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Décisions

CA Paris, 1re ch. C, 30 septembre 1993, n° 91-1656

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

ACEC (SA), ACEC France (SA)

Défendeur :

France Transfo (Sté), Merlin Gerin (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Brissier

Avocat général :

Mme Bernard- Catat

Conseillers :

Mmes Pascal, Desolneux

Avoués :

SCP Duboscq-Pellerin, SCP Dauthy-Naboudet, SCP Varin-Petit

Avocats :

Mes Sudaka, de Granvilliers, Le Bault de la Moriniere.

T.com de Paris, du 19 déc. 1990

19 décembre 1990

Par jugement du 19 décembre 1990, le Tribunal de commerce de Paris - sur assignation de la société France Transfo (FT) et mise en cause par cette dernière de la société Merlin Gerin (MG) a :

- dit les sociétés ACEC France et ACEC Belgique irrecevables en leur demande de nullité de l'assignation signifiée à la société MG;

- donné acte à la société FT de désistement de son action à l'encontre de la Compagnie Royale Belge ;

- dit "les ACEC Belgique" recevables et mal fondées en leur exception d'incompétence et s'est déclaré compétent pour connaître du litige opposant la société FT "aux ACEC Belgique" ;

- dit les ACEC France et ACEC Belgique mal fondées en leur exception d'irrecevabilité en application de l'article 1648 du Code civil ;

- dit les ACEC France et ACEC Belgique mal fondées en leur demande de nullité du "rapport des deux Experts Messieurs Belot et Corbin", les en a déboutés ainsi que de leur demande d'une nouvelle expertise ;

- prononcé la résolution de la vente des régleurs en charge "par les ACEC France à France Transfo " ;

- condamné solidairement les ACEC France et les ACEC Belgique à payer à la société FT, à titre de dommages-intérêts, la somme de cent soixante sept millions neuf cent quarante quatre mille six cent quinze francs (167 944 615 F) avec "intérêts au taux légal à compter du 1er mai 1989" ;

- les a condamnés solidairement à payer à la société FT la somme de cent mille francs (100 000 F) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement "avec garantie d'une première banque à hauteur de la condamnation ci-dessus prononcée en paiement de dommages et intérêts" ;

- condamné solidairement les ACEC France et ACEC Belgique aux dépens, lesquels comprendront l'ensemble des frais d'expertise.

La société de droit belge ACEC Union Minière (ACEC UM) - antérieurement dénommée ACEC Belgique - et la société ACEC France ont interjeté appel du jugement précité à l'égard de la société FT (procédure n° du rôle général 91-1656 et cette dernière société a mis en cause la société MG afin que la décision à intervenir lui soit opposable (procédure n° RG 91-14049).

Il est référé à ce jugement pour l'exposé détaillé des faits qui peuvent être ainsi résumés :

En novembre 1980, le "State Organisation of Electricité" (SOE) - entreprise de l'Etat irakien - conclu avec la société MG un contrat portant sur "la construction et l'installation clés en mains de 90 sous stations électriques réparties sur le territoire irakien, équipées de 138 transformateurs de 5 MVA et de 5 transformateurs de 10 MVA".

La société MG a passé un contrat d sous-traitance avec la société FT pour la fourniture de transformateurs.

Pour équiper les transformateurs, la société FT a fait le choix des "régleurs en charge" (ci-après régleurs) fabriqués par la société ACEC UM, la qualité du véritable vendeur (ACEC UM ou sa filiale, ACEC France) faisant l'objet d'un contestation entre les parties.

Les conditions générales de vente l'exportation des Ateliers de Constructions Electrique de Charleroi SA (ACEC UM) comportent une clause compromissoire (article 13), alors que dans "le conditions générales de vente du matériel industriel" (ACEC UM) figure une clause attributive de compétence aux juridictions belges (Charleroi ou Bruxelles au choix du vendeur).

A partir de novembre 1984, se sont produits de nombreux et graves incidents entraînant la destruction des régleurs ("amorçages" ou "claquages").

Par lettre du 9 septembre 1985, confirmée par télex du 15 septembre 1985, le maître d 'ouvrage (SOE) a mis en demeure la société MG de procéder au remplacement de "tous les transformateurs et régleurs" et a suspendu les paiements à compter du 15 septembre 1985.

Après mise en œuvre - dans de conditions ayant reçu l'agrément des parties -, d'essai d'endurance effectués par le Laboratoire central des industries électriques (LCIE), dont les résultats ont été contestés par les sociétés ACEC UM et ACEC France, une expertise judiciaire comportant une mission technique et financière confiée à Mr Belot a été ordonnée (ordonnance du 16 juillet 1987) et, pour l'exécution de la mission financière, a été désigné (ordonnance du 12 juillet 1989) Mr Corbin, une contestation existant entre les parties sur la nature de la mission attribuée à ce dernier, les sociétés ACEC considérant qu'il a accompli sa mission en qualité de technicien consulté pour avis en application de l'article 278 du nouveau Code de procédure civile et les sociétés intimées en tant que "co-expert".

Une transaction a été conclue le 29 décembre 1986 entre la société MG et la société FT répartissant les tâches de chacune d'elles pour la "mise en conformité" des sous-stations électriques et comportant l'engagement de la société FT de verser (selon un échelonnement spécifié) à la société MG la somme de 75 000 F représentant "le montant des coûts supportés (par cette dernière), consécutifs aux incidents relatifs à l'opération d'échange des transformateurs, y compris ceux dus à la prolongation de la période de maintenance contractuelle et aux décalages de paiement".

Les sociétés ACEC UM et ACEC France poursuivent l'infirmation du jugement précité du 19 décembre 1990, en demandant à la cour de :

- se déclarer incompétente et de renvoyer le litige "devant le tribunal arbitral à constituer selon le règlement de la Cour d'Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale" ;

- mettre hors de cause la société ACEC France en sa qualité de mandataire de la société ACEC UM ;

- déclarer "nul et de nul effet" le rapport d'expertise de Monsieur Belot "en ce compris celui de Monsieur Corbin, expert adjoint qui lui était nécessairement annexé" (conclusions du 9 décembre 1992 page 40) ;

- ordonner une mesure d'instruction complémentaire "en l'état des questions non réglées dans les termes du rapport d'expertise de Monsieur Belot" (ibidem page 41) ;

- débouté la société FT de son en garantie des vices cachés ;

- subsidiairement "pour le cas où la cour retiendrait l'existence d'un vice caché", réduire le montant de l'indemnité "pouvant être mise à la charge" de la société ACEC France et celle d'ACEC UM "au seul coût des régleurs prétendument défectueux", sur le fondement, la première, des "conditions générales de vente du matériel industriel" et la seconde, des "conditions générales de vente à l'exportation";

- dire que la clause stipulée dans "les conditions spécifiques" du contrat SOE/MG, prévoyant "un fonctionnement de 100 000 manœuvres sans maintenance" est inopposable à la société ACEC France et ne peut recevoir application dans les rapports FT et ACEC UM;

- dire que la société FT "ne peut invoquer utilement les dispositions de l'article 1645 du Code civil" et que "la réparation de son préjudice doit être limitée dans les conditions de l'article 1646 du même code c'est-à-dire à la seule restitution du prix des matériels vendus" (conclusions du 14 avril 1992 page 158);

- "à supposer que l'absence d'anneau de garde constitue une non-conformité", débouter la société FT de son action en responsabilité contractuelle pour défaut de conformité de la chose vendue et, en toute hypothèse, "dire que la société FT ne saurait prétendre qu'au prix des régleurs prétendument défectueux" ;

- sur le préjudice, dire que, "par application des clauses limitatives de garantie et de responsabilité du vendeur", elles "ne sauraient être tenues qu'à la répétition du coût d'acquisition de 32 % des régleurs" et, par application de l'article 1150 du Code civil, qu'aux "frais exposés en relation directe avec la défaillance des régleurs sur 32 % des sous-stations exclusivement" (conclusions du 14 avril 1992 page 164) ;

- subsidiairement, ordonner "une nouvelle expertise (financière) . pour rechercher dans la seule limite du préjudice directement indemnisable, le montant dudit préjudice" (ibidem page 165) ;

- plus subsidiairement, "pour le cas où la cour croirait devoir statuer en l'état, en écartant les clauses limitatives de responsabilité du vendeur", dire que "le montant du préjudice subi par la société FT ne saurait excéder la somme de 16 284 589,16 F" ;

- ordonner "la répétition sur tous règlements (par elles) effectuées sur la base de l'exécution provisoire du jugement déféré à la cour, outre les intérêts de droit à compter de la date desdits règlements, lesdits intérêts portant eux-mêmes intérêt conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil" ;

- condamner la société FT à leur rembourser "sur simple justification, le coût des frais par elle exposés auprès de la Société générale de Belgique pour les garanties visées par l'ordonnance de Monsieur le Premier Président ayant ordonné la suspension partielle de l'exécution provisoire ordonnée par les premiers juges" ;

- débouter la société FT de son appel incident ;

- condamner cette société à leur payer la somme de 150 000 F majorée de la TVA en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société FT conclut à la confirmation du jugement déféré à l'exception de se dispositions concernant "l'évaluation" du montant de son préjudice et, formant un appel incident sur ce point, sollicite le remboursement de la somme (75 000 F) par elle versée à la société MG en vertu de la transaction du 29 décembre 1986 ainsi que la fixation à "12 % par an du taux des frais financiers" et, par voie de conséquence, la condamnation solidaire des sociétés ACEC France et ACEC UM au paiement de la somme de 185 929 763 F à titre de dommages et intérêts, "augmentée des frais financiers au taux de 1 % par mois à compter du 1er mai 1989, ou subsidiairement avec intérêts légaux à compter du 1er mai 1989, lesdits frais financiers ou intérêts étant capitalisés par application de l'article 1154 du Code civil".

Elle précise que sa demande est formée à titre principal "pour vice rédhibitoire" et à titre subsidiaire, "pour non-conformité de la chose vendue aux spécifications contractuelles".

Elle demande, de plus, l'allocation de 300 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société MG sollicite également la confirmation du jugement déféré sauf "en ce qu'il l'a déboutée" de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, et énonçant former, sur ce point, un appel incident, sollicite la condamnation solidaire des sociétés ACEC au paiement de 300 000 F sur le fondement de ce texte.

