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Décisions

CA Toulouse, 3e ch. sect. 1, 14 décembre 2004, n° 03-00809

TOULOUSE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Etablissement Pierre Harinordoquy (SARL), Mutuelle des assurances des professions alimentaires

Défendeur :

Bel (Consorts), Amblard, MACIF Sud Ouest Pyrénées, CPAM du Tarn, Union mutualiste Tarnaise

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dreuilhe

Conseillers :

MM. Helip, Boyer-Campourcy

Avoués :

SCP Château-Passera, SCP Sorel Dessart Sorel

Avocats :

SCP Salvaire, Veaute, Arnaud-Laur, SCP Bugis, Mes Costes,

CA Toulouse n° 03-00809

14 décembre 2004

Rappel des faits et de la procédure

Le 8 septembre 1998, la société Harinordoquy, qui a pour objet social l'importation, l'exportation, l'abattage et la commercialisation des chevaux en gros, a fait abattre un lot de 22 chevaux provenant de l'ex-Yougoslavie dans les abattoirs de Narbonne, comme en témoigne le cahier d'enregistrement d'abattage tenu par les services vétérinaires.

Un contrôle sanitaire obligatoire aux fins de détecter l'éventuelle présence de larves de trichines sur les chevaux abattus a été effectué préalablement à l'autorisation de libération des carcasses et à leur commercialisation sur le marché on vue de la consommation humaine.

Le 9 septembre 1998, le laboratoire d'analyses départemental de l'Aude a délivré aux services vétérinaires de l'abattoir de Narbonne un certificat négatif pour les chevaux ayant fait l'objet des prélèvements examinés (jugement rectificatif).

Les carcasses ainsi libérées ont fait l'objet d'une commercialisation auprès de leurs bouchers habituels dont Monsieur Amblard.

Le 6 octobre 1998, une alerte d'épidémie de trichinellose était tancée par le corps médical auprès des autorités sanitaires de Midi Pyrénées.

Le parcours de la carcasse à l'origine de l'épidémie a été immédiatement reconstitué par l'enquête vétérinaire le cheval infesté était le cheval numéro 22 du lot n° 2 abattu à l'abattoir de Narbonne le 9 septembre 1998 pour le compte de la société Harinordoquy.

L'enquête a révélé que 404 personnes avaient été contaminées entre le 20 septembre et le 27 octobre 1998 dans le département de la Haute-Garonne et du Tarn.

Toutes les victimes avaient consommé de la viande de cheval infecté par les larves de l'espèce trichinella spiralis.

Les victimes de la région de Castres avaient acheté la viande auprès de la boucherie de Monsieur Amblard.

Les consorts Bel ont présenté une pathologie de la trichinose en octobre 1998.

Ils ont assigné Jacques Amblard, son assureur la MACIF Sud Ouest Pyrénées, la Caisse primaire d'assurance maladie du Tarn, la SARL Harinordoquy et son assureur la Mutuelle d'assurance des professions alimentaires (MAPA) an déclaration de responsabilité et en dommages intérêts.

Le jugement appele

Le 19 décembre 2002, le Tribunal de grande instance de Castres:

A sur la responsabilité

A dit que la responsabilité de plein droit de Monsieur Amblard, vendeur, est engagée an dehors de toute faute, par application de l'article 1386-1 du Code civil, de même que pour le fournisseur de Monsieur Amblard, la SARL Harinordoquy;

B sur les causes d'exonération

- a dit que le risque de contamination de la viande de cheval par des trichines était parfaitement et complètement connu au moment de l'épidémie d'octobre 19981 ainsi que ses méthodes de détection;

- a donc écarté l'exonération légale tenant à l'état des connaissances scientifiques et techniques;

- a dit que les éventuelles fautes des services administratifs de contrôle préalable à la commercialisation ne peuvent exonérer les défendeurs de leur responsabilité de plein droit; qu'elles peuvent seulement permettre à ces derniers d'agir devant la juridiction administrative, après l'indemnisation des victimes, de manière récursoire;

