CJCE, 12 juillet 1957, n° 7-56
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Algera, Cicconardi, Couturaud, Genuardi, Steichen
Défendeur :
Assemblée commune de la Communauté européenne du charbon et de l'acier
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avocats :
Mes Chareyre, Coutard
LA COUR,
A - Recours en annulation 7-56
I - Sur la recevabilité
Par leurs conclusions, les requérants demandent à la Cour de "... constater que les décisions entreprises sont intervenues dans des conditions irrégulières ; annuler avec toutes conséquences de droit les décisions entreprises ",
Sans toutefois préciser de quelles décisions il s'agit.
Dans la requête se trouve cependant l'indication suivante : " les décisions du 12 juillet 1956 et du 15 octobre 1956 constituent les décisions attaquées ". D'après cette précision, il s'agit donc de la lettre du 12 juillet 1956 adressée par M. Vanrullen, vice-président de l'Assemblée commune, aux requérants, ainsi que de la communication n° 56-13, adressée le 15 octobre 1956 au personnel de l'Assemblée commune par le secrétaire général adjoint.
A cet égard, la Cour estime que la lettre de M. Vanrullen du 12 juillet 1956 constitue bien une décision. En effet, cette lettre indique avec toute la précision voulue quelles suites pour la situation des requérants l'Assemblée commune entendait donner au maintien éventuel de leur refus d'accepter les propositions qui leur avaient été faites antérieurement par la lettre de M. Vanrullen du 27 juin 1956. Or, les demandeurs ont expressément maintenu ce refus.
M. Vanrullen était habilité à prendre cette décision, car le bureau, par sa décision du 19 juin 1956, lui avait " délégué tous ses pouvoirs " pour " résoudre le problème du reclassement et des mesures qui s'y rapportent, sur la base des propositions faites par le comité Delvaux et adoptées par la Commission des quatre présidents au cours de sa réunion du 15 juin 1956 ". Au surplus, la décision contenue dans la lettre a été confirmée par la décision du bureau de l'assemblée en date du 1er octobre 1956.
Quant à la communication n° 56-13 du 15 octobre 1956, on peut se demander si elle constitue une décision à l'égard des requérants ou seulement une indication dont ils pouvaient déduire qu'ils ne recevraient plus le traitement qui leur avait été reconnu par les arrêtés du 12 décembre 1955. Or, la décision du bureau de l'assemblée de ne pas appliquer aux demandeurs le statut et de ne pas leur accorder le traitement prévu par les arrêtés du 12 décembre 1955 ne leur a pas été expressément communiquée. Pareille attitude de la partie défenderesse ne saurait cependant priver les requérants de leur droit de recours.
Pour cette raison, la Cour admet également le recours dirigé contre la communication n° 56-13 du 15 octobre 1956, puisque c'est cette communication seulement qui a permis aux demandeurs de savoir que les propositions de M. Vanrullen avaient été confirmées par le bureau, ce que la communication n° 56-12 ne faisait apparaître qu'indirectement. En demandant l'annulation de la " décision du 15 octobre 1956 ", les requérants entreprennent donc la décision implicite de la partie défenderesse de ne leur accorder ni le traitement ni le classement qui leur avaient été conférés par les arrêtés du 12 décembre 1955.
Le recours est donc recevable en ses deux chefs.
II - Sur la compétence de la Cour
La compétence de la Cour n'a pas été contestée par les parties et ne donne lieu à aucune objection d'office.
III - Sur la révocabilité d'actes administratifs générateurs de droits subjectifs
Les recours attaquent le retrait par l'assemblée des arrêtés du 12 décembre 1955. Les requérants font valoir que lesdits arrêtés leur auraient conféré des droits acquis qui n'auraient pu être révoqués que de leur consentement. Il convient donc d'examiner si le retrait de tels actes est possible en droit.
Tout d'abord, une erreur de raisonnement susceptible de conduire à cet égard à un cercle vicieux et consistant à affirmer qu'il s'agit d'un droit acquis, pour en conclure ensuite qu'il ne saurait être révoqué, doit être éliminée. En effet, si un droit conféré par un acte administratif peut être révoqué unilatéralement par l'Administration, c'est que, précisément, il ne constitue pas un droit acquis.
Les arrêtés du 12 décembre 1955 déclarent les requérants admis au bénéfice du statut, les nomment à certains " grades " et fixent leur rang à des échelons d'ancienneté déterminés.