Suite à "l'apport (par la société MG) de l'ensemble de ses activités et moyens industriels" à la société Septamatel, cette dernière, qui a pris la dénomination de Merlin-Gerin , est intervenue aux débats (conclusions du 8 septembre 1992) pour demander que lui soit adjugé le bénéfice des conclusions précédemment signifiées par l'ancienne société Merlin-Gerin.

Il est référé aux écritures des parties pour l'exposé détaillé de leur argumentation respective, celle des sociétés ACEC - contenue dans des conclusions qualifiées de "récapitulatives et responsives" du 14 avril 1992 (166 pages) et du 9 décembre 1992 (4 pages) et reprise sous forme de "dire et juger", en même temps que l'énoncé de leurs prétentions, dans le dispositif de ces conclusions - étant mentionnée à propos de chacune de leur demande et celle des sociétés FT et MG (laquelle est, pour l'essentiel, identique) pouvant être résumée comme suit :

Sur l'exception d'incompétence :

- la modification de la relation de faits et de leur qualification juridique par les société ACEC (selon leurs écritures de première instance et leurs premières conclusions du 22 mai 1991 devant la cour, vente des régleurs par les ACEC France, selon leurs conclusions postérieures, vente des régleurs par la société ACEC UM, la société ACEC France ayant la qualité d'intermédiaire de cette dernière) n'est pas motivée par "une prise de conscience tardive du rôle modeste qu'aurait joué ACEC France à l'occasion de la conclusion du contrat" mais par le dessein de pallier les conséquences d'un changement de jurisprudence concernant "la chaîne des contrats" et par celle relative à l'inopposabilité de la clause compromissoire au sous-acquéreur (16 novembre 1990) ;

- la société ACEC France, à laquelle la société FT a adressé le bon de commande du 29 juin 1981, dont elle a accusé réception le 7 septembre 1981 et qui a établi des factures, à la qualité de vendeur, ainsi que l'ont d'ailleurs reconnu originellement les sociétés ACEC ;

- le prétendu mandat entre ACEC UM et ACEC France n'est pas opposable à la société FT pour n' avoir pas été porté à sa connaissance ;

- l'offre E. 1785 du 16 mars 1981 invoquée par les sociétés ACEC concerne "un autre marché" et vise les conditions particulières et non les conditions générales de vente ;

- les accusés de réception du bon de commande émanant de la société ACEC France comportent une référence aux "conditions générales de vente ACEC France", de sorte que, le contrat étant dès lors soumis à ces dernières (qui ne contiennent aucune clause compromissoire) ainsi qu'aux conditions générales de vente FT, "il importe peu que les conditions générales de vente à l'exportation d'ACEC Union Minière aient pu être communiquées à France-Transfo, à l'occasion d'un marché antérieur et distinct" (conclusions du 25 janvier 1993 page 4) ;

Sur l'exception de nullité des opérations d'expertise :

- compte tenu de son mode de désignation (ordonnance du juge chargé du contrôle des expertises du 12 juillet 1989), de l'importance et de l'étendue de sa mission et des conditions d'accomplissement de celle-ci, Monsieur Corbin est, non pas un technicien consulté pour avis, mais un "co-expert", de sorte que les dispositions de l'article 278 du nouveau Code de procédure civile et l'obligation corrélative pour l'expert de communiquer l'avis du technicien avant le dépôt de son rapport ne peuvent trouver application en l'espèce ;

- en tout état de cause, le fait que Monsieur Corbin ait accompli sa mission "contradictoirement en présence de toutes les parties et de leur conseil" "dispensait" Monsieur Belot de la communication préalable de l'avis de Monsieur Corbin ;

- les irrégularités invoquées par les sociétés ACEC ou sont couvertes (ainsi pour les "difficultés" relatives à la participation du conseiller de ces sociétés aux opérations d'expertise) ou, en l'absence d'un grief causé à ces dernières, ne sont pas susceptibles d'entraîner la nullité des expertises ;

- à supposer que la cour, considère comme nulles les expertises, elle pourra puiser, dans les rapports d'expertises, tous éléments qui lui seront nécessaires pour statuer.

- Sur le fond :

+ sur l'action principale en garantie des vices cachés et celle subsidiaire pour non-conformité:

* l'action en garantie des vices cachés et l'action pour non-conformité peuvent être cumulées et sont en l'espèce l'une et l'autre bien fondées ;

* les conclusions du rapport d'expertise technique révèlent que les désordres affectant les régleurs ("claquages") sont dus à "l'absence d'anneau de garde", l'expert ayant d'ailleurs pris acte de ce que les conseillers techniques des ACEC "avaient accepté ses conclusions" (conclusions FT du 4 août 1992 page 46), de sorte que la demande d'expertise technique nouvelle est dénuée de fondement ;

* les sociétés ACEC, dont "la garantie standard pour les régleurs est de 35 000 manœuvres "sans maintenance", ont accepté la clause du cahier des charges SOE prévoyant 100 000 manœuvres "sans maintenance" ;

* l'absence d'anneau de garde, si elle pouvait être apparente aux yeux d'un fabricant de transformateurs, ne constituait pas en elle-même un vice apparent", alors que "deux ans d'expertise et d'essais" ont été nécessaires pour le "mettre en évidence" et que ni la société MG ni elle-même n'ont les compétences requises pour déceler un tel " vice de conception " (conclusions FT du 4 août 1992 page 46) ;

* " la technique des régleurs en charge ... est une spécialité distincte de celle des transformateurs (conclusions FT du 5 janvier 1992 page 17) de sorte que la société FT ne peut être considérée comme un professionnel de la même spécialité que les sociétés ACEC ;

* n'étant pas apparente, la non-conformité n'a pu être agréée par l'acheteur" ;

* les circonstances dans lesquelles les sociétés ACEC ont modifié la conception des régleurs (à savoir "le souci de ne pas faire apparaître que les matériels vendus étaient une contrefaçon des régleurs MR ") caractérisent une "faute lourde ou dolosive" rendant inefficace les clauses limitatives de garantie ou de responsabilité invoquées par ces sociétés (conclusions FT du 15 janvier 1992 page 17) ;

- Sur le préjudice :

* les contestations par les sociétés ACEC du caractère direct et prévisible du préjudice sont dénuées de fondement eu égard notamment aux conclusions de l'expertise technique faisant état de la nécessité d'un transport en France des transformateurs-régleurs pour assurer le remplacement des régleurs dans de bonnes conditions, aux dispositions de l'article 33. 7. 6 du contrat 50E / MG et à l'inapplication, en l'espèce, des conditions générales des contrats types FIDIC ;

* le montant du préjudice a été exactement apprécié par le tribunal sur le fondement de l'expertise financière sous les réserves suivantes :

+ la transaction intervenue entre elles le 29 décembre 1986 a fait une exacte évaluation de la somme due par la société FT à la société MG soit 75 000 F ;

+ les frais financiers doivent être fixés à 42 000 F car le taux de 12 % correspondant à une réparation normale de ce poste de préjudice (conclusions FT du 15 janvier 1993 page 14)

Sur ce, la cour,

Considérant qu'il convient de joindre, pour une bonne administration de la justice, les procédures sus-mentionnées inscrites au rôle général de la cour sous les numéros 91-1656 et 91-14049 et de donner acte à la société Merlin Gerin de son intervention aux lieu et place de l'ancienne société Merlin-Gerin ;

- Sur l'exception d'incompétence et la demande de mise hors de cause de la société ACEC France en sa qualité de mandataire de la société ACEC UM :

Dans leurs premières conclusions du 2 mai 1991 les sociétés ACEC UM et ACEC France énoncent que sont intervenues entre ACEC France et FT "une vente interne soumise aux conditions générales de vente de matériel industriel" et entre ACEC France et ACEC UM "une vente internationale" régie par les "conditions générales de vente à l'exportation".

Se fondant sur les arrêts de l'Assemblée plénière de la Cour de Cassation du 7 février 1986 et de la Première Chambre civile des 8 mai et 21 juin 1988 et se prévalant de la "théorie des groupes de contrat", les sociétés ACEC soutiennent que l'action exercée à leur encontre par la société FT est "de nature nécessairement contractuelle" et en déduisent que "les règles qui régissent les obligations du débiteur substitué, en l'espèce, la société ACEC Belgique,"et qui découlent de la vente intervenue entre la société ACEC Belgique et la société ACEC France et notamment "les dispositions de l'article 13 des conditions générales de vente à l'exportation de la société ACEC Belgique " s'imposent à la société FT.

Dans leurs conclusions postérieures du 14 avril 1992, les sociétés ACEC considèrent que les rapports ayant existé entre les parties à l'instance quant à l'opération litigieuse doivent recevoir la qualification suivante :

- le contrat de vente a été conclu directement par la société FT avec la société ACEC UM, la société ACEC France n'ayant joué qu' " un rôle d'intermédiaire" soit comme mandataire en qualité d'agent commercial tel que prévu par le contrat du 14 novembre 1973 conclu entre elles soit comme distributeur des produits fabriqués par la société ACEC UM ;

- "l'opération internationale" de fourniture de régleurs "constitue un ensemble contractuel indivisible" mis en œuvre par "deux sociétés du même groupe" "fondues, pour l'opération projetée dans une unité économique soumise à seul un pouvoir de décision, celui de la société ACEC UM".

Elles prétendent que ces différentes qualifications aboutissent au même résultat : l'incompétence des juridictions étatiques pour statuer sur le présent litige :

- s'agissant d'un contrat international conclu avec la société ACEC UM par l'intermédiaire de la société ACEC France en sa qualité de mandataire de celle-ci, "l'opposabilité de la clause compromissoire à la société FT est justifiée par l'existence entre les parties de relations contractuelles antérieures et similaires qui étaient régies par les conditions générales contenant la clause compromissoire et par (la) référence faite dans la confirmation de commande de France Transfo à une offre antérieure (celle du 8 mai 1981) qui incluait ces documents et notamment la clause compromissoire" (conclusions précitées page 28) ;

- si la société ACEC France doit être considérée comme un distributeur de produits fabriqués par la société ACEC UM, cette dernière est en droit d'opposer, dans le cadre de l'action directe exercée contre elle, sur le fondement des arrêts de l'Assemblée plénière de la Cour de Cassation des 7 février 1986 (lesquels n'ont pas été remis en cause par l'arrêt de l'Assemblée plénière du 12 juillet 1992 qui n'est applicable qu'en matière de sous-traitance) à la société FT toutes les "stipulations" du contrat de vente par elle passé avec la société ACEC France, et notamment la clause compromissoire ;

- à l'égard de la société ACEC France l'incompétence des juridictions étatiques "s'induit de celle attachée au contrat principal" ainsi que de l' " indivisibilité du litige" (conclusions du 14 avril 1992 pages 34 et 150) et de celle des "conventions internationales ayant régi les rapports de la société France Transfo, ACEC France et de la société Union Minière" (conclusions du 9 décembre 1992 page 37).