- a écarté la force majeure qui n'est pas prévue par la loi du 19 mai 1998 sur les produits défectueux et qui dans toutes les hypothèses n'est pas constituée;

C sur le préjudice de contamination

- a dit qu'aucun préjudice corporel lié au processus de contamination n'était établi an dehors des séquelles corporelles liées à ce processus;

- a retenu " un préjudice moral " spécifique lié à l'idée de véhiculer dans son corps des organismes vivants, et ce pendant de nombreuses années, même si leur présence ne peut an elle-même être génératrice de troubles particuliers, cette " idée " étant de nature à causer à la victime une légitime angoisse, une gêne morale et donc un préjudice moral indemnisable;

D sur l'indemnisation des préjudices

- a condamné in solidum Monsieur Jacques Amblard et sa compagnie d'assurance la MACIF Sud Ouest Pyrénées à payer, sous réserve des provisions versées en deniers ou quittances valables,

À Monsieur Bel Christian les sommes de :

6 167,32 euro au titre du préjudice corporel soumis à recours

1 900 euro au titre du préjudice corporel non soumis à recours

1 500 euro au titre du préjudice moral

À Madame Huguette Bel les sommes de :

745,60 euro au titre de l'indemnisation forfaitaire

1 500 euro au titre du préjudice corporel non soumis à recours

1 500 euro au titre du préjudice moral

Aux époux Bel pour le compte de leur fille Mélanie les sommes de :

113,57 euro au titre de l'indemnisation forfaitaire

900 euro au tif me du préjudice corporel non soumis à recours

1 500 euro au titre du préjudice moral

À Monsieur Julien Bel les sommes de :

389,51 euro au titre de l'indemnisation forfaitaire

1 500 euro au titre du préjudice corporel non soumis à recours

1 500 euro au titra du préjudice moral

E Sur la créance de la Caisse primaire d'assurance maladie du Tarn

- a alloué à la Caisse primaire d'assurance maladie du Tarn

1 733,82 euro au titre des prestations versées

Ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de la date du jugement;

- a rejeté la demande de la Caisse fondée sur l'application des dispositions de l'article L. 376-1 du Code de la sécurité sociale;

F sur l'action an garantie

- a condamné in solidum la SARL Harinordoquy et son assureur la MAPA à relever et garantir intégralement Monsieur Amblard et son assureur la MACIF de toutes les condamnations prononcées contre eux, tant on principal qu'en intérêts, frais dépens et sommes allouées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

- a ordonné l'exécution provisoire du jugement;

G sur les demandes annexes et accessoires

- a condamné in solidum Monsieur Amblard et sa compagnie d'assurance la MACIF à payer aux demandeurs la somme de 1 000 euro sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

- a condamné in solidum Monsieur Amblard et sa compagnie d'assurance la MACIF à payer à la Caisse primaire d'assurance maladie la somme de 220 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

- a condamné in solidum la société Harinordoquy et la MAPA à payer à Monsieur Amblard et à son assureur la somme de 500 euro sur te fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

- a condamné in solidum Monsieur Amblard et sa compagnie d'assurance aux entiers dépens qui comprendront ceux de référé et les frais d'expertise.

L'appel

LA SARL Harinordoquy et son assureur la MAPA (mutuelle des assurances des professions alimentaires) ont interjeté appel de ce jugement le 17 mars 2003.

