CA Caen, 1re ch. civ. et com., 25 novembre 2004, n° 04-01796
CAEN
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Jaga NV (Sté)
Défendeur :
Ishak
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Le Fèvre
Conseillers :
Mme Holman, M. Hallard
Avocats :
Mes Dietrich, Masson.
LA COUR,
Attendu que les parties ont conclu le 17 novembre 1993 un "contrat de VRP"; que le 29 mars 2000, après que Jaga eût exprimé, notamment dans un fax du 27 mars 2000, son accord sur un "changement de statut" a été conclu un "contrat d'agent commercial", se référant expressément à la loi du 25 juin 1991, entre "la société Jaga SA" et "M. Claude Ishak agent commercial"; que ce contrat définissait la mission de M. Ishak, qui avait pour mandat de la "représenter" en tant qu'agent commercial, cette mission étant de "négocier la vente de produits Jaga Tempo pour le compte et au nom de la société Jaga SA" ; que la volonté des parties de continuer leurs relations sans le statut d'agent commercial est clairement exprimée ; que M. Ishak s'est fait immatriculer au registre des agents commerciaux de Caen avec pour "date de début d'activité" le "01-07-2000" ; qu'il est présumé être agent commercial ; qu'il appartient à Jaga de démontrer que les apparences ne correspondraient pas à la réalité, qui selon la contredisante, serait contraire aux stipulations du contrat;
Attendu que Jaga soutient que les relations entre les parties se sont poursuivies dans le cadre et les obligations définies par le contrat de travail initial du 17 novembre 1993, que M. Ishak a continué à suivre les instructions de ses supérieurs hiérarchiques, qu'il lui a été demandé le 27 août 2000 de ne plus intervenir seul à la centrale d'achat Leroy-Merlin, qu'il a été prié d'établir un plan promotionnel et une estimation de son chiffre d'affaires pour 2001, que des notes de service lui ont été adressées en 2001 relativement à des produits défectueux, que sa politique budgétaire et promotionnelle lui était imposée par sa hiérarchie ; mais que M. Ishak déclare qu'il organisait ses tournées "sur sa propre initiative, sans recevoir aucune instruction de Jaga, en fonction de ses autres cartes" et avec ses propres moyens, qu'il n'était pas soumis aux conditions et horaires de travail de l'encadrement de la société Jaga, que les notes de service de Jaga ne constituaient pas des instructions obligatoires pour lui, qu'il ne se conformait pas à l'ensemble de celles-ci sans être pour autant sanctionné, qu'il gardait toute liberté dans l'organisation de sa prospection;
Attendu qu'il apparaît en effet que, même si Jaga a exprimé son mécontentement à la suite d'un rapport de M. Ishak en lui demandant de ne plus intervenir seul chez Leroy-Merlin, elle ne l'a pas sanctionné ; qu'il apparaît que la cessation de son activité est due à son état de santé; qu'il déclare que les demandes de Jaga de recevoir des rapports chaque semaine et de réaliser des feuilles de visite quotidiennes n'ont jamais été suivies d'effet; qu'il est constant que M. Ishak adressait à Jaga des rapports mensuels sur son activité; mais que ceci ne caractérise pas la position de subordination résultant d'un contrat de travail, pas plus que l'expression de reproches sur la qualité de produits ; qu'un mandant peut faire des observations à son mandataire ; que tout mandataire à une obligation de loyauté et doit rendre compte de son mandat ; que le fait que Jaga ait conservé la maîtrise de ses prix est sans incidence dès lors qu'elle se réservait la conclusion des contrats ; que M. Ishak remarque encore sans être précisément contredit que Jaga n'assumait pas les obligations d'un employeur notamment quant aux charges sociales qu'il a prises à son compte entièrement et aux congés payés ; que Jaga doit assumer les conséquences à son désavantage, comme elle a profité de celles qui étaient à son avantage, du contrat qu'elle a signé librement;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède et des motifs non contraires du tribunal que la société Jaga ne fait pas la preuve qui lui incombe qu'à l'encontre des stipulations claires et explicites du contrat d'agent commercial, ses relations avec M. Ishak auraient en réalité eu les caractéristiques d'un contrat de travail ; que M. Ishak a la faculté d'attraire Jaga, société commerciale, devant le tribunal de commerce ; que la contredisante doit être déboutée de son contredit ; qu'il est équitable d'accorder à M. Ishak 3 000 euro au titre de ses frais irrépétibles ; que la demande d'exécution provisoire est sans objet, les arrêts de la cour étant exécutoires de plein droit;
Par ces motifs : Déboute la société Jaga NV de son contredit; La condamne à payer à M. Claude Ishak la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et met à sa charge les dépens du contredit; Renvoie les parties devant le Tribunal de commerce de Caen.