Si ces arrêtés sont légaux et valables en droit, ils constituent des actes administratifs individuels, générateurs d'un droit subjectif.
Quant à la possibilité d'un retrait de tels actes, il s'agit là d'un problème de droit administratif, bien connu dans la jurisprudence et la doctrine de tous les pays de la Communauté, mais pour la solution duquel le traité ne contient pas de règles. La Cour, sous peine de commettre un déni de justice, est donc obligée de le résoudre en s'inspirant des règles reconnues par les législations, la doctrine et la jurisprudence des pays membres.
Une étude de droit comparé fait ressortir que dans les six Etats membres un acte administratif conférant des droits subjectifs à l'intéressé ne peut en principe pas être retiré, s'il s'agit d'un acte légal ; dans ce cas, le droit subjectif étant acquis, la nécessité de sauvegarder la confiance dans la stabilité de la situation ainsi créée l'emporte sur l'intérêt de l'administration qui voudrait revenir sur sa décision. Cela vaut notamment pour la nomination d'un fonctionnaire.
Si, par contre, l'acte administratif est illégal, le droit de tous les Etats-membres admet la possibilité d'une révocation. L'absence d'une base légale objective de l'acte affecte le droit subjectif de l'intéressé et justifie la révocation dudit acte. Il convient de souligner que si ce principe est généralement reconnu, seules les conditions de son exercice varient.
Le droit français exige que le retrait de l'acte illégal soit prononcé avant l'expiration du délai de recours contentieux et, si un recours a été formé, avant l'intervention de l'arrêt ; les droits belge, luxembourgeois et néerlandais semblent suivre, avec certaines nuances, des règles analogues.
Par contre, le droit allemand ne connaît pas de délai pour l'exercice du droit de révocation, sauf si un tel délai est prévu par une disposition spéciale. Ainsi la loi fédérale sur les fonctionnaires publics n'admet dans son article 13 le retrait de la nomination que dans un délai de six mois. Cependant, il est généralement reconnu que le principe du respect de la bonne foi (treu und glauben) s'oppose à un retrait indûment tardif, intervenant sensiblement après la date à laquelle le retrait aurait pu être prononcé. La jurisprudence et la doctrine invoquent à cet égard également la notion de renonciation (verzicht) et celle de forclusion (verwirkung) du droit de révocation.
Le droit italien est particulièrement net sur la question. Tout acte administratif entaché d'incompétence, de violation de la loi ou d'excès de pouvoir (eccesso di potere) peut être annulé ex tunc par l'Administration dont il émane, indépendamment des droits subjectifs qu'il pourrait avoir fait naître. Ce retrait peut être déclaré à n'importe quel moment (in qualsiasi momento) ; il n'y a donc pas de délai fixé pour le retrait. Cependant, selon la doctrine et la jurisprudence, un retrait indûment tardif peut constituer un excès de pouvoir ; des actes accomplis depuis longtemps (fatti avvenuti da lunga data) méritent d'être maintenus, même s'ils étaient contraires à la loi, à moins que des raisons d'ordre majeur n'exigent leur retrait dans l'intérêt public.
La révocabilité d'un acte administratif vicié par son illégalité est donc admise dans tous les Etats-membres.
D'accord avec les conclusions de M. l'Avocat général, la Cour admet le principe de la révocabilité des actes illégaux au moins pendant un délai raisonnable, tel celui dans lequel sont intervenues les décisions entreprises dans le présent litige.
IV - Sur la légalité des arrêtés du 12 décembre 1955
1. Au regard des règles fixant les compétences à l'intérieur de l'Assemblée commune, les arrêtés du 12 décembre 1955 ont été pris valablement : ils ont été signés par le président de l'Assemblée commune et par son secrétaire général. Le président a agi dans le cadre des décisions du bureau de l'Assemblée commune du 25 novembre 1955. Les arrêtés ont donc été pris valablement d'après les dispositions prévues au règlement de l'Assemblée commune (Journal officiel de la Communauté n° 13, du 9 juin 1954, page 402) - notamment dans son article 43, paragraphe 3 - et au règlement administratif intérieur de l'Assemblée commune du 25 novembre 1955 - notamment dans ses articles 1, 2 et 14.
