CJCE, 6e ch., 20 juin 2002, n° C-388/00
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Radiosistemi Srl
Défendeur :
Prefetto di Genova
LA COUR,
1 Par ordonnances des 16 octobre et 11 novembre 2000, parvenues à la Cour respectivement les 23 octobre et 20 novembre suivants, le Giudice di pace di Genova a posé, en application de l'article 234 CE, quatre questions préjudicielles sur l'interprétation de l'article 28 CE, de la directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 1999, concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunications et la reconnaissance mutuelle de leur conformité (JO L. 91, p. 10, ci-après la "directive"), ainsi que de la décision n° 3052/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 1995, établissant une procédure d'information mutuelle sur les mesures nationales dérogeant au principe de libre circulation des marchandises à l'intérieur de la Communauté (JO L. 321, p. 1).
2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Radiosistemi Srl (ci-après "Radiosistemi") au Prefetto di Genova (préfet de Gênes) au sujet de la saisie d'un certain nombre de radiocommandes commercialisées en Italie par Radiosistemi.
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
3 Selon son article 1er, la directive établit un cadre réglementaire pour la mise sur le marché, la libre circulation et la mise en service dans la Communauté des équipements hertziens et des équipements terminaux de télécommunications.
4 L'article 2, sous c), de la directive définit un équipement hertzien comme "un produit, ou un composant pertinent d'un produit, qui permet de communiquer par l'émission et/ou la réception d'ondes hertziennes en utilisant le spectre attribué aux communications radio terrestres ou spatiales".
5 L'article 3, paragraphe 1, de la directive dispose que certaines exigences essentielles sont applicables à tous les appareils. En outre, le paragraphe 2 de ladite disposition prévoit que les équipements hertziens sont construits de telle sorte qu'ils utilisent efficacement le spectre attribué aux communications radio pour éviter les interférences dommageables.
6 L'article 5 de la directive énonce que, lorsqu'un appareil est conforme aux normes harmonisées, il est présumé que les exigences essentielles visées à l'article 3 sont respectées.
7 Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, de la directive :
"Les Etats membres veillent à ce que les appareils ne soient mis sur le marché qu'à condition d'être conformes aux exigences essentielles appropriées visées à l'article 3 et aux autres dispositions pertinentes de la présente directive lorsqu'ils sont installés et entretenus de façon appropriée et qu'ils sont utilisés conformément à leur destination. Ils ne sont pas soumis à d'autres exigences nationales quant à la mise sur le marché."
8 Selon l'article 6, paragraphe 4, de la directive :
"Dans le cas d'équipements hertziens utilisant des bandes de fréquences dont l'utilisation n'est pas harmonisée dans l'ensemble de la Communauté, le fabricant ou son mandataire établi dans la Communauté ou la personne responsable de la mise sur le marché des équipements informe l'autorité nationale responsable de la gestion des fréquences dans l'Etat membre concerné de son intention de commercialiser ces équipements sur son marché national.
La notification est faite au moins quatre semaines avant le début de la mise sur le marché et comprend des informations sur les caractéristiques hertziennes des équipements (en particulier, bandes de fréquences, espacement des canaux, type de modulation et puissance RF) et le numéro d'identification de l'organisme notifié visé aux annexes IV et V."
9 L'article 7, paragraphes 1 et 2, de la directive dispose :
"1. Les Etats membres autorisent la mise en service des appareils conformément à l'usage auquel ils sont destinés lorsqu'ils sont conformes aux exigences essentielles appropriées visées à l'article 3 et aux autres dispositions pertinentes de la présente directive.
2. Nonobstant le paragraphe 1 et sans préjudice des conditions attachées aux autorisations pour la fourniture du service concerné conformément au droit communautaire, les Etats membres ne peuvent limiter la mise en service d'équipements hertziens que pour des raisons liées à l'utilisation efficace et appropriée du spectre radio, à la nécessité d'éviter des interférences dommageables, ou à des questions liées à la santé publique."
10 L'article 8, paragraphe 1, de la directive prévoit :
"Les Etats membres n'interdisent pas, ne limitent pas ou n'entravent pas la mise sur le marché et la mise en service sur leur territoire d'appareils portant le marquage CE visé à l'annexe VII, qui prouve leur conformité avec toutes les dispositions de la présente directive, y compris les procédures d'évaluation de la conformité définies au chapitre II, et cela sans préjudice des dispositions de l'article 6, paragraphe 4, de l'article 7, paragraphe 2, et de l'article 9, paragraphe 5."
11 L'article 9, paragraphe 1, de la directive est libellé comme suit :
"Lorsqu'un Etat membre constate qu'un appareil relevant du champ d'application de la présente directive n'est pas conforme aux exigences de celle-ci, il prend toutes les mesures utiles sur son territoire pour retirer l'appareil du marché ou du service, en interdire la mise sur le marché ou la mise en service ou en restreindre la liberté de circulation."
12 Aux termes de l'article 9, paragraphe 5, de la directive :
"a) Nonobstant les dispositions de l'article 6, un Etat membre peut, dans le respect des dispositions du traité et notamment de ses articles 30 et 36, arrêter toute mesure appropriée en vue :
i) d'interdire ou de restreindre la mise sur son marché,
et/ou
ii) d'exiger le retrait de son marché
d'équipements hertziens, y compris de types d'équipements hertziens, qui ont provoqué, ou dont il estime raisonnablement qu'ils vont provoquer des interférences dommageables, y compris des interférences avec des services existants ou prévus sur les bandes de fréquences attribuées au niveau national.
b) Lorsqu'un Etat membre prend des mesures conformément au point a), il en informe immédiatement la Commission en indiquant les raisons qui l'ont incité à le faire."
