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Décisions

CA Versailles, 3e ch., 3 novembre 2000, n° 98-08609

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Beau

Défendeur :

Amirat

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Guirimand

Conseillers :

Mmes Simonnot, Prager-Bouyala

Avoués :

SCP gas, SCP Keime/Guttin

Avocats :

Mes Le Gouillou, Zou

TGI Versailles, 4e ch., du 10 sept. 1998

10 septembre 1998

Exposé des faits et de la procédure :

Monsieur Thierry Beau est appelant du jugement rendu le 10 septembre 1998 par le Tribunal de grande instance de Versailles qui, sur l'assignation de Monsieur Pascal Amirat aux fins de résolution de la vente d'un véhicule pour vices cachés et paiement de diverses sommes, a:

- homologué le rapport de Monsieur Huet, expert judiciaire,

- ordonné la résolution de la vente pour vices cachés,

- ordonné la restitution à Monsieur Thierry Beau du véhicule vendu et le remboursement par celui-ci, en faveur de Monsieur Pascal Amirat, de la somme de 90 000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 1993 jusqu'à complet remboursement,

- condamné Monsieur Thierry Beau à payer à Monsieur Pascal Amirat la somme de 76 146,64 F, au titre des frais occasionnés par la vente et la somme de 20 000 F à titre de dommages-intérêts, toutes causes de préjudice confondues, et la somme de 8 000 F au titre des frais irrépétibles,

- débouté Monsieur Thierry Beau de sa demande reconventionnelle.

Monsieur Thierry Beau expose que Monsieur Pascal Amirat ne rapporte pas la preuve de l'existence de vices cachés et préexistants à l'acte d'acquisition du 27 juillet 1993, et que l'action n'a pas été engagée à bref délai.

A titre subsidiaire, il prie la cour de dire que les demandes formulées par Monsieur Amirat ne pourront qu'être accueillies à hauteur de 90 000 F, de le recevoir, en revanche, en sa demande reconventionnelle de paiement d'une indemnité d'utilisation du véhicule à hauteur de la somme de 45 000 F, d'ordonner le cas échéant la compensation, et de dire que le cours des intérêts légaux sera suspendu entre le 10 novembre 1998, date de la mise à disposition des fonds par lui versés au titre de l'exécution du jugement et ayant été déposés en Carpa à la suite d'une ordonnance du premier président saisi par ses soins aux fins de mettre un terme à l'exécution provisoire décidée en première instance, et la date à laquelle l'arrêt deviendra exécutoire.

L'appelant sollicite en outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Monsieur Pascal Amirat conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de Monsieur Thierry Beau à lui verser une somme complémentaire sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 29 juin 2000.

Discussion et motifs de la décision :

Considérant que le 27 juillet 1993, Monsieur Pascal Amirat a acquis auprès de Monsieur Thierry Beau, directeur commercial, par l'intermédiaire de la "Centrale des Particuliers", un véhicule de marque BMW 325.1 ayant 66 500 km au compteur, pour un prix de 90 000 F;

Que le véhicule, qui avait été mis en circulation en 1987, a d'abord appartenu à Monsieur Aubin, qui l'a vendu à Monsieur Rezlan en octobre 1990; qu'à cette époque, le véhicule n'avait subi aucun accident;

Qu'ensuite, Monsieur Dhuiege, agissant en qualité de mandataire de Monsieur Rezlan, a pris possession en 1991 de cette voiture pour des réparations, alors que celle-ci avait subi le 4 février 1991 un grave accident qui l'avait laissée à l'état d'épave;

Que Monsieur Beau a acheté l'automobile le 17 octobre 1991 au prix de 130 000 F et s'est vu remettre alors un certificat de contrôle technique de sécurité daté du 15 octobre 1991, établi au nom de Monsieur Rezlan;

Estimant que le fonctionnement de la voiture était défectueux, Monsieur Pascal Amirat a fait examiner celle-ci par Monsieur Gandon, expert automobile, qui a constaté le 19 octobre 1993 diverses anomalies et relevé que le carter d'huile avait déjà été démonté;

Que Monsieur Pascal Amirat a dû changer le moteur de la voiture au mois de décembre 1993, pour un prix de 26 015 F;

Que le contrôle technique du véhicule effectué le 23 avril 1994 a démontré que la suspension arrière du véhicule était insuffisante et qu'il présentait des traces de réparation;

Que le 23 juin 1994, Monsieur Pascal Amirat a obtenu en référé la désignation d'un expert, Monsieur Huet;

Que celui-ci a observé que la voiture, qui présentait 81 330 kilomètres au compteur, comportait, à l'arrière, des séquelles d'accident très importantes qui avaient fait l'objet, sur les longerons arrière, de réparations grossières, masquées par une quantité de produit "blackson" importante;

Que l'expert a fait état d'une proposition, émanant de Monsieur Beau, de prise en charge des frais de changement de moteur, mais a estimé que le véhicule n'était pas réparable ;