Considérant qu'il résulte des documents produits aux débats :

- que toutes les conditions de la vente ont été déterminées par la société ACEC UM (télex des 6 avril, 7 mai et 8 mai 1981) après que celle-ci ait réclamé "les éléments essentiels de la spécification technique délimitant l'étendue de la fourniture" (télex du 7 mai 1981) et en ait obtenu communication (télex des 8 mai et 10 novembre 1981) ;

- que les difficultés consécutives à des anomalies de fonctionnement des régleurs (notamment fuites: lettres à ACEC UM du 19 mai 1982, 10 et 18 mars 1983, 7 avril 1983) ont été signalées par la société FT à la société ACEC UM et traitées par cette dernière ;

- que la mise en garde concernant ces défaillances d'étanchéité d'un certain nombre des régleurs assortie de réserves sur une éventuelle responsabilité contractuelle pouvant en découler a été adressée par la société FT à la société ACEC UM (lettre du 24 mars 1983) ;

- que les incidents entraînant la destruction des régleurs (qui ont motivé la présente instance) ont été portés, dès leur survenance, par la société FT, à la connaissance de la société ACEC UM (lettre FT du 4 octobre 1985, lettre ACEC UM du 23 octobre 1985) et le principe et conditions de mise en œuvre d'essais d'endurance des régleurs par le LCIEL (rapport du 19 septembre 1986) ont fait l'objet de nombreuses tractations entre ces deux sociétés (notamment lettre FT du 15 janvier 1986, lettres FT et ACEC UM du 30 janvier 1986, lettre FT du 26 février 1986, lettre FT du 10 mars 1986, lettre ACEC UM du 18 mars 1986, lettre FT du 25 mars 1986) ;

Considérant, dans ces conditions, que, si la commande des régleurs a été passée avec la sociétéé ACEC France, qui l'a acceptée (lettre du 7 septembre 1981 à laquelle sont joints les accusés de réception de la commande établie pour chaque livraison), la société ACEC UM, société mère, a, cependant, joué un rôle prépondérant, sinon exclusif, dans la négociation et dans l'exécution du contrat, lequel manifeste l'intention commune de la société ACEC UM et de sa filiale, ACEC France, de concourir très étroitement à la conclusion et à la mise en œuvre d'une opération économique unique ;

Considérant, qu'au surplus et en tout état de cause, la participation effective et déterminante de ACEC UM à cette opération économique unique - impliquée par son comportement précité - a créé l'apparence d'une véritable partie co-contractante légitimant l'assimilation des deux sociétés ACEC UM et ACEC France faite par la société FT qui, notamment dans sa commande du 29 juin 1981, vise pour définir les conditions du contrat le télex du 8 mai 1981 en l'attribuant à la société ACEC France alors qu'il émane de la société ACEC UM ("suite à votre télex du 8 mai 1981") ;

Considérant que les sociétés ACEC UM et ACEC France doivent, dans ces conditions, être considérées comme co-contractantes de la société FT ;

Considérant que le bon de commande du 29 juin 1981 fait référence au télex ACEC UM du 8 mai 1981 qui fait lui-même référence au télex ACEC UM du 6 avril 1981 ;

Considérant que ce télex du 6 avril 1981, après avoir mentionné, dans un premier paragraphe, les prix de base proposés, prévoit sous la rubrique "b, conditions particulières" que celles-ci sont "identiques à notre référence E. 1785 du 16 mars 1981" à l'exception du délai de livraison, de celui de l'option et de la "clause de rajustement de change" dont les conditions spécifiques sont précisées ;

Considérant que, sous le titre " Conditions Particulières", l'offre E. 1785 du 16 mars 1981 concernant une vente concomitante de régleurs ACEC à destination de l'Egypte (sans autre indication) précise quant à la livraison, que celle-ci "sera exécutée conformément aux conditions générales de vente du matériel industriel mod. 1606 et aux conditions générales de vente à l'exportation mod. 1791 en annexe "et comporte, en ce qui concerne la garantie, la mention suivante : "Outre les conditions normales de garantie sur notre matériel (cf. annexe) ... ", un exemplaire des conditions générales de vente du matériel industriel, Ateliers de Constructions Electriques de Charleroi SA et un exemplaire des conditions générales de vente à l'exportation - Ateliers de Constructions Electriques de Charleroi SA étant annexés à cette offre ;

Considérant que les accusés de réception de commandes établis par la société ACEC France pour chaque livraison échelonnée dans le temps et adressés le 7 septembre 1981 à la société FT comportent, en revanche, en première page, la mention suivante "Nous vous remercions de votre commande précitée. Nous l'enregistrons à nos conditions générales de vente reproduites au verso et aux conditions particulières ci-dessus", étant relevé que, si les conditions générales de vente ne figurent pas au verso des photocopies des accusés de réception produites aux débats, il ressort des conclusions concordantes des parties (notamment société ACEC du 14 avril 1992 pages 76 à 80) qu'il s'agit des conditions générales de vente du matériel industriel ;

Considérant que les sociétés ACEC indiquent même dans leurs conclusions du 14 avril 1992 (page 76) - sans être contredites par la société FT - que les conditions générales de vente de matériel industriel étaient annexées à la "lettre de commande" de la société FT du 29 juin 1981 "telle que produite par cette dernière en cours d'expertise" ;

Considérant que, hormis le marché égyptien (dont l'existence est établie par l'offre E. 1785 du 16 mars 1981 et qui est concomitant au présent contrat), il n'est justifié d'aucunes relations habituelles d'affaires antérieures entre les parties qui auraient été régies par les conditions générales de vente à l'exportation ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments :

- que le télex ACEC UM du 6 avril 1981, auquel se réfère le bon de commande du 29 juin 1981 (par le biais du télex ACEC UM du 8 mai 1981) ne fait aucune référence à des conditions générales de vente;

- que l'offre E. 1785 du 16 mars 1981 - auquel se réfère le télex du 6 avril 1981 - ne comporte pas une référence générale ou globale aux deux conditions générales de vente précitées qui y sont annexées ou à l'une d'entre elles, mais une référence spécifique à ces deux conditions générales de vente pour la livraison et la garantie ;

- que les conditions générales de vente du matériel industriel sont seules visées par les accusés de réception de la commande établie par la société ACEC France ;

- que les conditions générales de vente du matériel industriel et les conditions générales de vente à l'exportation, qui ont en principe chacune un champ d'application propre (les premières pour les ventes internes, les secondes pour les ventes internationales) présentent des différences importantes (en particulier sur le plan de la compétence clause attributive de compétence aux Tribunaux de Charleroi ou de Bruxelles au choix du vendeur pour les premières, clause compromissoire précitée pour les secondes) ;

Considérant que les deux documents constituant et établissant la formation du contrat sont donc ainsi contradictoires le bon de commande du 29 juin 1981 (par les références successives susmentionnées) se référant à la fois et indistinctement aux conditions générales du matériel industriel et aux conditions générales de vente à l'exportation alors que les accusés de réception de cette commande délivrés par la société ACEC France ne visent expressément que les premières;

Considérant de plus, que, contrairement aux allégations des sociétés ACEC qui prétendent que les conditions générales de vente du matériel industriel devraient trouver application dans les rapports ACEC France - FT et celles de vente à l'exportation dans les rapports de ACEC UM et FT (notamment conclusions du 14 avril 1992 pages 76 à 80), ces deux sortes de conditions générales de vente sont peu compatibles entre elles, comme ayant chacune un domaine propre, alors que, pour les motif sus-exposés, il s'agit d'une opération contractuelle unique conclue entre d'une part, les sociétés ACEC UM et ACEC France et d'autre part, la société FT ;

Considérant que les incertitudes concernant l'application des conditions générales de vente à l'exportation (comportant seule la clause compromissoire) qui résultent pour le moins des éléments précités et, en tout état de cause, l'absence de référence générale ou globale des documents contractuels à ces conditions générales de vente font obstacle à l'existence d'une acceptation certaine et éclairée, par la société FT, de la clause compromissoire ;

Que l'exception d'incompétence soulevé par les sociétés ACEC ainsi que la demande de mis hors de cause de la société ACEC France sont, dés lors, dénuées de fondement ;

- Sur l'exception de nullité des " opérations d'expertise " :

1°) pour violation de l'article 237 du nouveau Code de procédure civile en ce que, dans le cadre de la mission d'expertise financière, Monsieur Corbin (technicien consulté pour avis selon les ACEC, "co-expert" selon FT et MG) a manqué au respect de ses obligations d'objectivité et d'impartialité :

* en ayant tenté d'écarter, "pour des motifs inopérants", le conseiller financier choisi par les sociétés ACEC pour les assister au cours des opérations de l'expertise financière ;

* en leur ayant adressé, "de manière systématique", des reproches pour tardiveté prétendue du dépôt de leurs observations alors que "d'autres retards plus importants étaient enregistrés du côté des sociétés demanderesses" (conclusions du 9 décembre 1992 page 38) ;

En ayant "tenté de jeter le doute sur l'authenticité de la copie d'une correspondance adressée par le conseil des ACEC au service du contrôle des expertises" (conclusions du 14 avril 1992 page 151.3.1.),

2°) pour violation des articles 16 et 276 du nouveau Code de procédure civile :

a) en ce que Mr Corbin :

* a "délaissé certains dires" dont notamment celui du 26 octobre 1989 ;

