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Décisions

CA Dijon, 1re ch. sect. 2, 18 février 1992, n° 2621-90

DIJON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Des Avions Pierre Robin (SA)

Défendeur :

Aéro-Club Langrois (Sté), Aéro-Club Vosgien (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Richard

Conseillers :

Mmes Dufrenne, Arnaud

Avoués :

SCP André-Gillis, SCP Bourgeon-Delignette, Me Gerbay

Avocats :

Mes Bouf, Wilhelem, Soirot.

TGI Chaumont, du 29 nov. 1990

29 novembre 1990

Par jugement du 29 novembre 1990 le Tribunal de grande instance de Chaumont a restitué dans le litige opposant l'Aéro-Club Vosgien à l'Aéro-Club Langrois, et l'appelée en garantie, la SA des Avions Pierre Robin.

Fondant son action contre l'Aéro-Club Langrois sur l'article 1641 du Code civil, l'Aéro-Club Vosgien exposait que, ayant acquis du premier un aéronef Rallye ST 110 n° 3255 de marque Socata pour le prix de 150 000 F, le 7 août 1987, il a découvert des désordres (importante corrosion, dissimulée par une mise en peinture effectuée par le vendeur) constatés par huissier le 19 septembre 1987, et confirmés par l'expert Auffray, désigné par emplacement du premier expert empêché Monsieur Vigne, par ordonnance de référé du 21 octobre 1987.

L'Aéro-Club Langrois avait assigné en garantie le 7 juillet 1988 la SA Des Avions Pierre Robin, à laquelle il reproche, en tant que vendeur professionnel, de lui avoir cédé le 7 août 1987, un avion sans valeur compte tenu du montant des réparations à y effectuer.

Le tribunal saisi à, déclarant irrecevable les conclusions de la SA Des Avions Pierre Robin postérieures à l'ordonnance de clôture du 6 septembre 1990 :

- condamné l'Aéro-Club Langrois à payer à l'Aéro-Club Vosgien :

* la somme de 57 082,75 F au titre de la restitution du prix,

* la somme de 20 200 F en réparation du préjudice d'exploitation,

* la somme de 4 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamné la SA des Avions Pierre Robin à garantir à l'Aéro-Club Langrois de l'ensemble des condamnations prononcées contre lui, y compris au titre des dépens, et à lui payer la somme de 4 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamné l'Aéro-Club Langrois aux dépens qui comprendront les frais d'expertise avec possibilité de recouvrement direct par Maître de Chanlaire, avocat.

La SA des Avions Pierre Robin a interjeté appel de cette décision demandant de voir :

- dire recevable en la forme, et bien fondé, l'appel inscrit le 14 septembre 1990 par la SA des Avions Pierre Robin à l'encontre du jugement rendu le 29 novembre 1990 par le Tribunal de grande instance de Chaumont,

- réformer purement et simplement cette dernière décision et débouter l'Aéro-Club de son action en garantie exercée à l'encontre de la société des Avions Pierre Robin.

1. A titre principal

En constatant l'irrecevabilité de l'action estimatoire pour vices cachés diligentés par l'Aéro-Club Langrois à l'encontre de la société des Avions Pierre Robin, et ce, par application combinée des articles 1583-1642-1644 du Code civil et de la jurisprudence dominante en la matière.

2. A titre subsidiaire

Dire et juger que l'Aéro-Club Langrois est sans intérêt à agir à l'encontre de la société des Avions Pierre Robin par application combinée des articles 1149 du Code civil et 32, et 122 et suivants du nouveau Code de procédure civile.

3. A titre très subsidiaire

Dire et juger que la société des Avions Pierre Robin s'exonère toute responsabilité par application des articles 1147 et 1148 du Code civil.

Tant à titre principal qu'à titre subsidiaire, et très subsidiaire, condamner l'Aéro-Club Langrois à payer à la société des Avions Pierre Robin :

- la somme de 20 000 F à titre de dommages et intérêts pour procédure particulièrement abusive et dilatoire,

- la somme de 10 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Tant à titre principal qu'à titre subsidiaire et très subsidiaire, condamner l'Aéro-Club Langrois aux entiers dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés directement, pour ces derniers, par la SCP Andre/Andre et par application de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

L'Aéro-Club Langrois conclut :

- au débouté de l'Aéro-Club Vosgien, au principal au motif que sa bonne foi est entière, le prix demandé étant considéré comme normal par l'expert pour un avion normal " ce qu'il paraissait " ;

- subsidiairement à la confirmation de la garantie de la SA Avions Robins, demandant sa condamnation au paiement de 5 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Il a déposé des conclusions qui vu leur date de significations concomitantes à celle de l'ordonnance de clôture, ne peuvent qu'être déclarées irrecevables.

L'Aéro-Club Vosgien demande le déboutement de l'appel, la confirmation du jugement du 29 novembre 1990, et l'allocation, en cause d'appel, d'une somme de 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est en date du 30 janvier 1992.