Au cas où le secrétariat et le président de l'Assemblée commune n'auraient pas choisi le moment opportun pour remettre les arrêtés aux intéressés (le bureau avait prévu leur remise " en temps utile ") et où les obligations prévues au paragraphe 3 de l'article 43 du règlement de l'Assemblée commune et au paragraphe 4 de l'article 2 du règlement administratif intérieur n'auraient pas été respectées, cela n'aurait pas porté atteinte à la validité des arrêtés du 12 décembre 1955, du point de vue de l'ordre interne de l'assemblée.
2. Au regard des dispositions du traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier le présent litige soulevé, en ce qui concerne les arrêtés du 12 décembre 1955, la question de savoir si la partie défenderesse pouvait valablement admettre les requérants au statut et fixer leur classement sans le consentement ou l'avis de la Commission des présidents, prévue à l'article 78 du traité, ou si elle ne pouvait le faire qu'avec ledit consentement ou ledit avis. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de se prononcer sur l'étendue des autres pouvoirs que ladite Commission tient du traité, ni sur la compétence qu'elle aurait pour établir le statut du personnel, en vertu du paragraphe 7, dernier alinéa, de la convention relative aux dispositions transitoires.
a) L'admission au statut appartient aux institutions, sans qu'une participation quelconque de la Commission des présidents soit prévue au traité. Si les arrêtés du 12 décembre 1955 constituent effectivement l'admission des demandeurs au statut - question qui sera examinée ci-dessous sub VI - cette partie desdits arrêtés est légale et valable.
b) Quant au classement prévu aux arrêtés du 12 décembre 1955, la situation est moins claire.
Il ressort des arrêtés du 12 décembre 1955 que les demandeurs ont été nommés à certains grades et qu'il leur a été attribué un rang à un échelon déterminé d'ancienneté. Cette attribution entraînait, entre autres effets, celui de fixer le traitement des requérants, ainsi qu'il ressort du texte des décisions prises par le bureau de l'assemblée le 25 novembre 1955.
Or, l'examen du problème de savoir si l'Assemblée commune était compétente pour fixer seule le traitement de ses fonctionnaires, ou si elle ne pouvait le faire qu'avec le concours de la Commission des présidents prévue à l'article 78 du traité, conduit aux considérations suivantes :
1) Les institutions sont autonomes, dans le cadre de leurs attributions (article 6, alinéa 4, du traité). Ainsi, dans son arrêt 1-55 (affaire Kergall), la Cour a reconnu que l'Assemblée commune avait compétence " pour organiser son secrétariat à son gré et au mieux du service ".
D'autre part, l'alinéa 2 du paragraphe 3 de l'article 78 ne constitue qu'une exception à la règle de l'autonomie prévue à son alinéa et se trouve de ce fait soumis à une interprétation restrictive.
Mais cela n'empêche pas que l'article 78, paragraphe 3, reconnaît à la Commission des présidents une compétence propre en ce qui concerne le nombre des agents et les échelles de leurs traitements : ces données doivent être " préalablement déterminées " par ladite Commission.
Cette disposition s'explique par le fait que seule la Communauté, et non ses institutions, a la personnalité juridique. D'où la nécessité d'harmoniser la vie des quatre institutions et de prévoir un contrôle d'ordre financier et budgétaire, tâche confiée par l'article 78 du traité à la Commission des présidents. Il convient de souligner qu'aucun autre organe n'est investi d'un pouvoir de contrôle préalable en matière financière.
2) Le pouvoir de déterminer le nombre des agents et les échelles de leurs traitements n'est accordé à la Commission des présidents par l'alinéa 2 du paragraphe 3 de l'article 78 du traité que pour autant qu'ils n'auront pas été fixés en vertu d'une autre disposition du traité ou d'un règlement d'exécution. Tel n'est pas le cas en l'espèce.
Le contrôle prévu par le traité serait inefficace si chacune des institutions avait le pouvoir d'émettre des règlements internes, fixant le nombre ou les échelles des traitements de ses agents. Une telle interprétation mènerait à un résultat absurde. L'incise du paragraphe 3, alinéa 2, de l'article 78 ne vise que les cas où le traité prévoit une méthode spéciale pour la fixation d'un traitement ainsi que l'hypothèse d'un règlement d'exécution basé sur une telle disposition du traité. Toute autre interprétation viderait l'article 78 de son contenu et doit partant être rejetée.
