CJCE, 8 novembre 1979, n° 251-78
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Firma Denkavit Futtermittel GmbH
Défendeur :
Ministre de l'Alimentation, de l'Agriculture et des Forêts du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie
LA COUR,
1. Par ordonnance du 13 septembre 1978, parvenue à la Cour le 10 novembre 1978, le Verwaltungsgericht de Münster a posé, en vertu de l'article 177 du traité CEE, une question préjudicielle concernant le point de savoir si les articles 9, 30 et 36 du traité CEE et les règlements CEE n° 804-68 (organisation commune des marches dans le secteur du lait) et n° 2727-75 (organisation commune des marches dans le secteur des céréales) peuvent(-ils) être interprètes en ce sens qu'ils interdisent :
- soit de subordonner dans un état membre, par une règlementation, l'importation d'aliments d'origine animale d'un autre état membre, au regard de chaque lot, à une attestation de l'autorité compétente du pays exportateur, dont il résulte que les aliments pour animaux ont été soumis à un procédé d'élimination des salmonellas et, en outre, de n'autoriser l'importation que lorsque l'autorité nationale compétente du pays importateur a constaté par un examen bactériologique que la marchandise est exempte de salmonellas,
- soit de soumettre l'octroi de dérogations à cet égard à l'appréciation de l'autorité compétente et de lui donner ainsi la possibilité d'accorder ces dérogations à la condition :
- que l'autorisation n'est accordée que temporairement, qu'elle peut être retirée à tout moment sans indemnisation pour des motifs d'administration vétérinaire, que, par ailleurs, conformément à la demande, elle n'est valable que pour une marchandise en quantité et d'une origine déterminées et seulement pour le transport franchissant certains postes de douane vers des destinataires déterminés;
- qu'une attestation de l'administration des services vétérinaires du pays exportateur relative à la composition et aux procédés de traitement des aliments pour animaux à importer doit être présentée pour chaque lot en particulier;
- que l'importation en sacs de plastique n'est autorisée que s'ils sont neufs et détruits d'une manière inoffensive après avoir été vides;
- qu'une taxe de cinq DM au moins et de cinquante DM au plus est perçue pour chaque autorisation,
Alors que, d'une part, une disposition de police sanitaire du pays importateur prescrit en général pour la production nationale le contrôle par les services vétérinaires des installations affectées à la production industrielle d'aliments pour animaux contenant des produits d'origine animale, et lorsque, d'autre part, une disposition comparable n'existe pas dans le pays exportateur, l'entreprise exportatrice étant cependant soumise à un contrôle officiel a tout le moins comparable à celui qui est pratique dans le pays importateur?
2. Cette question est posée dans le cadre d'un litige opposant un opérateur économique qui importe en République Fédérale d'Allemagne, en provenance des Pays-Bas, des aliments pour animaux contenant des produits d'origine animale
- en l'occurrence des aliments de substitution a base de lait (milchaustauschfutter),
- au Ministre de l'Alimentation, de l'Agriculture et des Forêts du land de Rhenanie-du-Nord-Westphalie.
Cet opérateur met en cause la compatibilité de certaines dispositions du décret du 18 septembre 1957 du land en question, relatif aux mesures de police sanitaire applicables lors de l'importation et du transit d'aliments pour animaux contenant des produits d'origine animale provenant de l'étranger (ci-après Viehseuchenverordnung 1957), avec les articles 30 et 36 ainsi qu'avec l'article 9 du traité relatifs respectivement à l'interdiction des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives et des taxes d'effet équivalant à des droits de douane dans les échanges intracommunautaires, ainsi qu'avec les dispositions du règlement n° 804-68 du conseil du 27 juin 1968 (JO n° L 148, p. 13) portant organisation commune des marches dans le secteur du lait et des produits laitiers et du règlement n° 2727-75 du conseil du 29 octobre 1975 (JO n° L 281, p. 1) portant organisation commune des marchés dans le secteur des céréales qui édictent ou impliquent les mêmes interdictions.
