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Décisions

Cass. 1re civ., 4 mai 1999, n° 97-11.703

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Ray-Barman

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

Mme Catry

Avocat général :

Mme Petit

Avocats :

M. Odent, Mme Luc-Thaler.

Paris, du 13 nov. 1996

13 novembre 1996

LA COUR : - Attendu que la Banque Colbert, aux droits de la Banque Saga, a assigné Mme Ray-Barman en paiement d'une somme correspondant au solde impayé d'un découvert qu'elle lui avait consenti le 18 septembre 1990 pour permettre une acquisition immobilière ; que Mme Ray-Barman s'est opposée à la demande et reconventionnellement, elle a notamment sollicité la déchéance de la banque de son droit aux intérêts sur le découvert en application des dispositions de la loi du 13 juillet 1979 et le paiement de dommages-intérêts en réparation de son préjudice résultant de l'inexécution par la banque de son ordre de vente de titres, ayant eu pour effet de l'obliger à signer la convention de découvert ; que l'arrêt confirmatif attaqué a débouté Mme Ray-Barman de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à payer les sommes restant dues au titre du découvert ;

Sur le second moyen : - Attendu que Mme Ray-Barman fait grief à la cour d'appel d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que la banque, mandataire de ses clients, doit exécuter les ordres de vente qu'elle reçoit d'eux ; que la cour d'appel a constaté que la banque, qui avait reçu l'ordre de vendre tout ce qu'elle détenait pour le compte de la demanderesse, au meilleur moment possible, mais au plus tard le 12 septembre 1990, date de la conclusion d'une vente immobilière, s'était abstenue d'y procéder ; qu'en se bornant, pour exonérer la banque de toute responsabilité dans la non-passation de l'ordre de vente avant la date limite fixée, à faire état de l'attitude changeante et conflictuelle de Mme Ray-Barman, la cour d'appel s'est prononcée par des considérations inopérantes, privant sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1992 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que si Mme Ray-Barman avait adressé à la banque un ordre écrit, le 21 mai 1990, lui demandant de vendre tout ce qu'elle possédait au meilleur moment possible et lui précisant qu'elle utiliserait le produit de la vente pour le paiement d'un appartement dont l'acte de vente serait signé vers le 12 septembre, celle-ci lui avait, ensuite, adressé de nouvelles instructions, d'abord le 5 juin 1990, puis en juillet 1990, qui étaient incompatibles avec l'ordre initial de liquider tout l'actif, puisque Mme Ray-Barman demandait que certains titres soient vendus et que d'autres ne le soient pas et que celle-ci n'avait pas réitéré, après ces nouvelles instructions, son ordre initial ; que la cour d'appel a pu déduire de ces circonstances que la banque n'avait pas commis de faute ; d'où il suit que le grief n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen : - Vu l'article L. 312-33, dernier alinéa, du Code de la consommation ; - Attendu que le juge civil est compétent pour prononcer la déchéance du prêteur du droit aux intérêts, prévue par ce texte ;

Attendu que pour rejeter la demande de l'emprunteuse, la cour d'appel a retenu que s'il n'est pas contesté que la convention de découvert a été passée le jour même de l'acte d'acquisition d'un appartement, qu'elle avait pour objet de faciliter, et qu'elle n'a fait l'objet d'aucune offre préalable, en violation des articles L. 312-7 et suivants du Code de la consommation, la banque remarque, à juste titre, que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, qui fait suite à des peines d'amende dans le texte de l'article L. 312-33 du Code de la consommation, ne peut être prononcée que par le juge pénal ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 novembre 1996, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Amiens.