CJCE, 15 juin 1972, n° 5-72
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Fratelli Grassi fu Davide
Défendeur :
Administration des finances de la République italienne
LA COUR,
1. Attendu que, par arrêt du 24 novembre 1971, parvenu au greffe de la Cour le 31 janvier 1972, la Cour d'appel de Brescia a soumis à celle-ci deux questions tendant à l'interprétation, notamment, des règlements du Conseil n° 19, du 4 avril 1962, portant établissement graduel d'une organisation commune des marchés dans le secteur des céréales, et 120-67-CEE, du 13 juin 1967, instituant définitivement une telle organisation ;
2. Que la première question tend à savoir si, pendant la période antérieure au 1er juillet 1967, les dispositions du traité et du règlement n° 19, conjointement avec l'article 16 du règlement n° 120-67-CEE, obligeaient, ou habilitaient seulement, les Etats membres à accorder des restitutions à l'exportation vers les pays tiers ;
Que, par la seconde question, il est demandé à la Cour de dire si ces dispositions permettaient auxdits Etats "d'invoquer des délais avant de s'exécuter " ;
I - Sur la compétence de la Cour
3. Attendu que la firme Grassi estime que, bien que les questions posées visent seulement la période antérieure au 1er juillet 1967, la Cour devrait se prononcer également sur le régime des restitutions applicables depuis cette date, en vue de mettre la juridiction nationale en mesure de statuer utilement ;
4. Attendu qu'aux termes de l'article 177 du traité, il appartient au juge national et non aux parties au litige principal de saisir la Cour ;
Que la faculté de déterminer les questions à poser étant dévolue au seul juge national, les parties ne peuvent en changer la teneur ;
Qu'en l'espèce, il résulte du texte de l'arrêt par lequel la Cour d'appel de Brescia a décidé de saisir la Cour de justice que la juridiction nationale a statué elle-même sur les questions relatives à la période postérieure au 30 juin 1967 ;
Que, dès lors, il n'y a pas lieu de procéder à l'examen des problèmes relatifs à cette période ;
II - Sur les questions posées
5. Attendu qu'aux termes de l'article 20, paragraphe 2, du règlement n° 19, une restitution " peut " être accordée lors d'une exportation vers les pays tiers ;
Que, dès lors, les Etats membres étaient libres de renoncer à tout octroi de restitution ;
Que cette interprétation est corroborée par l'article 1 du règlement n° 90 de la Commission du 25 juillet 1962, pris en application du règlement n° 19, disposant que les Etats membres " peuvent " accorder une restitution à l'exportation vers les pays tiers ;
6. Attendu, quant à la seconde question, que le règlement n° 19 et les dispositions prises pour son application ne règlent pas la question de savoir dans quel délai les restitutions devaient être payées lorsqu'un Etat membre avait fait usage de la faculté d'accorder des restitutions ;
Que cette question relevait donc du seul droit national, le droit communautaire restant indifférent aux modalités d'un paiement qu'il permettait sans l'imposer ;
7. Attendu que l'article 16 du règlement n° 120-67, visé également par la juridiction nationale, est sans influence sur le régime applicable avant le 1er juillet 1967 ;
Qu'en effet, aux termes de l'article 33 dudit règlement, le régime prévu par celui-ci n'est applicable qu'à partir du 1er juillet 1967, date à laquelle le règlement n° 19 et les dispositions prises en exécution de celui-ci ont été abrogés ;
Que, dès lors, dans la mesure où le régime instauré par le règlement n° 120-67 diffère de celui découlant du règlement n° 19, la nouvelle règlementation ne concerne que les opérations économiques intervenues postérieurement au 30 juin 1967 ;
8. Attendu que les frais exposés par le Gouvernement de la République italienne et par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement et que la procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé au cours du litige pendant devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens ;
LA COUR,
Statuant sur les questions à elle soumises par la Cour d'appel de Brescia, par arrêt du 24 novembre 1971, dit pour droit :
1) Sous le régime du règlement n° 19, c'est-à-dire jusqu'au 30 juin 1967 inclus, les Etats membres étaient libres d'octroyer ou non des restitutions à l'exportation de céréales vers les pays tiers ;
2) Lorsqu'un Etat membre avait fait usage de cette faculté, la question de savoir dans quel délai les restitutions devaient être payées relevait du seul droit national.