* a retenu "quelques jours avant la clôture de son rapport (même si son dépôt est intervenu plusieurs semaines plus tard) des documents émis par la société Merlin Gerin" (conclusions du 9 décembre 1992 page 39) sans leur avoir accordé "le moindre délai pour formuler leurs observations" (conclusions du 14 avril 1992 page 151.3.2) ;

b) en ce que Mr Belot a déposé son rapport "sans avoir communiqué (aux parties) l'avis de son expert adjoint, Monsieur Corbin ", (conclusions du 9 décembre 1992 page 39), alors que, celui-ci, qui est "intervenu dans les termes et limites de l'article 278 du nouveau Code de procédure civile, est un "expert-adjoint " et non un "co-expert" (ibidem page 34), que la comparution des sociétés ACEC devant le Président chargé du contrôle des expertises, lors de l'incident ayant donné lieu à l'ordonnance du 20 décembre 1989, "ne saurait avaliser" les irrégularités "antérieures et postérieures à la date dudit incident" (ibidem page 39), que "de telles violations leur ont manifestement fait grief" en les ayant empêché de "faire valoir l'ensemble des moyens qu'elle ont développé devant le tribunal, puis devant la cour" (ibidem page 40) ;

c) en ce que Mr Belot s'est abstenu de communiquer aux parties le dernier procès-verbal d'essais réalisés par le LCIE, "alors que l'examen de ce document montre que le débat technique est loin d'être épuisé notamment sur le rôle de fusible des régleurs protégeant les transformateurs" (ibidem page 40) ;

Considérant que les " incidents " concernant le rôle du conseiller technique choisi par les société ACEC pour les assister dans le cadre des opérations de l'expertise financière ainsi que la communication par ces sociétés de leur police d'assurance, ont été réglés par le juge chargé du contrôle des expertises, et, partant, ne peuvent être considérés comme des manquements par Mr Corbin à ses obligations d'impartialité et d'objectivité, quelle que soit la solution donnée à ces "incidents" ;

Considérant que les sociétés ACEC ont déposé leur premier dire le jour même de la deuxième réunion d'expertise, alors que les parties adverses ont fait preuve de ponctualité pour remettre les pièces dont la communication leur a été demandée ou pour présenter leurs observations, de sorte que l'inégalité de traitement, entre les parties dans le déroulement de l'expertise, imputée par ces sociétés à Mr Corbin, n'est pas, en l'espèce, caractérisée ;

Considérant que, si l'observation de Mr Corbin, sous forme incidente et dubitative, ayant trait à une éventuelle absence de parfaite concordante entre la lettre du conseil des sociétés ACEC du 29 juin 1989 adressée au juge chargé du contrôle des expertises et la copie qui lui a été transmise (rapport page 8) apparaît gratuite et même quelque peu désobligeante, elle ne saurait être tenue pour une manifestation de partialité ;

Considérant que "les dires" du 20 octobre 1989, n° 1 du 10 octobre 1989 et n° 2 du 26 octobre 1989 ont été joints au rapport (volume l.G et volume 2. M. et N.) par Mr Corbin et les questions soulevées par ces "dires" ont été examinées dans le rapport (notamment pages 54, 58, 60 et 61 et 68 (pour le dire n° 2) ;

Considérant que, hormis le dire n° 2 du 26 octobre 1989 spécifiquement visé, les sociétés ACEC se bornent à énoncer que "des dires " ont été "délaissés tant sur le plan financier que sur le plan technique " (conclusions du 14 avril 1992 page 151.3.2) ou que "certains dires " ont été "délaissés " par "l'expert-adjoint" (conclusions du 9 décembre 1992 page 38) sans fournir d'indication permettant de les identifier, de sorte que leur argumentation, exposée d'une manière aussi vague et imprécise, est inopérante ;

Considérant qu'il résulte des éléments du dossier qu'après avoir reçu les dires des sociétés ACEC du 20 octobre 1989 et n° 2 du 26 octobre 1989, Mr Corbin a demandé, en particulier sur le fondement de ceux-ci, et sous forme d'un "nouveau questionnaire à l'intention des société FT et MG", des "explications ou précisions" à ces sociétés lesquelles ont répondu le 27 novembre 1989 pour MG et les 22 et 27 novembre 1989 pour FT, alors qu'il résulte des énonciations de l'ordonnance du 20 décembre 1989 du juge chargé du contrôle des expertises - laquelle fait mention de "la plus extrême urgence à ce que les experts déposent leur rapport" - que les rapports desdites expertises ont été déposés au greffe du Tribunal de commerce de Paris postérieurement au prononcé de cette ordonnance ;

Considérant que, dans ces conditions, les sociétés ACEC ont disposé d'un laps de temps suffisant pour présenter par écrit, leurs éventuelles observations sur les explications fournies dans leurs notes précitées par les sociétés FT et MG à la demande de Mr Corbin, et même de la possibilité de demander, tant avant l'audience du 15 décembre 1989 (ayant précédé l'ordonnance du 20 décembre 1989) que lors de cette audience, un délai supplémentaire à cette fin ;

Considérant que les sociétés ACEC, ayant ainsi, à dessein et par un choix délibéré de stratégie procédurale, décidé de ne pas user de cette faculté, les dispositions des articles 276 et 16 du nouveau Code de procédure civile ont été en l'espèce, respectées ;

Considérant que, selon les énonciations (non contestées sur ce point) du rapport d'expertise technique de Mr Belot (en particulier pages 36 et 43) ainsi que de la lettre de ce dernier du 3 juillet 1989 au Président du Tribunal de commerce de Paris, le recours à Mr Corbin, expert-comptable, a été décidé, avec l'accord des parties, en raison, non seulement de l' " incompétence" invoquée de Mr Belot pour "analyser les pièces comptables produites" (lettre précitée) mais également en raison de l'importance et de la difficulté des questions financières, eu égard notamment aux circonstances particulières de la cause et au montant très élevé du préjudice pouvant en découler, étant, au surplus, relevé que Mr Corbin a été désigné, à la requête de Mr Belot, par ordonnance du juge chargé du contrôle des expertises en date du 12 juillet 1989 ;

Considérant que la mission financière de l'expertise, qui pour les parties, revêtait ainsi une grande importance et qui nécessitait, pour son accomplissement, des investigations nombreuses et approfondies, dépasse les limites d'un avis au sens de l'article 278 du nouveau Code de procédure civile ;

Considérant qu'il résulte, de plus, des éléments du dossier que cette mission financière de l'expertise a été exécutée en commun par Messieurs Belot et Corbin, les réunions ayant eu lieu sous leur présidence conjointe et Mr Belot ayant assisté à toutes les opérations d'expertise ;

Qu'il s'ensuit que Mr Corbin a été désigné par ordonnance du 12 juillet 1989, non pas pour donner un avis en tant que spécialiste consulté (bien que la requête précitée de Mr Belot vise l'article 278 du nouveau Code de procédure civile) mais pour, conformément à l'intention réelle commune des parties, permettre une expertise de caractère collégial ou une "co-expertïse" en ce qui concerne la mission financière de l'expertise initiale, de sorte que les dispositions des articles 278 et 282 alinéa 3 du nouveau Code de procédure Civile n'étaient pas applicables en l'espèce ;

Considérant qu'il ne peut, dès lors, être fait grief à Mr Belot de n'avoir pas communiqué aux parties, avant le dépôt de son rapport, le rapport de Mr Corbin qui ne peut être assimilé à l'avis d'un technicien consulté par ce dernier ;

Considérant, au surplus, qu'en admettant même, pour les besoins du raisonnement, que la mission de Mr Corbin puisse être qualifiée d'avis d'un technicien consulté en vertu de l'article 278 du nouveau Code de procédure civile, le caractère contradictoire exigé en matière d'expertise a été mis en application quant aux conditions d'établissement de cet avis, puisque, selon les énonciations du rapport, les parties ont été associées à l'exécution de toutes les opérations de la mission financière et que, pour les motifs sus-exposés, elles ont formulé ou ont été en mesure de formuler leurs observations sur ces opérations ainsi que sur les documents remis à Mr Corbin;

Considérant que le respect des droits de la défense ayant été ainsi assuré, la non-communication de l'avis de "l'expert-adjoint" avant le dépôt du rapport, ne peut être considéré comme ayant causé un grief aux sociétés ACEC ;

Considérant qu'il en est de même en ce qui concerne la non-communication alléguée du compte-rendu des derniers essais effectués le 8 juin 1989 à la demande de Mr Legros, conseiller technique des sociétés ACEC ;

Considérant, en effet, que, selon les énonciations (non contestées) du rapport de Mr Belot (pages 45, 47 et page 91), non seulement ces essais ont eu lieu en présence de Mr Legros et Chatelain, conseillers techniques des sociétés ACEC, mais les conclusions qui en ont été tirées et exposées immédiatement par l'expert ont reçu l'agrément de ces derniers (ibidem page 47) ;

Qu'il s'ensuit que l'exception de nullité des expertises est dénuée de fondement.

- Sur le fond :

Considérant que, bien que les conditions générales de vente à l'exportation dont les sociétés ACEC revendiquent l'application prévoient (article 11) que "le contrat est régi par la loi du pays du vendeur", les parties, et notamment les sociétés ACEC, ont, de manière certaine, entendu que leurs relations contractuelles soient soumis au droit positif français en faisant uniquement référence au Code civil et à la jurisprudence français concernant notamment la garantie des vices cachés et l'obligation contractuelle de délivrer une chose conforme à sa destination normale ;

1°) Sur la demande d'expertise technique complémentaire :

A l'appui de cette demande, les société ACEC prétendent que "le vice allégué" (absence d'anneau de répartition de potentiel sur les régleurs) au regard des désordres sur le site et la relation causale entre le vice prétendu et les désordres sont loin d'être établis" (conclusions du 9 décembre 1992 page 41), en faisant, pour l'essentiel, état :

- de la détérioration d'un certain nombre de transformateurs "sans que les régleurs soient eux-mêmes atteints", détérioration mentionnée dans le compte-rendu d'une réunion du 30 août 1985 entre les représentants des sociétés MG et FT, lequel n'aurait pas été soumis à l'expert Belot ;

- de l'impossibilité pour l'expert d'exclure, comme cause des désordres, "les conditions d'exploitation sur le site ... en faisant exclusivement référence à sa connaissance du site, alors que cette connaissance ne résulte d'aucune constatation contradictoire et est nécessairement extérieure aux opérations d'expertise et aux parties "(ibidem page 41.5);

- de l'absence d'incidents des "matériels de la même construction" commercialisés "monde entier" par les ACEC,"notamment en Egypte par le canal de la société France Transfo" (conclusions du 14 avril 1992 page 57. f.) ;

Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise technique :