Motifs et décision

Attendu que les conclusions concomitamment déposées à l'ordonnance de clôture du 30 janvier 1992 par l'Aéro-Club Langrois sont irrecevables ;

Au fond

Attendu que, dans une exacte analyse des faits de la cause, et par des motifs pertinents, les premiers juges ont justement stigmatisé la mauvaise foi de l'Aéro-Club Langrois, dès lors qu'était établi l'état de corrosion de l'avion litigieux, antérieur à la vente du 7 août 1987, l'Aéro-Club Langrois, qui ne " l'a utilisé " que sur une très bonne courte durée après l'avoir acquis de la SA Avions Robin le 28 mars 1987 pour le prix de 70 000 F, l'ayant revendu à l'Aéro-Club Vosgien plus du double de son prix d'achat après y avoir effectué des travaux de peinture masquant l'effet de la corrosion ; qu'en raison de cette mauvaise foi ils ont justement décidé que la clause de non garantie prévue dans l'acte de vente ne pouvait s'appliquer ;

Attendu qu'il convient de rappeler, qu'après dépose, l'huissier de justice a constaté l'état de corrosion avancé de l'appareil (PV 19 septembre 1987) et signalé que les colmatages par opposition de mastic étaient visibles sur peinture et que des soudures avaient été grossièrement effectuées ;

Attendu que l'Aéro-Club Langrois qui lui-même fait état des risques de corrosion plus rapides affectant les appareils utilisés en région maritime, ne pouvait ignorer l'état de corrosion de l'avion acquis le 29 janvier 1987 de l'Aéro-Club de Vendée pour un prix d'ailleurs modique de 85 120 F.

Attendu que l'Aéro-Club Langrois fait naïvement en page 5 de ses conclusions du 16 août 1991, l'aveu de sa mauvaise foi en écrivant " le prix demandé (150 000 F tractation Aéro-Club Langrois - Aéro-Club Vosgien) est considéré comme normal par l'expert pour un avion normal ce qu'il paraissait ;

Attendu qu'il y a lieu de confirmer la décision faisant droit à la demande de l'Aéro-Club Vosgien ;

Sur l'appel en garantie

Attendu que l'Aéro-Club Langrois souligne, à l'appui de son action en garantie dirigée contre la SA des Avions Robin, que celle-ci est un professionnel de la construction aéronautique " ce dont elle se vante maladroitement " et lui reproche de n'avoir pas effectué, comme tel, de vérification sur l'appareil litigieux depuis son acquisition de l'Aéro-Club de Vendée, ledit appareil n'ayant fait que transiter à Darois ;

Attendu qu'il reproche un comportement dès lors " irresponsable " la corrosion, constatée, étant exigeante à l'arrivée à Langres, et certainement au départ des Sables d'Olonne ;

Attendu qu'il ne peut être accordé un crédit infaillible aux dires, citées par l'expert en page 10 de son rapport, selon lesquels une proposition de vente de l'appareil à l'Aéro-Club Langrois, eût été faite à celui-ci pour un prix e 125 000 F après traitement de la corrosion par le vendeur (SA avions Robin) proposition déclinée par l'acheteur qui a opté pour le prix de 70 000 F en l'état ;

Attendu néanmoins que cette version est plausible, la corrosion étant établie par le livret d'aéronef accessible à l'acheteur ;

Qu'en tout les cas, le vil prix de cession de l'appareil, dont la valeur marchande normale eût été de 150 000 F (prix de revente d'ailleurs pratiqué avec l'Aéro-Club Vosgien) ne trouve son explication que dans la connaissance par l'acheteur du vice important affectant l'objet rendu ;

Attendu que, vendeur professionnel la SA Avions Robin, censé connaître, et connaissant ce vice, ne saurait être recherchée en garantie par leur acquéreur dès lors que celui-ci contractait avec lui en toute connaissance de cause ;

Qu'il y a lieu dans ces conditions de réformer partiellement la décision entreprise ;

Attendu que tout autre argument est surabondant ;

Attendu qu'il est d'équité d'allouer à l'Aéro-Club Vosgien une indemnité complémentaire de 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Que toute autre demande s'avère mal fondée et sera rejetée ;

Attendu que les dépens, tant de première instance que d'appel, seront supportés par l'Aéro-Club Langrois ;

Par ces motifs, LA COUR, Dit irrecevables les conclusions en date du 30 janvier 1992 de l'Aéro-Club Langrois, Reçoit l'appel, Confirme la décision entreprise prononçant condamnation de l'Aéro-Club Langrois au profit de l'Aéro-Club Vosgien, La réformer pour le surplus, Statuant à nouveau, Déboute l'Aéro-Club Langrois de ses demandes en garantie et en paiement contre la SA Avions Robin, Condamne, ajoutant, l'Aéro-Club Langrois à payer l'Aéro-Club Vosgien une indemnité complémentaire au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile de 5 000 F, Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires, Condamne l'Aéro-Club Langrois aux entiers dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés directement par la SCP André/Gillis et Maître Gerbay, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.