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Décisions

Cass. 1re civ., 20 janvier 1998, n° 96-11.006

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Escriva (Epoux)

Défendeur :

Caisse d'épargne de l'Aude (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Bouscharain

Avocat général :

M. Gaunet

Avocats :

SCP Lesourd, SCP Monod.

Montpellier, 1re ch., sec D, du 8 mars 1…

8 mars 1995

LA COUR : - Attendu que pour financer l'exécution de travaux d'aménagement de leur maison, évalués à 88 960 francs, les époux Escriva ont, suivant offre préalable du 27 janvier 1988, contracté auprès de la Caisse d'épargne de l'Aude un emprunt de 80 000 francs qui a donné lieu, les 11 et 16 février 1988, à l'émission, au profit de l'entrepreneur, la société Midi- Pyrénées bâtiment, de deux chèques de 40 000 et 30 000 francs ; que les époux Escriva n'ayant pas remboursé cet emprunt, la caisse d'épargne a obtenu leur condamnation, par l'arrêt attaqué, au paiement de diverses sommes d'argent ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches : - Attendu que les époux Escriva font grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, d'une part, que les emprunteurs ne peuvent accepter l'offre de prêt qu'à l'expiration d'un délai de réflexion de dix jours à compter de sa réception, à peine de nullité du prêt ; que par ailleurs, l'acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi ; qu'en l'espèce, l'arrêt ne précise pas la date de l'envoi postal de l'acceptation de l'offre de prêt et ne permet donc pas de vérifier si les emprunteurs ont disposé du délai légal de réflexion, ce en quoi l'arrêt manque de base légale au regard de l'article L. 312-10 du Code de la consommation ; et alors, d'autre part, que le prêteur ne peut verser aucune somme avant l'expiration du délai de dix jours, sous la même sanction ; que ce délai expire le dixième jour, à 24 heures, après la date de l'acceptation ; qu'en l'espèce, le délai de réflexion qui a couru à compter du 1er février 1988, date de l'accusé de réception de l'offre, ne venait à expiration que le 11 février 1988 à 24 heures, de sorte que les fonds prêtés ne pouvaient être débloqués que le 12 février au plus tôt ; qu'en déclarant régulier le déblocage de fonds effectué le 11 février 1988, la cour d'appel a violé l'article L. 312-11 du Code de la consommation ;

Mais attendu, d'une part, que le prêt ayant été consenti avant la date d'entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1989, l'acceptation du prêt, dont les époux Escriva ne contestaient pas l'existence, n'avait pas à être donnée par lettre, dont le cachet postal faisait foi ; que, d'autre part, l'arrêt, qui retient souverainement que l'offre de prêt a été reçue le 27 janvier 1988 par les emprunteurs, en déduit exactement que le délai de réflexion de dix jours à eux donné était expiré lorsque, le 11 février 1988, a eu lieu le premier versement d'une partie des fonds prêtés ; qu'en aucune de ses deux premières branches, le moyen n'est fondé ;

Mais, sur la troisième branche du moyen : - Vu l'articlele 455 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu que, pour écarter la prétention des époux Escriva qui, reprochant son imprudence à la caisse d'épargne, contestaient avoir reçu les lettres contenant les chèques de paiement de partie de la somme prêtée, l'arrêt attaqué retient qu'il faut considérer, en l'état des documents remis par la banque, que les chèques établis au profit de l'entrepreneur ont été initialement remis aux époux Escriva avant que ceux-ci ne les transmettent à leur bénéficiaire ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans procéder à l'analyse, même sommaire des documents de la cause, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 mars 1995, entre les parties, par la Cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Montpellier, autrement composée.