couverts par le règlement (CE) n° 1540-98 et que, par conséquent, ces observations ne doivent pas être prises en considération. Ces yachts de luxe sont, en outre, construits par IZAR sans aucune aide d'État et la part du marché mondial détenue par IZAR dans ce segment est minime (moins de [...] %). L'Espagne nie aussi qu'une partie des prétendus investissements dans les chantiers navals de San Fernando et de Carthagène ait eu lieu.

V. APPRÉCIATION

Base juridique

(56) Aux termes de l'article 87, paragraphe 1, du traité, sont incompatibles avec le Marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Conformément à une jurisprudence constante de la Cour de justice, le critère selon lequel les échanges doivent être affectés est rempli si l'entreprise bénéficiaire exerce une activité économique donnant lieu à des échanges entre États membres.

(57) Conformément à l'article 87, paragraphe 3, point e), du traité, peuvent être considérées comme compatibles avec le Marché commun les catégories d'aides déterminées par décision du Conseil statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission. Sur cette base, le Conseil a adopté, le 29 juin 1998, le règlement (CE) n° 1540-98, en vigueur du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2003, qui était applicable à toute aide illégale accordée pendant cette période, conformément à la communication de la Commission sur la détermination des règles applicables à l'appréciation des aides d'État illégales (14).

(58) La construction navale est une activité économique qui implique des échanges entre les États membres. Les aides à la construction navale relèvent par conséquent du champ d'application de l'article 87, paragraphe 1, du traité CE.

(59) La Commission relève que, selon le règlement (CE) n° 1540-98, il convient d'entendre par "construction navale" la construction de navires de commerce autopropulsés. La Commission relève, en outre, que selon l'article 2 de ce même règlement, les aides qui sont accordées à la construction, à la réparation et à la transformation navales ne sont considérées comme compatibles avec le Marché commun que si elles respectent les dispositions dudit règlement. Ces dispositions s'appliquent non seulement aux aides accordées aux entreprises qui exercent les activités précitées, mais également aux entités apparentées.

(60) En août 1997, conformément au règlement (CE) n° 1013-97, la Commission a autorisé, à titre exceptionnel, un paquet d'aides à la restructuration en faveur des chantiers navals civils publics espagnols, afin que leur retour à la viabilité puisse être assuré pour la fin de 1998. Si l'on inclut les aides autorisées antérieurement, le paquet se chiffrait à 318 milliards de pesetas espagnoles (1,9 milliard d'euro).

(61) En donnant son accord, le Conseil a souligné le caractère unique et final du paquet d'aides. Le Gouvernement espagnol s'était engagé à ce que les chantiers navals ne reçoivent plus aucune aide à la restructuration, au sauvetage, à l'absorption des pertes ou à la privatisation. Ce caractère exceptionnel se reflète dans les conditions prévues par la décision de la Commission autorisant les aides et il a également été souligné à l'article 5, paragraphe 1, premier tiret, du règlement (CE) n° 1540-98, qui spécifie qu'aucune aucune aide au sauvetage ou à la restructuration ne peut être accordée à une entreprise qui a déjà reçu des aides de ce type en application du règlement (CE) n° 1013-97.

(62) Par conséquent, toute aide s'ajoutant à celle autorisée par la décision initiale de la Commission d'août 1997 serait incompatible avec le Marché commun, à moins qu'elle ne soit autorisée en vertu d'une autre base juridique.

(63) La Commission observe que les chantiers navals Sestao, Puerto Réal, Sevilla, Cadiz et Juliana construisaient ou réparaient des navires à cette époque et que l'activité de ces entreprises relevait, par conséquent, du champ d'application du règlement. Manises et Fene (l'ancienne Astano) peuvent être considérées comme des entités apparentées. La Commission note en outre qu'AESA et IZAR, en tant que sociétés mères ou propriétaires de plusieurs chantiers navals, relèvent du champ d'application de l'article 1er du règlement (CE) n° 1540-98. Cette appréciation est conforme à l'approche suivie par la Commission dans des décisions antérieures concernant les chantiers navals publics espagnols, notamment sa décision de 1997 autorisant les aides et celle de 1999 (15) déclarant l'aide de la SEPI à AESA incompatible.

Évaluation des aides liées aux différentes transmissions

(64) Comme il a été indiqué précédemment, la présente affaire couvre trois transmissions distinctes d'entreprises entre des sociétés de portefeuille différentes et les aides potentielles liées à ces transmissions. Aux fins de l'appréciation, les aspects pertinents de chacune des trois transmissions seront examinés. Les questions soulevées à l'ouverture de la procédure et lors des deux extensions ne peuvent par conséquent pas être traitées séparément.

1) Le rôle de la SEPI

(65) Dans les décisions d'ouverture et d'extension de la procédure, la Commission est partie du principe que la SEPI agissait au nom de l'État, ce qui signifie que son comportement dans les diverses transactions était imputable à l'État. L'Espagne a contesté cette affirmation, en alléguant que la SEPI opérait de manière autonome et que son comportement n'était par conséquent pas imputable à l'État. Selon l'Espagne, la SEPI a, en tout état de cause, agi comme un investisseur privé et les fonds qu'elle a octroyés en l'espèce ne peuvent par conséquent pas être considérés comme une aide d'État.

(66) La Commission observe que la SEPI est une société de portefeuille publique dépendant directement du ministère des Finances et qu'elle doit de ce fait être considérée comme une entreprise publique au sens de la directive 2000-52-CE de la Commission (16) modifiant la directive 80-723-CEE de la Commission (17), puisque les pouvoirs publics peuvent exercer directement ou indirectement une influence dominante sur la SEPI du fait de la propriété ou de la participation financière.

