Cass. com., 4 décembre 1978, n° 76-13.850
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
SETA (Sté)
Défendeur :
SETP (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vienne
Rapporteur :
M. Lhez
Avocat général :
M. Robin
Avocats :
Mes Cossa, Lépany.
LA COUR : - Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : - Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Rouen, 21 mai 1976) d'avoir condamné la Société Elbeuvienne de Travaux et d'Agglomérés (SETA) , dont Roger Perrine est gérant, à restituer à Langlois, syndic de la liquidation des biens de la Société Elbeuvienne de Travaux Publics (SETP) , dont Jacques Perrine, fils de Roger Perrine, est gérant, huit camions mixeurs, ou, à défaut, à payer à cette dernière la valeur vénale des véhicules, au motif que la SETA n'établit pas qu'elle était propriétaire des camions litigieux et que par des présomptions précises et concordantes, la SETP fait la preuve de sa propriété, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il appartient à celui qui exerce une action en revendication d'objets mobiliers de prouver qu'il est propriétaire de ces objets ; qu'ainsi, en mettant à la charge de la SETA, défenderesse à l'action, la charge de prouver son droit de propriété sur les camions en litige, la cour d'appel a renversé le fardeau de la preuve, et alors, d'autre part, que la faculté d'admettre la preuve par présomption en matière commerciale cesse dans tous les cas où la confection d'un écrit est exigée ; que tel est le cas du contrat de vente d'un véhicule automobile, où le transfert de propriété n'est opéré que par la remise à l'acheteur du certificat d'immatriculation sur lequel a été apposé la mention "vendu" ; que la cour d'appel, pour reconnaître les droits de la SETP sur les camions revendiques, s'est déterminée à partir de simples présomptions et a dénié tout effet juridique aux certificats d'immatriculation desdits camions, établis au nom de la société SETA et produits par elle aux débats, qui constituaient autant de titres de propriété ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a méconnu les règles de la preuve ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement la portée des éléments qui lui sont soumis et ayant relevé que si jusqu'en février 1971, les camions litigieux ont été donnés en location à la SETP par la société SETA, à partir de cette date, toute facturation mensuelle a cessé, la cour d'appel retient qu'à l'appui de sa demande la SETP justifie qu'elle a effectué sur les camions des travaux, non de simple entretien, mais de véritable remise en état, qu'elle les a donnés en location à une société Dunkerquoise et qu'elle a assigné cette dernière société à la suite d'un accident survenu à l'un des véhicules pour réclamer réparation du dommage résultant de sa perte totale ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations et alors qu'en l'absence de conventions particulières, le fait de ne pas remettre à l'acheteur les certificats d'immatriculation des véhicules vendus ne saurait, à lui seul, faire échec à l'existence de la vente, la cour d'appel, qui n'a pas renversé la charge de la preuve, n'a fait, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que considérer que la SETP établissait qu'elle était la véritable propriétaire des véhicules ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen : vu l'article 1382 du code civil ; - Attendu que la cour d'appel a confirmé la décision des premiers juges qui condamnait la SETA a payer à la société SETP une somme de 25 000 francs à titre de dommages-intérêts ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, sans relever aucune circonstance de nature à caractériser la faute qu'aurait commise la SETA, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ce que l'arrêt attaqué a condamné la Société Elbeuvienne de Travaux et d'Agglomérés a payer la somme de 25 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu entre les parties le 21 mai 1976 par la Cour d'appel de Rouen ; Remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Caen.