- que, contrairement aux allégations précitées des sociétés ACEC, Mr Belot n'a nullement fait état d'une "connaissance personnelle du site" pour exclure, comme cause des désordres, "les conditions d'exploitation sur le site", celui-ci s'étant borné à mentionner que les conseillers techniques (Mrs Chatelain et Legros) des sociétés ACEC ont reconnu que "l'Irak présente un niveau kéraunique peu élevé, ce qui rend improbable les surtensions orageuses" (rapport page 46 et également page 41) ;

- que les essais complémentaires d'endurance, réalisés dans des conditions ayant expressément reçu l'accord des parties et mis en œuvre le 11 janvier 1989 à la demande des conseillers techniques des sociétés ACEC pour vérifier les résultats des essais déjà effectués à Ennery en 1986 par le Laboratoire Central des Industries Electriques (LCIE) en ce qui concerne "les formes d'ondes et tensions", ont mis en évidence :

* que les essais d'endurance précités réalisés par le LCIE "étaient valables" (page 41 et page 90) ;

* que "les distorsions globales, même avec une tension dépassant la tension nominale de 10 %, n'atteignaient pas 7 %" (page 40 bis) ;

* que " la pollution de l'huile du régleur ACEC s'est élevée rapidement et cette huile a dû être changée, après 12 600 manœuvres, à la demande, d'ailleurs, des ACEC, bien avant donc les 35 000 manœuvres prévues au cahier des charges ,

* qu' "un amorçage s'est produit au bout de 16 300 manœuvres ;

* que, "en revanche, le régleur MR (de fabrication allemande), exactement dans les mêmes conditions, s'est fort bien comporté" et permettaient de conclure que "l'origine des incidents se situaient dans (une) erreur de conception des régleurs (et) non dans les surtensions invoquées par les ACEC (page 90) ;

- que les "essais de choc répétitifs", réalisés à la demande "insistante" des ACEC (pages 24, 33, 36 et 90), les 9 février et 8 juin 1989, ont confirmé les résultats des essais d'endurance en démontrant notamment :

* que, même en tenant compte de la surtension due à des ondes de foudre le long des cables (50 m. environ) en deux tronçons séparés par les disjoncteurs, en aucun cas la tension aux bornes des transformateurs ne peut avoir atteint 170 KV" (page 46), "tension garantie par les ACEC" (page 32 et également 16) ;

* que "les tensions susceptibles d'avoir engendré les amorçages ne pouvaient dépasser 130 à 150 KV, valeurs bien inférieures aux valeurs données par le cahier des charges des ACEC" (page 47) ;

* que ces tensions, qui au surplus ont lieu "entre deux prises du stator", n'affectent pas le "rotor des régleurs" où se sont produits les amorçages, de sorte que "lesdites tensions ne peuvent être à l'origine de ces derniers" (page 46 et également pages 32 et 41) ;

* que les destructions des régleurs (amorçages) se sont produits après moins de 25 000 manœuvres (page 95) alors que la garantie "standard" de sociétés ACEC prévoit 35 000 manœuvres sans maintenance ;

Considérant que l'expert conclut que les résultats de ces deux types d'essais établissent avec certitude que les diverses hypothèses émises par les ACEC (pages 88 et 89) et notamment celles invoquées par leurs conseillers techniques, Mrs Chatelain et Legros (erreur de conception des transformateurs qui auraient créé, "en raison de phénomènes de résonnance, des surtensions supérieures aux valeurs contractuelles admissibles sur les régleurs" (pages 20, 28, 40 bis, et 89) sont dénuées de tout fondement et que les incidents ont pour seule cause une " grave erreur de conception de régleurs" qui ne comportent "aucun anneau de répartition de potentiel ni aucun autre dispositif (déflecteur ou autre) "permettant de réduire les champs électriques entre phases sur le rotor" ou se sont produits les amorçages (page 91 et également pages 48 et 19, 20) ;

Considérant, de plus, que, selon les énonciations du rapport d'expertise technique - non contestée sur ce point par les sociétés ACEC dans leurs écritures devant la cour -, l'expert a constaté que les conseillers techniques de ces sociétés, Mr Chatelain, professeur à l'Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (Suisse) et Mr Legros, professeur à l'Institut d'Electricité de Montefiore à Liège (Belgique) ont reconnu, expressément et à plusieurs reprises, la fiabilité des essais pratiqués ainsi que le bien-fondé des conclusions susmentionnées qui en ont été tirées par l'expert (notamment pages 34, 39, 40, 43, 47, 75 et 91) ;

Considérant que l'absence alléguée d'incidents concernant la vente de régleurs dans le cadre d'un marché en Egypte est totalement inopérante à défaut de précision notamment sur les conditions de cette vente (existence ou non d'anneau de répartition de potentiel) et celles d'utilisation des régleurs ;

Considérant que, relevant le comportement incompréhensible, voire même inconcevable des sociétés ACEC ("on ne s'explique pas ... " page 91), qui, pour pallier l'absence d'anneau de répartition de potentiel, n'ont mis en place aucun dispositif adéquat ("déflecteur ou autre permettant de réduire les champs électriques entre phases sur le rotor" , " rayons de courbures indispensables aux pièces conductrices les plus voisines") et faisant état des résultats des essais effectués par le laboratoire belge Laborec et par le LCIE, ainsi que de la lettre du 30 janvier 1986 signée par Mr Koch, "chef du département, réglages en charge", de la société ACEC UM proposant la mise en œuvre d'essais par le LCIE sur des "régleurs ACEC équipés d'anneau de garde" (pages 43 et 47) l'expert a, de plus, estimé que les sociétés ACEC" savaient que les surtensions n'étaient pas à l'origine des incidents" (page 92) et "ne pouvaient ignorer, dès le début, l'origine des incidents qui affectaient leurs régleurs" (page 96) et a, ainsi, souligné la mauvaise foi des sociétés ACEC ;

Considérant que, dans ces conditions, la demande d'expertise technique complémentaire est totalement dénuée de pertinence et de fondement ;

2°) Sur l'action en garantie des vices cachés :

A) Sur la recevabilité et le bien-fondé de cette action :

Pour s'opposer à celle-ci, les sociétés ACEC soutiennent que, si l'absence d'anneau de répartition de potentiel est retenue comme la cause des désordres, il s'agit d'un vice apparent et "nécessairement" connu de la société FT pour les motifs suivants :

- "la révélation" de ce vice par le simple examen de la documentation fournie à l'époque par la société ACEC UM et par les informations transmises à la société FT par télex du 9 septembre 1981 et destinées au maître de l'ouvrage ;

- les énonciations de l'expert selon lesquelles "une personne avertie des problèmes relatifs à la haute tension et aux champs électriques ne peut qu'être surprise" de l'absence d'anneau de répartition de potentiel ainsi que l'attestation établie le 19 mai 1990 par le professeur Chatelain, qui affirme que "l'absence d'anneau de garde ne constitue pas un vice caché" ;

- "la très haute compétence de la société FT, en matière de construction de transformateurs électriques et en matière d'équipements électriques associés à ses propres constructions" (conclusions du 14 avril 1992 page 68) attestée par les dispositions de la norme CEI 214 (Commission Electrotechnique Internationale) aux termes desquelles "le constructeur du transformateur est responsable non seulement du choix d'un changeur de prise de niveau d'isolement convenable, mais aussi du niveau d'isolement des connexions reliant le changeur de prise et les enroulements du transformateur " ;

- la qualité de professionnel de la même spécialité que le vendeur que posséderait la société FT impliquant qu'elle connaissait ou aurait dû connaître le vice précité ;

- "les relations commerciales antérieures des parties (qui ont) porté sur la livraison de régleurs de conception identique ;

- le fait qu'il résulte du rapport de l'expert que celui-ci "avait pu se convaincre de la cause du vice dès son premier examen visuel d'un règleur démonté" (conclusions du 14 avril 1992 page 68) et ce, nonobstant la durée de l'expertise qui "visait à examiner l'influence d'autres facteurs " (ibidem page 66).

Considérant que l'absence de fonctionnement normal des régleurs, qui provient d'une défectuosité de ceux-ci (à savoir le défaut d'anneau de répartition de potentiel) les rendant impropres à l'usage auquel ils sont destinés constitue un vice affectant la structure ou la conception de la chose ;

Considérant que l'expert a relevé dans son rapport, d'une part, que l'absence d'anneau de répartition de potentiel" ne pouvait être décelé qu'après ouverture et démontage d'un régleur, les caractéristiques diélectriques données par les ACEC ne pouvant laisser supposer une telle erreur de conception "(page 91) et d'autre part, qu'il était légitime de croire que la société ACEC UM avait, pour pallier une telle absence, utilisé "des pièces de profil convenable... " "(déflecteur ou autre"), permettant de réduire les champs électriques entre phases sur le rotor" (page 91) ;

Considérant que, si l'expert - ainsi qu'il le note dans son rapport (notamment pages 42, 47, 72) - a eu très tôt l'intuition que l'absence d'anneau de répartition de potentiel était la cause du "claquage des régleurs, il n'en demeure pas moins que cet état de fait ne pouvait, pour les raisons susmentionnées, être considéré en lui-même comme un vice apparent et que surtout son rôle causal dans la réalisation des désordres très graves constatés (destruction des régleurs) n'a pu être établi avec certitude qu'à la suite de la mise en œuvre de deux types d'essais - essai d'endurance et essai de répartition de choc, - étant, au surplus, relevé que l'argumentation des sociétés ACEC est quelque peu contradictoire puisqu'elles excipent du caractère apparent du vice tout en déniant son rôle causal ;

Considérant que, dans ces conditions et en l'absence (ci-dessus relevée) de preuve de relations commerciales habituelles entre les parties, la société FT, quelle que soit sa compétence technique n'avait pas la possibilité d'avoir, au moment de la livraison, une connaissance effective des risques de l'absence d'anneau de répartition de potentiel, du rôle causal de cette absence dans la réalisation des désordres et, partant, de ses conséquences dommageables ;

Considérant que l'absence d'anneau de répartition de potentiel, qui n'était pas ainsi apparent dans son rôle causal et ses conséquences dommageables, constitue un vice caché au sens de l'article 1641 du Code civil ;

Qu'il s'ensuit que l'action en garantie des vices cachés est recevable et bien fondée.