13 L'article 12, paragraphe 1, de la directive prévoit :
"Les appareils conformes à toutes les exigences essentielles applicables portent le marquage `CE' de conformité prévu à l'annexe VII. [...]"
14 L'article 19, paragraphe 1, de la directive dispose :
"Les Etats membres adoptent et publient au plus tard le 7 avril 2000 les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive. Ils en informent immédiatement la Commission. Ils appliquent les présentes dispositions à partir du 8 avril 2000.
[...]"
15 Par ailleurs, l'article 1er de la décision n° 3052/95 prévoit :
"Lorsqu'un Etat membre fait obstacle à la libre circulation ou à la mise sur le marché d'un certain modèle ou d'un certain type de produit légalement fabriqué ou commercialisé dans un autre Etat membre, il notifie cette mesure à la Commission dès lors qu'elle a pour effet direct ou indirect :
- une interdiction générale,
- un refus d'autorisation de mise sur le marché,
- la modification du modèle ou type de produit en cause, en vue de sa mise ou de son maintien sur le marché
ou
- un retrait du marché."
16 Aux termes de l'article 3 de la décision n° 3052/95 :
"1. L'obligation de notification visée à l'article 1er s'applique aux mesures prises par les autorités compétentes des Etats membres habilitées à prendre de tels actes, à l'exception des décisions judiciaires.
Lorsqu'un certain modèle ou un certain type de produit fait l'objet de plusieurs mesures prises dans des conditions de fond et de procédure identiques, seule la première de ces mesures est soumise à l'obligation de notification.
2. L'article 1er ne s'applique pas :
- aux mesures prises uniquement en application de dispositions communautaires d'harmonisation,
- aux mesures qui sont notifiées à la Commission en vertu de dispositions spécifiques,
- aux mesures qui ont été notifiées à l'état de projet à la Commission en vertu de dispositions communautaires spécifiques,
- aux mesures qui, comme les mesures conservatoires ou d'instruction, n'ont pour objet que de permettre l'établissement de la mesure principale visée à l'article 1er,
- aux mesures relevant uniquement de la protection de la moralité publique ou de l'ordre public,
- aux mesures concernant des biens d'occasion que le temps ou l'utilisation a rendu impropres à la mise ou au maintien sur le marché.
3. L'introduction d'un recours juridictionnel contre la mesure principale visée au paragraphe 1 n'entraîne en aucun cas la suspension de l'application de l'article 1er."
La réglementation nationale
17 En Italie, la commercialisation et l'utilisation des appareils radio, y compris les appareils non professionnels, sont régies par le Codice postale (ci-après le "code des Postes"), établi par le décret du président de la République n° 156, du 29 mars 1973 (GURI n° 113, du 3 mai 1973, p. 2), tel que modifié par la loi n° 209, du 22 mai 1980 (GURI n° 155, du 7 juin 1980, p. 4988).
18 L'article 398 dudit code établit des règles relatives à la prévention et à l'élimination des perturbations dans les transmissions et les réceptions radio. Dans sa version modifiée, il est rédigé comme suit :
"Il est interdit de construire ou d'importer, à des fins commerciales, sur le territoire national, d'utiliser ou de faire fonctionner, à quelque titre que ce soit, des appareils ou des installations électriques, radioélectriques ou des lignes de transmission d'énergie électrique ne répondant pas aux règles fixées en vue de la prévention et de l'élimination des perturbations dans les transmissions et les réceptions radio.
Lesdites règles, fixant aussi la méthode de vérification de la conformité, sont publiées par décret du ministre des Postes et des Télécommunications, en accord avec le ministre de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat, conformément aux directives des Communautés européennes.
La mise sur le marché et l'importation, à des fins commerciales, des matériels visés au premier alinéa sont subordonnées à la délivrance d'un certificat, d'une marque, d'une attestation de conformité ou à la présentation d'une déclaration de conformité dont les formes sont fixées par le décret visé au deuxième alinéa.
Les organismes ou les sujets qui délivrent les marques ou les attestations de conformité visées à l'alinéa précédent sont désignés par décret du ministre des Postes et des Télécommunications en accord avec le ministre de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat."
19 Les règles visées au deuxième alinéa de l'article 398 du code des Postes ont été arrêtées par décret ministériel du 15 juillet 1977 (GURI n° 226, du 20 août 1977, p. 6104), relatif aux fréquences réservées aux appareils radioélectriques émetteurs-récepteurs de faible puissance, tel que modifié par décret ministériel du 8 novembre 1996 (GURI n° 274, du 22 novembre 1996, p. 9), qui prévoit l'obligation d'apposer une marque attestant l'homologation par l'administration des postes (dorénavant le ministère des Communications).
20 L'article 2 du décret ministériel du 15 juillet 1977 prévoit notamment :
"Les appareils visés à l'article qui précède doivent être d'un type homologué par l'administration sur la base des normes techniques établies à l'annexe 1 du présent décret.
L'acte d'agrément indique à quelles fins l'appareil est utilisé et les caractéristiques de l'homologation. Ces caractéristiques sont indiquées sur la marque prévue à l'article 334, deuxième alinéa, point c), du code des Postes selon le modèle de l'annexe 2.
