CA Douai, 1re ch., 28 octobre 2002, n° 00-04733
DOUAI
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Coudeville
Défendeur :
Applitex (SARL), Bondroit (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
Mme Roussel
Conseillers :
Mmes Turlin, Courteille
Avoués :
SCP Masurel-Thery, SCP Deleforge-Franchi
Avocats :
SCP Poddevin Dufour Carlier, SCP Deschryver Lebas.
Faits - procédure - prétentions des parties:
Par ordonnance de référé en date du 3 août 2000, à laquelle il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions et moyens respectifs des parties, le Président du Tribunal de grande instance de Dunkerque, dans un litige opposant Monsieur Christophe Coudeville à la SARL Applitex et à Maître Bondroit, ès qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Applitex, a:
- dit n'y avoir lieu à rétractation de l'ordonnance rendue le 10 mars 2000 par le Président du Tribunal de grande instance de Dunkerque à la requête de la SARL Applitex et de Maître Bondroit, en qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Applitex;
- débouté Monsieur Christophe Coudeville ;
- condamné Monsieur Christophe Coudeville à payer à la SARL Applitex et à Maître Bondroit, en qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Applitex la somme de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Cette décision a été frappée d'appel par Monsieur Christophe Coudeville qui, par conclusions signifiées le 11 décembre 2000, demande à la cour de réformer l'ordonnance entreprise et, vu les articles 496 alinéa 2 et 497 du NCPC, de prononcer la rétractation de l'ordonnance rendue pour absence de motifs légitimes.
En outre, il sollicite la condamnation de la SARL Applitex et de Maître Bondroit, in solidum, au paiement des sommes de:
* 20 000 F de dommages et intérêts pour le préjudice moral grave subi résultant de l'atteinte à la vie privée
* 5 000 F pour procédure abusive;
* 5 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.
Par conclusions signifiées le 29 mars 2001, la SARL Applitex et Maître Bondroit, en qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Applitex, demandent à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise et de débouter Monsieur Christophe Coudeville de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
En outre, ils sollicitent la condamnation de Monsieur Christophe Coudeville au paiement de la somme de 5 000 F à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et dilatoire et à celle de 20 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.
Par ailleurs, par conclusions procédurales déposées le 6 septembre 2002, la SCP d'avoués constituée sur les intérêts de la SARL Applitex demande de lui donner acte de sa nouvelle dénomination sociale : "SCP F. Deleforge et B. Franchi". Le Ministère public a pris ses observations en date du 28 février 2002.
L'analyse plus ample des moyens et des prétentions des parties sera effectuée à l'occasion de la réponse qui sera apportée à leurs écritures opérantes.
L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance en date du 25 juin 2002.
Discussion:
1: A titre préalable, il y a lieu de donner acte à la SCP d'avoués constituée sur les intérêts de la SARL Applitex de sa nouvelle dénomination sociale.
2: Sur la demande en rétractation de Christophe Coudeville
Au soutien de son appel, Christophe Coudeville prétend pour l'essentiel qu'il n'existait pas de motifs légitimes fondant la requête aux fins de nomination d'un huissier pour se rendre au domicile du concluant afin de procéder à différentes constatations et se faire remettre les documents liant Christophe Coudeville à la société Maxem en sorte que l'ordonnance du 10 mars 2000 ayant autorisé ladite nomination doit être rétractée.
A cet égard, il fait valoir que les faits allégués à l'appui de la requête sont inexacts. Ainsi, il conteste l'existence d'une action concertée entre lui et la société Maxem. Il indique que sa démission au sein de la société Applitex est justifiée par un profond désaccord entre les deux parties sur la gestion de l'entreprise et qu'il est totalement étranger à la rupture des relations commerciales entre la société Applitex et la société Maxem. Par ailleurs, il soutient qu'à défaut d'avoir perçu l'indemnité mensuelle due contractuellement en contrepartie de l'obligation de non-concurrence stipulée à son contrat de travail, il était déliée de ladite clause.
Il s'observe cependant que la requête déposée par la société Applitex était fondée sur une action concertée apparue en été 1999 entre Christophe Coudeville et la société Maxem en lien avec la rupture sans préavis des relations contractuelles existantes entre la requérante et la société Maxem, la démission de Christophe Coudeville de son poste de directeur commercial et l'ouverture d'un établissement secondaire de la société Maxem à Dunkerque à une adresse correspondante au domicile de Christophe Coudeville.
