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Décisions

Cass. com., 15 octobre 1991, n° 90-10.180

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Chopinet

Défendeur :

Société moderne d'électronique (SARL), SAVA Crédit (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Apollis

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, SCP Waquet, Farge, Hazan

Bordeaux, 2e ch., du 26 oct. 1989

26 octobre 1989

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux 26 octobre 1989) que, pour l'achat d'un matériel de protection contre le vol que lui a livré la Société moderne d'électronique (société SME), Mme Chopinet a souscrit un emprunt auprès de la société SAVA Crédit (société SAVA) ; que Mme Chopinet, qui n'a pas été satisfaite de l'installation et qui ne s'est pas acquittée des mensualités de remboursement de son emprunt, a formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer prise à son encontre à la requête de la société SAVA et a assigné la société SME en résolution de la vente en raison du vice de la chose vendue et du prétendu manquement de cette société à son obligation de conseil ;

Attendu que Mme Chopinet fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de son action, alors, selon le pourvoi, que, de première part, tout vendeur est tenu de garantir l'acquéreur des défauts cachés de la chose vendue rendant celle-ci impropre à l'usage auquel elle est destinée ; que l'existence du vice s'apprécie au jour de la vente et, s'il est établi, l'acquéreur a le choix entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire, le vendeur ne pouvant lui imposer une autre solution, notamment la modification de la chose vendue ; qu'ayant constaté l'existence de difficultés d'utilisation et en s'abstenant néanmoins de rechercher, comme elle y avait été invitée, si le seul fait pour la venderesse d'avoir, à la suite de la dénonciation de ces difficultés d'utilisation, proposé purement et simplement de refaire l'installation ne suffisait pas à établir que la première installation présentait un défaut caché rendant la chose impropre à l'usage auquel elle était destinée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1641 du Code civil ; alors que, de deuxième part, tout professionnel, qu'il soit vendeur ou locateur d'ouvrage, est tenu d'une obligation de conseil et de renseignements ; que l'entreprise, spécialiste de la vente et de l'installation de matériel électronique d'alarme destiné à la protection des magasins contre le vol, est tenue de concevoir et de réaliser le système de protection susceptible d'obtenir le résultat escompté ; qu'en l'espèce, il appartenait donc à la venderesse, spécialiste à qui Mme Chopinet avait demandé de réaliser un système de protection de son magasin contre le vol, de proposer et d'installer le matériel adéquat ; qu'en déclarant que Mme Chopinet aurait dû se préoccuper, avant de passer commande, du résultat exigé par son assureur et qu'il n'était pas prouvé qu'elle eût suffisamment précisé au vendeur les performances exactes qu'elle attendait du matériel acquis, la cour d'appel a violé les articles 1602, 1615, 1135 et 1147 du Code civil ; alors que, de troisième part, les juges sont tenus de statuer dans les limites du débat telles que fixées par les conclusions des parties ; que la venderesse n'avait pas soutenu que Mme Chopinet ne lui aurait pas suffisamment précisé les performances exactes qu'elle attendait du matériel acquis ; qu'en se fondant d'office sur un tel motif sans avoir préalablement provoqué les explications des parties, la cour d'appel a violé le principe de la contradiction et l'article 16 du nouveau Code de procédure civile, a méconnu les termes du débat en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; alors que, de quatrième part, lorsqu'elle infirme un jugement, la cour d'appel est tenue d'examiner les motifs par lesquels les premiers juges s'étaient prononcés ; qu'en imputant à faute à Mme Chopinet le fait d'avoir fait démonter le matériel et de l'avoir adressé à l'organisme de crédit, sans examiner les motifs selon lesquels Mme Chopinet avait pu légitimement penser que cet organisme n'était qu'une émanation de la venderesse compte tenu des énonciations du bon de commande et de l'injonction à elle adressée par ledit organisme de lui restituer le matériel, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors que, enfin, en ne précisant pas les raisons pour lesquelles elle ne confiait pas à l'expert par elle désigné pour indiquer la valeur actuelle marchande du matériel la mission également de déterminer si le matériel était atteint d'un vice le rendant impropre à l'usage auquel il était destiné, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 143 et 146 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé que, sans même répondre aux propositions du vendeur qui lui avait offert une mise au point et une extension du système de protection contre le vol, Mme Chopinet a fait démonter le matériel, l'arrêt retient souverainement que celle-ci n'a pas rapporté la preuve que la chose vendue était affectée d'un vice caché la rendant impropre à l'usage auquel elle était destinée ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces de la procédure qu'aux prétentions de Mme Chopinet, selon lesquelles la société SME aurait manqué à son obligation de conseil, cette société a répondu qu'il appartient à tout client, et notamment à un commerçant avisé, de faire préalablement à son achat une enquête suffisante, que c'est donc sans violer le principe de la contradiction, ni méconnaître l'objet du litige que l'arrêt retient souverainement des éléments de preuve qui lui ont été soumis, que Mme Chopinet ne rapporte pas la preuve qu'elle a suffisamment précisé à son vendeur les performances exactes qu'elle attendait du matériel qu'elle lui a ensuite acheté ;

Attendu, enfin, qu'ayant ordonné une expertise, il ne peut être fait grief à la cour d'appel de n'avoir pas motivé une telle décision qui ne relève que de son seul pouvoir d'appréciation, ni de n'avoir pas répondu à des conclusions sur lesquelles elle a réservé sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.