B - Sur l'application des clauses limitatives de garantie contenues respectivement dans les conditions générales de vente du matériel industriel et dans les conditions générales de vente à l'exportation et sur la clause prévoyant "100 000 manœuvres sans maintenance" insérée au titre des "spécifications techniques " dans le contrat SOE / MG :

Pour justifier leur demande subsidiaire tendant à réduire l'indemnité mise à leur charge au coût des régleurs, les sociétés ACEC, - après avoir énoncé que la société FT, et elle-même sont des professionnels de la même spécialité (en raison tant du "domaine d'activité" de cette société que de "l'application des règles CEI qui définissent la responsabilité du fabricant du transformateur au regard du choix du régleur": (conclusions du 14 avril 1992 page 75 - 30) - se prévalent des clauses limitatives de garantie en prétendant :

- que celles stipulées dans les conditions générales de vente du matériel industriel sont applicables dans les rapports FT / ACEC France en sa qualité d'agent commercial, ces conditions générales "étant d'ailleurs annexées à la lettre de commande de la société France Transfo telle que produite par cette dernière en cours d'expertise" (conclusions du 14 avril 1992 3 - 1. 1er paragraphe page 76) ;

- que celles insérées dans les conditions générales de vente à l'exportation sont applicables dans les rapports FT / ACEC UM, quelle que soit la qualification donnée à ces rapports et à l'action exercée (action en garantie des vices cachés de l'acquéreur en cas de "vente directe" ou action aux mêmes fins du sous-acquéreur auquel la garantie du vendeur a été transmise dans les limites de celle-ci), étant souligné que, s'agissant en toute hypothèse d'une vente internationale pour la société ACEC UM, la vente est régie, à l'égard de cette société, par les conditions générales de vente à l'exportation ;

Les sociétés ACEC soutiennent en revanche que la clause prévoyant "100 000 manœuvres sans maintenance" n'est pas opposable à la société ACEC France pour n'avoir pas été portée à sa connaissance, et que cette clause ne saurait trouver application en ce qui concerne la société ACEC UM pour les motifs suivants :

* Elle ne constitue pas, dans le cadre du marché MG/SOE "une garantie contractuelle", car les conditions générales du contrat SOE/MG "priment" les "spécifications techniques" de ce même contrat qui comportent seules cette clause ;

* Elle ne saurait avoir pour effet de "déroger aux "conditions générales de vente" ACEC France et ACEC UM quant à la durée des garanties contractuelles ;

* Dans son "contexte anglo-saxon", elle ne visait que "l'absence d'intervention ou de remplacement important et non l'absence de tout entretien" (ibidem page 82) ;

Considérant que, même si, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, les clauses limitatives de garantie, dont ACEC UM et ACEC France demandent respectivement l'application, aboutissent, en l'occurrence, au même résultant à savoir la limitation de l'obligation de garantie au "coût des régleurs", ces clauses comportent, non seulement de différences importantes, notamment quant à leur durée et leurs modalités de mise en œuvre, mais sont contenues dans deux documents distincts et en principe incompatibles comme ayant chacun un champ d'application propre (les conditions générales de vente du matériel industriel pour les ventes internes, les conditions générales de vente à l'exportation pour les ventes internationales), alors que, pour les motifs sus-mentionnés, il s'agit d'une opération économique unique, les sociétés ACEC UM et ACEC France étant les co-contractantes de la société FT ;

Considérant que l'application cumulative, pour un même contrat, de ces deux sortes de conditions générales de caractère, en principe inconciliable, la disparité des clauses limitatives de garantie stipulées dans chacune d'elles ainsi que les difficultés pratiques inéluctables, sinon l'impossibilité juridique, de leur mise en œuvre excluent une acceptation certaine et exempte d'équivoque de ces clauses par la société FT ;

Considérant, en outre, que, selon les énonciations - non contestées - de l'expertise technique (page 5), le régleur en charge " n'est construit que par un petit nombre de sociétés", de sorte que ce type d'appareil relève d'une spécialité très particulière et suppose une compétence spécifique ;

Considérant que, dans ces conditions, la société FT, fabricant des transformateurs sur lesquels sont disposés des régleurs, ne peut être considérée comme étant de la même spécialité professionnelle que la société ACEC UM ;

Considérant, au surplus, que, pour les motifs sus-exposés et à "défaut de preuve de relations commerciales antérieures continues (le marché égyptien invoqué par les sociétés ACEC étant concomitant), la société FT n'était pas en mesure de détecter que la société ACEC UM avait omis de suppléer à l'absence d'anneau de répartition de potentiel par dispositif adéquat et ainsi d'apprécier les risques de cet état de chose et les conséquences dommageables pouvant en découler et, partant, d'accepter en connaissance de cause les clauses limitatives de garantie alléguées ;

Considérant que, sans même tenir compte de la clause de 100 000 manœuvres sans maintenance - bien que celle-ci ait été portée à la connaissance de la société ACEC UM (télex ACEC UM des 8 mai et 10 novembre 1981, bon de commande du 29 juin 1981) et acceptée formellement par cette dernière (télex du 10 novembre 1981), laquelle ne peut prétendre, sans avoir commis une négligence grave, ne pas en avoir informé sa filiale, co-contractante, ACEC France - il est démontré par l'expertise technique sus-analysée que les régleurs livrés à la société FT étaient impropres à l'usage pour lequel ils étaient conçus puisque les tensions dont ils devaient assurer la régulation et qui provoquaient leur destruction (amorçage) étaient inférieures aux "valeurs contractuelles" (notamment pages 39, 46, 75, 90 et 91) et en particulier à la garantie "standard" de 35 000 manœuvres (pages 40 bis et 95) ;

Que ces clauses doivent, en conséquence, être rejetées comme ne pouvant recevoir effet.

C) Sur l'application de l'article 1646 du Code civil :

Pour exclure l'application de l'article 1645 du Code civil et justifier celle de l'article 1646 du même Code, les sociétés ACEC font état, pour l'essentiel, des arguments suivants :

- "en matière de vente entre professionnels, notamment lorsqu'il s'agit de professionnels de la même spécialité, l'acquéreur ne peut invoquer à l'encontre du vendeur la présomption de connaissance du vice caché de la chose vendue" (conclusions du 14 avril 1922 - 5.4.4. page 157) ;

- "il lui appartient en cette hypothèse de rapporter, à l'encontre du vendeur, la preuve d'un comportement d'une extrême gravité confinant au dol et démontrant l'inaptitude du débiteur de l'obligation à l'accomplissement de ce à quoi il s'était engagé" "(ibidem page 157), ce qui ne serait pas le cas en l'espèce, dès lors que la société ACEC UM "a régulièrement soumis les régleurs vendus aux essais normatifs du Laboratoire Kema et a, antérieurement à la vente litigieuse, commercialisé dans le monde entier, notamment auprès de la société France-Transfo des matériels de conception identique qui n'ont fait l'objet d'aucune réclamation " (ibidem page 158) ;

Considérant que le vendeur professionnel ou le fabricant est tenu de connaître les vices de la chose vendue ou fabriquée ;

Considérant que, pour les motifs sus-mentionnés, la société FT d'une part, et les société ACEC UM et ACEC France d'autre part, ne sont pas des professionnels de la même spécialité ;

Considérant, en outre, que la qualité de professionnel de la société FT ne saurait, en l'espèce faire obstacle à l'application de l'article 1645 du Code civil dans le mesure où, pour les raisons sus-exposées le vice n'était pas, lors de la livraison, apparent ni en lui-même ni dans ses conséquences dommageables alors, en revanche, que les risques de l'absence d'anneau de répartition de potentiel ne pouvaient être légitimement ignorés des sociétés ACEC; qu'il ressort, en effet des résultats de l'expertise technique que les essais du Laboratoire de la Kema ne correspondent pas aux "contraintes réelles" de fonctionnement comme ne permettant pas une "simultanéité de l'application du courant et de la tension entre phases", (page 30 et également pages 22 et 23) et qu'aucun dispositif susceptible de pallier l'absence d'anneau de répartition de potentiel n'avait été mis en place ;

Que ce moyen invoqué pour faire échec à l'application de l'article 1645 du Code civil est donc inopérant.

3°) Sur l'action et non-conformité :

Les sociétés ACEC invoquent, pour l'essentiel, les arguments suivants :

- "les conditions générales de vente à l'exportation de la société ACEC UM et les conditions générales de vente du matériel industriel de la société ACEC France (pour le cas où cette dernière ne serait pas mise hors de cause en sa qualité de mandataire)" doivent recevoir application (conclusions du 9 décembre 1992 page 43) ;

- les clauses limitatives de responsabilité contenues dans ces conditions générales doivent être tenues pour valables dès lors que la société FT et elles-mêmes sont des professionnels de la même spécialité et que la preuve n'est pas rapportée d' "un comportement d'une extrême gravité confinant au dol" de leur part ;

- "l'absence d'anneau de garde, à supposer qu'elle constitue une non-conformité, était nécessairement connue de l'acquéreur tant en raison des livraisons antérieures que de la notice technique de la société ACEC Union Minière" (ibidem page 43) ;

- "l'agréation de la chose vendue couvre la non-conformité apparente", cette agréation, faute d'avoir été mise en œuvre, conformément aux stipulations contractuelles" à la diligence de l'acquéreur en présence d'un contrôleur du client SOE ... s'est effectuée lors de la livraison à l'usine de la société France-Transfo " (conclusions du 14 avril 1992 page 87, conclusions du 9 novembre 1992 page 43) ;

Considérant qu'à supposer que l'erreur de conception consistant à ne pas avoir muni les régleurs d'un anneau de répartition de potentiel ou d'un dispositif susceptible d'y suppléer puisse être tenu pour un défaut de conformité comme provenant de la livraison d'une chose différente de celle promise et que (malgré une évolution récente de la jurisprudence tendant vers un rapprochement, sinon une uniformisation, des décisions divergentes rendues en la matière civ. 1 5 mai 1993), le concours de l'action en garantie des vices cachés et de l'action en non-conformité demeure possible, ces deux actions produisent, en l'espèce, les mêmes résultats (sous réserve de l'application éventuelle des dispositions de l'article 1150 du Code civil invoquées par les sociétés ACEC dans le cadre de leurs prétentions relatives au préjudice, lesquelles seront examinées ci- dessous) ;

Considérant, en effet, que si, en matière de non-conformité de la chose vendue, les clauses limitatives de responsabilité sont, en principe, valables, alors même que les co-contractants sont des professionnels n'ayant pas la même spécialité, les clauses invoquées par les sociétés ACEC, qui, contenues pour chacune d'elles, dans des conditions générales de vente ayant leur domaine propre et soumises à des conditions d'application différentes, ne sont pas, pour les motifs sus-énoncés, opposables à la société FT faute d'avoir été acceptées, en connaissance de cause, par cette dernière ;