Considérant, en cet état, qu'il est établi par les pièces versées aux débats que, nonobstant les dénégations de Monsieur Thierry Beau, les désordres relevés par l'expert et qualifiés par celui-ci d'irréparables, constituent des vices cachés au sens de l'article 1641 du Code civil, et que l'action exercée par l'acquéreur, après un changement du moteur en décembre 1993 et un contrôle technique ayant mis en évidence le 23 avril 1994 l'état du véhicule, a été exercée à bref délai, Monsieur Amirat ayant obtenu la désignation d'un expert en référé le 23 juin 1994 et ayant ensuite assigné au fond le 13 décembre 1994;

Qu'il conviendra, dans ces conditions, de confirmer le jugement en celles de ses dispositions ordonnant la résolution de la vente, la restitution par Monsieur Pascal Amirat à Monsieur Thierry Beau du véhicule et le remboursement par ce dernier à Monsieur Pascal Amirat de la somme de 90 000 F;

Qu'en ce qui concerne les intérêts, il y aura lieu d'en faire courir le point de départ au jour de l'assignation de Monsieur Pascal Amirat, le 13 décembre 1994;

Qu'il ne convient pas de faire droit à la demande de suspension des intérêts, puisqu'à la suite de l'assignation aux fins d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire, Monsieur Beau a consigné, en application de l'article 521 du nouveau Code de procédure civile, des sommes pour garantir en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation, et qu'il n'a pas procédé à un paiement libératoire à l'égard de Monsieur Amirat;

Considérant, par ailleurs, que la preuve n'est pas rapportée du fait que Monsieur Thierry Beau ait connu les vices de la chose vendue, dès lors que celui-ci n'est pas un professionnel de l'automobile et qu'il a, dans des conditions normales, acquis le véhicule le 17 octobre 1991 au prix de 130 000 F, pour le revendre, le 27 juillet 1993, au prix de 90 000 F ;

Qu'en conséquence, par application de l'article 1646 du Code civil, il conviendra de condamner Monsieur Thierry Beau à rembourser à Monsieur Pascal Amirat, au titre des frais occasionnés par la vente pouvant être seuls pris en compte en application de ce texte, le coût du prix de la vignette 1995 (1 162 F);

Que par ailleurs, Monsieur Amirat devra payer à Monsieur Beau, pour les frais d'utilisation du véhicule, la somme de 20 000 F, et qu'il y aura lieu à compensation, à due concurrence, avec la somme due par ce dernier, pour le remboursement du prix du véhicule;

Que les dispositions du jugement en ce qui concerne les frais irrépétibles supportés par Monsieur Pascal Amirat seront confirmées, de même qu'en ce qui concerne les dépens, incluant notamment les frais d'expertise;

Qu'il conviendra de condamner Monsieur Thierry Beau, sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, à verser à Monsieur Pascal Amirat, pour les frais engagés en cause d'appel, la somme de 12 000 F;

Qu'il n'y aura pas lieu de faire droit à la demande présentée par Monsieur Beau sur le fondement de ce texte ;

Qu'il sera fait masse des dépens d'appel, qui seront supportés, pour les trois-quarts, par Monsieur Beau, et pour un quart, par Monsieur Amirat, et qui pourront être recouvrés directement par les avoués de la cause qui en ont fait la demande, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile

Par ces motifs, Statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort, Confirme le jugement en celles de ses dispositions ayant ordonné la résolution de la vente, ainsi que la restitution du véhicule à Monsieur Thierry Beau et, simultanément, le remboursement à Monsieur Pascal Amirat de la somme de 90 000 F, Confirme également le jugement en ses dispositions relatives à l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en faveur de Monsieur Pascal Amirat, et aux dépens, incluant notamment les frais d'expertise, Réformant pour le surplus, Statuant à nouveau : Condamne Monsieur Thierry Beau à verser à Monsieur Pascal Amirat la somme de 1 162 F à titre de dommages-intérêts, Dit que les intérêts au taux légal courront, pour les sommes précitées, à compter du 13 décembre 1994, jour de l'assignation, Condamne Monsieur Amirat à verser à Monsieur Beau la somme de 20 000 F à titre de dommages-intérêts, pour l'utilisation du véhicule, Dit que cette somme se compensera à due concurrence avec celle due par Monsieur Beau à Monsieur Amirat, Condamne Monsieur Thierry Beau à verser à Monsieur Pascal Amirat la somme complémentaire de 12 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, pour les frais irrépétibles engagés en cause d'appel, Déboute Monsieur Pascal Amirat et Monsieur Beau de leurs autres demandes, Dit qu'il sera fait masse des dépens d'appel, qui seront supportés, pour les trois-quarts, par Monsieur Beau, et, pour un quart, par Monsieur Amirat, et qui pourront être recouvrés directement par les avoués de la cause qui en ont fait la demande, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.