Prétentions des parties

A La société Harinordoquy

Dans ses conclusions récapitulatives d'appel on date du 1er octobre 2004 auxquelles la cour se réfère par application des dispositions des articles 455 et 753 du nouveau Code de procédure civile, la société Harinordoquy conclut à l'infirmation de la décision et au remboursement des sommes qu'elle a été amenée à verser an raison de l'exécution provisoire attachée au jugement. Elle sollicite an outre une indemnité de 1 500 euro on application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle critique la décision déférée:

- an ce qu'elle n'a pas retenu la faute des services administratifs de contrôle; selon l'appelante, cette faute exclusive des services administratifs, à l'origine des dommages invoqués par les victimes, est de nature à l'exonérer de sa responsabilité;

- an ce qu'elle a accordé un préjudice moral qui fait partie intégrante du quantum dolons ; si un tel préjudice spécifique a pu être accordé dans des circonstances exceptionnelles où les victimes avaient contracté le virus du sida qui engendre nécessairement une aggravation des soins et un traitement médical futur lourd, il n'existe dans le cas présent qu'un préjudice hypothétique et très aléatoire qui ne peut faire l'objet d'une indemnisation distincte;

B La MAPA

Dans ses conclusions du 15 septembre 2004 auxquelles la cour se réfère par application des mêmes dispositions du nouveau Code de procédure civile, la MAPA, assureur de la société Harinordoquy, conclut au principal aux mêmes fins au vu des certificats délivrés par les administrations intervenantes.

Elle estime que la SARL Harinordoquy, ainsi que Monsieur Amblard et son assureur la MACIF, peuvent légitimement invoquer à leur profit l'exonération de leur responsabilité par la force majeure qui n'est pas exclue du champ d'application de la loi du 19 mai 1998.

En conséquence, et selon elle, ces producteur et vendeur ne sont pas tenus, pas plus que leurs assureurs, à réparation. Elle demande donc à la cour d'infirmer les décisions intervenues, d'ordonner le remboursement des sommes indûment allouées et de renvoyer les demandeurs initiaux à mieux se pourvoir devant la juridiction administrative.

Par contre, la MAPA sollicite la confirmation du jugement an ce qu'il a débouté la Caisse primaire d'assurance maladie au titra de l'indemnité de gestion.

Elle sollicite l'allocation d'une somma de 1 500 euro par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Subsidiairement, la MAPA conclut à l'infirmation de la décision an ce qu'elle a alloué un préjudice moral spécifique, ce préjudice hypothétique éventuel et incertain ne pouvant donner lieu à indemnisation.

Elle sollicite le remboursement des sommes allouées et versées à ce titre, la diminution des condamnations fondées sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et le rejet de cette demande an cause d'appel.

C les victimes

Dans leurs conclusions du 17 septembre 2004 auxquelles la course réfère là aussi expressément, les consorts Bel demandent à la cour de confirmer la décision dont appel, de leur allouer an réparation des préjudices subis

Pour Monsieur Bel Christian :

ITT: 551,71 euro,

ITP 50 % : 316,48 euro

souffrances endurées : 1 829,39 euro,

préjudice corporel et moral : 7 622,45 euro,

perte de salaire : 5 299,13 euro

préjudice d'agrément : 762,25 euro

pour Madame Bel Huguette

ITT : 356,73 euro,

souffrances endurées : 1 829,39 euro,

ITP 5O% : 194,68 euro

perte de salaire : 194,19 C

préjudice corporel et moral : 7 622,45 euro

pour Monsieur Julien Bel :

ITT : 243,46 euro,

ITP 50 % 146,05 euro

souffrances endurées : 1 829,39 euro,

préjudice corporel et moral : 7 622,45 euro,

pour Mélanie Bel

ITT : 113,57 euro

souffrances endurées : 1 295,82 euro

préjudice corporel et moral : 7 622,45 euro

outre la somme de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

D La Caisse primaire d'assurance maladie

La Caisse conclut à l'infirmation de la disposition du jugement qui l'a déboutée, par un moyen relevé d'office, de sa demande d'indemnité de gestion; elle maintient ses demandes et conclut an outre à l'allocation d'une somme de 500 euro par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

E Monsieur Amblard et son assureur la MACIF

Monsieur Amblard et son assureur la MACIF constatent que par l'appel interjeté la SARL Harinordoquy et son assureur la MAPA limitent leurs explications à la cause étrangère qui résulterait selon eux du fait des services vétérinaires du département de l'Aude absents des débats devant la cour.

