CA Poitiers, 1re ch. civ., 3 décembre 2003, n° 02-02404
POITIERS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Gonzalez-Ruiz (Epoux)
Défendeur :
BNP Paribas (SA), CEGEREC (Sté), Crédit Lyonnais (SA), Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente Maritime Deux-Sèvres
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Muller
Conseillers :
M. Barthelemy, Mme Albert
Avocats :
Mes Cartier, Rougier, SCP Meunier-Mady
Faits et procédure:
En contestant les mesures recommandées par la Commission de surendettement des particuliers de la Charente Maritime, et en soutenant que les créances du Crédit Agricole et du Crédit Lyonnais devaient être écartées du plan de redressement, Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz ont saisi le Juge de l'exécution siégeant au Tribunal d'instance de Marennes qui, par jugement en date du 13 juin 2002 a statué comme suit :
Constate que le prêt de 208 000 F consenti le 21 septembre 1988 par le Crédit Agricole aux époux Gonzalez-Ruiz et remboursable en 180 mensualités de 2 318,61 F sera soldé le 15 septembre 2003 et que le prêt de 214 000 F consenti le 10 février 1999 par la société CGLE sera soldé le 10 février 2004.
Donne acte aux époux Gonzalez-Ruiz de ce que les échéances du prêt consenti par le Crédit Lyonnais sont réglées par leur assurance chômage.
Dit que les époux Gonzalez-Ruiz sont redevables envers le Crédit Agricole et la BNP Paribas des sommes respectives de 49 700,74 euro et 91 129,91 euro outre intérêts au taux de 0 %.
Dit que les époux Gonzalez-Ruiz régleront le 15 de chaque mois à partir du 15 juillet 2002 les sommes suivantes :
- Crédit Agricole : 15 x 200 euro puis 5 x 375 euro puis 100 x 448,26 euro
- BNP Paribas : 15 x 200 euro puis 5 x 375 euro puis 100 x 862,55 euro
Constate que les époux Gonzalez-Ruiz supporteront une charge mensuelle totale de remboursement de 1 198,16 euro entre le 15 juillet 2002 et le 15 septembre 2003, de 1 194,69 euro entre le 15 octobre 2003 et le 15 février 2004 puis de 1 310,81 euro entre le 15 mars 2004 et le 15 juin 2012.
Dit qu'à défaut du règlement d'une seule mensualité l'intégralité du plan sera caduque.
Dit que copie du jugement sera transmise aux huissiers de justice du ressort de ce tribunal.
Vu l'appel de cette décision du 13 juin 2002, interjeté par courriers des 1er et 3 juillet 2002 au nom de Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz;
Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 16 janvier 2003 qui a cassé seulement en ce qu'il a condamné Monsieur Gonzalez à payer à la BNP la somme de 587 773 F l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers du 5 décembre 2000;
Vu l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers, première chambre civile, qui a réouvert les débats et invité les parties à s'expliquer au vu de l'arrêt de cassation du 16 janvier 2003
Vu les conclusions de Monsieur et Madame Gonzalez demandant à la cour de :
A titre principal :
- réformer le jugement en ce qu'il a dit que les époux Gonzalez sont redevables envers le Crédit Agricole et BNP Paribas des sommes respectives de 49 700,74 euro et 91 129,91 euro outre intérêts au taux de 0 %, et par suite,
- dire et juger Monsieur et Madame Gonzalez fondés dans leur contestation des mesures recommandées par la Commission,
- dire et juger que la créance du Crédit Agricole devra être purement et simplement déclarée inexistante puisque déjà réglée et écartée du plan de surendettement,
- dire et juger que la créance de BNP Paribas devra être écartée du plan de surendettement,
- surseoir à statuer en ce qui concerne la situation définie à l'article L. 331-2 du Code de la consommation,
- condamner solidairement BNP Paribas et le Crédit Agricole aux entiers dépens de première instance et d'appel,
- condamner solidairement BNP Paribas et le Crédit Agricole à payer la somme de 1 300 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
A titre subsidiaire:
- réformer le jugement en ce qu'il a dit que les époux Gonzalez sont redevables envers le Crédit Agricole et BNP Paribas des sommes respectives de 49 700,74 euro et 91 129,91 euro outre intérêts au taux de 0 % et par suite;
- dire et juger Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz fondé dans leur contestation des mesures recommandées par la Commission,
- dire et juger que la créance du Crédit Agricole devra être ramenée à la somme de 41 320,01 euro,