L'utilisation des appareils reste soumise à la possession dudit agrément par leur propriétaire."
21 L'article 399 du code des Postes, tel que modifié, prévoit les sanctions applicables en cas de violation des dispositions de l'article 398 de ce même code. Il est libellé comme suit :
"Quiconque contrevient aux dispositions de l'article 398 ci-dessus est passible d'une amende administrative de 15 000 à 300 000 lires.
Si le contrevenant relève de la catégorie des constructeurs ou des importateurs d'appareils ou d'installations électriques ou radioélectriques, l'amende administrative est de 50 000 à 1 000 000 de lires, outre la confiscation des produits et équipements non conformes au certificat de conformité visé à l'article 398 ci-dessus."
22 Le gouvernement italien n'a pas transposé la directive dans son droit national dans le délai prévu par celle-ci. Toutefois, la circulaire n° GM/123709/4517 DL/CR du ministère des Communications, du 17 avril 2000 (GURI n° 101, du 3 mai 2000, p. 67) prévoit :
"1. Les services du ministère des Communications se conforment, aux fins de la mise sur le marché et de la mise en service des équipements terminaux de télécommunication et des équipements hertziens, aux dispositions de la directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 1999, dans les limites prévues à l'article 1er, paragraphe 4, de la directive.
2. Le ministère des Communications prend des mesures nécessaires pour interdire la mise sur le marché et la mise en service, retirer du marché ou du service ou limiter la libre circulation des appareils non conformes aux conditions prévues."
Les litiges au principal et les questions préjudicielles
L'affaire C-388-00
23 Radiosistemi est une entreprise italienne productrice de modèles réduits de voitures dynamiques, actionnés par des moteurs à explosion ou électriques et contrôlés à distance grâce à des radiocommandes. Elle produit les modèles réduits, mais non les radiocommandes, qui sont importées étant donné l'absence de producteurs sur le marché national.
24 Les 2 et 8 février 2000, des agents de la police postale de Ligurie se sont rendus dans des établissements commerciaux de vente au détail de Gênes (Italie) et ont procédé à la saisie administrative d'un certain nombre de radiocommandes commercialisées en Italie par Radiosistemi, qui les avait achetées dans d'autres Etats membres, au motif qu'elles ne portaient pas la marque d'homologation prévue à l'article 398 du code des Postes.
25 Par procès-verbaux du 18 février 2000, la police postale a reproché à Radiosistemi, en tant que société ayant vendu les appareils saisis, de ne pas avoir respecté les articles 398 et 399 du code des Postes et lui a infligé une amende administrative de 100 000 ITL pour chaque infraction constatée.
26 Radiosistemi a introduit devant le Prefetto di Genova un recours contre ces décisions et une demande de mainlevée de la saisie des radiocommandes, en faisant valoir qu'il ressort de l'expertise technique, diligentée par l'autorité administrative qui a effectué lesdites saisies, que les appareils en cause sont techniquement conformes à la réglementation nationale en vigueur en ce qu'ils fonctionnent seulement sur les fréquences radio autorisées et qu'ils portent régulièrement le marquage "CE".
27 Par ordonnance du 20 avril 2000, le Prefetto di Genova a rejeté le recours ainsi que la demande de mainlevée et il a enjoint à Radiosistemi de payer, à titre de sanction pécuniaire pour les infractions reprochées, la somme de 330 000 ITL. Il a fondé sa décision notamment sur les motifs que le défaut d'apposition de la marque d'homologation nationale constitue à lui seul une violation de l'article 398 du code des Postes et que ledit article est conforme à la réglementation communautaire.
28 Le 14 juin 2000, Radiosistemi a formé un recours juridictionnel contre cette ordonnance préfectorale devant le Giudice di pace di Genova en faisant valoir que le Prefetto di Genova avait ordonné la confiscation des biens déjà saisis, qui risquaient ainsi d'être détruits, et en demandant, à titre conservatoire et d'urgence, la suspension de la mesure attaquée. Le Giudice di pace a fait droit à cette demande par ordonnance du 15 juin 2000.
29 Sur le fond, après avoir réitéré que les appareils en question étaient conformes à la réglementation en vigueur, tant nationale que communautaire, Radiosistemi a fait valoir que la sanction et la saisie, suivie de la confiscation et de la destruction des appareils, constituaient des mesures contraires au principe de proportionnalité garanti par l'ordre juridique communautaire, en arguant en outre que l'ordonnance préfectorale avait été adoptée le 20 avril 2000, soit après l'expiration du délai de transposition de la directive, à savoir le 8 avril 2000, de sorte qu'elle violait également cette dernière.
30 Le Prefetto di Genova, en se constituant dans le litige, a déposé devant la juridiction nationale des notes du ministère des Communications des 24 mars et 14 juillet 2000. Il ressort de la note du 24 mars 2000 que "le rapport de l'inspecteur confirme que les radiocommandes [faisant l'objet de la saisie] fonctionnent sur les fréquences qui leur sont réservées, mais [il] ne peut pas se substituer à l'homologation relevant de la compétence de la direction générale de la planification et de la gestion des fréquences du ministère des Communications." Quant à la note du 14 juillet 2000, elle indique que la notification prévue à l'article 6, paragraphe 4, de la directive pour la mise sur le marché d'appareils du type de ceux faisant l'objet de la saisie n'a eu lieu que le 26 mai 2000, soit après l'adoption de l'ordonnance préfectorale contestée.