3. Il importe de souligner qu'après le 31 décembre 1969, terme de la période transitoire, les articles 9 et 30 du traité ont effet direct et engendrent par eux-mêmes pour les justiciables des droits que les juridictions nationales doivent sauvegarder. Il en résulte qu'a partir du 1er janvier 1970, il n'était plus nécessaire de répéter, dans les règlements d'organisation de marche, les interdictions que ces articles édictent, l'article 38 du traité prévoyant que " sauf dispositions contraires des articles 39 à 46 inclus, les règles prévues pour l'établissement du marche commun sont applicables aux produits agricoles ". C'est pour ce motif que le règlement n° 804-68 - qui date de 1968 - prévoit expressément à son article 22 l'interdiction de mesures d'effet équivalent ou restrictions quantitatives dans le commerce intracommunautaire tandis que, dans le règlement n° 2727-75, cette interdiction n'est plus expressément édictée qu'en ce qui concerne les échanges avec les pays tiers. Dans ces conditions, la Cour peut se limiter à l'interprétation des dispositions en cause du traité.
4. La Viehseuchenverordnung 1957, dont la conformité avec le droit communautaire est mise en cause dans le litige au principal, a été abrogée et remplacée avec effet au 1er avril 1979 par une réglementation fédérale. Elle était toutefois en vigueur au moment des faits qui ont donné lieu aux contestations dont est saisie la juridiction nationale. Cette réglementation, qui se situe dans le cadre de la lutte contre la salmonellose, vise en particulier à la détection et à l'élimination de salmonellas dans les aliments pour animaux importes en République Fédérale d'Allemagne.
5. Les caractéristiques de cette règlementation, en ce qui concerne les entraves qu'elle est susceptible de provoquer dans les échanges intracommunautaires, sont décrites comme suit par la juridiction nationale. En vertu des paragraphes 1 et 2 de la Viehseuchenverordnung 1957, les aliments pour animaux en question ne peuvent être importés qu'à la double condition, d'une part, que soit présente à l'importation un certificat des autorités compétentes du pays d'exportation d'ou il ressort que la marchandise a subi, lors du séchage ou au terme de celui-ci, un traitement de chauffage qui a éliminé la présence éventuelle de salmonellas (paragraphe 1) et, d'autre part, que ces mêmes aliments soient soumis au moment de l'importation à un contrôle préalable effectué sous forme de prélèvements d'échantillons par des experts vétérinaires du pays importateur et examines dans un institut de contrôle vétérinaire officiel, l'importation ne pouvant se faire qu'après que l'absence de salmonellas a été constatée par une analyse bactériologique. Selon le paragraphe 9, le ministre compétent peut accorder des dérogations aux prescriptions du décret, notamment en ce qui concerne le contrôle systématique à la frontière, lorsqu'il n'y a pas lieu de craindre que l'importation ou le transit des aliments en question constitue une source d'introduction ou de propagation des germes d'épizootie. Il peut subordonner cette dérogation à certaines conditions. C'est ce qui s'est produit en l'occurrence, ou la dérogation sollicitée par la requérante au principal a été accordée moyennant l'acceptation par elle des conditions énumérées dans la question posée.
6. La juridiction nationale a déclaré que les mesures prévues par les paragraphes 1 et 2 de la Viehseuchenverordnung 1957, l'obligation de solliciter une dérogation au sens du paragraphe 9 et les conditions auxquelles cette dérogation est subordonnée constituent des mesures d'effet équivalant a des restrictions quantitatives au sens de l'article 30 du traité, le litige portant seulement sur la question de savoir si ces restrictions sont couvertes par l'exception prévue à l'article 36 du traité, selon lequel les dispositions des articles 30 et 34 ne font pas obstacle aux restrictions d'importation justifiées par des raisons de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux, à condition toutefois de ne constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre états membres. Elle est également encline à penser que l'exigence du paiement d'une redevance pour l'octroi de la dérogation est incompatible avec l'article 9 du traité, qui interdit la perception de taxes d'effet équivalant aux droits de douane.