L'autonomie de l'Assemblée commune, en tant qu'assemblée parlementaire, ne saurait être opposée non plus au pouvoir accordé à la Commission des présidents par l'article 78 du traité. Cet article s'applique en effet à toutes les institutions de la Communauté sans distinction ; le fait que l'Assemblée commune a des attributions spéciales n'y change rien ; son autonomie fonctionnelle s'exerce seulement dans le cadre de ses attributions, prévues par le traité (article 6, dernier alinéa).
3) Le pouvoir reconnu par l'article 78 du traité à la Commission des présidents s'applique donc en l'espèce.
Cependant, quant à l'étendue de ce pouvoir, deux thèses ont été présentées à la Cour :
a) Selon la première thèse, la Commission des présidents, pour l'exercice d'un contrôle efficace, doit disposer d'un droit de décision dans le domaine financier.
En faveur de cette thèse, on a invoqué tant la lettre que la finalité de l'article 78.
En ce qui concerne la lettre, l'article 78, paragraphe 3, confie à la Commission des présidents la mission de déterminer, préalablement à l'établissement des états prévisionnels, le nombre des agents et les échelles de leurs traitements. L'emploi dans ce texte de l'expression " déterminer " indique clairement l'existence d'un pouvoir de décision.
En ce qui concerne la finalité de l'article 78, qui tend manifestement à l'établissement d'un contrôle financier, elle implique que la compétence de la Commission n'est pas restreinte à l'établissement abstrait d'une grille ou d'un barème de traitements. En effet, pour que ce pouvoir soit efficace, la Commission doit être compétente pour déterminer le traitement prévu in abstracto pour les agents exerçant une fonction déterminée, dont la description, elle (" job-description "), est élaborée par chaque institution. Si cette compétence n'existait pas, rien n'empêcherait une institution de classer tous ses agents à l'échelon le plus élevé de la grille, et le contrôle serait éludé.
Au surplus, le texte parle de la détermination du nombre des agents et des échelles de " leurs " traitements, et non des échelles " des " traitements.
Aux termes de cette interprétation, l'alinéa 2 du paragraphe 3 de l'article 78 doit être considéré comme générateur d'un pouvoir implicite permettant l'exercice du contrôle financier en matière de dépenses de personnel, à l'instar des alinéas 3 et 4, générateurs d'un contrôle budgétaire, et de l'alinéa 6, générateur d'un contrôle comptable.
La détermination préalable du nombre des agents est destinée à prohiber un gonflement injustifié des cadres des institutions, la détermination des échelles de leurs traitements à prohiber l'allocation de traitements excessifs.
b) Selon une autre opinion, la théorie du pouvoir implicite ne conduit pas nécessairement à la conclusion que la Commission des présidents devrait disposer d'un droit de décision dans le sens indiqué ci-dessus, étant donné qu'elle dispose encore d'autres moyens pour exercer un contrôle efficace.
Aucun texte ne confère avec une précision suffisante à la Commission des présidents des droits de décision dépassant la compétence d'un organisme de coordination. Notamment la tâche de " déterminer " le nombre des agents et les échelles de leur traitement n'enlève aux institutions leur autonomie administrative pas plus qu'elle ne saurait attribuer aux présidents des institutions, réunis en Commission des présidents, des pouvoirs qu'ils ne possèdent pas en tant que présidents de celles-ci.
D'après cette thèse la Commission des présidents doit être informée et consultée, le pouvoir de décision étant réservé aux institutions dont la bonne volonté doit être présumée.
4) Il semble que la Commission des présidents elle-même, sans avoir pris position nettement, se rallie plutôt à cette deuxième interprétation. Ainsi, après avoir décidé, dans sa séance du 12 décembre 1955, qu'en ce qui concerne la procédure à suivre pour la rédaction des annexes " les Administrations des institutions devront prendre contact entre elles ", la Commission déclare en même temps " que ces contacts devront tendre à une harmonisation des textes, mais qu'ils ne devront pas porter atteinte au caractère facultatif des annexes ".
De même, dans sa séance du 28 janvier 1956, la Commission des présidents dit : " les annexes au statut n'étant soumises à la Commission des présidents que pour avis, les modifications sur lesquelles la Commission s'est mise d'accord ne constituent que des propositions faites aux institutions et non des décisions ".