(67) La Cour de justice a précisé les conditions d'applicabilité de la notion de "ressources d'État" en déclarant que "même si les sommes correspondant à la mesure [...] ne sont pas de façon permanente en possession du Trésor public, le fait qu'elles restent constamment sous contrôle public, et donc à la disposition des autorités nationales compétentes, suffit pour qu'elles soient qualifiées de ressources d'État" [arrêt de la Cour de justice du 23 novembre 1999 dans l'affaire C-83-98, P France contre Ladbroke Racing et Commission (18)]. Cela vaut clairement pour les ressources de la SEPI.

(68) Dans son arrêt du 16 mai 2002 dans l'affaire C-482-99, Stardust Marine (19), la Cour de justice a résumé les critères d'imputabilité à l'État d'une mesure d'aide prise par une entreprise publique. Selon la Cour de justice, cette imputabilité "peut être déduite d'un ensemble d'indices résultant des circonstances de l'espèce et du contexte dans lequel cette mesure est intervenue".

(69) Des exemples d'indices cités par la Cour de justice sont l'intégration de l'entreprise dans les structures de l'administration publique, la nature de ses activités et l'exercice de celles-ci sur le marché dans des conditions normales de concurrence avec des opérateurs privés, le statut juridique de l'entreprise, celle-ci relevant du droit public ou du droit commun des sociétés, l'intensité de la tutelle exercée par les autorités publiques sur la gestion de l'entreprise ou tout autre indice indiquant, dans le cas concret, une implication des autorités publiques ou l'improbabilité d'une absence d'implication dans l'adoption d'une mesure, eu égard également à l'ampleur de celleci, à son contenu ou aux conditions qu'elle comporte.

(70) La SEPI est une entreprise dotée d'un statut juridique particulier puisque, par exemple, ses rapports annuels ne peuvent pas être consultés dans le registre public espagnol. L'entreprise est dirigée par un conseil d'administration composé, en grande partie, de secrétaires d'État et d'autres personnes directement attachées au gouvernement. Ses activités englobent la privatisation d'entreprises publiques, activité étroitement liée aux politiques publiques. En outre, la SEPI a pris dans le passé, à l'égard des chantiers navals, des mesures qui peuvent être considérées comme imputables à l'État, telles que l'octroi d'une partie des aides à la restructuration autorisées en 1997 et d'aides illégales en 1998 (20). On peut aussi noter que la SEPI octroie des aides à d'autres secteurs, notamment à l'industrie houillère (21).

(71) Il ressort des considérants 66 et 67 que les fonds de la SEPI sont des ressources d'État. En outre, il est expliqué aux considérants 68 à 70 que l'octroi de fonds à des entreprises de construction navale doit être considéré comme imputable à l'État dans la mesure où ces fonds sont accordés à des conditions non conformes aux principes d'une économie de marché.

(72) Le principe général applicable aux transactions financières entre l'État et les entreprises publiques est le principe dit de l'investisseur en économie de marché. Puisque les fonds de la SEPI sont des ressources d'État, il est essentiel que la SEPI, dans les transactions économiques avec ses filiales de construction navale (qu'il s'agisse d'entreprises ayant des activités économiques ou de sociétés de portefeuille qui comprennent de telles entreprises), agisse d'une manière pleinement conforme au principe de l'investisseur en économie de marché.

(73) Le principe de l'investisseur en économie de marché est expliqué en détail dans la communication de la Commission aux États membres sur l'application des articles 92 et 93 du traité CE et de l'article 5 de la directive 80-723-CEE de la Commission (22) aux entreprises publiques du secteur manufacturier. La Cour de justice a aussi déclaré, par exemple dans son arrêt du 10 juillet 1986 dans l'affaire C-40-85, Belgique contre Commission [Boch (23)], qu'il est pertinent, pour établir si une mesure constitue une aide d'État, d'appliquer le critère basé sur les possibilités pour l'entreprise d'obtenir les sommes en cause aux mêmes conditions sur les marchés privés des capitaux et, en particulier, d'apprécier si, dans des circonstances similaires, un associé privé, se basant sur les possibilités de rentabilité prévisibles, abstraction faite de toute considération de caractère social ou de politique régionale ou sectorielle, aurait procédé à l'apport en capital concerné.

(74) La Commission n'exclut pas que les fonds fournis par la SEPI puissent être exempts d'aides, pour autant que la SEPI se soit conformée au principe de l'investisseur en économie de marché. Par conséquent pour chaque transaction examinée, la Commission évaluera si la SEPI a agi selon le principe de l'investisseur en économie de marché.

(75) L'Espagne soutient en outre que les transactions réalisées à l'intérieur du groupe SEPI ne doivent pas correspondre aux conditions du marché et fait référence à des cas où la Commission n'a pas exigé que les transactions internes au groupe soient réalisées aux conditions du marché.

(76) La Commission considère que bien que l'on puisse, dans certains cas très spécifiques, admettre que des entreprises soient transmises à des conditions non commerciales à l'intérieur d'un groupe public, cela n'est pas acceptable lorsque des ressources d'État sont transférées à des entreprises qui sont en concurrence avec d'autres entreprises dans le Marché commun.

2) Aides contenues dans les transactions portant sur la transmission 1 entre AESA et la SEPI

(77) Le 28 décembre 1999, la SEPI a acheté les trois entreprises Juliana, Cádiz et Manises à AESA. Il convient d'évaluer deux éléments pour établir l'existence d'éléments d'aide d'État dans cette transmission. L'une des questions qui se posent est de savoir si le prix d'achat payé par la SEPI à AESA est un prix de marché et l'autre si les prêts de la SEPI aux entreprises qu'elle a achetées ont été consentis dans le respect du principe de l'investisseur en économie de marché.

a) Prix d'achat

(78) Il convient de noter, en premier lieu, que l'Espagne a informé la Commission que le prix payé pour les trois entreprises s'est élevé à 15,302 millions d'euro et non à 60 millions, comme cela avait été indiqué dans la décision d'ouverture. L'Espagne avait d'abord affirmé que le montant de 15,302 millions d'euro payé par la SEPI pour les trois entreprises correspondait à la valeur comptable au moment de la transaction, mais à un stade avancé de l'enquête, elle a indiqué qu'il s'agissait de la valeur comptable à une date antérieure, non spécifiée, mais en 1999.

