CA Nîmes, 2e ch. A, 16 mai 1995, n° 94-1839
NÎMES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Hernandez
Défendeur :
Ollier
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Roche
Conseillers :
MM. Testud, Cavallino
Avoués :
Me d'Everjange, SCP POmies-Richaud-Astraud
Avocats :
Mes Texier-André, Ribeyre d'Abrigeon.
Procédure et prétentions des parties
Manuel Hernandez a régulièrement interjeté appel du jugement rendu le 15 février 1994 par le Tribunal d'instance de Privas, qui l'a débouté de son action rédhibitoire pour l'achat d'un véhicule de marque Renault GT Turbo à Jean-Luc Ollier.
En fondant son action sur les articles 164-1 et suivants du Code civil, il réclame une restitution partielle de 18 000 F du prix de vente du véhicule outre 6 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Jean-Luc Ollier réplique que le premier juge a retenu sa bonne foi alors qu'il n'est pas professionnel de l'automobile et qu'il n'est absolument pas démontré qu'il ait connu un vice caché lors de la transaction du véhicule. Il se fonde sur le rapport d'expertise qui fait état de la vétusté du véhicule, de l'utilisation antérieure et du caractère sportif, pour expliquer la rupture du Turbo dudit véhicule.
Il soutient que l'appelant formule une demande nouvelle irrecevable en cause d'appel ; qu'en toute hypothèse, la cour doit rejeter, en l'absence de preuve de l'existence d'un vice au moment de la vente et de l'absence de preuve qu'il en ait eu alors connaissance.
Il réclame 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par conclusions responsives, Manuel Hernandez rappelle qu'il n'a roulé que 150 km avant de tomber en panne, que l'expert note que " les désordres affectant le véhicule ont pour origine la vétusté et l'utilisation antérieure " et qu'il a la faculté de modifier le fondement de sa demande en cause d'appel.
Motifs de la décision
Manuel Hernandez a acheté à Jean-Luc Ollier un véhicule Renault GT Turbo pour le prix de 28 000 F dont il a pris livraison le 31 octobre 1992. Cette transaction s'est opérée à la suite de la parution d'une annonce dans le journal "26 Hebdo".
Après avoir parcouru 150 km, l'acheteur a du faire procéder au changement du turbo et il a constaté que le joint de culasse était défectueux. Il a alors engagé l'action rédhibitoire de l'article 1644 du Code civil contre son vendeur et à titre subsidiaire, il a sollicité la désignation d'un expert.
Le premier juge a, avant dire droit, désigné Henri Casseville en qualité d'expert. Ce dernier affirme, dans son rapport déposé le 6 août 1993, que "les désordres qui affectent le véhicule résultent de sa vétusté, de son utilisation antérieure, son caractère sportif rendant la longévité du moteur plus aléatoire".
Manuel Hernandez a alors modifié ses demandes initiales et il a sollicité le remboursement des frais exposés à concurrence de 12 901,66 F, outre 5 000 F à titre de dommages et intérêts.
Le premier juge a rejeté à bon droit ces demandes au motif que Manuel Hernandez en fondant son action sur l'article 1646 du Code civil, ne peut prétendre ni au remboursement du coût des réparations ni au paiement de dommages et intérêts. En effet, ledit article dispose que "mi le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente".
En cause d'appel, Manuel Hernandez invoque la garantie des défauts de la chose vendue tels que prévus par les articles 1641 et suivants du Code civil.
Cette demande bien que nouvelle, est recevable en cause d'appel puisqu'il est de jurisprudence constante que l'acheteur peut modifier son choix tant qu'il n'a pas été statué sur su demande par une décision passée en force de chose jugée et même en cause d'appel.
L'appelant est en charge d'une double preuve d'une part de celle "de défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus" et d'autre part que le vendeur connaissait les vices de la chose.
Le rapport d'expertise rappelle que la petite annonce parue dans la presse à l'initiative de Jean-Luc Ollier précisait que le véhicule était en très bon état, moteur turbo 35 000 km qu'après 150 km parcourus le remplacement du turbo compresseur avait dû être fait, le vendeur prenant alors en charge la moitié du montant de la facture correspondante qui s'élevait à 5 520,56 F et surtout que les désordres avaient pour origine la vétusté et l'utilisation antérieure du véhicule, dont le caractère sportif rend la longévité encore plus aléatoire, an particulier an ce qui concerne le turbo compresseur mais aussi le moteur.
Il résulte dudit rapport et des documents produits par les parties, que la rupture du turbo résulte de la vétusté du véhicule et de son utilisation antérieure. Il faut et il suffit pour que la garantie légale du vendeur s'applique que le vice existe en germe lors de la vente.
Tel est bien le cas en l'espèce, en l'état de la fragilité du turbo liée à une vétusté et à une utilisation antérieure à la vente ayant entraîné sa rupture après un parcours de seulement 150 km.
La rupture du turbo compresseur est un phénomène qui se produit de façon instantanée, liée à la vétusté et au mode d'utilisation du véhicule.
L'appelant fait état dans ses écritures "de la mauvaise foi de son adversaire, titulaire d'un CAP de mécanique qui ne pouvait ignorer les défauts affectant le véhicule".
Ces affirmations ne sont corroborées par aucun élément de preuve établissant que le vendeur ait effectivement eu connaissance des vices cachés;
A bon droit, le premier juge a considéré que le fait que Jean-Luc Ollier ait participé aux frais de remplacement du turbo spontanément et pour moitié de la facture soit 2 800 F, n'équivalait pas à une reconnaissance de responsabilité de sa part.
Dès lors, les demandes de l'appelant doivent être rejetées.
Au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, l'équité commande d'allouer 2 000 F à l'intimé pour les frais irrépétibles exposés par lui an cause d'appel.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, an matière civile et en dernier ressort ; En la forme, reçoit l'appel, Au fond, confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions Y ajoutant ; Condamne Manuel Hernandez à porter et à payer à M. Jean-Luc Ollier la somme de 2 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne Manuel Hernandez aux entiers dépens y compris les frais d'expertise, les dépens d'appel étant distraits à Maître d'Everlange, avoué, sur ses offres de droit.