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Décisions

CA Versailles, 3e ch., 28 septembre 1990, n° 463-89

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Dahan

Défendeur :

Pardieu

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Ride

Conseillers :

MM. Thavaud, Assie

Avoués :

Mes Robert, Delcaire

Avocats :

Mes Gondinet, Patillet.

TGI Nanterre, 1re ch., du 28 oct. 1988

28 octobre 1988

FAITS ET PROCEDURE

Le 19 août 1986, Daniel Dahan a acheté à André Pardieu pour le prix de 70 000,00 F un véhicule Buick Skylark mis en circulation en mars 1982 et qui avait parcouru 92 000 kms.

Au cours des mois qui suivirent, il fit effectuer quelques réparations sur le véhicule et au mois de novembre 1986 le garagiste concessionnaire General Motors auquel il s'était adressé, la société Petit, lui signala que la boîte de vitesse était à réviser et lui soumis un devis estimatif s'élevant à 31 269,42 F.

Faisant valoir que d'après l'annonce qui avait parue dans la presse la boîte de vitesse avait été refaite à neuf, Daniel Dahan fit assigner André Pardieu en restitution d'une somme de 31 269,42 F sur le montant du prix du véhicule sur le fondement de l'article 1641 du Code civil. En outre, il sollicitait le versement de la somme de 10 000,00 F à titre de dommages et intérêts et de 3 500,00 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

A titre subsidiaire, il sollicitait une expertise.

Par jugement du 28 octobre 1988, le Tribunal de grande instance de Nanterre le débouta de l'ensemble de ses demandes au motif que l'acheteur pouvait s'attendre à un certain nombre de défaillances mécaniques eu égard au kilométrage parcouru par le véhicule et qu'il avait été pleinement éclairé sur l'état du véhicule par la communication des factures de réparations effectuée par le vendeur notamment au niveau de la boîte de vitesse. Appelant de cette décision Daniel Dahan souligne qu'en toute hypothèse, la boîte de vitesse présentait de graves déficiences de fonctionnement qui ne pouvaient être décelées par un non professionnel s'agissant d'une boîte automatique. Il ajoute qu'il n'avait parcouru que 3 900 kms lorsque ces déficiences sont apparues et qu'aucune responsabilité ne peut lui incomber à cet égard. Se fondant à la fois sur la tromperie dont il aurait fait l'objet et sur la garantie des vices cachés, il réitère donc les demandes qu'il avait formées à titre principal devant le tribunal. Il maintient également à titre subsidiaire sa demande d' expertise.

André Pardieu conclut à l'irrecevabilité de la demande à défaut de respect du bref délai imposé en la matière et subsidiairement à la confirmation sur le fond de la décision du tribunal. Il sollicite la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 5 000,00 F à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi qu'une somme de même montant sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

DISCUSSION

Considérant que l'action a été engagée le 24 février 1987, soit trois mois à peine après que Daniel Dahan ait appris par le garagiste auquel il avait confié le véhicule que la boîte de vitesse devait être soumise à une sérieuse révision; que c'est donc dans un bref délai que l'action a été engagée et qu'elle est donc recevable aussi bien sur le fondement du vice caché que sur le fondement du dol; Considérant que Daniel Dahan n'a pu être trompé par le vendeur, puisque, s'il est vrai que sur l'annonce parue dans la presse il était indiqué "train, VNS et boîte NFS" le fait qu'André Pardieu lui ait communiqué une facture révélant que le mois précédent il avait fait pratiquer une réparation au niveau de la boîte de vitesse (et non pas à son remplacement) laissait apparaître que cette boîte n'était pas neuve et qu'elle avait déjà présenté des défaillances ; que ces défaillances avaient été suffisamment importantes pour immobiliser le véhicule qui, ainsi que cela est précisé sur la facture, avait dû être remorqué jusqu'à un garage ;

Que d'autre part, au moment même de la vente, le véhicule ne présentait pas de vice le rendant impropre à l'usage auquel il était destiné puisque Daniel Dahan a pu parcourir 3 900 kms avant qu'une anomalie ne se manifeste au niveau de la boîte de vitesse ; que la gravité de cette anomalie n'est pas établie et ne résulte que d'un devis estimatif établi à la demande de l'acquéreur; que ce devis reste très approximatif puisque pour l'essentiel les travaux devaient être effectués par un spécialiste et non par le garagiste qui a établi le devis et que celui-ci ne pouvait donner qu'une indication sur leur coût ; qu'il appartenait au demandeur de recourir à un expert judiciaire aussitôt que les désordres se sont manifestés alors qu'il résulte des pièces même qu'il a communiquées qu'il a, au moins jusqu'à juin 1987, continué à circuler avec la voiture; qu'actuellement plus de quatre ans après la vente, une expertise ne serait pas susceptible d'éclairer suffisamment la Cour ;

Qu'en définitive il ne saurait être fait droit à l'action de Daniel Dahan qui n'a pas été victime d'un dol ; que sans doute compte tenu de la robustesse et de la puissance du type de véhicule qu'il avait acquis pouvait-il espérer qu'il pourrait lui faire encore un long usage, mais que, en raison du kilométrage déjà parcouru il pouvait normalement prévoir qu'il courait le risque d'avoir à effectuer des réparations au cours des mois à venir ; que même à supposer établi que les déficiences de la boîte de vitesse était dûes à la vétusté, cette vétusté ne saurait, en l'état, être considérée comme un vice caché ;

Qu'il convient donc de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a débouté Daniel Dahan de l'ensemble de ses demandes ;

Considérant que celui-ci a pu se tromper cependant de bonne foi sur la nature et la portée de ses droits et qu'il ne saurait être condamné à des dommages et intérêts ;

Qu'il serait toutefois inéquitable qu'André Pardieu conserve à sa charge le montant des frais non taxables par lui exposés au cours de l'instance et qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 3 000,00 F en sus de celle de 2 000,00 F que les premiers juges lui ont accordé sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Par ces motifs ; LA COUR, Statuant, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Reçoit Daniel Dahan en son appel ; Confirme intégralement la décision déférée ; Y ajoutant, Condamne Daniel Dahan à payer à André Pardieu la somme de 3 000,00 F (trois mille francs) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en sus de celle de 2 000,00 F déjà allouée par les premiers juges ; Le condamne aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par Maître Delcaire, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.