7. En ce qui concerne les mesures de contrôle sanitaire prévues par la réglementation nationale en cause, la requérante au principal fait en premier lieu valoir que l'article 36 ne pourrait plus être invoqué pour justifier de telles mesures parce qu'à la suite des directives communautaires adoptées dans le secteur des aliments pour animaux aux fins d'harmonisation des législations nationales, le recours par les autorités nationales à l'article 36 cesserait d'être justifie. Elle fait, en second lieu et a titre subsidiaire, valoir que non seulement les mesures imposées par la Viehseuchenverordnung 1957 elle-même, mais l'obligation de solliciter une dérogation et les conditions mises a l'octroi de celle-ci, constituent une accumulation, à son sens inutile et des lors non justifiée, de restrictions à la libre circulation des produits en cause, non couvertes par l'exception de l'article 36, compte tenu de ce que dans l'état membre exportateur la production d'aliments pour animaux par les entreprises concernées fait - bien qu'il n'existe pas de dispositions impératives à cet égard - cependant l'objet de contrôles comparables à ceux que la législation de l'état importateur impose aux entreprises sur son propre territoire. Elle estime également que la redevance de 50 DM, au paiement de laquelle est lié l'octroi d'une dérogation, est incompatible avec l'article 9 du traité.
8. C'est essentiellement en vue de pouvoir trancher les problèmes ainsi soulevés par la requérante au principal que la question d'interprétation, dont la Cour est saisie, a été posée par la juridiction nationale.
9. La Cour examinera d'abord l'interprétation à donner aux articles 30 et 36 qui concernent les mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives et ensuite celle à donner à l'article 9 qui doit être mise en rapport avec l'obligation de payer une redevance.
I - En ce qui concerne les articles 30 et 36 du traité CEE
A - Sur l'article 30 du traité
10. Ainsi que la juridiction nationale l' a juste titre indiqué, une jurisprudence constante de la Cour interprète la notion de mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'article 30 du traité comme s'étendant aux contrôles sanitaires systématiques opérés aux frontières intracommunautaires. La même interprétation vaut, ainsi que la Cour l'a reconnu dans son arrêt du 24 janvier 1978 (affaire n° 82-77, Openbaar Ministerie Nederland/Van Tiggele, recueil, p. 25), pour un système en vertu duquel un opérateur économique se trouve dans la nécessité de demander une exemption ou dérogation a une mesure nationale qui constitue elle-même une restriction quantitative ou une mesure d'effet équivalent.
11. La notion de mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative s'étend aussi à l'obligation de présenter un certificat attestant que les aliments importés ont subi dans le pays exportateur un traitement déterminé. La circonstance que l'exigence d'un certificat accompagnant la marchandise est fréquemment prévue dans les directives communautaires qui tendent à harmoniser et à éliminer dans toute la mesure du possible les contrôles sanitaires nationaux à la frontière n'aboutit pas à écarter la qualification de mesure d'effet équivalent qui s'attache à l'exigence nationale dans l'état membre importateur de produire un certificat émanant des autorités de l'état expéditeur. On ne saurait en effet comparer, en ce qui concerne leur effet restrictif sur les échanges intracommunautaires, l'exigence de la production d'un certificat édictée unilatéralement par un état membre et à la production duquel il attache tels effets juridiques qu'il estime utiles, et l'obligation imposée par une directive à tous les états membres de délivrer, en vue de faciliter les échanges entre états membres, un certificat sanitaire, de modèle uniforme, dans un système qui vise à déplacer le contrôle vers l'état membre expéditeur et à substituer ainsi aux mesures systématiques de protection à la frontière un système uniforme de façon à rendre superflus des contrôles frontaliers multiples tout en ménageant à l'état destinataire la possibilité de veiller à ce que soient réalisées effectivement les garanties résultant du système ainsi uniformisé.
12. Il suit des considérations précédentes que la notion de mesure d'effet équivalant à des restrictions quantitatives s'étend à des mesures nationales du type de celles prévues aux paragraphes 1, 2 et 9 de la Viehseuchenverordnung 1957 et que de telles mesures tombent sous l'interdiction de l'article 30 du traité, à moins qu'elles ne rentrent dans l'exception prévue à l'article 36.
B - Sur l'applicabilité de l'article 36 du traité
13. En ce qui concerne le champ d'application de l'article 36, la juridiction nationale demande, en premier lieu, si cette disposition peut encore être invoquée par un état membre alors que des directives ou règlements communautaires organiseraient un contrôle visant aux mêmes fins que celles prévues par les dispositions nationales prises conformément audit article 36.