Et, que la société Applitex faisait état d'un comportement de Christophe Coudeville de nature à caractériser une entreprise de concurrence déloyale par détournement de clients.
Il résulte des pièces annexées à ladite requête, au demeurant non remises en cause par aucun élément du dossier, dont la lettre de Christophe Coudeville en date du 14 août 1999, la copie de la base de données BIL (base d'informations légales) et le fax adressé par Christophe Coudeville à la veille de ses congés, et des pièces produites aux débats dont le procès-verbal de constat de Maître Thierry Doco, huissier de justice, en date du 18 mars 2000 et l'extrait du Répertoire Sirène en date du 6 juillet 2000, que la SARL Applitex et Maître Bondroit, pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Applitex disposaient bien d'un motif légitime pour solliciter les opérations de constat par voie d'ordonnance sur requête.
En effet et ainsi que justement apprécié par le premier juge, Christophe Coudeville qui a effectivement ouvert un établissement secondaire de la société Maxem à son propre domicile dunkerquois, a également et avant la démission de son emploi de directeur commercial de la société Applitex, fait livrer directement par la société Maxem des clients de la société Applitex.
De même, il a aussi informé les clients d'Applitex de la date de ses congés annuel et demandé auxdits clients de transmettre directement leurs commandes à un numéro de télécopie qui était celui de la société Maxem en Belgique.
Enfin, il sera ajouté que les arguments de Christophe Coudeville tendant à faire valoir qu'il n'a pas détourné de clientèle, qu'il n'a pas commis d'acte de concurrence déloyale et que la clause de non concurrence ne lui serait pas applicable en l'espèce restent inopérants en la cause pour excéder les pouvoirs du juge saisi en la forme des référés d'une demande en rétractation d'une ordonnance sur requête.
En conséquence, l'ordonnance du 3 août 2000 entreprise sera confirmée.
3 : Sur les autres demandes:
Christophe Coudeville ne démontre pas en quoi il aurait subi un préjudice moral grave résultant de l'atteinte à la vie privée alors que Maître Thierry Doco, huissier de justice, a agi sur et aux fins d'une décision de justice exécutoire et qu'aucun fait de nature à porter atteinte à la vie privée n'est caractérisé en la cause.
En conséquence, sa demande en dommages et intérêts formulée de ce chef sera rejetée.
Les éléments du dossier ne permettent pas de retenir que la procédure engagée par la société Applitex et Maître Bondroit, en qualité d'administrateur judiciaire de ladite société, serait abusive.
De même, la société Applitex et Maître Bondroit, en qualité d'administrateur judiciaire de ladite société, ne caractérisent pas en quoi la procédure suivie par Christophe Coudeville serait abusive ou même dilatoire.
En sorte qu'il ne sera pas fait droit à la demande respective des parties en dommages et intérêts.
Christophe Coudeville, succombant en sa demande, ne saurait prétendre à l'allocation d'une indemnité procédurale.
Alors que l'équité et les circonstances de la cause justifient de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit des intimés, laquelle sera ramenée à la somme totale et forfaitaire de 1 525 euro.
Par ces motifs : - Donne acte à la SCP d'avoués, constituée sur les intérêts de la SARL Applitex, de sa nouvelle dénomination sociale: "SCP F. Deleforge et B. Franchi". - Confirme l'ordonnance rendue par le Président du Tribunal de grande instance de Dunkerque le 3 août 2000, sauf à ramener l'indemnité procédurale à la somme totale et forfaitaire fixée au présent dispositif. Y ajoutant : - Rejette la demande en dommages et intérêts pour préjudice moral présentée par Monsieur Christophe Coudeville. - Rejette la demande en dommages et intérêts pour procédure abusive formée par Monsieur Christophe Coudeville. - Rejette la demande en dommages et intérêts pour procédure abusive formée par la SARL Applitex et Maître Bondroit, ès qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Applitex. - Condamne Monsieur Christophe Coudeville à payer à la SARL Applitex et à Maître Bondroit, ès qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Applitex, la somme totale et forfaitaire de 1 525 euro en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. - Condamne Monsieur Christophe Coudeville aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile au profit de la SCP F. Deleforge et B. Franchi, avoués associés.