(79) L'Espagne allègue en outre que la SEPI ne devait pas payer le prix du marché puisqu'elle a acheté les trois chantiers navals pour les privatiser. Toutefois, la classification d'une mesure comme aide d'État ne dépend pas de son objectif mais de son effet. Le fait que les chantiers navals ont été achetés à une fin présumée (privatisation) n'est donc pas une raison d'écarter le caractère d'aide d'État de la transaction. En outre, compte tenu du fait que la SEPI est une société de portefeuille publique, il convient de rappeler que les transactions financières entre la SEPI et des entreprises qui livrent concurrence sur le Marché commun devraient toujours se baser sur les principes du marché. Par conséquent, si la SEPI a payé pour une entreprise un prix supérieur à celui du marché, on se trouve en présence d'une aide d'État au vendeur, en l'occurrence AESA.

(80) La Commission observe que la SEPI n'a pas réussi à privatiser les trois entreprises. Celles-ci ont, au contraire, été vendues à Bazán, filiale de la SEPI, en juillet 2000, c'est-à-dire sept mois après la transaction, pour une peseta espagnole chacune.

(81) Les rapports annuels des entreprises concernées montrent que la valeur comptable des trois entreprises à la fin de 1999, trois jours après la transaction, s'élevait au total à un montant négatif de - 40,646 millions d'euro (Cádiz: - 13,745 millions d'euro; Juliana: - 18,679 millions d'euro; Manises: - 8,222 millions d'euro).

(82) En outre, comme il a été expliqué précédemment, l'Espagne a estimé la valeur de marché de ces trois entreprises en juillet 2000, au moment de leur transmission à Bazán. L'Espagne soutient que, à ce moment, la valeur de marché était la valeur comptable diminuée des risques calculés non inclus dans le bilan des entreprises. Ces risques comprenaient, par exemple, des pertes encourues sur des navires en construction et les coûts résultant d'un taux d'activité inférieur à la normale. Même si ces facteurs peuvent évoluer avec le temps, on peut raisonnablement supposer qu'ils n'ont pas changé de manière sensible pendant une période de sept mois. Pour les trois entreprises considérées, l'Espagne a calculé que les risques totaux s'élevaient à 25,3 millions d'euro en juillet 2000.

(83) Cela amène la Commission à la conclusion que, le 28 décembre 1999, la SEPI a payé 15,302 millions d'euro pour trois entreprises qui avaient une valeur comptable négative de - 40,646 millions d'euro trois jours plus tard, plus des risques qui ont été calculés sept mois plus tard à 25,3 millions d'euro. On peut, par conséquent, considérer que la SEPI a payé plus que le prix du marché pour les entreprises. Tout montant s'ajoutant au prix du marché doit être considéré comme une aide d'État au vendeur, AESA.

(84) Dans la demande de renseignements de juillet 2002, la Commission a demandé copie de tous les documents qui pourraient clarifier l'évaluation des entreprises au moment de la transmission de propriété. L'Espagne n'ayant pas fourni d'informations sur cette transaction, la Commission ne peut calculer la valeur du marché qu'en se basant sur les informations disponibles.

(85) La valeur du marché correspondrait, en l'occurrence, à la valeur comptable diminuée des risques financiers.Faute d'informations, la Commission n'est pas en mesure de calculer la valeur précise des risques financiers. Pour exclure une surestimation de ces risques, elle adopte par conséquent une approche prudente et suppose que les risques financiers sont nuls. Dans les circonstances actuelles, une estimation prudente de la valeur du marché consisterait par conséquent à utiliser la meilleure approximation de la valeur comptable.

(86) La meilleure évaluation disponible de la valeur comptable à la date de la transaction, c'est-à-dire le 28 décembre 1999, est la valeur comptable au 31 décembre 1999, qui est une valeur négative de - 40,646 millions d'euro. Sur cette base, la valeur du marché des trois entreprises ne dépasserait pas ce montant.

(87) Sur la base des informations disponibles, on peut par conséquent conclure qu'AESA a vendu à la SEPI, pour 15,302 millions d'euro, trois entreprises dont la valeur était, tout au plus, de - 40,646 millions d'euro, ce qui implique un bénéfice pour AESA d'au moins 55,948 millions d'euro.

(88) En conclusion, on ne peut considérer que le paiement par la SEPI de 15,302 millions d'euro pour les trois entreprises, Cádiz, Juliana et Manises, est conforme au principe de l'investisseur en économie de marché. Il convient, par conséquent, de considérer le gain de 55,948 millions d'euro réalisé par AESA comme une aide d'État. Après la vente, AESA possédait encore trois autres chantiers navals spécialisés dans la construction de navires civils. Cette aide d'État est illégale puisqu'elle n'a pas été notifiée à la Commission et elle n'est pas compatible avec le marché étant donné qu'elle ne peut être autorisée comme aide à la restructuration ni comme aucun autre type d'aide.

(89) On peut lire dans les rapports annuels de 1998 et 1999 d'AESA et des entreprises qu'elle possédait que les entreprises dépendaient, pour la poursuite de toutes leurs activités, de l'aide financière de leurs actionnaires respectifs, à savoir la SEPI pour AESA et AESA pour les chantiers navals. La Commission en conclut que l'aide fournie par la SEPI à AESA dans le cadre de cette transaction a été transférée aux trois entreprises dont AESA était encore propriétaire (Sestao, Sevilla et Puerto Real). Dans la décision de la Commission concernant l'aide d'État illégale accordée par la SEPI à AESA en 1998 (24), confirmée ultérieurement par la Cour de justice dans son arrêt du 21 mars 2002 dans l'affaire C-36-00, Espagne contre Commission (25), la Commission était déjà arrivée à la conclusion que l'aide d'État accordée à AESA constituait une aide d'État à ses activités de construction navale.

b) Prêts de la SEPI à trois chantiers navals en décembre 1999

(90) Dans sa seconde décision d'extension, la Commission a observé que la SEPI avait accordé aux trois entreprises - Juliana, Cádiz et Manises - des prêts de 194,4 millions d'euro pendant l'année 1999. La Commission n'excluait pas qu'il puisse s'agir d'aides d'État à ces entreprises.