31 La juridiction nationale constate notamment que la violation de l'article 398 du code des Postes a été imputée à Radiosistemi non tant pour avoir importé et mis sur le marché des appareils ne correspondant pas objectivement aux normes techniques édictées pour la prévention et l'élimination des perturbations des réceptions et des transmissions radio (respect des fréquences et de la compatibilité électromagnétique), mais seulement en raison du défaut d'apposition de la marque d'homologation nationale sur les appareils commercialisés. L'expertise ordonnée par le ministère des Communications a établi que les appareils fonctionnent sur des fréquences autorisées selon les dispositions en vigueur et qu'ils sont conformes aux normes harmonisées relatives à la compatibilité électromagnétique, comme cela est attesté par le marquage "CE".
32 La juridiction nationale, estimant que la solution du litige pendant devant elle nécessite l'interprétation de règles du droit communautaire, a sursis à statuer et a posé à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
"1°) Le droit communautaire, y compris ses principes fondamentaux non écrits, est-il compatible avec les règles et/ou les pratiques administratives nationales qui, en confiant les procédures d'évaluation de la conformité en vue de la mise sur le marché et de la mise en service des équipements hertziens au pouvoir purement discrétionnaire de l'administration, interdisent aux opérateurs économiques, en l'absence d'homologation nationale, d'importer, de commercialiser, de détenir pour la vente des appareils radio, sans la possibilité de prouver d'une façon équivalente et moins onéreuse la conformité desdits appareils aux conditions concernant le bon usage des fréquences radio autorisées par le droit national ?
2°) La directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 1999, attribue-t-elle aux particuliers des droits qui peuvent être invoqués devant les juridictions internes, bien que la directive elle-même, après l'expiration du délai pour sa transposition, n'ait pas été formellement transposée en droit interne ? En cas de réponse positive à la question formulée, l'article 7, paragraphe 2, de la directive précitée est-il compatible avec le maintien de règles et/ou de pratiques du droit national qui, après le 8 avril 2000, interdisent la commercialisation et/ou la mise en service d'équipements hertziens en l'absence d'apposition d'une marque d'homologation nationale, s'il a été établi ou s'il est facilement vérifiable que le spectre des fréquences hertziennes autorisé par le droit national a été correctement et efficacement utilisé ?
3°) Quelle est la notion de `mesure' dans l'interprétation de l'article 1er de la décision n° 3052/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 1995, et peut-on y inclure le maintien d'une saisie administrative d'un certain modèle ou d'un certain type de produit commercialisé légalement dans un autre Etat membre, après que la conformité du produit avec la réglementation nationale et communautaire a été constatée par les autorités nationales chargées des contrôles techniques, l'effet utile de la saisie aux fins de l'enquête étant ainsi épuisé ?
4) Le droit communautaire, y compris au regard des principes de non-discrimination et de proportionnalité, est-il compatible avec un régime de sanctions tel que celui figurant à l'article 399 du code des Postes italien (décret du président de la République n° 156, du 29 mars 1973) ?"
L'affaire C-429-00
33 Par ordonnance du 11 novembre 2000, rendue dans un litige entre les mêmes parties que celles en cause dans l'affaire C-388-00, le Giudice di pace di Genova a soumis à la Cour quatre questions préjudicielles rédigées en des termes identiques en substance à celles posées dans le cadre de cette dernière affaire.
34 Il ressort du dossier déposé au greffe de la Cour que ce litige résulte d'une saisie de marchandises analogue à celles qui sont en cause dans l'affaire C-388-00. Aussi, par ordonnance du président de la Cour du 14 décembre 2000, les deux affaires ont-elles été jointes aux fins de la procédure écrite et orale et de l'arrêt.
35 Dans ces conditions, il convient de donner les mêmes réponses aux deux demandes de décision préjudicielle.
Sur la première question
36 Par sa première question, la juridiction nationale demande en substance si le droit communautaire s'oppose à des règles et/ou à des pratiques administratives nationales qui, en confiant les procédures d'évaluation de la conformité en vue de la mise sur le marché et de la mise en service des équipements hertziens au pouvoir discrétionnaire de l'administration, interdisent aux opérateurs économiques, en l'absence d'homologation nationale, d'importer, de commercialiser ou de détenir pour la vente des appareils radio, sans qu'existe la possibilité de prouver d'une façon équivalente et moins onéreuse la conformité desdits appareils aux conditions concernant le bon usage des fréquences radio autorisées par le droit national.
37 Étant donné que les faits du litige au principal se sont déroulés, à tout le moins pour partie, avant le 7 avril 2000, date de l'expiration du délai de transposition de la directive en droit interne et que la République italienne n'avait pas alors transposé la directive, il convient de considérer que la première question vise le droit communautaire tel qu'en vigueur à cette date, c'est-à-dire abstraction faite de l'effet éventuel de la directive.
38 La compatibilité d'une réglementation telle que celle au principal doit donc être examinée à l'aune de l'article 28 CE.
39 Aux termes de l'article 28 CE, sont interdites dans le commerce entre Etats membres les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent. Selon une jurisprudence constante de la Cour, est à considérer comme mesure d'effet équivalant à des restrictions quantitatives toute réglementation commerciale des Etats membres susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire (voir, notamment, arrêts du 11 juillet 1974, Dassonville, 8/74, Rec. p. 837, point 5, et du 13 mars 2001, PreussenElektra, C-379-98, Rec. p. I-2099, point 69).