Le statut du personnel s'inspire des mêmes idées : il ne prévoit qu'une communication à la Commission du nombre des emplois dans chaque grade, établi par l'institution sur la base des effectifs arrêtés par la Commission des présidents (article 25, alinéa 2) et déclare, en son article 62, que les annexes au statut " seront établies par chaque institution... et soumises pour avis à la Commission des présidents, avant leur mise en vigueur ". D'autre part, l'alinéa premier de l'article 25 renvoie d'une manière tout à fait générale à l'article 78 du traité en ce qui concerne le tableau de correspondance entre grades et emplois.
D'après cette thèse, la Commission des présidents devrait donc seulement être consultée et donner son avis sur le classement des agents, mais n'aurait pas un droit propre de décision, sauf en ce qui concerne le nombre des agents de chaque institution.
5) Selon l'article 31 du traité, il appartient à la Cour d'assurer le respect du droit dans l'interprétation et l'application du traité et des règlements d'exécution. Elle ne serait donc liée ni par le point de vue adopté par la Commission des présidents, ni par le texte du statut du personnel, s'il apparaissait qu'un choix entre les deux thèses susmentionnées fut nécessaire à la solution du présent litige.
Cependant, ce litige n'exige pas que la controverse soit tranchée.
En effet, le classement des demandeurs accordé par les arrêtés du 12 décembre 1955 s'avère illégal aussi bien d'après la première que d'après la seconde thèse : d'après la première, parce que l'Assemblée commune n'avait pas obtenu préalablement le consentement de la Commission des présidents ; d'après la seconde, parce qu'elle n'avait pas préalablement soumis pour avis le classement à la Commission des présidents, ce qu'elle aurait également dû faire en vertu de l'article 2, alinéa 4, de son règlement administratif intérieur ainsi que d'après l'article 43, paragraphe 3, de son règlement. Or, la partie défenderesse n'a pas contesté qu'elle n'avait jamais reçu ni même sollicité avant le 12 décembre 1955 l'accord ou l'avis de la Commission des présidents.
Dans ces conditions, elle n'était pas habilitée à fixer dans le cadre du statut le classement des requérants, de sorte que cette partie des arrêtés du 12 décembre 1955 est frappée d'illégalité.
V - Des conséquences de l'illégalité de la partie des arrêtés du 12 décembre 1955, contenant le classement des demandeurs
1. Nullité absolue ou révocabilité ?
De l'avis de la Cour, l'illégalité d'un acte administratif individuel n'entraîne sa nullité absolue que dans certains cas qui sont étrangers au présent litige. Abstraction faite de ces cas exceptionnels, la doctrine et la jurisprudence des Etats-membres n'admettent qu'une annulabilité et révocabilité. L'intervention d'un acte administratif crée la présomption de sa validité. Celle-ci ne peut être infirmée que par annulation ou par retrait, pour autant que ces mesures sont admises.
2. La révocabilité des arrêtés du 12 décembre 1955 s'étend-elle à leur contenu tout entier ou seulement à la partie affectée d'illégalité ?
M. l'Avocat général, dans ses conclusions, s'est prononcé pour l'indissociabilité des éléments des arrêtés, en invoquant l'article 59 du statut du personnel qui prévoit que " les agents peuvent être titularisés dans un grade quelconque d'une catégorie ou d'un cadre visé à l'article 24 du statut ". D'après lui, " la titularisation s'accompagnant de la renonciation des agents au bénéfice de leur contrat, ceux-ci sont en droit, pour être à même d'exercer leur option en toute connaissance de cause, de connaître le grade et l'échelon d'ancienneté auxquels l'Administration se propose de les nommer, et non pas seulement la décision de principe les considérant comme dignes de devenir fonctionnaires à statut... ".
Il est vrai que chacun des requérants a déclaré " accepter d'être admis au bénéfice du statut dans les conditions lui offertes ".
Toutefois, l'élément essentiel et prépondérant de cette déclaration consiste dans l'admission au statut, leur assurant une situation stable avec droit à une pension de retraité. Quant au traitement, on sait qu'il peut subir des modifications ultérieures par voie règlementaire, mais la titularisation statutaire ne saurait s'en trouver affectée. En se ralliant à l'interprétation suivie dans la plupart des législations modernes suivant laquelle l'illégalité partielle n'entraîne pas la révocabilité de l'acte tout entier, à moins que celui-ci ne soit privé de sa raison d'être si la partie illégale est supprimée, la Cour rejette la thèse du caractère indissociable des divers éléments des arrêtés.