- dire et juger que la créance de BNP Paribas devra être écartée du plan de surendettement,
- condamner solidairement BNP Paribas et le Crédit Agricole aux entiers dépens de première instance et d'appel,
- condamner solidairement BNP Paribas et le Crédit Agricole à payer la somme de 1 300 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Vu les conclusions du Crédit Agricole requérant la Cour de :
- débouter les époux Julio Gonzalez-Ruiz - Marie Vialet de leur demande de sursis à statuer en ce qui concerne la situation définie à l'article L. 331-2 du Code de la consommation,
- constater que les époux Julio Gonzalez-Ruiz - Marie Vialet ont renoncé à bénéficier des dispositions en matière de surendettement dans leurs précédentes conclusions,
- dire et juger que les créanciers et notamment la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente Maritime - Deux Sèvres pourront reprendre les poursuites à l'encontre des époux Julio Gonzalez-Ruiz - Marie Vialet par tout moyen,
- subsidiairement modifier l'échéancier organisé au profit des époux Julio Gonzalez-Ruiz - Marie Vialet compte tenu du disponible dégagé du fait de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 16 janvier 2003,
- subsidiairement confirmer les dispositions du jugement du 25 octobre 2001 rendu par Monsieur le Juge de l'exécution près le Tribunal de grande instance de Rochefort sur Mer en son cabinet de Marennes, ayant fixé des créances de la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente Maritime - Deux Sèvres aux sommes suivantes :
- la somme de 8 174,50 euro au titre du prêt de 208 000 F, outre intérêts au taux contractuel,
- la somme de 71 427,77 euro au titre des trois prêts consentis à l'EARL Ferme Aquacole et cautionnés par les époux Julio Gonzalez-Ruiz - Marie Vialet, outre intérêts au taux légal,
- s'entendre les époux Julio Gonzalez-Ruiz - Marie Vialet condamnés solidairement à payer à la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Charente Maritime - Deux-Sèvres la somme de 915 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
Vu les conclusions de la BNP Paribas priant la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré du 13 juin 2002 et y ajoutant, de condamner les époux Gonzalez-Ruiz à lui payer la somme de 1 500 euro (article 700 du nouveau Code de procédure civile).
Vu la lettre du Crédit Lyonnais du 18 décembre 2002;
Vu la non comparution de CEGEREC;
Saisi par la Commission d'une demande de vérification des créances, le Juge de l'exécution, par décision (ordonnance) du 25 octobre 2001, non susceptible d'appel (article R. 331-13 du Code de la consommation), a fixé les créances à l'encontre des époux Gonzalez-Ruiz de la manière suivante :
* BNP Paribas : 91 129,91 euro / 597 773 F
* Crédit Lyonnais : 14 884,15 euro / 97 633,62 F
* Crédit Agricole: 8 174,50 euro / 53 621,20 F (prêt) ; 71 427,77 euro / 468 535,45 F (cautions)
Cette décision du 25 octobre 2001, qui n'a pas autorité de la chose jugée au principal, ne peut cependant pas être modifiée sans circonstances nouvelles, même antérieures à la décision rendue mais qui ont été révélées après ;
1) La créance du Crédit Agricole de 71 427,77 euro
Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz demandent que cette créance du Crédit Agricole de 71 427,77 euro, ramenée à 49 700,74 euro dans le jugement du 13 juin 2002 déféré, soit "déclarée inexistante puisque déjà réglée", et à titre subsidiaire soit ramenée à la somme de 41 320,01euro;
A l'appui de leurs demandes concernant cette créance du Crédit Agricole, Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz n'invoquent aucun élément nouveau qui ne soit pas déjà inclus dans leur lettre en date du 24 septembre 2001 adressée au Juge de l'exécution dans le cadre de la vérification des créances, et visée expressément dans la décision du 25 octobre 2001 ;
Dans ces conditions, et en l'absence de circonstances nouvelles depuis la décision du 25 octobre 2001, Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz sont irrecevables à contester la créance du Crédit Agricole fixée à 71 427,77 euro;
Et le jugement déféré doit être réformé en ce qu'il a ramené la créance du Crédit Agricole de 71 427,77 euro à 49 700,74 euro;
2) La créance de BNP Paribas de 91 129,91 euro :
587 773 F + 10 000 F (article 700 du nouveau Code de procédure civile)
En vertu de l'arrêt de la Cour de cassation du 16 janvier 2003, la BNP ne dispose plus à l'encontre des époux Gonzalez-Ruiz d'une créance au caractère liquide et certain;
