Cass. 1re civ., 2 décembre 1992, n° 91-13.463
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Legeay père et fils (Sté)
Défendeur :
Etablissements Berthelot (Sté), Fiat Geotech France (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Grégoire (faisant fonction)
Rapporteur :
Mme Gié
Avocat général :
M. Lupi
Avocats :
SCP Defrénois, Levis, Me Vincent, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : - Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société des établissements Berthelot a vendu le 9 septembre 1986 à la société Legeay père et fils une ensileuse fabriquée par la société Fiat Geotech France ; que, le 11 septembre 1987, le vendeur a procédé à la révision générale de la machine ; que, le 6 novembre suivant, celle-ci a pris feu alors qu'elle était en cours de fonctionnement ; que l'incendie n'a pu être maîtrisé, l'un des deux extincteurs fournis par les établissements Boulay Fougères incendie n'ayant pas fonctionné ; qu'après une expertise ordonnée en référé, la société Legeay père et fils a assigné la société des établissements Berthelot et les établissements Boulay Fougères incendie pour qu'ils soient déclarés responsables du sinistre ; que la société des établissements Berthelot a demandé garantie à la société Fiat Geotech France ; que l'arrêt attaqué (Rennes, 22 janvier 1991) a condamné in solidum la société des établissements Berthelot, la société Fiat Geotech France et les établissements Boulay Fougères incendie à réparer le dommage ;
Attendu que la société Fiat Geotech France fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, d'une part, qu'il appartient à l'acheteur de démontrer que la défaillance de la machine est due à un vice caché susceptible d'être couvert par la garantie légale, qu'en jugeant que sa responsabilité était engagée en sa qualité de fabricant alors que la société Legeay père et fils n'avait pu apporter aucun élément de preuve relatif à l'origine du sinistre ni contredire les déclarations de l'expert sur l'incertitude de l'origine de l'accident, la cour d'appel a violé les articles 1315 et 1641 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'une expertise n'est opposable à une partie que si celle-ci a été appelée ou représentée ; que pour écarter l'exception d'inopposabilité de l'expertise à laquelle elle n'avait été ni appelée ni représentée, la cour d'appel a affirmé ne pas tenir compte du rapport de l'expert ; qu'en fondant cependant sa décision sur des éléments de fait résultant de ce rapport, l'arrêt a violé l'article 160 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, se fondant sur des faits qui étaient dans le débat et qui ne résultaient pas des seules constatations de l'expert dont le rapport est écarté, l'arrêt constate que la machine, récente et révisée depuis peu, n'avait fonctionné que 960 heures avant l'incendie, qu'elle était bien utilisée et bien entretenue, et encore qu'une imprudence ou un sabotage n'étaient pas allégués ; que c'est sans méconnaître les règles sur la charge de la preuve, ni violer les textes visés au moyen, que la cour d'appel en a déduit, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que l'incendie révélait nécessairement l'existence d'un vice caché qui ne pouvait être qu'un vice de construction ; que le moyen ne peut donc être accueilli en aucune de ses branches ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.