CJCE, 10 octobre 1989, n° C-246/89 R
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Ordonnance
PARTIES
Demandeur :
Commission des Communautés européennes
Défendeur :
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, Irlande
LA COUR,
1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 4 août 1989, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l'article 169 du traité CEE, un recours visant à faire constater que, en imposant les conditions de nationalité que fixent les articles 13 et 14 du Merchant Shipping Act de 1988, le Royaume-Uni a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 7, 52 et 221 du traité CEE.
2. Ces questions ont été posées dans le cadre d'un litige qui oppose l'Institut National pour l'Assurance des Travailleurs Indépendants (ci-après "INASTI") à M. Stanton et à la société dont il est administrateur, depuis 1979, au sujet du paiement des cotisations au régime social belge des travailleurs indépendants au titre de cette activité professionnelle.
3 Le Merchant Shipping Act de 1988 est entré en vigueur le 1er décembre 1988 et la période transitoire visée à l'article 13, paragraphe 3, a expiré le 31 mars 1989.
4 L'article 14 du Merchant Shipping Act de 1988 dispose, en son paragraphe 1, que, sauf dérogation contraire décidée par le ministre des Transports, un navire de pêche ne peut être inscrit dans le nouveau registre que :
" a) si son propriétaire est britannique,
b) s'il est exploité à partir du Royaume-Uni et que son utilisation est dirigée et contrôlée à partir du Royaume-Uni, et
c) si l'affréteur, l'armateur exploitant ou l'exploitant du navire est une personne ou société qualifiée ".
Selon le paragraphe 2 du même article, un navire de pêche est réputé appartenir à un propriétaire britannique si le droit de propriété est en totalité détenu par une ou plusieurs personnes ou sociétés qualifiées et si l'usufruit du navire appartient à une ou plusieurs sociétés qualifiées ou à 75 % au moins à une ou plusieurs personnes qualifiées; le paragraphe 7 de la même disposition précise que, par "personne qualifiée", il faut entendre une personne qui est citoyen britannique, résidant et domicilié au Royaume-Uni, et, par "société qualifiée", une société constituée au Royaume-Uni et y ayant son siège, dont 75 % au moins du capital social est détenu par une ou plusieurs personnes ou sociétés qualifiées et dont 75 % au moins des administrateurs sont des personnes qualifiées.
7. Il convient de préciser qu'un régime communautaire des travailleurs indépendants a été mis en place par le règlement n° 1390-81 du Conseil, du 12 mai 1981, étendant aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille le règlement n° 1408-71 du Conseil (JO L 143, p. 1). Aux termes de l'article 2 de ce règlement, celui-ci n'ouvre aucun droit pour une période antérieure à la date de son entrée en vigueur. Or, il résulte de son article 4 que ledit règlement n'est entre en vigueur que le 1er juillet 1982, soit à une date postérieure aux périodes concernées par le litige au principal (1979 à 1980). Ce règlement est donc inapplicable à ces litiges, et c'est à juste titre que la question posée se réfère exclusivement à certaines dispositions du traité.
6 Par ordonnance du 12 septembre 1989, l'Irlande a été autorisée à intervenir dans la présente procédure en référé au soutien du Royaume-Uni.
7 La partie défenderesse a présenté ses observations écrites le 25 août 1989 et les parties ont été entendues en leurs explications orales le 15 septembre 1989.
8 Il convient, à titre liminaire, de rappeler le contexte factuel et juridique dans lequel s'inscrit le litige.
11. Ainsi que l'a jugé la Cour (voir notamment l'arrêt du 12 juillet 1984, Klopp, 107-83, Rec. p. 2971, et l'arrêt du 28 janvier 1986, Commission/France, 270-83, Rec. p. 285), la liberté d'établissement ne se limite pas au droit de créer un seul établissement à l'intérieur de la Communauté, mais comporte la faculté de créer et de maintenir, dans le respect des règles professionnelles, plus d'un centre d'activité sur le territoire de celle-ci.