Cette décision se justifie aussi du fait qu'il a été constaté ci-dessus (sub III) que seuls les actes administratifs illégaux sont révocables, les actes légaux restant irrévocables. En l'espèce, l'assemblée était compétente pour l'admission au statut, de sorte que celle-ci est valable et irrévocable, tandis que l'attribution du grade et le classement à certains échelons était illégal et révocable. Dans ces conditions, l'admission au statut qui a été valablement prononcée ne pouvait pas être révoquée.
Cette décision n'est pas contraire au texte du statut du personnel. D'ailleurs, il ne s'agit pas ici d'appliquer le statut du personnel, qui n'était pas encore en vigueur au moment de la remise des arrêtés, mais d'appliquer le traité. Or, d'après celui-ci, l'admission au statut en tant que telle relevait de la compétence exclusive de l'assemblée, tandis que celle-ci n'était pas habilitée à procéder au classement sans consentement ou avis préalable de la Commission des présidents. Le fait même que le traité a réglé de façon différente les compétences dans ces deux matières impose la conclusion que les éléments correspondants des arrêtés peuvent, et doivent même, être dissociés sur le plan légal.
Au demeurant, s'il est vrai que l'admission au statut est accompagnée de la titularisation dans un grade d'une catégorie ou d'un cadre déterminé (article 59, dispositions transitoires), il convient de rappeler que le statut distingue entre l'admission au statut et le classement (voir par exemple l'article 27 qui ne parle que de l'admission au statut, l'article 36 qui prévoit un rapport recommandant " la titularisation ").
En outre, d'autres arguments encore sont en faveur du caractère dissociable des éléments des arrêtés.
Ainsi, il serait peu équitable de permettre à l'assemblée de ne pas respecter le droit au bénéfice du statut dans le sens de leur nomination comme fonctionnaires titulaires qu'elle avait voulu reconnaître aux requérants, simplement parce qu'elle leur avait en outre fait des promesses illégales qu'elle n'était pas habilitée à faire.
En ce qui concerne la question de savoir si les parties en cause auraient également été d'accord avec une nomination assortie d'un classement légal, l'agent de la partie défenderesse y a répondu, au cours des débats oraux, par l'affirmative. Il faut reconnaître que la volonté des requérants est plus difficile à interpréter ; mais la Cour estime qu'on ne peut, sous prétexte de ne pas leur prêter une volonté qu'ils n'auraient peut-être pas manifestée, les priver du bénéfice de l'admission au statut, qui avait été valablement prononcée. Du reste, le maintien de leur admission au statut leur laisse la possibilité réelle de répondre à la question sus indiquée : ils pourront donner leur démission s'ils estiment que la situation qui leur est faite n'est pas adéquate.
Dans les considérants susmentionnés, la validité et l'irrévocabilité de l'admission des demandeurs au bénéfice du statut ont été admises pour le cas où les arrêtés du 12 décembre 1955 contiendraient effectivement une telle décision (V. ci-dessus IV, 2 a). Or, cela n'est pas certain, quoique fort vraisemblable.
Les circonstances dans lesquelles les arrêtés du 12 décembre 1955 ont été remis aux demandeurs font nettement ressortir que la partie défenderesse avait l'intention d'accorder aux demandeurs le bénéfice du statut dans une situation stable, et que ceux-ci etaient d'accord pour y être admis. Le texte des arrêtés, prononçant sans réserve l'admission au bénéfice du statut, les déclarations préalables d'acceptation de cette admission, signées par les requérants, ainsi que leurs accusés de réception des arrêtés, en font preuve. La remise des arrêtés n'a eu lieu qu'après que la Commission des présidents eut, le 12 décembre 1955, décidé que le statut du personnel était " définitivement adopté ", en tout cas en ce qui concerne l'Assemblée commune, de sorte que son président, M. Pella, pouvait estimer que le statut était définitivement admis et serait très prochainement mis en vigueur, et que, de ce fait, il pouvait admettre à son bénéfice les fonctionnaires qui en avaient exprimé le désir.