Dès lors, ils s'opposent a l'allocation de la somme réclamée au titre de l'article 700 qu'il serait inéquitable de laisser à leur charge alors que les appelants n'impliquent dans leurs écritures que les seuls services vétérinaires.

Ils concluent à la confirmation de la décision an ce qu'elle a rejeté la demande de paiement des frais de gestion au profit de la Caisse primaire d'assurance maladie, celle-ci ne pouvant résulter dune condamnation judiciaire mais d'une décision de l'organisme social.

Ils sollicitent la condamnation de la Caisse à leur verser la somme de 600 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Motifs de la décision

Vu les conclusions susvisées

I La responsabilité de plein droit de Monsieur Amblard, vendeur, et de la SARL Harinordoquy, fournisseur, est engagée en dehors de toute faute, comme le prévoit l'article 1386-1 du Code civil, le tribunal de grande instance ayant parfaitement analysé, par des motifs que la cour adopte expressément, l'existence d'un dommage, son origine, le caractère défectueux du produit et le lien entre ce défaut et le dommage.

Ces dispositions ne sont plus contestées par les appelants.

II Sur la cause d'exonération de responsabilité soulevée par les appelants.

Les appelants ont renoncé à se prévaloir des causes d'exonération prévues par les articles 1386-10 et 1386-11 qu'ils avaient invoqués devant le tribunal de grande instance.

Il est donc acquis que l'état des connaissances scientifiques et techniques permettaient de déceler l'existence du défaut au moment où a viande a été mise an circulation. Il est également acquis que la défectuosité du produit n'est pas couverte par le respect d'une réglementation an matière d'hygiène et de santé publique.

Les appelants estiment devoir être exonérés de leur responsabilité par la force majeure qui résulterait du fait d'un tiers, an l'espèce la faute commise par les services vétérinaires.

Le Tribunal de grande instance de Castres a, là aussi, par une analyse minutieuse des textes applicables, au vu des travaux préparatoires de la commission des lois, et par des motifs pertinents que la cour adopte, écarté cette argumentation.

Les fautes éventuelles commises par l'administration qui n'est pas présente aux débats ne peuvent être invoquées par les défendeurs pour s'exonérer de leur responsabilité. En effet, les éventuelles défaillances commises par l'administration ne sont pas les causes exclusives du dommage du fait de la préexistence de la présence des larves avant cette intervention administrative et de la misa an circulation du produit.

Cette intervention peut seulement et éventuellement permettre aux défendeurs d'agir devant la juridiction administrative, après indemnisation des victimes, et de manière récursoire.

Le tribunal de grande instance de Castres a enfin justement rappelé que la loi du 19 mai 1998 sur les produits défectueux édictait de manière limitative les causes d'exonération de cette responsabilité de plain droit; que la force majeure n'y figurait pas ; qu'en tout état de cause les conditions d'imprévisibilité, d'irrésistibilité et d'extériorité n'étaient pas constituées.

La cour confirme donc les dispositions du jugement qui a déclaré Monsieur Amblard et la SARL Harinordoquy totalement responsables de la contamination dont s'agit et qui les a condamnés in solidum avec leurs assureurs respectifs à an réparer les conséquences dommageables.

III Sur les indemnisations

Sur le "préjudice moral" spécifique retenu par le tribunal

Ce motif est dépourvu de fondement juridique; la notion de préjudice spécifique de contamination a été dégagée à la suite d'affaires gravissimes de transmission sanguine, de maladies comme le sida ou l'hépatite C.

La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 2 avril 1996, l'a défini ainsi: " Le préjudice de contamination, qui n'inclut pas l'atteinte à l'intégrité physique, comprend l'ensemble des préjudices à caractère personnel, tant physique que psychique, subis par la victime et résultant notamment de la réduction de l'espérance de vie, des perturbations de la vie sociale, familiale et sexuelle, ainsi que des souffrances et de leur crainte, du préjudice esthétique et d'agrément, ainsi que de toutes les maladies opportunistes consécutives à la déclaration de la maladie".