(91) Sur le plan factuel, la situation était la suivante. Ces trois chantiers navals (Juliana, Cádiz et Manises) avaient accumulé des dettes de 192,1 millions d'euro envers AESA. Quand la SEPI a repris les trois entreprises, elle leur a aussi fourni une "avance" de 192,1 millions d'euro (Cádiz: 120,8 millions; Juliana: 47,2 millions; Manises: 24,1 millions), qui a servi à rembourser les prêts à AESA. Ces prêts ont été accordés à un taux d'intérêt égal au MIBOR majoré de 8 points. La SEPI a, à son tour, repris la créance de 192,1 millions d'euro d'AESA. La différence entre ces 192,1 millions d'euro et les 194,4 millions d'euro mentionnés dans la seconde décision d'extension (2,1 millions d'euro) est due à des petits prêts accordés antérieurement par la SEPI aux chantiers navals.

(92) Du point de vue des aides d'État, l'appréciation doit se focaliser sur la transaction par laquelle des ressources d'État ont été transférées de l'État aux bénéficiaires, c'est-à-dire, pour le prêt de 192,1 millions d'euro, de la SEPI aux trois entreprises, Juliana, Cádiz et Manises. La différence de 2,1 millions d'euro entre ce montant et les 194,4 millions d'euro mentionnés dans la seconde décision d'extension sera supposée ne pas constituer une aide d'État puisque les circonstances de l'octroi de ce montant n'ont pas été établies.

(93) L'élément qui doit être évalué est, comme la Cour de justice l'a établi dans l'affaire 40-85 (Boch), la question de savoir si, dans des circonstances similaires, un associé privé, se basant sur les perspectives de rentabilité, abstraction faite de toute considération de caractère social ou de politique régionale ou sectorielle, aurait procédé à l'apport en capital concerné. Par conséquent, la question qui se pose est celle de savoir si un investisseur privé, même s'il prenait la décision au niveau d'un groupe dans son ensemble, escompterait dans une économie de marché normale une rentabilité acceptable pour le capital investi. La Cour de justice, dans ses arrêts du 29 avril 1999 dans l'affaire C-342-96, Espagne contre Commission (26), et du 29 juin 1999 dans l'affaire C-256-97, DMT (27), a également affirmé qu'il était pertinent, pour établir si un prêt constitue une aide d'État, d'appliquer le critère consistant à déterminer dans quelle mesure l'entreprise pourrait obtenir les sommes nécessaires sur les marchés privés des capitaux, critère dit "de l'investisseur privé".

(94) Les rapports annuels de Juliana, Cádiz et Manises montrent clairement que ces trois entreprises étaient en difficulté. Chacune d'elles avait une valeur comptable négative à la fin de 1998 et a enregistré des pertes en 1999. Le commissaire aux comptes a également déclaré dans les comptes annuels, aussi bien de 1998 que de 1999, que les entreprises avaient besoin du soutien de leurs actionnaires pour pouvoir rester en activité. En outre, il n'y avait aucun indice laissant présager une amélioration de la situation financière difficile des chantiers navals.

(95) Ces raisons permettent d'affirmer que les trois entreprises n'auraient pas été en mesure d'obtenir les prêts sur les marchés des capitaux privés, ce qui signifie que ces prêts ne satisfont pas au critère de l'investisseur privé. Pour les mêmes raisons, la SEPI ne pouvait pas s'attendre à ce que les prêts soient remboursés et les intérêts payés. Par conséquent, l'octroi de ces ressources par la SEPI aux chantiers navals n'était pas conforme au principe de l'investisseur privé et les prêts constituent une aide d'État en faveur des trois entreprises. Cette aide d'État est illégale car elle n'a pas été notifiée à la Commission et elle est incompatible avec le Marché commun puisqu'elle ne peut pas être autorisée comme aide à la restructuration ni comme aucun autre type d'aide.

(96) Selon l'Espagne, les prêts de 192,1 millions d'euro ont été remboursés, intérêts inclus, à la SEPI le 12 septembre 2000 par IZAR, qui, à cette époque, avait repris Juliana, Cádiz et Manises et avait dissous ces entreprises. Cette aide illégale a par conséquent été remboursée. Toutefois, la Commission se propose d'utiliser cette information dans une autre affaire d'aide d'État, C-38-03, qui a pour objet de déterminer dans quelle mesure les apports de capitaux de la SEPI à IZAR ont profité à la construction navale civile.

3) Élément d'aide contenu dans les transactions liées à la transmission 2 entre AESA et IZAR

(97) Le 20 juillet 2000, AESA a vendu à Bazán les trois chantiers navals qui lui restaient: Puerto Real, Sestao et Sevilla (28).

(98) Pour établir l'existence d'une aide d'État, il convient d'examiner deux questions, qui ont été soulevées dans les décisions d'étendre la procédure. La première est celle de savoir si le prix d'achat payé par IZAR à AESA était celui du marché et la seconde celle de savoir si la contribution de 252,425 millions d'euro de la SEPI à AESA était conforme au principe de l'investisseur privé.

a) Apport de capitaux

(99) Le 18 juillet 2000, la SEPI a décidé de procéder à une injection de capitaux dans AESA à hauteur de 252,425 millions d'euro, deux jours avant qu'AESA ne vende ses chantiers navals (Sestao, Sevilla et Puerto Real) à Bazán. Ce montant a été déboursé en septembre 2000. L'Espagne affirme que puisque l'apport n'a été réalisé qu'en septembre 2000, quand AESA avait déjà vendu ses chantiers navals, il ne pouvait pas fausser la concurrence dans la construction navale.