40 Toutefois, selon l'article 30 CE, l'article 28 CE ne fait pas obstacle aux interdictions ou aux restrictions d'importation justifiées, notamment, par des raisons de sécurité publique, à condition que ces interdictions ou restrictions ne constituent ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les Etats membres.
41 Il convient en outre de rappeler que, selon une jurisprudence également constante (voir notamment arrêt du 20 février 1979, Rewe-Zentral, dit "Cassis de Dijon", 120/78, Rec. p. 649, point 8), en l'absence d'une réglementation commune des produits dont il s'agit, les obstacles à la libre circulation intracommunautaire résultant de disparités des réglementations nationales doivent être acceptés dans la mesure où une telle réglementation nationale, indistinctement applicable aux produits nationaux et aux produits importés, peut être justifiée comme étant nécessaire pour satisfaire à des exigences impératives du droit communautaire telles que celles tenant à la protection des usagers et au bon fonctionnement du réseau public de télécommunications (voir arrêt du 13 décembre 1991, GB-Inno-BM, C-18-88, Rec. p. I-5941, points 30 et 31).
42 Qu'elle soit fondée sur les cas explicitement prévus à l'article 30 CE ou sur des exigences impératives reconnues par la jurisprudence, une réglementation nationale dérogeant à l'article 28 CE ne peut être justifiée que si elle est nécessaire en vue d'assurer l'objectif autorisé et si celui-ci ne peut pas être atteint par des moyens moins restrictifs de la libre circulation des marchandises à l'intérieur de la Communauté (voir notamment arrêts du 2 mars 1983, Commission/Belgique, 155/82, Rec. p. 531, point 12, et GB-Inno-BM, précité, point 33).
43 À cet égard, la Cour a déjà jugé que constitue une mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative, au sens de l'article 28 CE, la réglementation d'un Etat membre qui interdit d'importer, de commercialiser ou de détenir pour la vente des équipements hertziens dépourvus d'une marque d'homologation nationale, telle que la réglementation en cause au principal (voir arrêt du 24 mars 1994, Commission/Belgique, C-80-92, Rec. p. I-1019, point 21).
44 Certes, il est vrai que l'homologation nationale des équipements hertziens est de nature à être justifiée par des considérations de sécurité publique ainsi que par des exigences impératives tenant au bon fonctionnement du réseau public de télécommunications. Cependant, il est constant que des équipements tels que ceux en cause au principal sont en fait conformes aux règles nationales concernant le bon usage des fréquences radio dans l'Etat membre d'importation.
45 Nonobstant, il ressort de l'ordonnance de renvoi que la réglementation nationale ne permet à l'opérateur économique d'établir la conformité de ces équipements que moyennant la procédure d'apposition sur ceux-ci de la marque d'homologation nationale. Or, une telle exigence n'est manifestement pas proportionnée à l'objectif visé, en raison du fait qu'elle ne permet pas à l'opérateur économique d'établir de façon moins onéreuse la conformité desdits équipements aux conditions nationales et dans la mesure où elle fait double emploi avec des contrôles qui ont déjà été effectués dans un autre Etat membre.
46 Il découle de ce qui précède qu'une réglementation nationale telle que celle en cause au principal ne peut être justifiée ni au titre de l'article 30 CE ni au titre des exigences impératives reconnues par la jurisprudence.
47 Par conséquent, il y a lieu de répondre à la première question que l'article 28 CE s'oppose à des règles et à des pratiques administratives nationales qui, en confiant les procédures d'évaluation de la conformité en vue de la mise sur le marché et de la mise en service des équipements hertziens au pouvoir discrétionnaire de l'administration, interdisent aux opérateurs économiques, en l'absence d'homologation nationale, d'importer, de commercialiser ou de détenir pour la vente des appareils radio, sans qu'existe la possibilité de prouver d'une façon équivalente et moins onéreuse la conformité desdits appareils aux conditions concernant le bon usage des fréquences radio autorisées par le droit national.
Sur la deuxième question
48 Par la première partie de sa deuxième question, la juridiction nationale demande si la directive attribue aux particuliers des droits qui peuvent être invoqués devant les juridictions nationales, bien que celle-ci n'ait pas été formellement transposée en droit interne à l'expiration du délai prévu à cette fin.
49 Selon une jurisprudence constante, dans tous les cas où des dispositions d'une directive apparaissent comme étant, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises, ces dispositions peuvent être invoquées, à défaut de mesures d'application prises dans les délais, à l'encontre de toute disposition nationale non conforme à la directive (voir arrêts du 19 janvier 1982, Becker, 8/81, Rec. p. 53, point 25, et du 26 septembre 2000, IGI, C-134-99, Rec. p. I-7717, point 36).
50 Il convient donc de déterminer si certaines dispositions de la directive présentent le caractère inconditionnel et suffisamment précis exigé par la jurisprudence mentionnée au point précédent (voir arrêt Becker, précité, point 29).
51 À cet égard, les articles 6, paragraphe 1, 7, paragraphe 1, et 8, paragraphe 1, de la directive paraissent particulièrement pertinents pour la solution du litige au principal. Les articles 6, paragraphe 1, et 7, paragraphe 1, visent, respectivement, la mise sur le marché et la mise en service des appareils en général. L'article 8, paragraphe 1, en revanche, vise la mise sur le marché et la mise en service spécifiquement des appareils portant le marquage "CE" prévu par la directive. Eu égard au libellé et au système de la directive, il n'apparaît pas que ces dispositions s'excluent mutuellement. Les appareils en cause au principal portant, selon l'ordonnance de renvoi, le marquage "CE", le litige est susceptible de relever tant de l'article 8, paragraphe 1, que des articles 6, paragraphe 1, et 7, paragraphe 1, de la directive.