10 Avec effet au 1er janvier 1977, les États membres ont, par une action concertée, étendu les zones de pêche exclusives, relevant de leur juridiction, à 200 milles nautiques au large de leurs côtes bordant, notamment, l'Atlantique Nord. Des eaux devenues communautaires ont été exclus entre autres les navires de pêche battant pavillon espagnol, dont un certain nombre avait, jusqu'alors, pêché dans ces eaux, notamment à l'Ouest des îles Britanniques et au large des côtes françaises.
11 Après un régime transitoire, la Communauté a, le 15 avril 1980, conclu un accord de pêche avec le Gouvernement de l'Espagne (JO L 322, p. 3) fixant les conditions pour l'exercice de la pêche par les navires de chacune des parties dans les zones relevant de la juridiction de l'autre partie. Cet accord prévoit la fixation annuelle du volume des prises allouées aux navires de chaque partie dans les zones de pêche de l'autre partie et l'instauration d'un système de licences pour les navires autorisés à effectuer ces prises.
12 Il est constant que, suite à cet accord, un nombre important de navires de pêche battant pavillon espagnol ont été réimmatriculés au Royaume-Uni, leurs propriétaires y créant des sociétés auxquelles la propriété des navires était transférée. Le Merchant Shipping Act de 1894, alors en vigueur, exigeait seulement, pour l'inscription au registre britannique, que le navire soit propriété d'un sujet britannique ou d'une société constituée au Royaume-Uni et y ayant son siège. La réimmatriculation a permis à ces navires de pêcher dans les eaux communautaires sous pavillon et licence de pêche britanniques, tout en mettant à terre leurs prises en Espagne.
13 Avec effet au 27 janvier 1983, les États membres ont instauré un régime de quotas de pêche. Le règlement n° 170-83 du Conseil, du 25 janvier 1983, instituant un régime communautaire de conservation et de gestion des ressources de pêche (JO L 24, p. 1), prévoit, en son article 3, la fixation périodique du total admissible des captures pour certaines espèces ou certains groupes d'espèces de poissons et, en son article 4, la répartition du volume des prises disponibles pour la Communauté entre les États membres. Conformément à l'article 10 du règlement n° 2057-82 du Conseil, du 29 juin 1982, établissant certaines mesures de contrôle à l'égard des activités de pêche exercées par les bateaux des États membres (JO L 220, p. 1), toutes les captures soumises à quota effectuées par les bateaux de pêche battant pavillon d'un État membre ou enregistrés dans un État membre sont imputées sur le quota applicable à cet État, quel que soit le lieu de la mise à terre.
14 Le 30 mars 1983, les autorités britanniques ont, par le British Fishing Boats Act de 1983 et le British Fishing Boats Order de 1983, introduit une nouvelle réglementation sur les navires de pêche. Cette réglementation, qui n'affecte pas la validité des licences de pêche existantes, interdit la pêche dans les eaux relevant de la juridiction du Royaume-Uni et la mise à terre de poissons au Royaume-Uni aux navires britanniques dont l'équipage n'est pas, à 75 % au moins, composé de citoyens britanniques ou de ressortissants des États membres de la Communauté.
15 Le 1er janvier 1986, l'Espagne est devenue membre de la Communauté. Pour la pêche, les articles 156 à 164 de l'acte relatif aux conditions d'adhésion du Royaume d'Espagne et de la République portugaise et aux adaptations des traités (JO L 302 du 15.11.1985) instaurent, pour la période allant jusqu'au 31 décembre 2002, un régime transitoire, qui limite le nombre des navires de pêche battant pavillon espagnol pouvant exercer leurs activités dans les eaux relevant de la juridiction des États membres de l'ancienne Communauté à 300 navires figurant sur une liste nominative, dont seuls 150 sont autorisés à exercer leur activité simultanément.
16 Il est également constant que, suite à l'adhésion de l'Espagne, un certain nombre de navires de pêche britanniques ont été acquis avec leurs licences de pêche par des intérêts espagnols par l'intermédiaire de sociétés créées à cet effet au Royaume-Uni. Tout comme les navires espagnols précédemment réimmatriculés au Royaume-Uni, ces navires, opérés par des équipages espagnols, ont été en mesure, selon la réglementation existante, de pêcher dans les eaux relevant de la juridiction des États membres de la Communauté à dix, à l'exclusion des eaux britanniques, et de mettre à terre leurs prises en Espagne, les prises ainsi mises à terre étant imputées sur les quotas alloués au Royaume-Uni.