(100) Selon le rapport annuel d'AESA pour l'exercice 2000, celle-ci est intervenue financièrement à hauteur de 309 millions d'euro en faveur de ses trois chantiers navals avant qu'ils ne soient vendus à Bazán/IZAR. Les rapports annuels de ces chantiers navals révèlent que ce montant a été fourni sous forme de remises de dette. L'Espagne a confirmé qu'AESA avait "ajusté" les dettes des chantiers navals en vue de leur vente à Bazán "pour mieux refléter la valeur des chantiers", mais n'a fourni aucun chiffre.

(101) Après la remise de dettes, AESA a vendu les entreprises pour une peseta espagnole chacune à Bazán. La transaction a occasionné une perte comptable de 198 millions d'euro à AESA. Avec d'autres pertes liées à des activités de construction navale, cela a porté le montant total des pertes d'AESA en 2000 à 271 millions d'euro. Sans l'apport de capitaux de la SEPI, AESA aurait eu un capital propre négatif de 259 millions d'euro à la fin de 2000 et aurait dû être liquidée conformément au droit des sociétés.

(102) La question qui doit être examinée est, comme il est indiqué plus haut, celle de savoir si, dans des circonstances similaires, un actionnaire privé aurait injecté les fonds et aurait pu attendre un taux acceptable de rendement du capital investi.

(103) En premier lieu, il est évident qu'AESA ne pouvait pas tirer de rendement acceptable du capital puisqu'elle a utilisé les fonds pour couvrir des coûts liés à l'annulation de dettes de ses chantiers navals et à la perte qui est résultée, par la suite, de la vente desdits chantiers à Bazán. En outre, comme AESA est une société holding qui n'exerce aucun autre type d'activités, elle n'est pas en mesure de produire elle-même des bénéfices. On peut aussi exclure que les bénéficiaires ultimes des mesures, les chantiers navals, sous la propriété de Bazán/IZAR, produisent un rendement acceptable étant donné leurs derniers résultats et l'absence de mesures de restructuration. Cela ressort également des rapports annuels d'IZAR, qui indiquent que ses chantiers navals civils ont subi des pertes en 2000, 2001 et 2002.

(104) On peut donc considérer que l'apport de capitaux de la SEPI à AESA n'a pas respecté le principe de l'investisseur de marché et constitue une aide d'État.

(105) Il convient de souligner, à cet égard, qu'en annulant les dettes de ses chantiers navals à concurrence de 309 millions d'euro, AESA a amélioré leur situation financière d'un montant équivalent. On peut aussi établir que, comme l'annulation de la dette par AESA n'a impliqué aucun paiement en espèces, la décision de la SEPI du 18 juillet 2000 d'injecter 252,425 millions d'euro dans AESA, bien que le montant n'ait pas été déboursé avant septembre 2000, a permis à AESA d'annuler immédiatement les dettes sans devoir être déclarée en faillite.

(106) Du point de vue des aides d'État, l'aide a été accordée par la décision d'injecter du capital prise par la SEPI le 18 juillet 2000, puisque cette décision était la condition nécessaire pour qu'AESA puisse annuler les dettes des chantiers navals. Les bénéficiaires ultimes de cette aide sont les chantiers navals, puisque l'opération a eu pour effet d'exonérer les chantiers navals de leurs dettes envers AESA.

(107) L'annulation de la dette par AESA a amélioré de 309 millions d'euro la situation financière des chantiers navals concernés. Toutefois, la Commission n'apprécie que l'apport de fonds de la SEPI qui, dans cette transaction, s'élève à 252,425 millions d'euro. Cette aide d'État est illégale car elle n'a pas été notifiée à la Commission et elle est incompatible avec le Marché commun puisqu'elle ne peut pas être autorisée comme aide à la restructuration ni comme aucun autre type d'aide.

(108) Bien que l'on puisse conclure que le principe de l'investisseur en économie de marché n'a pas été respecté, l'Espagne invoque aussi le droit de procéder à un apport de capitaux pour garantir une cessation d'activité dans les meilleures conditions, au sens de l'arrêt Lanerossi (29). La Commission considère que l'argument de l'Espagne n'est pas recevable pour les raisons exposées ci-dessous.

(109) En premier lieu, l'arrêt Lanerossi n'est pas pertinent en l'espèce puisque les trois chantiers navals qui profitent de l'apport de capitaux grâce à la remise de dettes sont encore en activité et leur fermeture n'était absolument pas prévue quand l'aide a été fournie.

(110) En outre, même si l'on considère l'argument de l'Espagne dans l'optique d'une éventuelle cessation d'activité d'AESA, plutôt que de ses trois derniers chantiers navals, on peut observer que la procédure de cessation d'activité d'AESA n'a commencé que vers le milieu de l'année 2002. En outre, la Cour de justice a affirmé dans son arrêt Lanerossi que quand les apports de capitaux font abstraction de toute perspective de rentabilité, même à long terme, ils doivent être considérés comme des aides. Tel est le cas en l'espèce, puisqu'il est exclu que la SEPI perçoive jamais une rémunération du capital qu'elle a apporté aux entreprises de construction navale civile par l'intermédiaire d'AESA. Enfin, il convient d'indiquer que les coûts de fermeture d'AESA consistent, selon l'Espagne, en coûts sociaux liés à la restructuration des chantiers navals civils qui s'est produite entre 1994 et 1998. Tout aide supplémentaire destinée à couvrir ces coûts serait contraire à la décision de la Commission de 1997 par laquelle l'aide à la restructuration a été autorisée.

b) Prix d'achat

(111) La question de savoir si le prix d'achat a constitué une aide d'État à IZAR a été soulevée dans la première décision d'extension de la procédure du 28 novembre 2001. La raison pour laquelle une aide d'État a pu être fournie de cette manière est qu'après avoir vendu ses chantiers navals à Bazán, AESA n'était plus qu'une coquille vide, qui n'exerçait quasiment aucune activité. Il pouvait dès lors être tentant, pour les autorités espagnoles, de faire en sorte que le maximum d'actifs soit transféré d'AESA à ses chantiers navals et donc à l'entreprise qui reprendrait les chantiers navals civils, Bazán. Il semble également évident que la probabilité que la valeur de marché de chacune de ces trois entreprises soit exactement la même, une peseta espagnole, est très petite.