Considérant, au surplus et en tout état de cause, que la société ACEC UM, qui a omis de munir les régleurs d'un anneau de répartition de potentiel sans remédier à cette omission par d'autres dispositifs adéquats, ne pouvait ignorer, en tant que professionnel compétent et expérimenté, connaissant les conditions du marché, les risques sérieux de dysfonctionnement des régleurs et avait, partant, conscience des dommages pouvant en résulter, de sorte que les sociétés ACEC ont commis une faute lourde assimilable au dol, qui exclut l'application des clauses limitatives de responsabilité ;

Considérant, en outre, qu'à supposer (en l'absence, telle que résultant des énonciations précitées des ACEC, d'une réception conforme aux stipulations contractuelles) qu'une acceptation tacite ait eu lieu, cette dernière ne peut produire aucun effet puisque, pour les raisons sus-mentionnées, le défaut de conformité était non-apparent quant à son rôle causal et ses conséquences dommageables lors de la livraison des régleurs ;

Considérant que, sous les réserves précitées, l'action en non-conformité est donc, également, bien fondée ;

4°) Sur le préjudice :

A) Sur l'application des articles 1151 et 1150 du Code civil :

En ce qui concerne les liens de causalité, les sociétés ACEC considèrent comme indirects les préjudices, invoqués par les sociétés intimées, découlant du "rapatriement" en France des transformateurs-régleurs, de la modification des transformateurs, qualifiée de "modification de conception" et consistant à "placer les régleurs en milieu de phase", de leur nouveau transport en Irak, de la prolongation de la garantie postérieurement à l'expiration de la période de maintenance, et partant, de la "mise en conformité" de 61 sous-stations (sur 90) ayant fait l'objet d'une réception définitive, de la suspension, par le maître de l'ouvrage du paiement dû à la réception définitive sur le montant du marché, "celle-ci étant réputée acquise pour la majorité des sous-stations" (conclusions du 14 avril 1992. 8.1.5 page 163) ainsi que "des moyens en personnels et matériels allégués du "bureau permanent", de Bagdad, en invoquant pour l'essentiel, sur le "plan technique" et sur le "plan contractuel" les arguments suivants :

a) "au plan technique" :

- le caractère apparent ou aisément décelable de la "défaillance alléguée" rendrait inopérante "l'incertitude de l'origine des désordres" ou l'indétermination de la cause des dommages" invoquées par les sociétés intimées pour justifier la demande en réparation de ces préjudices ;

- "l'interchangeabilité" des régleurs ACEC et des régleurs MR attestée par la société Pauwels Trafo Service (lettre du 14 janvier 1992), par le Professeur Chatelain (lettre du 19 mars 1990) et par Mr Kock, ingénieur (lettre du 6 janvier 1992) aurait permis un remplacement, sur place en Irak, des premiers par les seconds, un "hall de décuvage" pouvant être réalisé " à moindre prix" dans ce pays ;

- la "pression du client de Merlin Gerin", évoquée par l'expert lui-même dans son rapport, aurait été le motif déterminant des opérations précitées de "mise en conformité" ;

- la mise en œuvre rapide par les sociétés MG et FT d'une expertise judiciaire, eu égard à la "sagacité de l'expert qui, dès ses premières opérations et de ses propres dires, avait perçu l'origine du vice qu'il a en définitive retenu" (conclusions du 14 avril 1992 page 101, conclusions du 9 décembre 1992 page 25) aurait évité l'engagement de "frais considérables", "à supposer que l'absence d'anneau de garde soit en définitive la cause des dommages allégués" (conclusions du 9 décembre 1992 page 25) ;

- dès réception du rapport du LCIE du 19 septembre 1986, il aurait été loisible aux sociétés MG et FT d'arrêter l'opération "gigantesque" de "rapatriement des transformateurs-régleurs "dès lors qu'elles entendaient soutenir ultérieurement que les transformateurs étaient hors de cause" (conclusions du 14 avril 1992 page 122) ;

b) "au plan contractuel" :

- la mise en demeure du maître de l'ouvrage de changer tous les transformateurs et régleurs a été faite sur le fondement de l'article 24-10 des conditions générales du "contrat 80E/MG" lequel, visant les malfaçons et/ou les non-conformités avant l'expiration de la période de maintenance, ne pouvait recevoir application en l'espèce que pour "32 % de sa réclamation", de sorte que la société MG a pris à son égard des engagements "excédant manifestement les limites de ses obligations ;

- les premiers juges - qui se sont fondés sur les dispositions de l'article 33. 7.6 du "contrat SOE/MG" prévoyant le maintien de la garantie du vendeur pour un "défaut apparu, malgré un "examen raisonnable",- après la réception définitive - n' avaient pas "compétence" pour procéder à une "requalification" du fondement de la demande du maître de l'ouvrage, laquelle relevait "exclusivement du pouvoir d'interprétation du juge du contrat" (conclusions du 14 avril 1992 page 117);

- le maître de l'ouvrage n'était pas en droit de se prévaloir des dispositions précitées dès lors que " le différé de la réception définitive (lui) est directement imputable" (ibidem page 162) ;

En ce qui concerne la " prévisibilité " du préjudice, les sociétés ACEC font valoir que "la garantie subséquente de l'installation", postérieure à la période de maintenance, constitue une manifeste dérogation" aux clauses-type" du "contrat FIDIC " établies par la Fédération Internationale des Ingénieurs-Conseils, contrat FIDIC qui, par son usage habituel", est la lex mercatoria" dans les relations internationales lorsqu'il y est fait référence" (ibidem page 124) et que dès lors, la prise en charge des conséquences pécuniaires d'une telle garantie "ne pouvait pas entrer dans le champ de prévision du vendeur" (ibidem 8.2 page 163) ,

Considérant, en ce qui concerne le lien de causalité des chefs de préjudice précités, que les arguments invoqués par les sociétés ACEC sous la rubrique "au plan technique" sont totalement dénués de pertinence dès lors notamment :

- que, par leur répétition et leur gravité (destructions des régleurs), les désordre mettaient en péril le fonctionnement du réseau électrique de l'Irak ;

- qu'au moment même de la décision de "rapatriement" des transformateurs-régleurs, il existait alors une incertitude sur la cause des désordres (conception défectueuse des transformateurs ou des régleurs) et il était nécessaire, étant donné leur nombre et leur gravité, de remédier à ces désordres dans des conditions de fiabilité suffisante, d'où le remplacement des régleurs ACEC par des régleurs MR de fabrication allemande, qui, à la différence des régleurs ACEC, avaient parfaitement résisté aux essais d'endurance effectués (selon un protocole accepté par les parties) de mai à août 1986 par le LCIE ainsi que la disposition des régleurs au milieu des enroulements des transformateurs dans le but de rendre les régleurs moins vulnérables à d'éventuelles surtensions ;

- que les sociétés ACEC ont contesté avec constance (même si les motifs allégués ont varié) les résultats précités des essais du LCIE (qu'elles invoquent néanmoins pour les besoins de leur présente argumentation), se sont enquis, lors des premières opérations d'expertise (notamment au cours de la réunion du 18 mars 1987), du "rapatriement" des transformateurs-régleurs (qui s'est poursuivi - départ Irak jusqu'à fin mai 1987 - rapport d'expertise financière pages 28 - 30), non pour en demander la cessation, mais pour se préoccuper des garanties de conformité du matériel rapatrié (rapport d'expertise technique pages 17 et 20) ;

- que, selon le rapport d'expertise technique (page 93), la nature des opérations à mettre en œuvre (remplacement des régleurs ACEC par des régleurs MR qui ne peut se faire par une simple substitution en raison du nombre plus élevé des plots actifs de ces derniers, modification des transformateurs par suite de la disposition des régleurs "en milieu de phase" pour les raisons précitées, "traitement sous vide" pour le décuvage des transformateurs, utilisation d'un générateur de choc de type 250 KV pour les essais), leur nombre important ainsi que le souci de les effectuer dans des conditions de fiabilité satisfaisante en évitant notamment les inconvénients et les risques inhérents aux sujétions climatiques (en particulier poussières de sable) imposaient leur réalisation en France ;

Considérant que les attestations précitées du Professeur Chatelain, de. Mr Etienne Kock (signataire de la lettre ACEC UM du 30 janvier 1986 en qualité de "chef de département-réglage en charge" de la société ACEC UM) et de la société belge Pauwels Trafo Service, qui font état de la possibilité de procéder au remplacement des régleurs en Irak, ne peuvent recevoir crédit dans la mesure où elles ont été établies a posteriori après la détermination certaine (en dépit d'une contestation acharnée et persévérante des sociétés ACEC) de l'origine des désordres mettant en péril le réseau électrique de l'Irak ;

Considérant que, dans le cadre de l'appréciation du préjudice subi par les sociétés intimées et en présence des contestations des sociétés ACEC concernant ce préjudice, les premiers juges avaient le pouvoir et même l'obligation de déterminer si la société MG était contractuellement tenue de réparer les désordres affectant les sous-stations, survenus après la réception définitive de ces dernières ;

Considérant que les dispositions de l'article 33 - 7 .6 du "contrat SOE/MG" - dont la signification et la portée ne sont pas contestées - faisaient obligation à la société MG de remédier pour les sous-stations ayant fait l'objet d'une réception définitive, à la défectuosité des régleurs dont l'origine n'avait pu être décélée avec certitude qu'à la suite des essais précités effectués au cours de l'expertise judiciaire de sorte que les travaux de remise en état ne peuvent être attribués à des préoccupations d'ordre commercial dépourvues de valeur juridique et de force obligatoire et que les retards allégués des réceptions définitives sont indifférents ;

Considérant de plus que les travaux de remise en état des sous-stations et la prolongation corrélative de la période de maintenance constituent des charges qui excédaient celles que devait normalement assumer le "bureau permanent" de la société MG à Bagdad ;

Qu'il s'ensuit que les chefs de préjudice précités ont un lien de causalité direct avec la défectuosité des régleurs ;

Considérant, en ce qui concerne l'application de l'article 1150 du Code civil, que ce texte ne s'applique pas en matière de garantie des vices cachés, le vendeur ou le fabricant étant tenu, en vertu de l'article 1645 du Code civil, à réparer tous les dommages qu'a causé la chose ;