14. La Cour de justice a reconnu dans son arrêt du 5 octobre 1977 (affaire n° 5-77, Tedeschi/Denkavit, recueil, p. 1555) que l'article 36 du traité n'a pas pour objet de réserver certaines matières a la compétence exclusive des états membres, mais admet seulement que les législations nationales fassent exception au principe de la libre circulation des marchandises dans la mesure où cela est et demeure justifié pour atteindre les objectifs visés par cette disposition. Il en résulte que, lorsqu'en application de l'article 100 du traité, des directives communautaires prévoient l'harmonisation des mesures nécessaires pour garantir la protection de la santé des personnes et des animaux et lorsqu'elles aménagent des procédures de contrôle de leur observation, le recours à l'article 36 cesse d'être justifié et que c'est dans le cadre tracé par les directives d'harmonisation que les contrôles appropriés doivent être effectués et que les mesures de protection doivent être prises.
15. Un examen des directives invoquées par la requérante et examinées par la juridiction nationale montre
- ainsi d'ailleurs que cette juridiction l'estime a juste titre
- qu'elles ne concernent pas, et en tout cas ne concernaient pas à l'époque où se situent les faits qui sont à l'origine du litige au principal, l'harmonisation de la prévention et du contrôle sanitaires de la présence de salmonellas dans les aliments pour animaux d'origine animale et en particulier dans les aliments composés comprenant des produits laitiers et des graisses animales.
16. Il en est tout d'abord ainsi des deux directives du conseil, 70-524 du 23 novembre 1970 (JO n° L 270, p. 1) et 74-63 du 17 décembre 1973 (JO 1974 n° L 38, p. 31), relatives la première, aux additifs dans l'alimentation des animaux et la seconde, à la fixation de teneurs maximales pour les substances et produits indésirables dans les aliments des animaux. Il résulte, en effet, tant du texte que des objectifs poursuivis par ces directives qu'elles ne concernent à aucun égard la présence d'agents pathogènes dans les aliments en question, lesdits agents ne pouvant de toute évidence être considérés ni comme des additifs ni comme des substances et produits indésirables dont néanmoins une teneur maximale serait admise.
17. Il en est de même de la directive du conseil 70-373 du 20 juillet 1970 (JO n° L 170, p. 2) concernant l'introduction de modes de prélèvement d'échantillons et de méthodes d'analyse communautaires pour le contrôle officiel des aliments des animaux et des différentes directives de la commission prises pour son exécution. Il ressort, en effet, à la fois de l'intitulé et du contenu de ces directives qu'elles ne concernent pas les exigences matérielles qui sont envisagées en matière d'harmonisation des mesures nationales de police sanitaire relatives aux aliments pour animaux, mais uniquement les méthodes communautaires permettant de contrôler si les aliments sont conformes aux exigences matérielles établies ou à établir à l'avenir.
18. Ces exigences matérielles font, entre autres, l'objet des directives du conseil 77-101 du 23 novembre 1976 concernant la commercialisation des aliments simples pour animaux (JO 1977, n° L 32, p. 1) et 79-373 du 2 avril 1979 (JO n° L 86, p. 30) concernant la commercialisation des aliments composes pour animaux. C'est la seconde qui concerne les aliments du type de ceux dont l'importation a donne lieu au litige au principal. En tout cas, ni l'une ni l'autre n'étaient en vigueur à l'époque où est né le litige au principal et la seconde laisse, en outre, aux états membres, pour adopter les dispositions législatives, réglementaires et administratives
- nécessaires pour s'y conformer,
- un délai qui n'expire que le 1er janvier 1981. Il en résulte que ces directives ne sauraient avoir eu, ou avoir, pour effet d'éliminer la compétence que l'article 36 reconnaît aux états membres de faire exception à la libre circulation des produits en cause. Il en résulte également qu'il n'est pas nécessaire d'examiner la question de savoir si ces directives concernent ou non la présence d'éléments pathogènes dans les aliments pour animaux.