(112) Pendant la procédure, l'Espagne a fourni des renseignements selon lesquels la valeur comptable des entreprises était respectivement de 91,1 millions d'euro (Sestao), 37,8 millions d'euro (Sevilla) et 68,8 millions d'euro (Puerto Real), soit au total 197,7 millions d'euro. En outre, selon les informations communiquées par l'Espagne, la valeur de marché des trois chantiers navals était respectivement de [...] euro, [...] euro et [...] euro, soit au total [...] euro.

(113) Comme il été indiqué précédemment, le montant d'une peseta espagnole par chantier naval ne correspondait manifestement pas au prix du marché et impliquait, en théorie, un bénéfice net pour Bazán/IZAR de [...] euro si l'estimation espagnole de la valeur du marché est correcte.

(114) Toutefois, comme il n'a pas été établi que ce bénéfice imputable à Bazán/IZAR était directement constitué de ressources de la SEPI ou de l'État, la Commission ne considère pas que le prix d'une peseta espagnole par chantier naval puisse être utilisé pour établir l'existence d'une aide d'État en faveur de l'acheteur, Bazán/IZAR.

4) Aide contenue dans les transactions relatives à la transmission 3, entre la SEPI et Bazán

(115) Les quatre entreprises (Astano, Cádiz, Juliana et Manises) ont été vendues par la SEPI à Bazán, le 20 juillet 2000, pour une peseta espagnole chacune. Dans la première décision d'extension, la Commission a mis en doute que cela corresponde au prix du marché et estimé qu'une aide d'État pouvait par conséquent avoir été accordée à Bazán/IZAR. Dans la seconde décision d'extension, la Commission a noté que ces entreprises avaient une valeur comptable totale négative d'un montant de - 68,2 millions d'euro. Comme elle n'avait pas pu établir si cette somme avait été reprise comme perte dans le rapport annuel de Bazán/IZAR, la Commission se demandait si la SEPI avait injecté ce montant dans les quatre entreprises dans le contexte de leur transmission à Bazán.

(116) En ce qui concerne les valeurs comptables, l'Espagne a informé la Commission que les entreprises transmises avaient une valeur comptable totale négative d'un montant de - 68,2 millions d'euro au moment de la transaction. Il apparaît cependant que ce montant a en fait été consigné comme perte dans le rapport annuel de Bazán/IZAR pour l'exercice 2000, contrairement à l'hypothèse retenue dans la seconde décision d'extension (30).

(117) En ce qui concerne le prix, l'Espagne a fourni des informations crédibles indiquant que la valeur de marché de chacune des quatre entreprises était négative. On peut, par conséquent, considérer que le prix n'était pas trop faible et qu'il ne constituait donc pas une aide d'État à Bazán/IZAR.

Récupération de l'aide à la restructuration accordée et autorisée en 1997

(118) Puisque les doutes concernant l'octroi de nouvelles aides d'État illégales aux chantiers navals publics ont été confirmés, la Commission doit évaluer, comme cela a été indiqué dans la seconde décision d'extension, si une partie de l'aide à la restructuration accordée en 1997 doit être considérée comme incompatible et récupérée.

(119) La Commission considère, à cet égard, que, compte tenu des observations présentées par l'Espagne et IZAR dans le cadre de la présente procédure, il n'y a pas lieu de considérer une partie de l'aide à la restructuration autorisée en 1997 comme incompatible. La raison en est que, conformément à la décision d'autorisation (31), le droit de la Commission d'exiger la récupération de l'aide autorisée en 1997 s'est éteint avec le dernier rapport de contrôle en date du 13 octobre 1999 (32). L'aide autorisée en 1997 s'est par conséquent transformée en aide existante après l'expiration de la période de contrôle.

Récupération de l'aide après le changement de propriété

(120) Les chantiers navals qui ont bénéficié de l'aide illégale dont l'existence a été établie appartiennent maintenant à IZAR et cette aide illégale devrait par conséquent être remboursée par IZAR. Le transfert de propriété des chantiers navals, d'AESA ou de SEPI à IZAR, n'implique pas que le remboursement de l'aide puisse incomber à l'ancien propriétaire des entreprises concernées. La raison en est que les entreprises n'ont pas été transmises à IZAR aux conditions du marché et dans le cadre d'une procédure d'adjudication ouverte et transparente, mais sous la forme d'une réorganisation de sociétés à l'intérieur d'un même groupe, SEPI, en utilisant un prix symbolique. La Cour de justice a considéré dans deux arrêts récents [affaires C-390-98, H.J. Banks (33), point 77, et C-277-00, Allemagne contre Commission (34), point 80] que dans la mesure où les sociétés en cause ont été rachetées dans des conditions de concurrence non discriminatoires et au prix du marché, c'est-à-dire au prix le plus élevé qu'un investisseur privé agissant dans des conditions normales de concurrence était prêt à payer pour ces sociétés dans la situation où elles se trouvaient, notamment après avoir bénéficié d'aides d'État, l'élément d'aide a été évalué au prix du marché et inclus dans le prix d'achat. Dans de telles conditions, les adjudicataires ne sauraient être considérés comme ayant bénéficié d'un avantage par rapport aux autres opérateurs sur le marché. Il ne peut donc leur être demandé de rembourser l'élément d'aide considéré. Il ressort clairement de la description des faits que ces conditions ne sont pas remplies en l'espèce. En outre, dans les affaires conjointes C-328-99 et C-399-00 Italie et SIM 2 Multimedia SpA contre Commission (35), point 38, la Cour de justice a souligné que la vente d'actions d'une société bénéficiaire d'une aide illégale par un actionnaire à un tiers n'a pas d'influence sur l'obligation de récupération. Dans la présente affaire, Bazán/IZAR, propriété du groupe public SEPI, a acheté des actions d'entreprises qui faisaient aussi partie du groupe SEPI et leur a retiré la personnalité juridique. En tant que successeur de chantiers navals qui étaient auparavant indépendants du point de vue juridique (sous la forme de sociétés anonymes), IZAR est maintenant le bénéficiaire et il doit récupérer les aides accordées à ces chantiers navals.

