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Décisions

CA Bourges, 1re ch., 29 juin 1992, n° 940-91

BOURGES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bragnikov

Défendeur :

Lelarge, Cabiran

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Baudron (faisant fonction)

Conseillers :

MM. Gautier, Gouilhers

Avoués :

Mes Le Roy Des Barres, Guillaumin, Tracol

Avocats :

Mes Tanton, Chevasson

TGI Bourges, du 13 mai 1991

13 mai 1991

M. Bragnikov est appelant d'un jugement du 13 mai 1991, du Tribunal d'instance de Bourges (Cher) qui, après expertise :

- a prononcé la résolution de la vente du véhicule Austin consentie par M. Bragnikov à M. Lelarge ;

- a ordonné la restitution du véhicule à l'appelant et condamné ce dernier à rembourser le prix de vente (17 000 F) et à payer 3 744 F pour frais divers exposés par l'acquéreur ;

- a débouté M. Bragnikov de son appel en garantie contre son précédent vendeur, M. Cabiran ;

- a condamné M. Bragnikov à payer à Messieurs Lelarge et Cabiran 2 000 F chacun par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

- a condamné M. Bragnikov aux dépens, frais de référé et d'expertise compris ;

L'appelant soutient :

- qu'il a vendu un véhicule à la côte Argus, sans aucune garantie,

- que les vices relevés par l'expert étaient aisément indentifiables et qu'il n'y a pas de vice caché ;

- qu'en cas de vice caché, il faudrait encore que ce dernier rende le véhicule impropre à l'usage auquel il était destiné ;

- qu'il a acquis le véhicule de M. Cabiran le 18 septembre 1989 et l'a revendu le 12 octobre suivant ;

- qu'il ne peut être responsable en 3 semaines et 135 Km des vices qui affectent le véhicule ;

- que l'action en garantie contre M. Cabiran doit donc prospérer ;

- que M. Cabiran n'a jamais mentionné que le kilométrage, notoirement faux, n'était pas garanti alors qu'il en avait l'obligation ;

- qu'il n'a pas pu conserver le véhicule litigieux en raison d'un accident dont il avait été victime ;

Il conclut au débouté de la demande de Lelarge, subsidiairement à la garantie de Cabiran et à la condamnation de ce dernier à lui verser 2 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

M. Lelarge réplique :

- que les vices n'étaient décelables qu'en se glissant sous le véhicule ou en montant ce dernier sur un pont ;

- que l'expert a dû démonter de nombreuses pièces dans un garage ;

- qu'ainsi, le vice n'était pas apparent ;

- que Bragnikov connaissait le vice comme le démontrent ses allusions aux petites réparations nécessaires et son refus de dénoncer son précédent vendeur ;

- que la vente rapide du véhicule n'était motivée que par sa hâte à s'en débarrasser;

- que M. Bragnikov est d'une parfaite mauvaise foi ;

Il conclut à la confirmation sauf à dire que la restitution du prix se fera sous huit jours, passé lequel délai courront les intérêts légaux. Il sollicite 15 000 F pour immobilisation du véhicule, 3 744 F en remboursement des frais engagés et 5 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

M. Cabiran fait valoir :

- qu'il a vendu 6 000 F un véhicule en bon état ;

- qu'il a porté à la connaissance de Bragnikov le kilométrage réel du véhicule soit environ 80 000 Kms ;

- qu'il n'aurait pas vendu 6 000 F un véhicule de 20 765 Kms ;

- qu'il a d'ailleurs déposé 5 800 F sur son compte bancaire ;

- que Bragnikov a entravé la mission de l'expert en se refusant à lui communiquer les coordonnées de son précédent vendeur ;

- que Bragnikov était chauffeur routier de profession et devait connaître les vices ;

- qu'il a commis les désordres constatés et revendu 17 000 F le véhicule acquis en faisant un gain substantiel ;

Il conclut à la confirmation et sollicite 4 500 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Motifs,

Attendu qu'en des énonciations précises, par des motifs pertinents que la cour adopte expressément, le premier juge a justement exposé les faits, pertinemment répondu aux moyens des parties et tiré les exactes conséquences légales de ses constatations ;

Attendu que le 12 octobre 1989, M. Lelarge a acquis de M. Bragnikov au prix de 17 000 francs un véhicule Austin qui s'est si rapidement révélé défectueux que le 18 octobre, il lui faisait passer un test de contrôle qui se montrait désastreux et interdisait l'utilisation jusqu'à remise en état ;

Attendu qu'il ressort du rapport de l'expert M. Delacotte, que l'automobile présentait des jeux et déformations dus notamment à un choc violent d'avant vers arrière sous la caisse, provoquant la déformation du plancher avant droit du berceau arrière, de la jupe et du passage de roue arrière droit ; que l'expert précise bien à la fin de son rapport que les vices n'étaient pas décelables par un profane lui-même ayant dû opérer dans un garage avec un pont élévateur, et mettaient en jeu la sécurité des occupants ;

Attendu qu'interrogé par l'expert, M. Bragnikov a déclaré contre toute vraisemblance ne pas se souvenir du nom et de l'adresse de son précédent vendeur, alors que la transaction remontait à 3 semaines ;

Attendu que M. Bragnikov était chauffeur routier et ne peut prétendre ignorer, en qualité de professionnel, les vices dont étaient atteints le véhicule ;

Attendu ainsi que l'action en résolution de la vente pour vice caché est parfaitement fondée ;

Attendu que M. Bragnikov toujours en qualité de professionnel, n'aurait pu que se rendre compte de la défectuosité préexistante du véhicule vendu par M. Cabiran d'autant que, selon ses propres écritures, les défauts lui paraissent tellement évidents qu'il leur conteste la qualité de vice caché ; qu'en un tel cas, il n'eut cependant pas procédé à l'acquisition du véhicule ;

Attendu ainsi que de cela et de la mauvaise foi envers l'expert, le premier juge a déduit à bon droit que le dommage occasionné au véhicule et notamment le fameux choc d'avant vers l'arrière s'est produit lorsque Bragnikov était propriétaire et ne vient pas du fait de M. Cabiran ;

Attendu que pour justifier la revente hâtive du véhicule, M. Bragnikov argue d'un accident sans en justifier l'existence, les circonstances ni la date dans un dossier d'une désolante minceur ;

Attendu que l'action en garantie doit donc être rejetée ;

Attendu que M. Lelarge ne justifie, par aucune pièce à son dossier, du trouble subi du fait de l'immobilisation de son véhicule, ni en son principe ni en son montant ; qu'il convient toutefois de préciser que la somme de 17 000 F portera intérêts au taux huit jours après la signification de la présente décision ;

Attendu que l'équité commande d'allouer 3 000 F chacun à M. Lelarge et M. Cabiran qui ne bénéficie que de l'aide judiciaire partielle ;

Par ces motifs, et ceux du premier juge, Reçoit l'appel en la forme, Au fond, le dit injustifié, confirme le jugement déféré, y ajoutant dit que la somme de 17 000 F portera intérêts au taux légal huit jours passé la signification du présent arrêt, Rejette toute demande plus ample ou contraire, Condamne encore M. Bragnikov a verser à Messieurs Lelarge et Cabiran chacun 3 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne M. Bragnikov aux dépens d'appel et dit qu'ils seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide judiciaire.