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Décisions

CA Bordeaux, 1re ch., 8 décembre 1986, n° 1249-85

BORDEAUX

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Griffe

Défendeur :

Daure (époux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roudiere

Conseillers :

MM. Espinasse, Braud

Avoués :

Mes Lacampagne, Julia

Avocats :

Mes Martaguet, Goy.

TGI Bordeaux, du 2 janv. 1985.

2 janvier 1985

Vu l'appel régulièrement formé selon déclaration en date du 13 février 1985 par Monsieur Robert Griffe contre le jugement du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux en date du 2 janvier 1985 qui, accueillant la demande formée par Monsieur Raymond Daure, a :

- déclaré recevable et fondée l'action en résolution de vente de véhicule pour cause d'erreur, formée par Daure contre Griffe,

- condamné Griffe à payer à Daure en deniers ou quittances les sommes de :

* 24 800 F en restitution du prix de vente, avec intérêt de droit à compter du 12 avril 1981,

*5 000 F à titre de remboursement des frais de garage avec intérêts de droit à compter du jugement.

- donné acte à Daure de ce qu'il tient le véhicule litigieux à la disposition de Griffe, moyennant le paiement des sommes ci-dessus,

- condamné Griffe à payer à Daure la somme de 1 500 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

-condamné Griffe aux dépens.

Vu l'exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties en première instance, figurant dans les écritures et aux motifs dudit jugement.

Vu les conclusions en cause d'appel, les demandes et les moyens qu'elles contiennent, étant observé que Monsieur Daure étant décédé, l'instance a été reprise par ses héritiers Madame Daure née Albertine Halibeges et Monsieur Max Daure.

Attendu que des faits de la cause, pour le détail desquels la cour entend se référer à l'analyse qui en a été faite par les premiers juges, il doit être retenu que :

- le 28 mars 1981, Robert Griffe à vendu à Monsieur Raymond Daure une voiture Renault 14 TL pour le prix de 24 800 F , le certificat de vente portant les caractéristiques prétendues de la voiture et la mention que celle-ci n'avait pas subi de transformation notable,

- cependant les services préfectoraux faisaient connaître à l'acquéreur que ce véhicule ne pouvait être muté.

- l'expertise à laquelle il a été ultérieurement procédé a révélé effet que la voiture litigieuse était en fait le résultat d'un assemblage réalisé à la diligence de Monsieur Griffe par un carrossier qu'il n'a pas voulu indiquer d'un moteur et châssis d'une voiture accidentée et d'une carrosserie d'une autre voiture accidentée, que les numéros de série ne correspondaient pas à ceux portés sur le certificat de vente et que celui-ci était à tout le moins mensonger quant à l'absence de "transformations notables".

- normalement saisi d'une demande de restitution du prix et reprise de ce véhicule, Monsieur Griffe a opposé à l'acquéreur trompé une fin de non recevoir.

- Monsieur Daure a alors déposé contre son vendeur une plainte en tromperie sur laquelle , après expertise faisant apparaître des éléments de tromperie sur les organes de la voiture, est intervenu un arrêt de la chambre correctionnelle de la cour du 7 mars 1984, qui sur l'action civile a condamné Griffe au paiement de la somme principale de 16 500 F à titre de dommages-intérêts, cette somme correspondant à la diminution de la valeur de la chose compte tenu des vices organiques dont elle est affectée et aux frais de loyer exposés pour la conservation du véhicule.

Attendu que se fondant d'une part sur l'impossibilité d'obtenir le certificat administratif de propriété et donc de pouvoir mettre la voiture en circulation, et d'autre part sur la teneur limitée de la saisine et de la décision de la juridiction pénale, Monsieur Daure, par acte du 24 mai 1984 a asisgné Monsieur Griffe pour voir constater que son consentement avait été vicié par l'erreur sur une qualité substantielle de la chose vendue, faire prononcer la nullité de la vente dont s'agit, faire condamner Griffe au remboursement du prix de vente soit 24 800 F et des frais de gardiennage fixés à 10 044,51 F, ce, en deniers ou quittances eu égard à la condamnation déjà prononcée par la chambre des appels correctionnels, avec intérêts de droit à compter du 12 avril 1981 date d'une mise en demeure, outre 5 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Attendu qu'après avoir écarté deux moyens du défendeur selon lequel d'une part l'action n'aurait pas été engagée dans le bref délai exigé par l'article 1648 du Code civil et d'autre part la dite action se heurterait à l'autorité de chose jugée de l'arrêt pénal du 7 mars 1984, le Tribunal de grande instance de Bordeaux a accueilli le principe de la demande de M. Daure et rendu le jugement dont dispositif sus relaté.

Attendu qu'à l'appui de son recours Monsieur Griffe reprend ces deux moyens, ajoutant subsidiairement que Daure ayant été indemnisé de tous ses chefs de préjudice il n'aurait plus d'intérêt et serait donc irrecevable en son action.

Attendu cependant que le jugement déféré est en vote de confirmation.

Qu'en effet, sur l'exception de bref délai, il échet de relever que l'action de Monsieur Daure se fonde non sur un défaut caché de la chose vendue ouvrant droit à possible résolution de la vente mais sur l'erreur, résultant au demeurant d'un dol du vendeur portant sur la qualité substantielle sinon essentielle de la chose tenant à sa mise en circulation , erreur ayant incontestablement vicié son consentement et frappant de nullité la convention.

Qu'en ce qui concerne l'autorité de chose jugée de l'arrêt du 7 mars 1984, force est de constater que l'objet et la cause des demandes formées par Daure devant la juridiction pénale tendant à l'indemnisation du préjudice occasionné par une infraction à la loi du 1er août 1905 et devant la juridiction civile pour obtenir avec toutes conséquences de droit l'annulation pour vice de consentement d'une convention de vente, sont différents ; que la chambre des appels correctionnels a, par ailleurs précisé dans sa décision que Daure ne pouvait dans le cadre de ces poursuites prétendre au remboursement du prix d'achat, remboursement que lui permet par contre la présente action en annulation.

Attendu en outre, que compte tenu des indemnisations mises à la charge de Griffe par l'arrêt du 7 mars 1984, c'est également, à bon droit que les premiers juges ont prononcé une condamnation en deniers ou quittances.

Attendu enfin que l'obligation de plaider en cause d'appel a entraîné pour l'intimé et aujourd'hui ses ayants droit, des frais irrépétibles qu a hauteur de 3 000 F il serait inéquitable de laisser à leur charge.

Par ces motifs et ceux non contraires du Premier Juge qu'elle adopte, LA COUR, Déboute Monsieur Robert Griffe de son appel à l'encontre du jugement du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux du 2 janvier 1985, Confirme le dit jugement et y ajoutant, Condamne Monsieur Griffe à payer aux consorts Daure une somme supplémentaire de 3 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Le condamne aux dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de Maître Julia avoué à la cour , conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.