19. Il faut également rejeter l'argumentation de la requérante au principal selon laquelle il résulterait des résolutions du conseil du 12 mars 1968 et du 22 juillet 1974, relatives aux domaines vétérinaire et phytosanitaire ainsi qu'à la nutrition animale (JO 1968, n° C 22, p. 18, et JO 1974, n° C 92, p. 2), que le programme d'harmonisation établi par ces résolutions démontrerait que le conseil a trouve inutile une règlementation spécifique en ce qui concerne la lutte contre la salmonellose et que les différentes directives constitueraient un ensemble exhaustif dont la mise en œuvre aurait pour effet d'interdire dans l'ensemble du domaine de la police sanitaire pour aliments pour animaux le recours par les états membres à l'article 36. Cette argumentation méconnaît, d'une part, la méthode progressive et ponctuelle a laquelle le conseil a recours pour l'harmonisation des législations sanitaires nationales et, d'autre part, qu'en tout état de cause, à l'époque des faits ayant donne lieu au litige, l'ensemble du programme d'harmonisation n'était pas encore réalisé.
20. Il suit des considérations qui précèdent que les conditions rendant injustifié un recours des états membres aux exceptions permises par l'article 36 du traité CEE n'étaient pas réalisées au moment des faits ayant donne lieu au litige au principal pour les aliments composés, d'origine animale, pour animaux en ce qui concerne notamment la lutte contre les agents pathogènes.
C - Sur la notion de " restriction justifiée "au sens de l'article 36 du traité
21. Compte tenu des considérations qui précèdent, il y a lieu, au regard de la question posée par la juridiction nationale, d'examiner ensuite si des restrictions du type de celles qu'impose la Viehseuchenverordnung 1957 se tiennent dans les limites mises par l'article 36 du traité aux exceptions que cette disposition permet de faire a la libre circulation des marchandises. Il résulte en effet du texte même dudit article que les interdictions ou restrictions qu'il permet doivent être justifiées, c'est-à-dire nécessaires, pour atteindre l'objectif vise et ne peuvent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre états membres.
22. A cet égard, il est demande en premier lieu si un double contrôle
- consistant, d'une part, dans l'exigence d'une attestation de l'autorité compétente du pays exportateur d'ou il résulte que les aliments pour animaux ont été soumis à un procédé d'élimination des salmonellas et, d'autre part, en un contrôle systématique à la frontière, en vertu duquel l'importation n'est permise qu'après qu'il a été constaté que la marchandise est exempte de salmonellas
- dépasse ce que l'article 36 permet.
23. Dans son arrêt du 20 mai 1976 (affaire n° 104-75, de Peijper, recueil 1976, p. 613), la Cour a constaté qu'une règlementation ou pratique nationale ne bénéficie pas de la dérogation de l'article 36 lorsque la santé et la vie des personnes et des animaux " peuvent être protégées de manière aussi efficace par des mesures moins restrictives des échanges intracommunautaires " et " que, notamment, l'article 36 ne peut pas être invoqué pour justifier des règlementations ou pratiques, mêmes utiles, mais dont les éléments restrictifs s'expliquent essentiellement par le souci de réduire la charge administrative ou les dépenses publiques, sauf si, à défaut desdites règlementations ou pratiques, cette charge ou ces dépenses dépassaient manifestement les limites de ce qui peut être raisonnablement exigé ". Dans ce même arrêt, il est par ailleurs indique que lorsqu'une collaboration entre les autorités des états membres permet de faciliter et d'alléger les contrôles aux frontières, qui demeurent permis en vertu de l'exception de l'article 36, les autorités chargées des contrôles sanitaires doivent examiner si les documents de preuve délivrés dans le cadre de pareille collaboration ne créent pas une présomption de conformité des marchandises importées avec les exigences de la législation sanitaire nationale devant contribuer à un allégement des contrôles opérés à l'occasion du passage de la marchandise d'un état membre vers l'autre.
24. Il appartient, dans chaque cas, aux juridictions nationales d'appliquer ces critères à la lumière de toutes les circonstances des litiges soumis à leur appréciation en tenant compte de ce qu'il doit toujours incomber à l'autorité nationale qui invoque l'article 36 de démontrer que les mesures qu'elle impose satisfont à ces critères.