17 Avec effet au 1er janvier 1986, les autorités du Royaume-Uni ont, cependant, procédé à un renouvellement systématique des licences de pêche britanniques. Les nouvelles licences sont assorties des conditions suivantes :
- le navire doit exercer ses activités à partir des îles britanniques, cela étant présumé si, au cours d'une période de six mois, le navire met à terre et vend 50 % de ses prises dans les îles britanniques ou y relâche dans un port au moins quatre fois à quinze jours d'intervalle;
- l'équipage du navire doit être composé à 75 % au moins de citoyens britanniques ou de ressortissants des États membres de la Communauté résidant à terre au Royaume-Uni, à l'exclusion, entre autres, jusqu'au 1er janvier 1993, des ressortissants espagnols auxquels certaines dispositions du droit communautaire relatives à la libre circulation des travailleurs ne sont applicables qu'à partir de cette date, conformément aux articles 55 à 59 de l'acte d'adhésion, précité;
- le capitaine et l'équipage doivent cotiser au régime britannique de sécurité sociale.
18 La légalité de ces conditions, notamment au regard du droit communautaire, a été contestée devant les juridictions britanniques et fait l'objet de deux renvois préjudiciels qui sont en instance devant la Cour (affaires 3-87, Agegate, et 216-87, Jaderow). Ces mêmes conditions font aussi l'objet d'un recours en manquement introduit par la Commission (affaire 279-89, Commission/Royaume-Uni).
19 Il est enfin à signaler que la légalité des conditions fixées à l'article 14 du Merchant Shipping Act de 1988 a également été contestée devant les juridictions britanniques et fait, en ce qui concerne la compatibilité de ces conditions avec le droit communautaire, l'objet d'un renvoi préjudiciel (affaire 221-89, Factortame).
20 Il convient, ensuite, de rappeler que, en vertu de l'article 186 du traité CEE, la Cour peut, dans les affaires dont elle est saisie, prescrire les mesures provisoires nécessaires.
21 Selon l'article 83, paragraphe 2, du règlement de procédure, une décision ordonnant des mesures provisoires telles que celles sollicitées est subordonnée à l'existence de circonstances établissant l'urgence, ainsi que de moyens de fait et de droit justifiant à première vue leur octroi.
22 Il convient d'examiner si ces conditions sont remplies en l'espèce.
23 En ce qui concerne d'abord la condition du fumus boni juris, la Commission rappelle qu'elle conteste uniquement la conformité au droit communautaire des conditions de nationalité introduites par l'article 14 du Merchant Shipping Act de 1988. Ces conditions interdiraient aux ressortissants des autres États membres d'acquérir, par l'intermédiaire d'une société, un navire de pêche britannique et de gérer une société exploitant un tel navire dans les mêmes conditions que les ressortissants britanniques. Il s'agirait d'une discrimination directe, violant de façon flagrante l'interdiction de discrimination en raison de la nationalité, qui ne saurait être justifiée ni par la réglementation communautaire sur les quotas de pêche ni par les obligations incombant au Royaume-Uni en vertu du droit international.
24 Le Gouvernement du Royaume-Uni estime, quant à lui, que les dispositions nationales contestées par la Commission n'enfreignent pas le droit communautaire. Tout État membre serait libre de fixer les conditions pour l'immatriculation des navires et pour battre son pavillon. Le droit international ferait obligation au Royaume-Uni de fixer ces conditions de façon que le navire ait un lien substantiel avec le Royaume-Uni lui permettant d'exercer effectivement sa juridiction et son contrôle sur le navire. Les conditions contenues dans le Merchant Shipping Act de 1988 correspondraient à celles imposées par d'autres États membres pour battre leur pavillon.