52 Par sa première phrase, l'article 6, paragraphe 1, de la directive impose aux Etats membres de veiller à ce que les appareils ne soient mis sur le marché qu'à condition d'être conformes aux exigences essentielles appropriées visées à l'article 3 ainsi qu'aux autres dispositions pertinentes de ladite directive. Par sa seconde phrase, ladite disposition prévoit que ces appareils ne sont pas soumis à d'autres exigences nationales quant à la mise sur le marché.
53 Cette interdiction, prévue à l'article 6, paragraphe 1, seconde phrase, de la directive est claire et précise. Quant à son caractère inconditionnel, il est vrai que, dans le cas d'équipements hertziens utilisant des fréquences non harmonisées, l'article 6, paragraphe 4, de ladite directive impose à la personne responsable de la mise sur le marché de ceux-ci l'obligation d'informer l'autorité nationale responsable de la gestion des fréquences de son intention de commercialiser ces équipements sur son marché national. Cette règle de procédure vise à accompagner la mise en œuvre des mécanismes de la directive en droit interne, mais elle ne confère nullement aux Etats membres la faculté de soumettre à des conditions ou de restreindre l'interdiction énoncée à la seconde phrase de l'article 6, paragraphe 1, de la directive.
54 Il s'ensuit que l'interdiction énoncée à l'article 6, paragraphe 1, seconde phrase, de la directive est formulée en termes inconditionnels et suffisamment précis pour pouvoir être invoquée par les justiciables devant les juridictions nationales.
55 L'article 7, paragraphe 1, de la directive impose aux Etats membres d'autoriser la mise en service des appareils lorsqu'ils sont conformes aux exigences essentielles appropriées visées à l'article 3 et aux autres dispositions pertinentes de la directive. Cette disposition suppose clairement la possibilité, pour le justiciable concerné, de prouver la conformité des appareils en question aux dispositions pertinentes de la directive, ce qui implique l'obligation tout aussi claire des autorités nationales compétentes d'examiner les éléments de preuve présentés à cet égard.
56 L'article 7, paragraphe 2, de la directive prévoit, "nonobstant le paragraphe 1", que les Etats membres peuvent limiter la mise en service d'équipements hertziens pour certaines raisons limitativement énumérées, à savoir des raisons liées à l'utilisation efficace et appropriée du spectre radio, à la nécessité d'éviter des interférences dommageables ou à la santé publique. Cette dérogation présuppose un examen, par l'Etat membre concerné, des éléments de fait en présence et ne dispense pas ce dernier de l'obligation, découlant du paragraphe 1 de ladite disposition, d'examiner tout élément de preuve relatif à la conformité des appareils en question. Elle ne vise donc pas une réglementation nationale qui impose l'apposition d'une marque d'homologation nationale sans instaurer la possibilité de contrôler la conformité des appareils aux dispositions de fond concernant leur usage.
57 Il s'ensuit que l'article 7, paragraphe 1, de la directive est inconditionnel et suffisamment précis pour pouvoir être invoqué par les justiciables devant les juridictions nationales en l'absence d'une transposition dans les délais.
58 Quant à l'article 8, paragraphe 1, de la directive, il enjoint aux Etats membres de ne pas interdire, limiter ou entraver la mise sur le marché et la mise en service sur leur territoire d'appareils portant le marquage "CE" prévu par la directive. Le fait de porter ce marquage établit une présomption que les appareils en question sont conformes à toutes les dispositions de la directive. Cette disposition prévoit ainsi une obligation claire et précise, dans le chef des Etats membres, d'admettre la mise sur le marché et la mise en service sur leur territoire d'appareils portant ledit marquage.
59 Certes, cette obligation est prévue "sans préjudice des dispositions de l'article 6, paragraphe 4, de l'article 7, paragraphe 2, et de l'article 9, paragraphe 5", de la directive. Dans ces conditions, la question se pose de savoir si cette réserve a pour effet de conférer un caractère conditionnel à l'obligation prévue par la première partie du paragraphe 1 de l'article 8 de ladite directive.
60 Tout d'abord, ainsi qu'il ressort du point 53 du présent arrêt, l'article 6, paragraphe 4, de la directive constitue une règle de procédure qui vise à accompagner la mise en œuvre de celle-ci en droit national. En l'absence d'une telle mise en œuvre dans le délai prévu, cette disposition n'est pas apte à permettre aux Etats membres de déroger au droit de libre circulation des appareils portant le marquage "CE" prévu à l'article 8, paragraphe 1.
61 Ensuite, ainsi qu'il découle du point 56 du présent arrêt, l'article 7, paragraphe 2, de la directive permet aux Etats membres de déroger à la liberté de mise en service des équipements hertziens pour certaines raisons limitativement définies, lesquelles n'incluent pas l'exigence d'une marque d'homologation nationale sans contrôle au fond de la conformité des appareils concernés.
62 Enfin, l'article 9, paragraphe 5, de la directive permet à un Etat membre d'interdire ou de restreindre la mise sur son marché d'équipements hertziens qui sont susceptibles de provoquer des interférences dommageables. Cette disposition, tout comme l'article 7, paragraphe 2, de la directive, vise une situation qui ne correspond pas à celle du litige au principal, dans lequel il n'est nullement allégué que les appareils concernés seraient susceptibles de provoquer des interférences dommageables et il est constant, au contraire, que ces appareils sont conformes aux règles nationales concernant le bon usage des fréquences radio. Dans une telle situation, l'article 9, paragraphe 5, ne confère pas aux Etats membres la faculté d'interdire ou de restreindre la libre circulation des appareils prévue à l'article 8, paragraphe 1, de la directive.