Article 296

(121) Au cas où l'apport de capitaux aux chantiers navals serait considéré comme une aide à Bazán, l'Espagne soutient que cette aide serait conforme à l'article 296 et, par conséquent, sortirait du champ d'application des règles sur les aides d'État, puisque Bazán était une entreprise militaire au moment de l'acquisition des chantiers navals.

(122) L'article 296, paragraphe 1, point b), dispose que: "tout État membre peut prendre les mesures qu'il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d'armes, de munitions et de matériel de guerre; ces mesures ne doivent pas altérer les conditions de la concurrence dans le Marché commun en ce qui concerne les produits non destinés à des fins spécifiquement militaires. " Dans sa décision (36) relative aux aides à la restructuration en faveur de KSG, la Commission avait déjà exprimé le point de vue suivant: "En revanche, si une mesure relevant de la définition d'aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, influe sur la production militaire, civile ou à usage mixte, elle ne saurait se justifier intégralement sur la base de l'article 296. La Commission ne partage pas le point de vue des autorités néerlandaises et espagnoles lorsqu'elles affirment que, vu les aspects militaires de l'aide en question, celle-ci tombe intégralement sous le coup de l'article 296, quand bien même elle aurait eu un effet manifeste sur la concurrence dans des secteurs non militaires. Pareille interprétation va clairement à l'encontre de la lettre de l'article précité".

(123) Toujours selon cette décision, "Il est donc clair que les mesures ont effectivement altéré les conditions de la concurrence en ce qui concerne les produits civils. En conséquence, la Commission doit, conformément à sa politique constante, contrôler si les aides en question sont conformes aux règles en vigueur en matière d'aides d'État, dans la mesure où elles faussent ou risquent de fausser la concurrence sur certains marchés pour des produits qui ne relèvent pas de l'article 296".

(124) La Commission observe que Bazán, qui opère maintenant sous le nom d'IZAR, exerce actuellement des activités de construction navale militaire et civile. L'aide accordée aux chantiers navals achetés par Bazán était directement et exclusivement liée à la production de navires civils. Compte tenu des conclusions auxquelles elle est parvenue dans la présente affaire et de la décision concernant KSG, la Commission observe en outre que la production de navires civils relève du champ d'application de l'article 87 du traité et ne peut pas être exemptée en vertu de l'article 296 au seul motif que l'entreprise qui a acheté les chantiers navals, Bazán, se consacrait exclusivement à la production militaire au moment de l'acquisition.

(125) La décision d'ouverture de la procédure dans l'affaire C-38-03 énonce, aux points 44 et suivants, plusieurs critères d'applicabilité de l'article 296 du traité. Bien que ces critères soient bien connus des autorités espagnoles, elles n'ont présenté à la Commission aucune preuve attestant que les mesures décrites ci-dessus étaient destinées à promouvoir la production d'équipements militaires.

(126) On ne peut valablement contester que les chantiers navals civils aient eu besoin d'énormes injections de capitaux pour survivre. Le simple fait qu'ils ont été vendus à une entreprise de construction navale qui exerce aussi des activités de construction navale militaire n'altère pas la nature des chantiers. Ainsi, leur appartenance à une entreprise qui exerce aussi des activités de construction navale militaire ne leur confère pas un caractère militaire. En outre, il ne saurait être contraire aux intérêts essentiels de l'Espagne de fournir des informations sur ces chantiers navals. Dans la présente affaire, non seulement l'Espagne n'a donné aucune explication crédible sur la manière dont les intérêts essentiels de sa sécurité pourraient être affectés, mais elle a refusé de fournir toute information de quelque importance.

VI. CONCLUSION

La Commission constate que l'Espagne a illégalement mis à exécution, en violation de l'article 88, paragraphe 3, du traité, une aide d'un montant de 500,473 millions d'euro accordée sous les formes suivantes:

1) achat par la SEPI à AESA des entreprises Cádiz, Juliana et Manises, le 28 décembre 1999, à un prix supérieur de 55,948 millions d'euro au prix du marché, ce qui a profité, en définitive, aux autres chantiers navals dont AESA conservait la propriété, Sestao, Sevilla et Puerto Real;

2) prêts de 192,1 millions d'euro de la SEPI à trois entreprises en difficulté, Cádiz, Juliana et Manises, le "28 décembre 1999";

3) apport de capitaux à hauteur de 252,425 millions d'euro de la SEPI à AESA en septembre 2000, ce qui a profité, en définitive, aux entreprises Sestao, Sevilla et Puerto Real.

L'aide n'est pas compatible avec le Marché commun, puisqu'elle ne peut pas être autorisée comme aide à la restructuration ni comme aucun autre type d'aide. L'aide doit être remboursée dans sa totalité par le propriétaire actuel de ces chantiers navals, IZAR, qui a repris les entreprises d'AESA-SEPI.

Les prêts mentionnés au point 2), qui s'élèvent à 192,1 millions d'euro, ont été remboursés en septembre 2000, intérêts compris, par IZAR à la SEPI. On peut, par conséquent, considérer que l'aide illégale et incompatible a été récupérée à concurrence de ce montant,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

L'aide d'État mise à exécution par l'Espagne en faveur des chantiers navals publics espagnols, actuellement sous la propriété d'IZAR, pour un montant de 500,473 millions d'euro, est incompatible avec le Marché commun.

Article 2

1. L'Espagne prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer auprès de ses bénéficiaires l'aide visée à l'article 1er et déjà illégalement mise à leur disposition, à l'exception des 192,1 millions d'euro déjà récupérés.

