Cass. com., 28 juin 2005, n° 02-10.252
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Wanono, Bleu marine-Raymond Wanono (EURL)
Défendeur :
Mantero France (SARL), Jungle bis (EURL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
M. Pietton
Avocat général :
M. Jobart
Avocats :
SCP Boré, Salve de Bruneton, SCP Baraduc, Duhamel.
LA COUR : - Donne acte à la société civile professionnelle Leclerc et Masselon, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Bleu marine, qui vient aux droits de l'EURL Bleu marine, de ce qu'elle déclare reprendre l'instance engagée par cette société; - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Besançon, 16 octobre 2001), que la SARL Mantero qui fabrique et distribue des accessoires vestimentaires sous la marque Kenzo, a conclu avec l'EURL Jungle bis un contrat de concession en vue de distribuer ses produits; que reprochant à l'EURL Bleu marine (l'EURL), ayant pour gérant M. Wanono, de vendre des produits identiques dans ses deux magasins, elle a saisi la juridiction des référés d'une demande tendant à enjoindre à M. Wanono, tant en sa qualité de gérant de l'EURL Bleu marine qu'en son nom personnel, de communiquer le nom de son fournisseur sous astreinte et de lui interdire toute vente des produits litigieux;
Sur le premier moyen : - Attendu que M. Wanono et l'EURL Bleu marine font grief à l'arrêt d'avoir confirmé l'ordonnance de référé enjoignant à M. Wanono d'avoir à communiquer l'identité de son ou ses fournisseurs et lui interdisant de vendre divers produits alors, selon le moyen, qu'il n'existe une unicité de patrimoine entre une EURL et l'associé unique qu'à la condition qu'il soit constaté que la société est fictive et non réelle; qu'en déclarant dès lors qu'il y avait unicité de patrimoine entre l'EURL Bleu marine et l'associé unique, M. Wanono, sans constater le caractère fictif de cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 122 et 126 du nouveau Code de procédure civile et 34 et 35 de la loi du 24 juillet 1966 modifiée;
Mais attendu que l'arrêt relève que l'assignation visait M. Wanono, pris tant en sa qualité de dirigeant de l'EURL Bleu marine qu'à titre personnel, qu'elle avait été délivrée à l'EURL et que l'acte avait été remis à M. Wanono, gérant, par l'huissier instrumentaire ; que la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche inopérante, a retenu que l'appelant ne pouvait avoir aucun doute sur l'identité de la personne morale concernée; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, elle a, par ce seul motif, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par le moyen, légalement justifié sa décision; que le moyen ne peut être accueilli;
Mais sur le troisième moyen : - Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; - Attendu que pour accueillir la demande des sociétés Mantero et Jungle bis, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que M. Wanono, qui ne conteste pas la qualité spécifique des produits revêtus de la marque Kenzo, qualité supposant qu'ils soient distribués auprès de la clientèle dans le cadre d'un service particulièrement soigné, ne remet pas en cause le principe d'un système de distribution garantissant la qualité des produits mais se borne à contester sa mise à l'écart de ce système, sans démontrer qu'elle résulte d'une fraude commise à son détriment;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. Wanono et de l'EURL qui soutenaient qu'il appartenait aux sociétés Mantero et Jungle bis de justifier de la licéité du contrat de distribution exclusive et sélective et que le premier juge avait renversé la charge de la preuve en dispensant ces deux sociétés de prouver la licéité de leur contrat, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen : Casse et annule, mais seulement en ce que, en confirmant l'ordonnance déférée, il a enjoint à M. Wanono, dirigeant de l'EURL Bleu marine, de communiquer à la SARL Mantero France sous astreinte l'identité de la ou des personnes qui lui fournissent des foulards, écharpes, étoles, châles, paréos et gants portant la griffe Kenzo et lui interdisant sous astreindre de les vendre dans ses magasins, l'arrêt rendu le 16 octobre 2001, entre les parties, par la Cour d'appel de Besançon; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Dijon.