25. La juridiction nationale désire également savoir si on peut considérer comme demeurant dans les limites tracées par l'article 36 un système d'octroi d'autorisations d'importation dont la délivrance est laissée à l'appréciation de l'administration compétente et soumise aux conditions décrites dans la question posée.
26. La Cour a déclaré, dans son arrêt du 15 décembre 1976 (affaire n° 41-76, Donckerwolcke, recueil, p. 1921), que l'application dans les rapports intracommunautaires d'une législation nationale qui maintient l'exigence, fut-elle purement formelle, de licences d'importation ou de tout autre procédé similaire constitue une mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative et est, des lors, interdite. Cette interdiction ne vise cependant pas les cas ou des interdictions ou restrictions aux échanges peuvent précisément être maintenues en vertu de l'article 36 du traité à la condition d'être justifiées au sens de cette disposition. L'autorisation dont il s'agit dans le litige au principal consiste dans une dérogation à la règle générale du double contrôle imposé par les paragraphes 1 et 2 de la Viehseuchenverordnung 1957 et elle est, par définition, censée être moins contraignante que la règle générale à laquelle elle déroge. Il en résulte qu'un système d'autorisations d'importation qui déroge, dans un sens libéral, à un système de contrôle sanitaire général qui serait compatible avec l'article 36, est lui-même conforme à cette disposition. S'il permettait seulement d'assouplir un système de contrôle général qui irait au-delà de ce que permet l'article 36, il y aurait lieu de le juger sur ses propres mérites au regard des exceptions que permet l'article 36 du traité a l'interdiction des mesures d'effet équivalant a des restrictions quantitatives.
27. Il faut donc en conclure que l'article 36 du traité ne peut être interprété en ce sens qu'il interdirait en principe à une autorité nationale, qui a établi par une règle générale des restrictions de contrôle sanitaire à l'importation d'aliments pour animaux, de prévoir qu'il pourra y être dérogé par des mesures individuelles laissées à l'appréciation de l'administration si ces dérogations vont dans le sens d'un allégement des contraintes qu'impose la règlementation générale et si ce pouvoir de dérogation ne donne pas lieu a des discriminations arbitraires entre opérateurs économiques de différents états membres.
28. Il n'en résulte toutefois pas automatiquement que chacune des conditions que l'autorité nationale mettrait à l'octroi de pareilles autorisations serait, par elle-même, conforme à ce que permet l'article 36. Il appartient, dans chaque cas, aux juridictions nationales, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, d'apprécier si ces conditions sont nécessaires pour atteindre l'objectif que l'article 36 permet de rechercher, compte tenu de la règle déjà rappelée ci-dessus qu'il incombe à l'autorité nationale qui invoque l'article 36 de démontrer que les mesures qu'elle impose satisfont à ces critères.
II - En ce qui concerne l'article 9 du traité CEE
29. La juridiction nationale demande enfin à la Cour d'interpréter l'article 9 du traité en relation avec l'obligation faite à la requérante au principal de payer une redevance à l'occasion de l'octroi de la dérogation susvisée de la Viehseuchenverordnung 1957.
30. L'article 9 du traité comporte l'interdiction, entre les états membres, des droits de douane et de toutes taxes d'effet équivalent. Cette interdiction, n'admettant aucune distinction selon le but poursuivi par la perception des charges pécuniaires dont elle prévoit la suppression, comprend également les droits exiges du fait de contrôles sanitaires effectues en raison de l'importation de marchandises. Il n'en serait autrement que si les charges pécuniaires relevaient d'un système général de redevances intérieures appréhendant systématiquement les produits nationaux et les produits importés selon les mêmes critères ou si ces charges constituaient la rémunération d'un service effectivement rendu à l'importateur. Des redevances comme celles prévues par l'autorisation obtenue dans le cas d'espèce appréhendent uniquement les produits importés. Elles ne constituent pas non plus la rémunération d'un service rendu à l'importateur, car l'activité d'une administration d'un état destinée à maintenir, dans l'intérêt général, un système de contrôles sanitaires
- celui-ci fut-il aménagé sous la forme de mesures individuelles, dérogatoires et plus souples qu'un système de contrôle général
- ne peut être considérée comme un service rendu a l'importateur de nature à justifier la perception d'une charge pécuniaire en contrepartie.