2. La récupération a lieu sans délai conformément aux procédures du droit national, pour autant qu'elles permettent l'exécution immédiate et effective de la présente décision. Les aides à récupérer incluent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition des bénéficiaires, jusqu'à la date de leur récupération. Les intérêts sont calculés sur la base du taux de référence utilisé pour le calcul de l'équivalent-subvention dans le cadre des aides à finalité régionale.

3. Le taux d'intérêt visé au paragraphe 2 est appliqué sur une base composée pendant toute la période visée audit paragraphe.

Article 3

L'Espagne informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la date de la notification de la présente décision, des mesures qu'elle prévoit de prendre et de celles qu'elle a déjà prises pour s'y conformer. Elle utilise à cet effet le formulaire qui figure à l'annexe de la présente décision.

Article 4

Le Royaume d'Espagne est destinataire de la présente décision.

ANNEXE

Informations concernant l'exécution de la décision de la Commission 2005-173-CE

1. Calcul du montant à récupérer

1.1. Veuillez fournir les renseignements suivants sur les montants d'aide d'État illégale mis à la disposition du bénéficiaire:

Date (1)

[...]

Montant d'aide (2) [...]

Monnaie [...]

(1) Date à laquelle les tranches d'aide ont été mises à la disposition du bénéficiaire.

(2) Montant d'aide mis à la disposition du bénéficiaire (en équivalent-subvention brut).

Observations:

1.2. Veuillez expliquer en détail le mode de calcul des intérêts applicables à l'aide à récupérer.

2. Mesures prévues et déjà prises pour récupérer l'aide

2.1. Veuillez décrire en détail les mesures prévues et déjà prises pour procéder à la récupération immédiate et effective de l'aide. Veuillez spécifier, le cas échéant, la base juridique desdites mesures.

2.2. Veuillez indiquer le calendrier de la procédure de récupération. Pour quelle date la récupération sera-t-elle achevée?

3. Récupération déjà exécutée

3.1. Veuillez indiquer les montants d'aide récupérés auprès du bénéficiaire:

Date (1) [...]

Montant d'aide remboursé [...]

Monnaie [...]

(1) Date de remboursement de l'aide.

3.2. Veuillez joindre la preuve du remboursement des montants d'aide spécifiés au tableau du point 3.1.

Notes:

(1) JO L 202 du 18.7.1998, p. 1.

(2) JO L 148 du 6.6.1997, p. 1.

(3) JO C 328 du 18.11.2000, p. 16, JO C 21 du 24.1.2002, p. 17 et JO C 199 du 23.8.2003, p. 9.

(4) JO C 354 du 21.11.1997, p. 2.

(5) JO L 83 du 27.3.1999, p. 1.

(6) JO C 21 du 24.1.2004, p. 41. Affaire T-381-03.

(7) Les montants en euros cités dans la présente décision sont généralement des chiffres arrondis calculés à partir de pesetas espagnoles.

(8) JO C 201 du 26.8.2003, p. 3.

(9) Recueil 1980, p. 1205.

(10) Recueil 1994, p. I-877.

(11) Recueil 1998, p. I-7907.

(12) JO L 385 du 31.12.1994, p 1.

(13) Recueil 1991, p. I-1433.

(14) JO C 119 du 22.5.2002, p. 22.

(15) JO L 37 du 12.2.2000, p. 22.

(16) JO L 193 du 29.7.2000, p. 75.

(17) JO L 195 du 29.7.1980. p. 35.

(18) Recueil 2000, p. I-3271, point 50.

(19) Recueil 2002, p. I-4397, points 55 et 56.

(20) JO L 37 du 12.2.2000, p. 22.

(21) JO L 296 du 30.10.2002, p. 73.

(22) JO C 307 du 13.11.1993, p. 3.

(23) Recueil 1986, p. 2321.

(24) JO L 37 du 12.2.2000, p. 22.

(25) Recueil 2002, p. I-3243.

(26) Recueil 1999, p. I-2459. Voir, en particulier, les points 41 et 42.

(27) Recueil 1999, p. I-3913. Voir, en particulier, les points 23 et 24, ainsi que les points 334 à 336 des conclusions de l'avocat général, Me Jacobs, dans cette affaire.

(28) Elle était aussi propriétaire de plusieurs entreprises plus petites, mais son capital nominal total ne s'élevait qu'à 161 millions de pesetas espagnoles (un peu moins d'un million d'euro), contre 9,5 milliards de pesetas espagnoles (57,1 millions d'euro) pour les trois chantiers navals (Puerto Real: 4 milliards, Sestao: 4 milliards, Sevilla: 1,5 milliard).

(29) Aux points 21 et 22 de l'arrêt, la Cour déclare: "Il y a lieu, dès lors, d'admettre qu'une société mère peut également, pendant une période limitée, supporter les pertes d'une de ses filiales afin de permettre la cessation d'activité de cette dernière dans les meilleures conditions. De telles décisions peuvent être motivées non seulement par la probabilité d'en tirer un profit matériel indirect, mais également par d'autres préoccupations, comme le souci de maintenir l'image de marque du groupe, ou de réorienter ses activités. Toutefois, lorsque les apports de capitaux d'un investisseur public font abstraction de toute perspective de rentabilité, même à long terme, de tels apports doivent être considérés comme des aides au sens de l'article 92 du traité, et leur compatibilité avec le Marché commun doit être appréciée au regard des seuls critères prévus par cette disposition".

(30) Cette information sera cependant utilisée dans l'autre procédure ouverte à l'encontre d'IZAR, pour déterminer si une partie des apports de capitaux effectués en faveur d'IZAR au cours de l'année 2000 a été utilisée à des fins civiles.

(31) JO C 354 du 21.11.1997, p. 2 (voir note 4 de bas de page).

(32) COM (1999) 480 final.

(33) Recueil 2001, p. I-6117.

(34) Non encore publié au Recueil.

(35) Recueil 2003, p. I-4035.

(36) JO L 14 du 21.1.2003, p. 56.