63 Il s'ensuit que la réserve relative aux articles 6, paragraphe 4, 7, paragraphe 2, et 9, paragraphe 5, de la directive n'a pas pour effet de conférer un caractère conditionnel au droit de libre circulation des appareils prévu à l'article 8, paragraphe 1, de ladite directive. Par conséquent, cette dernière disposition est inconditionnelle et suffisamment précise pour pouvoir être invoquée par les justiciables devant les juridictions nationales, dans le cas où la directive n'a pas été transposée dans le délai fixé par celle-ci.
64 Par la seconde partie de sa deuxième question, la juridiction nationale demande si l'article 7, paragraphe 2, de la directive permet le maintien de règles et/ou de pratiques du droit national qui, après le 8 avril 2000, interdisent la commercialisation et/ou la mise en service d'équipements hertziens en l'absence d'apposition d'une marque d'homologation nationale, s'il a été établi ou s'il est facilement vérifiable que le spectre des fréquences hertziennes autorisé par le droit national a été correctement et efficacement utilisé.
65 Pour les raisons explicitées aux points 56 et 61 du présent arrêt, la réponse à cette question doit être négative.
66 Par conséquent, il convient de répondre à la deuxième question que les dispositions des articles 6, paragraphe 1, seconde phrase, 7, paragraphe 1, et 8, paragraphe 1, de la directive attribuent aux justiciables des droits qui peuvent être invoqués devant les juridictions nationales bien que la directive elle-même n'ait pas été formellement transposée en droit interne à l'expiration du délai prévu à cette fin, et que l'article 7, paragraphe 2, de ladite directive ne permet pas le maintien de règles ou de pratiques du droit national qui, après le 8 avril 2000, interdisent la commercialisation ou la mise en service d'équipements hertziens en l'absence d'apposition d'une marque d'homologation nationale, s'il a été établi ou s'il est facilement vérifiable que le spectre des fréquences hertziennes autorisé par le droit national a été correctement et efficacement utilisé.
Sur la troisième question
67 Par sa troisième question, la juridiction nationale s'interroge sur la portée de la notion de "mesure" au sens de l'article 1er de la décision n° 3052/95. Elle demande en particulier si cette notion comprend le maintien d'une saisie administrative d'un certain modèle ou d'un certain type de produit commercialisé légalement dans un autre Etat membre, après que le contrôle de la conformité du produit avec la réglementation nationale et communautaire a été effectué par les autorités nationales chargées des contrôles techniques, l'effet utile de la saisie aux fins de l'enquête étant ainsi épuisé.
68 L'article 1er de la décision n° 3052/95 vise les mesures par lesquelles un Etat membre fait obstacle à la libre circulation de produits légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre Etat membre. Selon l'article 2, dernier tiret, de ladite décision, cette notion de mesure est définie comme "toute mesure autre qu'une décision judiciaire". Cette notion comprend donc toute mesure prise par un Etat membre, à l'exception des décisions judiciaires, ayant pour effet de limiter la libre circulation de marchandises légalement fabriquées ou commercialisées dans un autre Etat membre, quelles que soient sa forme ou l'autorité dont elle émane.
69 En vertu de l'article 1er de la décision n° 3052/95, une telle mesure doit être notifiée à la Commission dès lors qu'elle a pour effet direct ou indirect notamment une interdiction générale, un refus d'autorisation de mise sur le marché ou un retrait du marché. Dans la mesure où elle interdit l'importation ou la commercialisation de marchandises qui ne portent pas une marque d'homologation nationale, une disposition de droit interne telle que l'article 398 du code des Postes relève de cette obligation de notification.
70 En ce qui concerne les mesures de saisie effectuées en vertu d'une telle disposition, il convient de relever que l'article 3, paragraphe 2, de la décision n° 3052/95 prévoit, à son quatrième tiret, que l'article 1er de celle-ci ne s'applique pas aux mesures qui, comme les mesures conservatoires ou d'instruction, n'ont pour objet que de permettre l'établissement de la mesure principale visée à l'article 1er.
71 Il en découle qu'une mesure de saisie dont la durée serait limitée à celle nécessaire pour contrôler la conformité de la marchandise en question, en tant que mesure conservatoire ou d'instruction, serait exonérée de l'application de l'article 1er de la décision n° 3052/95. En revanche, lorsque la saisie se prolonge au-delà de cette durée, comme c'est le cas au principal, elle ne relève pas de l'exception prévue à l'article 3, paragraphe 2, quatrième tiret, de ladite décision et doit être notifiée à la Commission en application de l'article 1er de cette décision.
72 Si une telle saisie était suivie d'autres mesures du même type, telles qu'une décision de confiscation définitive, il ne serait pas obligatoire de notifier celles-ci à la Commission. En effet, aux termes de l'article 3, paragraphe 1, second alinéa, de la décision n° 3052/95, lorsqu'un certain type de produit fait l'objet de plusieurs mesures prises dans des conditions de fond et de procédure identiques, seule la première de ces mesures est soumise à l'obligation de notification.
