Cass. 1re civ., 19 juin 1985, n° 84-10.934
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Guilpain
Défendeur :
Samain
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Joubrel
Rapporteur :
M. Lamanda
Avocat général :
M. Gulphe
Avocats :
SCP Boré, Xavier
LA COUR : - Sur le premier moyen : - Attendu, selon l'arrêt du 24 mai 1982 attaqué, que, le 25 janvier 1979, M. Samain, garagiste, a vendu, sans garantie à M. Guilpain une automobile, mise en circulation le 15 octobre 1974, sur laquelle avait été monte un moteur diesel d'occasion ; que l'acheteur, jugeant anormale la consommation d'huile, a demandé à un expert d'examiner la voiture ; que celui-ci a conclu que le moteur, plus ancien que le véhicule, était inutilisable ; que, faisant droit à la demande présentée par M. Guilpain, le tribunal a prononcé la nullité de la vente pour dol ; que la cour d'appel, après avoir ordonné une expertise, afin, notamment, de déterminer la date de fabrication et l'état du moteur et de rechercher si le prix payé correspondait à la chose vendue, a infirmé cette décision ;
Attendu que M. Guilpain fait grief aux juges du second degré d'avoir commis, avant dire droit, un expert, alors, selon le moyen, qu'ils ne pouvaient décider que l'expertise officieuse qu'il avait produite, n'était pas opposable à M. Samain, sans rechercher si le vendeur avait été appelé à y assister ou à y être représenté, comme le soutenaient les conclusions ; qu'en se bornant à affirmer, sans justification, que l'expertise officieuse n'était pas contradictoire, pour n'y attacher aucune valeur, la cour d'appel n'aurait pas donné de base légale à son arrêt ;
Mais attendu que les juges du fond, qui énoncent qu'ils ne disposent pas des éléments nécessaires pour trancher le litige, les parties invoquant chacune un rapport d'expertise établi à sa demande et contenant, l'un par rapport à l'autre, des affirmations opposées, n'ont fait qu'user de leur pouvoir souverain d'appréciation en estimant ne pas devoir retenir les éléments de l'expertise officieuse commandée par M. Guilpain et en confiant à un expert judiciaire une mesure d'instruction ; que, des lors, le moyen n'est pas fonde ; rejette le premier moyen et le pourvoi forme contre l'arrêt du 24 mai 1982 ;
Mais sur le deuxième moyen : - Vu l'article 1116 du Code civil ; - Attendu que pour rejeter la demande de M. Guilpain qui prétendait que M. Samain, garagiste, en s'abstenant de lui signaler que le moteur, remonte sur un modèle de 1975, annonce comme en parfait état, datait de 1968, s'était rendu coupable d'une manœuvre par réticence constitutive d'un dol, la cour d'appel se borne à énoncer que la facture porte que le véhicule est vendu dans l'état ou il se trouve avec un moteur d'occasion et que M. Guilpain, dont l'attention était ainsi attirée sur ce fait, n'a pas demandé de précision sur la date de fabrication du moteur ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si le vendeur professionnel n'avait pas, en omettant, par une réticence dolosive, de révéler l'ancienneté réelle du moteur, amené son client non spécialiste à se déterminer à acquérir le véhicule, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen : Casse et annule l'arrêt rendu le 5 décembre 1983, entre les parties, par la Cour d'appel de bourges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état ou elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Orléans, à ce désignée par délibération spéciale prise en la chambre du conseil.