La créance de la BNP admise le 25 octobre 2001 pour 91 129,91 euro doit donc aujourd'hui, vu l'arrêt de cassation du 16 janvier 2003, être écartée de la procédure de surendettement ;
Le jugement déféré doit en conséquence être réformé de ce chef;
3) La situation de surendettement au sens de l'article L. 331-2 du Code de la consommation :
Les époux Gonzalez-Ruiz n'ont pas repris dans le dernier état de leurs prétentions après l'arrêt du 2 avril 2003 leur demande tendant à faire dire qu'ils ne sont pas dans la situation définie à l'article L. 331-2 du Code de la consommation, et le Crédit Agricole doit être débouté de sa demande afin de faire constater que les époux Gonzalez-Ruiz ont renoncé à bénéficier des dispositions en matière de surendettement "dans leurs précédentes conclusions" (avant arrêt du 2 avril 2003);
Les époux Gonzalez-Ruiz doivent être déboutés de leur demande de sursis à statuer en ce concerne la situation définie à l'article L. 331-2 du Code de la consommation parce que cette demande n'a été formulée que dans le cas, non accueilli, où la créance du Crédit Agricole et la créance de la BNP Paribas seraient écartées du plan de redressement;
4) Le plan de redressement
Au vu des ressources mensuelles actuelles des époux Gonzalez-Ruiz d'environ 2 350 euro, des dépenses mensuelles courantes du ménage de l'ordre de 1 220 euro, en ce compris les 444,69 euro et 353,47 euro réglés à la société CGLE et au Crédit Agricole respectivement jusqu'aux 10 février 2004 et 15 septembre 2003 et alors que le reste à vivre minimum légal est de 1 149 euro, il convient d'ordonner le rééchelonnement du paiement de la dette des époux Gonzalez à l'égard du Crédit Agricole de 71 427,77 euro dans les conditions qui seront fixées dans le dispositif du présent arrêt;
Les sommes rééchelonnées seront assorties des intérêts au taux légal, et non pas à un taux réduit inférieur au taux d'intérêt légal en l'absence de proposition spéciale et motivée et de preuve que la situation des débiteurs l'exige;
Les dépens de première instance et d'appel seront à la charge de l'état français;
Les demandes des parties au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile devront être rejetées
Par ces motifs, LA COUR : Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, Réformant dans la mesure utile le jugement déféré et y ajoutant : Constate que par décision du 25 octobre 2001, il a été fixé les créances de : - BNP Paribas à 91 129,91 euro - Crédit Lyonnais à 14 884,15 euro - Crédit Agricole à 8 174,50 euro (prêt) 71 427,77 euro (cautions) - Déclare irrecevable la contestation par Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz de la créance du Crédit Agricole de 71 427,77 euro; - Dit que les époux Gonzalez-Ruiz sont redevables envers le Crédit Agricole, au titre des cautionnements solidaires souscrits de la somme non pas de 49 700,74 euro mais de 71 427,77 euro; - Déclare recevable et bien fondée la contestation par Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz de la créance de la BNP Paribas de 91 129,91 euro; - Ecarte du plan de redressement la créance de BNP Paribas de 91 129,91 euro; - Constate que le prêt de 208 000 F consenti le 21 septembre 1988 par le Crédit Agricole aux époux Gonzalez-Ruiz et remboursable en 180 mensualités de 2 318,61 F / 353,47 euro doit être soldé au 15 septembre 2003 et que le prêt de 214 000 F consenti le 10 février 1999 par la société CGLE doit être soldé le 10 février 2004; - Donne acte aux époux Gonzalez-Ruiz de ce que les échéances de prêt consenti par le Crédit Lyonnais sont réglées par leur assurance chômage; - Ordonne le rééchelonnement de la dette de 71 427,77 euro des époux Gonzalez-Ruiz à l'égard du Crédit Agricole comme suit, avec intérêts au taux légal 1re période : à compter du 1er du mois suivant la date du présent arrêt et jusqu'à fin février 2004 mensualités à payer par Monsieur Gonzalez-Ruiz au Crédit Agricole 685 euro 2e période : à compter du 1er mars 2004 : mensualités à payer par Monsieur et Madame Gonzalez-Ruiz au Crédit Agricole : 1 000 euro Dit qu'à défaut de règlement d'une seule mensualité, l'intégralité du plan sera caduque; - Rejette toute autre demande plus ample ou contraire, dont les demandes des parties au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, - Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de l'Etat Français.