31. Il en résulte que l'article 9 du traité doit être interprété en ce sens que constitue une taxe d'effet équivalant à un droit de douane, et qu'est dès lors interdite, une charge pécuniaire imposée pour des raisons de contrôle sanitaire, même si ce contrôle est aménagé sous la forme d'un système d'autorisations individuelles d'importation et même si ce système est justifie au sens de l'article 36 du traité.
Sur les dépens
32. les frais exposes par la commission des communautés européennes, qui a soumis des observations a la Cour, ne peuvent faire l'objet de remboursement. La procédure revêtant, a l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient a celle-ci de statuer sur les dépens;
Par ces motifs,
, LA COUR,
Statuant sur la question à elle soumise par le Verwaltungsgericht de Münster, par ordonnance du 13 septembre 1978 enregistrée à la Cour le 10 novembre 1978, dit pour droit :
1) La notion de mesure d'effet équivalant a des restrictions quantitatives s'étend à des mesures nationales du type de celles prévues aux paragraphes 1, 2 et 9 du décret du land de Rhenanie-du-Nord-Westphalie du 18 septembre 1957 relatif aux mesures de police sanitaire applicables lors de l'importation et du transit d'aliments pour animaux contenant des produits d'origine animale provenant de l'étranger. De telles mesures tombent sous l'interdiction de l'article 30 du traité CEE à moins qu'elles ne rentrent dans l'exception prévue à l'article 36 du traité CEE.
2) Les conditions rendant injustifié un recours des états membres aux exceptions permises par l'article 36 du traité CEE n'étaient pas réalisées au moment des faits ayant donne lieu au litige au principal pour les aliments composés, d'origine animale, pour animaux en ce qui concerne notamment la lutte contre les agents pathogènes.
3) Un double contrôle comme celui décrit dans la question posée dépasse ce que l'article 36 du traité CEE permet, lorsque la santé et la vie des personnes et des animaux peuvent être protégées d'une manière aussi efficace par des mesures moins restrictives des échanges intracommunautaires.
Lorsqu'une collaboration entre les autorités des états membres permet de faciliter et d'alléger les contrôles aux frontières, qui demeurent permis en vertu de l'exception de l'article 36 du traité CEE, les autorités chargées des contrôles sanitaires doivent examiner si les documents de preuve délivrés dans le cadre de pareille collaboration ne créent pas une présomption de conformité des marchandises importées avec les exigences de la législation sanitaire nationale devant contribuer à un allégement des contrôles opérés à l'occasion du passage de la marchandise d'un état membre vers l'autre.
4) L'article 36 du traité CEE ne peut être interprété en ce sens qu'il interdirait, en principe, à une autorité nationale, qui a établi par une règle générale des restrictions de contrôle sanitaire à l'importation d'aliments pour animaux, de prévoir qu'il pourra y être dérogé par des mesures individuelles laissées à l'appréciation de l'administration si ces dérogations vont dans le sens d'un allégement des contraintes qu'impose la règlementation générale et si ce pouvoir de dérogation ne donne pas lieu a des discriminations arbitraires entre opérateurs économiques de différents états membres. Il n'en résulte toutefois pas automatiquement que chacune des conditions que l'autorité nationale mettrait à l'octroi de pareille autorisation serait, par elle-même, conforme à ce que permet l'article 36 du traité CEE.
5) Il appartient, dans chaque cas, aux juridictions nationales d'appliquer ces critères à la lumière de toutes les circonstances des litiges soumis à leur appréciation en tenant compte de ce qu'il doit toujours incomber à l'autorité nationale qui invoque l'article 36 du traité CEE de démontrer que les mesures qu'elle impose satisfont à ces critères.
6) L'article 9 du traité CEE doit être interprété en ce sens que constitue une taxe d'effet équivalant a un droit de douane, et qu'est des lors interdite, une charge pécuniaire imposée pour des raisons de contrôle sanitaire, même si ce contrôle est aménagé sous la forme d'un système d'autorisations individuelles d'importation et même si ce système est justifié au sens de l'article 36 du traité CEE.