25 Le Gouvernement du Royaume-Uni estime en outre que les conditions de nationalité introduites par la loi de 1988 sont justifiées par la réglementation communautaire actuelle de la pêche. Cette réglementation, bien qu'établissant un régime commun, se baserait sur un principe de nationalité pour la répartition des quotas de pêche. En vertu de l'article 5, paragraphe 2, du règlement n° 170-83 du Conseil, précité, il appartiendrait aux États membres de fixer les modalités d'utilisation des quotas qui leur sont alloués, et donc de fixer les conditions auxquelles les navires autorisés à capturer ces quotas doivent satisfaire.
26 Il y a lieu d'observer que le système des quotas nationaux établi par le règlement n° 170-83 du Conseil, précité, constitue, comme le fait valoir le Royaume-Uni, une dérogation au principe de l'accès égal des pêcheurs de la Communauté aux fonds de pêche et à leur exploitation dans les eaux relevant de la juridiction des États membres, expression particulière du principe de non-discrimination établi à l'article 40, paragraphe 3, du traité CEE.
27 Cette dérogation se justifie, selon les considérants du règlement n° 170-83, par la nécessité, dans une situation de pénurie de ressources halieutiques, d'assurer une stabilité relative des activités de pêche, visant à préserver les besoins particuliers des régions dont les populations locales sont particulièrement tributaires de la pêche et des industries connexes.
28 On ne saurait dès lors exclure que les États membres, dans leur réglementation concernant, notamment, l'immatriculation des navires de pêche et l'accès aux activités de la pêche, puissent être amenés à introduire des conditions dont la compatibilité avec le droit communautaire ne peut se justifier que par la nécessité d'atteindre les objectifs du régime communautaire des quotas de pêche. En effet, ainsi que la Commission l'a elle-même admis dans le cadre de la présente procédure, de telles conditions peuvent être nécessaires pour assurer l'existence d'un lien substantiel avec le secteur de la pêche de l'État membre dans le quota duquel le navire peut puiser.
29 Cependant, aucun élément ne permet, à première vue, de conclure que de telles conditions puissent déroger à l'interdiction de discrimination en raison de la nationalité contenue aux articles 52 et 221 du traité CEE, concernant respectivement le droit d'établissement et le droit de participer financièrement au capital des sociétés au sens de l'article 58.
30 Les droits découlant des dispositions précitées du traité comportent non seulement le droit de s'établir et de participer au capital des sociétés, mais également le droit d'exercer une activité économique, le cas échéant par l'intermédiaire d'une société, dans les conditions définies par la législation du pays d'établissement pour ses propres ressortissants.
31 A première vue, ces droits comportent également celui de constituer et de gérer une société ayant pour but d'exploiter un navire de pêche immatriculé dans l'État d'établissement dans les mêmes conditions qu'une société contrôlée par des ressortissants de cet État.
32 S'agissant du premier moyen du Royaume-Uni tiré des obligations lui incombant en vertu du droit international, il suffit d'observer, à ce stade, qu'à cet égard aucun élément n'a été avancé qui, à première vue, pourrait nécessiter une quelconque dérogation aux droits précités découlant du droit communautaire en vue d'assurer l'exercice efficace de la juridiction et du contrôle britanniques sur les navires en cause.
33 En conséquence, il y a lieu de constater qu'au stade du référé le recours n'apparaît pas comme dépourvu de fondement et qu'il est ainsi satisfait à la condition du fumus boni juris.
34 En ce qui concerne, ensuite, la condition relative à l'urgence, il convient de rappeler que le caractère urgent d'une demande de mesures provisoires doit s'apprécier par rapport à la nécessité qu'il y a d'ordonner de telles mesures afin d'éviter qu'un préjudice grave et irréparable ne soit causé.
35 La Commission observe que l'instauration du nouveau registre des navires de pêche britanniques a eu pour effet d'immobiliser l'ensemble de la flotte "anglo-espagnole". Selon les informations de la Commission, l'immatriculation, dans ce registre, d'un certain nombre de ces navires ne serait exclue qu'en raison des conditions de nationalité litigieuses, les navires en question pouvant remplir les autres conditions de l'article 14 du Merchant Shipping Act de 1988, notamment celle relative à l'exploitation et au contrôle à partir du Royaume-Uni. Les propriétaires des navires en question subiraient, du fait de l'immobilisation, de lourdes pertes et seraient, à court terme, contraints de vendre leurs navires dans des conditions très difficiles. Or, selon le droit civil britannique, ces pertes ne pourraient pas être compensées ultérieurement dans le cadre d'actions intentées contre les autorités britanniques.