Pour retenir l'existence d'un tel préjudice an faveur de personnes victimes de trichinellose, il a été relevé :

- jugement du Tribunal de grande instance de Toulouse : " que s'il est certain que les thérapeutiques existantes sont efficaces et permettant la guérison clinique et parasitologique, l'infestation par les trichines étant an outre génératrice d'immunité rendant pratiquement impossible la ré-infestation, ce qui conduit à considérer qu'il n'y a pas d'évolution défavorable de l'infection à envisager, le processus d'enkystement étant aujourd'hui achevé, il n'en demeure pas moins que le fait de continuer à vivre avec des larves, qu'elles soient mortes ou vives, enkystées dans la peau durant toute la vie, ce que la personne contaminée sait pertinemment, génère an soi un préjudice corporel et psychologique qui ne peut être négligé et ouvre droit à réparation"

- le jugement déféré : " que l'idée de véhiculer dans son corps des organismes vivants et ce pendant de nombreuses années, même si leur présence ne peut être génératrice an elle-même de troubles particuliers, est de nature à causer à la victime une légitime angoisse, une gêne morale et donc un préjudice moral indemnisable".

Ce raisonnement ne peut être admis.

Il résulte des rapports d'expertise judiciaire qu'aucune séquelle fonctionnelle en relation avec la trichinose, aucune IPP, aucun préjudice d'agrément ou esthétique, aucune incidence professionnelle ne sont an relation avec cette maladie.

Les documents techniques du débat révèlent an outre que la première infestation par les trichines est génératrice d'une immunité qui rend par la suite pratiquement impossible la ré-infestation. De plus il est établi que les larves enkystées ne peuvent être ré-activées que par la suite de la dissolution de la coque qui les entoure sous l'action du suc gastrique, ce qui implique nécessairement l'intervention d'un tiers consommant les muscles infestés. Sinon, les larves enkystées qui peuvent demeurées an vie mais inactives pendant plusieurs années finissent par mourir.

Il s'ensuit qu'après traitement anthelminthique les personnes contaminées n'ont aucune évolution défavorable à redouter, aucune nécessité de se soumettre à une surveillance stricte et continue.

En l'espèce les victimes n'établissent aucune perturbation de leur vie sociale ou familiale, aucune souffrance persistant postérieurement à la guérison acquise, aucune suite de quelque nature que ce soit hormis la gêne purement subjective et irraisonnée due à la conscience de la présence dans leurs muscles de larves de trichines enkystées qui ne peut être considérée comme un préjudice indemnisable.

Il s'ensuit qu'aucun préjudice spécifique résultant de la phase chronique de la contamination ne peut juridiquement être retenu, rien ne justifiant de séparer les souffrances morales liées à 'l'idée" retenues par le tribunal des souffrances réparées par les indemnités allouées au titre du pretium dolons.

Ce préjudice, hypothétique et aléatoire, n'est pas établi aux débats, que ce soit par les rapports d'expertise, par les doléances des victimes ou par les soins prodigués (pas de prescription d'anti-dépresseurs, pas de trace de consultation de psychologue, etc...).

Et enfin, dans le cas où, par extraordinaire, l'état de santé des victimes viendrait à s'aggraver, an rapport direct et exclusif avec cette épidémie de trichinellose de 1998, cas victimes pourraient solliciter la réouverture de leur dossier an aggravation et obtenir la réparation intégrale de leurs nouveaux préjudices.

La cour infirme donc cette disposition du jugement appelé et ordonne on tant que de besoin le remboursement des sommes versées au vu de l'exécution provisoire attachée au jugement de première instance avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt, aucun élément du débat ne justifiant les dommages intérêts moratoires sollicités par la MAPA.

Sur les autres indemnisations

Le Tribunal de grande instance de Castres a alloué des indemnisations conformes à la jurisprudence habituelle au vu des conclusions des expertises médicales et des justificatifs fournis partes victimes, la cour constatant que la preuve du lien de causalité entre les pertes de revenus alléguées et la contamination n'est pas rapportée.

