Cass. 1re civ., 18 mars 2003, n° 00-17.761
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Croze
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, SCP Célice, Blancpain, Soltner, Me Cossa.
LA COUR : - Donne acte à la société Abbey national France de ce qu'elle s'associe aux moyens présentés par la demanderesse au pourvoi ; - Attendu qu'ayant délivré un commandement de payer demeuré infructueux, la Société de sonstruction et d'aménagement pour la région parisienne et la province (CARPI) a sollicié le bénéfice des effets de la clause résolutoire contenue dans la vente à terme d'une maison d'habitation, qu'elle avait conclue le 23 novembre 1985 avec les époux X et dont le paiement avait été réalisé partiellement par des fonds prêtés ; qu'elle a aussi demandé, outre l'expulsion des occupants, le paiement par eux des arriérés et d'une indemnité d'occupation ; que l'arrêt attaqué l'a déboutée de toutes ses demandes ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches, tel qu'énoncé au mémoire et reproduit en annexe : - Attendu que, par des motifs qui excluent qu'elle ait statué sur la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels, la cour d'appel n'a pu que se prononcer sur la déchéance du droit aux intérêts prévue par l'article L. 312-33 du Code de la consommation pour sanctionner la méconnaissance par le prêteur des obligations prévues à l'article L. 312-8 du même Code dans sa rédaction applicable à la date des prêts litigieux ; que le moyen, en ses quatre branches, manque en fait ;
Sur le deuxième moyen, tel qu'énoncé au mémoire et reproduit en annexe : - Attendu que, dès lors que les conclusions des époux X du 24 mars 1993 invoquaient bien la déchéance du droit aux intérêts pour non-conformité de l'offre de prêt aux dispositions légales relatives notamment à l'échéancier des amortissements, ce moyen n'ayant jamais été abandonné dans les écritures qu'ils ont déposées par la suite, le moyen qui fait grief à la cour d'appel d'avoir méconnu les termes du litige n'est pas fondé ;
Sur la première branche du troisième moyen : - Attendu qu'il ne résulte pas de la procédure que la société CARPI ait intérêt à critiquer les dispositions de l'arrêt relatives au prêt complémentaire consenti aux époux X par la seule société Ficofrance ; qu'en outre, en l'absence de pourvoi incident dans les formes prescrites par l'article 1010 du nouveau Code de procédure civile, la société Abbey national France, anciennement dénommée Ficofrance, qui s'est bornée à s'associer à la critique formulée par le moyen, est également irrecevable en sa prétention ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Mais sur la deuxième branche du troisième moyen : - Vu l'article L. 312-33, dernier alinéa, du Code de la consommation dans sa rédaction initiale, applicable en la cause ; - Attendu que l'arrêt attaqué, par motifs adoptés, prononce au profit du débiteur en application de ce texte non seulement la déchéance des intérêts, mais aussi celle des frais ; qu'en ce faisant, elle a violé le texte susvisé qui n'envisage pas ces derniers ;
Et sur la troisième branche du même moyen : - Vu l'article 1153, alinéa 3, du Code civil et l'article L. 312-33 du Code de la consommation ; - Attendu que pour débouter la société CARPI, l'arrêt retient que l'absence des précisions dans le texte comme le parallélisme avec l'article L. 311-33 sur le crédit à la consommation, qui vise en général des engagements moins lourds, conduit à considérer que cette déchéance porte sur tous intérêts tant conventionnels que légaux ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, alors que, si pour le prêteur, la méconnaissance des obligations prévues par l'article 312-8 du Code de la consommation, peut entraîner la déchéance du droit aux intérêts, l'emprunteur reste néanmoins tenu aux intérêts au taux légal depuis la mise en demeure, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le premier des textes susvisés, et, par fausse application, le second ;
Enfin sur le quatrième moyen : - Vu les articles 1134 et 1183 du Code civil ; - Attendu que le commandement de payer visant la clause résolutoire fait pour une somme supérieure au montant réel de la créance n'en est pas moins valable pour la partie non contestable de la dette ;
Attendu que pour priver de tout effet le commandement délivré le 24 octobre 1991, l'arrêt considère que "des comptes doivent être faits, eu égard aux sommes déjà acquittées par les époux X, à la déchéance des intérêts et à l'absence de ventilation entre les sommes dues au titre de chacun des prêts" ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ses dispositions prononçant au profit du débiteur la déchéance des frais de même que celle des intérêts au taux légal et jugeant dépourvu de tout effet le commandement de payer délivrer aux époux X, l'arrêt rendu le 2 mai 2000, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.