73 Par conséquent, il y a lieu de répondre à la troisième question que la notion de "mesure" au sens de l'article 1er de la décision n° 3052/95 comprend toutes les mesures, à l'exception des décisions judiciaires, prises par un Etat membre ayant pour effet de limiter la libre circulation de marchandises légalement fabriquées ou commercialisées dans un autre Etat membre. Le maintien d'une saisie administrative d'un certain modèle ou d'un certain type de produit commercialisé légalement dans un autre Etat membre, après que le contrôle de la conformité du produit avec la réglementation nationale et communautaire a été effectué par les autorités nationales chargées des contrôles techniques, relève de la notion de "mesure" qui doit être notifiée à la Commission au sens de ladite disposition.
Sur la quatrième question
74 Par sa quatrième question, la juridiction nationale demande en substance si le droit communautaire, notamment les principes de non-discrimination et de proportionnalité, s'oppose à un régime de sanctions tel que celui prévu à l'article 399 du code des Postes.
75 L'article 399 du code des Postes prévoit, en cas de contravention aux dispositions de l'article 398 du même code, l'imposition d'amendes et la confiscation des équipements non conformes au certificat d'homologation institué par cette dernière disposition.
76 Il convient de rappeler que la présente affaire vise une situation où la réglementation nationale en vigueur exige l'apposition d'une marque d'homologation nationale sans que la conformité des produits en question puisse être prouvée par d'autres méthodes.
77 Ainsi que cela a été constaté en réponse aux première et deuxième questions, une telle réglementation est contraire à l'article 28 CE en ce qui concerne la période antérieure à la date d'expiration du délai de transposition de la directive et, après cette date, la directive n'ayant pas été transposée en droit national, elle est incompatible avec plusieurs dispositions de celle-ci ayant un effet direct.
78 D'après la jurisprudence de la Cour, la sanction, pénale ou autre, d'une mesure de restriction nationale qui a été reconnue contraire au droit communautaire est aussi incompatible avec le droit communautaire que cette restriction elle-même (voir arrêts du 28 mars 1979, Rivoira e.a., 179/78, Rec. p. 1147, point 14, et du 16 décembre 1981, Tymen, 269/80, Rec. p. 3079, points 16 et 17).
79 Pour cette raison, un régime de sanctions visant à assurer l'exécution d'une réglementation nationale non conforme aux dispositions communautaires doit être jugé contraire au droit communautaire, sans qu'il soit besoin d'apprécier sa conformité aux principes de non-discrimination ou de proportionnalité.
80 Par conséquent, il convient de répondre à la quatrième question que, lorsqu'une réglementation nationale a été reconnue contraire au droit communautaire, infliger des amendes ou d'autres mesures coercitives au titre d'une contravention à cette réglementation est également incompatible avec le droit communautaire.
Sur les dépens
81 Les frais exposés par le gouvernement du Royaume-Uni et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.
Par ces motifs,
LA COUR
(sixième chambre),
statuant sur les questions à elle soumises par le Giudice di pace di Genova, par ordonnances des 16 octobre et 11 novembre 2000, dit pour droit :
1°) L'article 28 CE s'oppose à des règles et à des pratiques administratives nationales qui, en confiant les procédures d'évaluation de la conformité en vue de la mise sur le marché et de la mise en service des équipements hertziens au pouvoir discrétionnaire de l'administration, interdisent aux opérateurs économiques, en l'absence d'homologation nationale, d'importer, de commercialiser ou de détenir pour la vente des appareils radio, sans qu'existe la possibilité de prouver d'une façon équivalente et moins onéreuse la conformité desdits appareils aux conditions concernant le bon usage des fréquences radio autorisées par le droit national.
2°) Les dispositions des articles 6, paragraphe 1, seconde phrase, 7, paragraphe 1, et 8, paragraphe 1, de la directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 1999, concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunications et la reconnaissance mutuelle de leur conformité, attribuent aux justiciables des droits qui peuvent être invoqués devant les juridictions nationales bien que la directive elle-même n'ait pas été formellement transposée en droit interne à l'expiration du délai prévu à cette fin. L'article 7, paragraphe 2, de ladite directive ne permet pas le maintien de règles ou de pratiques du droit national qui, après le 8 avril 2000, interdisent la commercialisation ou la mise en service d'équipements hertziens en l'absence d'apposition d'une marque d'homologation nationale, s'il a été établi ou s'il est facilement vérifiable que le spectre des fréquences hertziennes autorisé par le droit national a été correctement et efficacement utilisé.
3°) La notion de "mesure" au sens de l'article 1er de la décision n° 3052/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 1995, établissant une procédure d'information mutuelle sur les mesures nationales dérogeant au principe de libre circulation des marchandises à l'intérieur de la Communauté, comprend toutes les mesures, à l'exception des décisions judiciaires, prises par un Etat membre ayant pour effet de limiter la libre circulation de marchandises légalement fabriquées ou commercialisées dans un autre Etat membre. Le maintien d'une saisie administrative d'un certain modèle ou d'un certain type de produit commercialisé légalement dans un autre Etat membre, après que le contrôle de la conformité du produit avec la réglementation nationale et communautaire a été effectué par les autorités nationales chargées des contrôles techniques, relève de la notion de "mesure" qui doit être notifiée à la Commission au sens de ladite disposition.
4°) Lorsqu'une réglementation nationale a été reconnue contraire au droit communautaire, infliger des amendes ou d'autres mesures coercitives au titre d'une contravention à cette réglementation est également incompatible avec le droit communautaire.