Il convient an effet de rappeler qu'aucune nouvelle séquelle fonctionnelle an relation avec la trichinose, aucune IPP, aucun préjudice d'agrément ou esthétique n'est on relation avec cette maladie. Les demandes nouvelles ou complémentaires formulées devant la cour ne sont pas justifiées par les conclusions de l'expertise médicale qui ne sont pas contredites utilement ni an relation directe de causalité avec la contamination; elles ne peuvent qu'être rejetées, comme doivent être rejetées les demandes portant indemnisation des pertes de salaires, sans lien direct avec l'infection.

Ces indemnisations allouées par le tribunal de grande instance sont donc confirmées ainsi que les sommes allouées à l'organisme social au titre de ses débours.

IV Sur l'appel de la Caisse primaire d'assurance maladie concernant son indemnité de gestion

Le tribunal de grande instance de Castres a d'office relevé le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande d'indemnité de gestion fondée sur l'application des dispositions de l'article L 3761 du Code de la sécurité sociale.

A supposer que cette dis position soit annulable pour ne pas avoir été soumise à la discussion contradictoire des parties, le tribunal de grande instance l'ayant relevé d'office, la cour d'appel, évoquant sur ce point désormais dans le débat, dit que cette demanda doit être rejetée.

En effet, aux termes de l'article L. 376 -1 du Code de ta sécurité sociale issu de l'ordonnance n° 9651 du 24 janvier 1896, on contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement des prestations servies à la victime d'un dommage corporel, la Caisse d'assurance maladie, à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident, recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu dans la limite maximum de 760 euro et d'un montant minimum de 76 euro.

L'ordonnance qui a institué cotte taxation forfaitaire de la personne condamnée à verser des dommages et intérêts ne permet pas à la juridiction judiciaire d'apprécier le bien fondé de la demande formée de ce chef et à la personne condamnée d'en contester le bien ou le mal fondé devant la juridiction compétente.

Il an résulte que cette somme ne doit pas résulter d'une condamnation judiciaire mais au contraire d'une décision de l'organisme social qui a obtenu l'acceptation de son action récursoire devant une juridiction.

L'appel est mal fondé; il est rejeté.

V Sur les demandes annexes

Les appelants succombent au principal dans leur appel, leur responsabilité de plein droit étant consacrée.

Les condamnations annexas arbitrées par le tribunal de grande instance sont donc confirmées et conformes à l'équité on ce qui concerne les indemnités allouées an application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Les dépens suivant le sort du principal, les appelants supporteront les dépens de Cet appel mal fondé au principal.

Les indemnisations étant pour partie réformées dans leur modalité contestée par les appelants, à savoir le préjudice spécifique dit "moral", et les intimés succombant sur ce point précis, l'équité ne commando pas qu'il soit fait application à ces intimés des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés certes pour se défendre mais aussi pour soutenir une demande juridiquement mal fondée.

Il ne sera donc pas fait application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties, la Caisse primaire d'assurance maladie succombant également dans son appel concernant l'indemnité de gestion.

L'équité ne commanda pas par ailleurs l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à Monsieur Amblard et à son assureur, leur présence aux débats étant indispensable et les dépens de l'appel étant supportés par les appelants la SARL Harinordoquy et son assureur la MAPA.

Par ces motifs, LA COUR, Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'exception de la disposition portant réparation au profit des victimes d'un préjudice spécifique dit "préjudice moral": Infirme la décision sur ce point; Dit n'y avoir lieu à indemnisation spécifique; Ordonne an tant que de besoin le remboursement des sommes versées à ce titre on vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision; Y ajoutant. Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties; Condamne in solidum la SARL Harinordoquy et son assureur la MAPA aux dépens d'appel, à l'exception des dépens exposés par la Caisse primaire d'assurance maladie du TARN qui resteront à sa charge, avec distraction au profit de l'avoué des victimes la SCP Château Passera.