CA Orléans, ch. com., 24 février 2005, n° 03-02697
ORLÉANS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Machet
Défendeur :
Locam (Sté), ADT Télésurveillance (Sté), STPE (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rémery
Conseillers :
Mme Magdelaine, M. Garnier
Avoués :
SCP Laval-Lueger, SCP Desplanques-Devauchelle, Me Garnier
Avocats :
Me Ritouret, SCP Cottereau-Meunier, CMS Bureau Francis Lefebvre
Monsieur Machet, exploitant d'un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie, a conclu le 13 octobre 1998 un contrat d'abonnement de télésurveillance avec la société STPE, aux droits de laquelle vient la société ADT Télésurveillance, qui lui a fourni et installé le matériel de détection et de télétransmission, en même temps qu'un contrat de location financière avec la société Locam. Invoquant le fait que le système ne correspondait pas aux informations qui lui avaient été fournies, Monsieur Machet a entendu résilier le contrat de location et a cessé de régler les loyers. La société Locam l'a alors mis en demeure puis lui a fait signifier une ordonnance d'injonction de payer les loyers échus et à échoir, à laquelle Monsieur Machet a fait opposition.
Par jugement du 13 juin 2003, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Tours, après que le locataire eût appelé la société STPE dans la cause, a condamné Monsieur Machet à verser à la société Locam la somme de 4 438,02 euro, avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 1999, ainsi qu'une indemnité de procédure de 150 euro à chacune des autres parties.
Monsieur Machet a relevé appel.
Par ses dernières conclusions signifiées le 18 janvier 2005, poursuivant l'infirmation de la décision entreprise, il fait valoir que la législation sur le démarchage à domicile s'applique dans la mesure où le contrat n'a pas de rapport direct avec son activité et sort du cadre de sa compétence professionnelle. Il en déduit que le contrat est nul, en ce qu'il ne comporte pas la désignation précise du bien loué, ni des modalités d'exécution de la prestation de service, que le bordereau de rétractation n'est pas conforme aux dispositions légales, et que la remise d'une autorisation de prélèvement a été exigée immédiatement. A titre subsidiaire, il relève l'existence de nombreuses irrégularités au regard de la législation sur les clauses abusives, ce qui justifie également la nullité de l'acte entier. Il demande, en conséquence, la condamnation in solidum de la société Locam et de la société ADT Télésurveillance à lui rembourser les loyers indûment perçus, soit 468,83 euro, ainsi qu'une somme supplémentaire de 800 euro à titre de dommages et intérêts, outre 2 000 euro en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Accessoirement, il reproche à la société ADT Télésurveillance un manquement à son obligation de conseil et de bonne foi, de sorte que cette société doit le garantir de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre.
Par ses dernières écritures du 16 septembre 2004, la société Locam réplique que selon la jurisprudence, les dispositions relatives à la protection du consommateur ne sont pas applicables aux contrats de fournitures de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le cocontractant, tant en ce qui concerne le démarchage à domicile que les clauses abusives. Elle oppose l'irrecevabilité des exceptions de nullité soulevées, en raison du commencement d'exécution du contrat, en soulignant que les règles, même d'ordre public, du Code de la consommation, constituent des mesures de protection édictées dans l'intérêt des particuliers dont la violation n'est sanctionnée que par la nullité relative du contrat. Elle conclut à la confirmation du jugement et à l'allocation de la somme de 2 500 euro à titre d'indemnité de procédure.
Par ses dernières conclusions du 29 juin 2004, la société ADT Télésurveillance expose également que le contrat litigieux n'est pas soumis aux dispositions du Code de la consommation. Elle ajoute que Monsieur Machet n'invoque ni ne démontre le mauvais fonctionnement du système. Elle sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 2 000 euro en remboursement de ses frais de procédure.
Sur quoi
Attendu que selon le contrat litigieux, Monsieur Machet s'est engagé à prendre en location pendant 48 mois " un transmetteur téléphonique, un émetteur radio FM et trois détecteurs infrarouge radar-microphone", moyennant un loyer mensuel de 615,06 F TTC; que ce matériel a été réceptionné sans réserve par le locataire le 22 octobre 1998;
Que selon l'article L. 121-22-4° du Code de la Consommation, ne sont pas soumises aux dispositions sur le démarchage, les ventes, locations et locations-ventes de biens ou de prestations de service lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession;
Qu'en outre, les dispositions de l'article L. 132-1 du même Code, selon lesquelles sont réputées non écrites parce qu'abusives les clauses des contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, ne s'appliquent pas aux contrats de fourniture de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le cocontractant;
Qu'en l'espèce, et peu important les compétences techniques de l'intéressé, le contrat de location d'un matériel d'alarme et de télésurveillance est destiné à préserver l'activité professionnelle du commerçant, dès lors que les dommages provoqués par un vol des marchandises, par des dégradations ou un sinistre, seraient susceptibles d'interrompre cette activité, causant des pertes d'exploitation et des perturbations pour la clientèle ; que le contrat litigieux qui permet de conserver les biens de l'entreprise est donc directement lié à la sauvegarde de l'activité professionnelle, de sorte que les dispositions invoquées du Code de la consommation ne sont pas applicables, et que, par confirmation du jugement, Monsieur Machet sera débouté de sa demande en nullité des contrats;
Qu'aux termes de l'article 10 : " Résiliation-Indemnités ", le non-paiement d'un loyer entraîne la résiliation du contrat qui impose au locataire, outre la restitution des matériels, le versement au bailleur d'une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat majorée d'une clause pénale de 10 % ; que par application de ces clauses, le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné le locataire à verser à la société Locam la somme de 4 438,02 euro, avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 1999;
Que Monsieur Machet ne prétend pas que le matériel aurait été défectueux ou que la société ADT Télésurveillance aurait été défaillante dans l'exécution de ses obligations de télésurveillance, et ne s'explique pas sur le défaut de conseil et d'information qu'il impute au prestataire; qu'il sera donc débouté de son appel en garantie de cette société;
Attendu que Monsieur Machet supportera les dépens d'appel, et versera, à ce titre, une indemnité de 1 200 euro à chacune de deux sociétés intimées, par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort; Confirme le jugement entrepris; Déboute Monsieur Machet de ses demandes en restitution des loyers déjà versés et en dommages-intérêts; Rejette la demande de Monsieur Machet tendant à appeler en garantie la société ADT Télésurveillance; Condamne Monsieur Machet aux dépens d'appel, et à payer la somme de 1 200 euro à chacune des deux sociétés Locam et ADT Télésurveillance, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Accorde aux avoués de la cause le droit à recouvrement direct reconnu par l'article 699 du même Code.