Considérant que, en matière de responsabilité contractuelle pour inexécution de l'obligation de délivrance d'une chose conforme, le caractère prévisible du préjudice, apprécié in abstracto, s'induit de la nature, de l'objet, des circonstances de la vente ainsi que de la qualité du vendeur ;

Considérant qu'en l'espèce, les sociétés ACEC ne rapportent pas la preuve que l'obligation, stipulée dans un contrat international, de réparer les défauts de conformité après la délivrance d'un certificat de réception définitive lorsque, "un examen raisonnable " n'avait pu en permettre préalablement la découverte, revêt, en l'absence de toute référence au contrat FIDIC, un caractère imprévisible au regard des usages du commerce international, compte tenu notamment de l'objet et de l'importance du marché et de son lieu d'exécution, alors, au surplus, que la clause imposant pour les régleurs "100 000 manœuvres sans maintenance" - dont, pour les motifs sus-énoncés, les sociétés ACEC, avaient été informées et avaient certifié la conformité du matériel livré à cette "spécification technique (lettre du 10 novembre 1981) - laissait clairement entendre que l'obligation de garantie n'était pas nécessairement liée ou limitée à une condition de durée ou à la réception définitive des travaux ;

Considérant, en outre, que, pour les motifs sus-mentionnés, les sociétés ACEC ont commis une faute lourde, assimilable au dol, faisant obstacle à l'application de l'article 1150 du Code civil ;

Considérant que les moyens fondés sur les dispositions des articles 1151 et 1150 du Code civil pour exclure comme indirects ou comme imprévisibles les chefs de préjudice sus-mentionnés sont, en conséquence, inopérants ;

B) Sur la demande subsidiaire d'expertise financière nouvelle ou complémentaire :

A l'appui de cette demande, les sociétés ACEC invoquent, pour l'essentiel :

- la "vacuité de l'analyse financière du rapport" (conclusions du 14 avril 1992 page 127), l'expert ayant uniquement procédé à un contrôle par sondage des factures émises ou réglées par la société France-Transfo sans l'assortir d'un contrôle de vraisemblance ;

- l'absence de justification :

* de la perte de chiffre d'affaires de la société FT imputée à des "choix dans ses prises de commandes ou à des retards dans l'exécution de celles-ci (conclusions du 9 décembre 1992 page 31), alors que, selon les sociétés ACEC, "il ressort des comptes de France-Transfo qu'en 1985 et 1986, cette société n'a pas été en mesure de vendre toute sa production (lettre de leur conseiller financier du 14 décembre 1992 et note de ce dernier du 26 mai 1990) ;

* des coûts salariaux qui seraient considérablement surévalués ;

* des frais financiers consécutifs aux retards des paiements imputés à la suspension de ceux-ci par SOE à la suite des désordres ;

* des frais du "bureau permanent" de la société MG à Bagdad, lesquels constitueraient "des charges fixes indépendantes de la "prétendue défaillance" des régleurs, la société M.G devant disposer "de personnels et matériels nécessaires à son activité locale" (conclusions du 14 avril page 119) ;

* des commissions sur caution et de l'assurance TRC ;

- la contradiction que comporterait ce rapport en ce que l'expert a exclu pour la société MG la baisse par elle alléguée de son chiffre d'affaires alors qu'il l'a admise pour la société FT ;

- l'irrégularité de la transaction du 29 décembre 1986 qui a été mise partiellement à exécution avant d'avoir fait l'objet d'une autorisation par le Conseil d'administration ;

- la prise en considération de factures postérieures au 31 décembre 1986, alors que le rapport du Commissaire aux comptes de la société FT mentionne que "les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 1986 ont enregistré le solde des charges afférentes à ces risques" (risques liés à l'exportation) ainsi que la prise en compte de frais excédant la provision constituée pour l'exercice 1986.

Considérant qu'après avoir effectué une vérification de la réalité des dépenses et de leur relation causale avec les opérations de " mise en conformité" des sous-stations électriques, l'expert a procédé - contrairement aux allégations précitées des sociétés ACEC - à un contrôle de vraisemblance pour les années 1984 à 1987, portant notamment sur l'excédent brut d'exploitation (pages 63 à 68) ;

Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise financière que c'est à juste titre que l'expert :

- a exclu, en ce qui concerne les frais généraux, la quote-part inclus par la société MG dans son préjudice dans la mesure où il n'a constaté aucun "indice de baisse ou de progression moindre du chiffre d'affaires pour cette société et l'a retenu pour la société FT dès lors qu'il a relevé que, "à frais généraux ou coût de structure constants", la " mise en conformité" des sous-stations - englobant l'ensemble des prestations nécessaires (rapport pages 53 - 54) et non pas seulement "la fabrication de transformateurs neufs" comme inexactement allégué par les ACEC (conclusions du 14 avril 1992 page 142) - a été pour cette société "une activité stérile", étant, au surplus, observé que d'une part, la surproduction alléguée par les sociétés ACEC pour l'année 1986 n'implique pas que le personnel employé aux opérations de "mise en conformité" des sous-stations électriques aurait été maintenu dans un état d'inactivité ou affecté à des travaux inutiles ou peu rentables et que, d'autre part, les opérations de "mise en conformité" se sont poursuivies en 1987 (dernier chargement de transformateurs-régleurs en Irak en mai 1987) et ont concerné 88 transformateurs-régleurs sur 191 (rapport page 28) ;

- a déterminé les coûts salariaux, pour la société MG en fonction du salaire moyen, du "forfait export" et des charges sociales (rapport page 41) et pour la société FT, en y incluant - pour les motifs précités - une majoration d'un taux d'un montant normal pour les frais généraux (rapport page 57) ;

- a tenu compte pour les sociétés MG et FT :

* des frais financiers consécutifs à la suspension des paiements par le maître de l'ouvrage, justifiée par les désordres graves affectant de nombreuses sous-stations électriques, ces retards dans les paiements, ayant obligé ces sociétés à se procurer des ressources financières "de manière onéreuse" (rapport page 47 et 59), dont le coût financier, qui en est résulté, a été évalué par l'expert entre 34 et 42 millions de F (page 62);

* des frais du "bureau permanent" de Bagdad, une partie de l'activité de cet établissement dont le personnel a dû être "renforcé", ayant été consacrée aux prestations de travail diverses nécessaires à la "mise en conformité" des sous-stations électriques (rapport page 42) ;

* des commissions des cautions bancaires, lesquelles ont dû être prolongées jusqu'à l'expiration de la nouvelle période de maintenance commençant à courir après achèvement des travaux de "mise en conformité" des sous-stations électriques (rapport page 38) ;

* de l'assurance TRC destinée à couvrir les risques inhérents aux travaux de démontage et remontage des transformateurs ;

Considérant que l'insuffisance alléguée de la provision pour risques n'est pas de nature à démontrer une absence d'engagement des frais dont la réalité a été vérifiée par l'expert ;

Considérant que l'irrégularité de la transaction MG/ FT du 29 décembre 1986 - pour autorisation tardive du conseil d'administration - est sans incidence sur l'évaluation du préjudice ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande d'expertise financière nouvelle ou complémentaire.

C) Sur le montant du préjudice :

Considérant que, sur le fondement du rapport d'expertise sus-analysé et pour des motifs que la Cour fait siens, la juridiction consulaire a fait, à la date du prononcé de sa décision, une juste appréciation du préjudice subi par la société FT (y compris celui relatif aux frais financiers) et résultant des opérations de "mise en conformité" par suite de la défectuosité des régleurs ;

Considérant que, dans la limite de l'appel le jugement déféré sera confirmé sauf en ce qui concerne ses dispositions relatives au point de départ des intérêts au taux légal et au rejet de la demande de la société MG au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Considérant qu'il convient, en conséquence, par voie de réformation partielle de dire que, en application de l'article 1153-1 du Code civil les intérêts au taux légal seront dus à compter du 19 décembre 1990, date du prononcé du jugement déféré et d'allouer à la société MG au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, pour les frais exposés en première instance et en cause d'appel la somme de 50 000 F, la mise en cause de cette société par la société FT ayant été utile aux débats en permettant notamment une meilleure appréhension de ses relations contractuelles avec SOE et de leurs conséquences quant à l'évaluation du préjudice;

Considérant que, ajoutant au jugement déféré, il convient également de préciser que la vente des régleurs est intervenue entre d'une part, les sociétés ACEC UM et ACEC France et d'autre part, la société FT et que la résolution de cette vente est prononcée entre lesdites parties et de faire droit, dans les conditions de l'article 1154 du Code civil, à la demande de capitalisation des intérêts formée par la société FT ;

Considérant qu'il est équitable d'attribuer à la société FT sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, pour les frais exposés en cause d'appel, la somme de 150 000 F ;

Considérant, en revanche, que les autres demandes des parties seront rejetées ;

Par ces motifs : - Joint les instances inscrites au rôle général de la cour sous les numéros 91-1656 et 91-14049 ; Donne acte à la société Merlin-Gerin de ce qu' " elle intervient aux lieu et place de l'ancienne société Merlin-Gerin" ; Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne ses dispositions relatives au point de départ des intérêts aux taux légal et au rejet de la demande de la société MG au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; - Le réformant partiellement sur ces points, - dit que les intérêts au taux légal seront dus à compter du 19 décembre 1990, date du prononcé du jugement déféré ; - Condamne solidairement les sociétés ACEC UM et ACEC France à payer à la société Merlin-Gerin, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour les frais par elle exposés en première instance et en cause d'appel, à la somme de 50 000 F ; - Ajoutant au jugement déféré, dit que la vente des "régleurs en charge" est intervenue entre, d'une part, les sociétés ACEC Union Minière et ACEC France et, d'autre part, la société France- Transfo et que la résolution de cette vente est prononcée entre lesdites sociétés ; Dit que les intérêts au taux légal seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ; Condamne solidairement les sociétés ACEC Union Minière et ACEC France à payer à la société France-Transfo en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, pour les frais par elle exposés en cause d'appel, la somme de 150 000 F ; Rejette les autres demandes des parties; Condamne solidairement les sociétés ACEC Union Minière et ACEC France aux dépens; Admet la société Civile Professionnelle Dauthy-Naboudet, avoués de la société France-Transfo et la société Civile Professionnelle Varin-Petit, avoués de la société Merlin-Gerin, au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.