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Décisions

Cass. 1re civ., 20 janvier 1998, n° 95-20.207

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Bouscharain

Avocat général :

M. Gaunet

Avocats :

SCP Vier, Barthélemy, M. Roger.

Colmar, du 23 juin 1995

23 juin 1995

LA COUR : - Attendu que, pour financer l'acquisition d'un terrain et la construction d'une maison, les époux Breckenfelder ont, par acte authentique du 22 mai 1990, contracté deux emprunts auprès du Crédit immobilier de Haute-Alsace, adhérant, pour l'un de ces emprunts, au contrat d'assurance de groupe souscrit par le prêteur auprès de la Caisse nationale de prévoyance et excluant de la garantie, pendant les deux premières années d'assurance, les incapacités totales de travail résultant d'un accident médicalement constaté avant la prise d'effet de l'assurance ; que, le 11 mars 1991, M. Breckenfelder a été placé en arrêt de travail pour des séquelles d'un accident subi en 1972 et déclaré lors de l'adhésion ; que l'assureur ayant refusé sa garantie, M. Breckenfelder a recherché la responsabilité du prêteur pour manquement à son obligation de conseil ; que l'arrêt attaqué a accueilli sa demande ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches : - Vu les articles 5 et 6 de la loi du 13 juillet 1979, devenus les articles L. 312-8 et L. 312-9 du Code de la consommation, ensemble l'article 2 du Code civil ;

Attendu que, selon le second de ces textes, lorsque le prêteur offre à l'emprunteur ou exige de lui l'adhésion à un contrat d'assurance collective qu'il a souscrit en vue de garantir, en cas de survenance de l'un des risques que ce contrat définit, soit le remboursement total ou partiel du montant du prêt restant dû, soit le paiement de tout ou partie des échéances dudit prêt, doit être annexée au contrat de prêt une notice énumérant les risques garantis et précisant toutes les modalités de la mise en jeu de l'assurance ; que, selon le premier, l'offre de prêt doit mentionner, en évaluant leur coût, les assurances qui conditionnent la conclusion du prêt ;

Attendu que, pour statuer ainsi qu'il l'a fait, l'arrêt attaqué retient que l'article L. 312-9 du Code de la consommation, applicable à l'espèce, doit, compte tenu, d'une part, des dispositions de l'article L. 111-1 du même Code selon lequel tout professionnel doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service, d'autre part, du fait que l'article L. 312-9 précité se trouve entre deux articles relatifs à l'offre de prêt, être interprété en ce sens que la notice en cause doit être remise au moment de l'offre de prêt ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que, d'une part, l'article L. 111-1 du Code de la consommation, issu de la loi du 18 janvier 1992, n'était pas applicable à l'époque de la souscription du contrat de prêt, et que, d'autre part, l'article 6 de la loi du 13 juillet 1979, devenu l'article L. 312-9 du Code de la consommation, exige seulement que la notice d'information soit annexée au contrat de prêt, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur la troisième branche du moyen : - Vu l'article 1322 du Code civil ; - Attendu que, pour considérer que M. Breckenfelder n'avait pas eu connaissance des conditions de l'assurance au moment de l'offre de prêt, l'arrêt retient que la mention, portée en petits caractères sur la demande d'adhésion, par laquelle ce dernier certifiait que lui avait été remis, lors de la signature, un résumé du contrat pour l'informer des modalités de l'assurance, ne saurait suffire à établir la remise de la notice résumant les risques garantis.

Attendu qu'en se déterminant ainsi, quand elle avait constaté que M. Breckenfelder, qui ne désavouait pas sa signature, avait signé la demande d'adhésion comportant cette mention, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 juin 1995, entre les parties, par la Cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Metz.