36 Le Gouvernement du Royaume-Uni fait valoir que les mesures provisoires demandées ne seraient d'aucun effet en pratique. Mis à part les conditions de nationalité, le Gouvernement britannique conteste que les navires immobilisés soient en mesure de satisfaire aux conditions requises pour l'immatriculation, notamment celles relatives à la résidence au Royaume-Uni et à l'exploitation du navire à partir du Royaume-Uni. La suspension de l'application des conditions relatives à la nationalité, demandée par la Commission, ne saurait par conséquent éviter le préjudice allégué, et il n'y aurait, de ce fait, aucune urgence. Le Gouvernement britannique souligne en outre que l'intérêt que la Commission peut avoir à obtenir ces mesures provisoires doit être mis en balance avec l'intérêt du Royaume-Uni à régler de façon durable les problèmes causés par les navires "anglo-espagnols" au secteur de la pêche britannique. Les mesures prises à cet égard par les autorités britanniques en 1983 et en 1986 seraient restées inefficaces et seule l'introduction d'exigences claires et faciles à administrer serait à même de résoudre ces problèmes.
37 Il y a lieu de constater, d'abord, que, pour les navires de pêche qui, jusqu'au 31 mars 1989, battaient pavillon britannique et pêchaient sous licence de pêche britannique, la perte du pavillon et la cessation de leurs activités entraînent un préjudice grave. Il n'y a pas lieu de croire que ces navires puissent, en attendant l'arrêt dans l'affaire au principal, être exploités dans des activités de pêche alternatives. Il y a lieu également de considérer ce préjudice comme irréparable en cas de succès du recours principal.
38 Il est vrai que, pour qu'il y ait urgence, il est nécessaire que les mesures provisoires demandées soient aptes à éviter le préjudice allégué. Au stade actuel de la procédure, il ne peut cependant être exclu qu'un certain nombre des navires en cause puissent, comme le dit la Commission, satisfaire aux conditions d'immatriculation si l'application de celle relative à la nationalité était suspendue.
39 Enfin, en ce qui concerne la balance des intérêts, il n'est pas établi que les mesures provisoires demandées puissent compromettre l'objectif poursuivi par la législation britannique en cause, à savoir d'assurer l'existence d'un lien substantiel entre les navires puisant dans les quotas britanniques et le secteur de la pêche britannique.
40 Il apparaît, à première vue, que les conditions d'immatriculation prévues par la nouvelle législation, autres que celles relatives à la nationalité, et les mesures prises par les autorités du Royaume-Uni en 1983 et en 1986 suffiraient pour assurer l'existence d'un tel lien. En effet, le gouvernement britannique estime lui-même que les navires "anglo-espagnols", qui n'ont pas ce lien avec le Royaume-Uni, ne pourront satisfaire auxdites conditions d'immatriculation.
41 Il est vrai que les conditions de nationalité seraient d'une administration plus facile que les conditions relatives à l'exploitation réelle d'un navire. Un État membre ne saurait cependant se prévaloir de difficultés administratives pour ne pas respecter les obligations que le droit communautaire lui impose.
42 Il s'ensuit qu'il est également satisfait à la condition relative à l'urgence. Il y a donc lieu d'ordonner les mesures provisoires demandées.
Par ces motifs,
LE PRESIDENT,
ordonne :
1) En attendant l'arrêt au principal, le Royaume-Uni est tenu de suspendre l'application des conditions de nationalité prévues à l'article 14, paragraphe 1, sous a) et c), du Merchant Shipping Act de 1988, lu conjointement avec les paragraphes 2 et 7 de cet article, en ce qui concerne les ressortissants d'autres États membres et pour les navires de pêche qui, jusqu'au 31 mars 1989, exerçaient une activité de pêche sous pavillon britannique et sous licence de pêche britannique.
2) Les dépens, y inclus ceux de l'intervention, sont réservés.