Des doutes peuvent cependant surgir du fait que le texte vraiment définitif du statut n'a été établi en réalité qu'ultérieurement, le 28 janvier 1956, et qu'il n'a été mis en vigueur par l'Assemblée commune qu'en octobre 1956, avec effet rétroactif au 1er juillet 1956. Vu que le paragraphe 4 des arrêtés du 12 décembre 1955 vise expressément la mise en vigueur ultérieure du statut et de ses annexes et que les requérants acceptaient le risque de son contenu, la Cour interprète les déclarations des requérants et le texte des arrêtés du 12 décembre 1955 en ce sens qu'il s'agissait de l'admission au futur statut, quel que soit son contenu.
Du reste, même s'il fallait admettre que l'admission aurait eu lieu à un statut non existant et qu'elle était, de ce fait, nulle et sans objet, même dans cette hypothèse, la lettre de M. Vanrullen et le refus de la part de l'Assemblée commune d'admettre les requérants au statut devrait être annulé, parce que cette décision méconnaît la vocation des agents à l'admission au statut, qui leur était acquise (arrêt 1-55 affaire Kergall). En effet, si la Cour a reconnu à M. Kergall une vocation à être admis au bénéfice du statut, bien qu'il ne lui ait jamais été fait de promesse formelle et solennelle à cet effet et bien que la mise en vigueur du statut fut alors moins imminente, il faut reconnaître, à fortiori, un droit à l'admission au statut analogue, et même plus fort, aux requérants.
VII
Pour autant que la décision contenue dans la lettre de M. Vanrullen du 12 juillet 1956 retire aux demandeurs leur admission au bénéfice du statut, elle doit être annulée pour les raisons exposées ci-dessus.
En outre, la décision, contenue dans la même lettre, de replacer les requérants sous le régime de leurs anciens contrats est également à annuler, car, sans un nouveau consentement exprès de leur part, le contrat qui avait pris fin à la suite de leur renonciation, renonciation acceptée par la remise des arrêtés du 12 décembre 1955, ne pouvait renaître, ni un nouveau contrat leur être imposé. L'assemblée commune, qui pouvait valablement retirer le classement prévu auxdits arrêtés, aurait pu reclasser d'office les demandeurs au niveau résultant des mesures d'harmonisation, une fois établi, mais elle n'avait pas le droit de leur réimposer leur ancien régime contractuel.
Sur le premier chef du recours, tendant à l'annulation des décisions contenues dans la lettre de M. Vanrullen du 12 juillet 1956, la Cour décide donc qu'il est fondé.
Quant à la communication n° 56-13 du 15 octobre 1956, elle doit également être annulée pour autant qu'elle implique le retrait de l'admission au statut et le rétablissement d'une situation contractuelle et temporaire, situation incompatible avec l'admission au statut dans une situation stable, déclarée valablement acquise. Par contre, ladite communication est valable pour autant qu'elle implique révocation du classement et du traitement y affère.
Par conséquent, la Cour admet le recours pour autant que ladite décision refuse aux demandeurs leur maintien au statut et les replace sous contrat ; par contre, le recours contre le refus de leur attribuer le traitement prévu auxdits arrêtés est rejeté, pour les raisons mentionnées ci-dessus sous IV, 2 B, 5, et sous V.
Il appartiendra à la partie défenderesse de procéder à une nouvelle fixation du traitement des requérants.
A cet égard, il convient de donner acte à la partie défenderesse de sa déclaration, faite à l'audience par son agent, qu'elle s'engage à reprendre les requérants dans ses services aux conditions générales actuelles de ses fonctionnaires, engagement que la Cour interprète dans le sens que ces conditions impliquent pour l'avenir la même indemnité compensatrice qu'elle accorde aux fonctionnaires qui avaient accepté la proposition de M. Vanrullen.
VIII - Les dépens
Quant aux dépens résultant du recours en annulation, la Cour, en appliquant l'article 60, paragraphe 2, de son règlement, met la totalité des dépens de la partie défenderesse et les quatre cinquièmes des dépens des requérants à la charge de la partie défenderesse, un cinquième de leurs propres dépens restant à la charge des requérants, vu que ceux-ci ont succombé sur un chef de leur recours.
B - Recours en indemnité 3 à 7-57
I - Sur la recevabilité
Rien ne s'oppose à ce qu'un requérant, dans un seul et même litige, présente des conclusions subsidiaires pour le cas où ses conclusions principales seraient rejetées.
Les recours sont donc recevables.
II - Quant au fond
1. Les bases légales de la responsabilité
Les requérants n'ont pas indiqué avec netteté sur quelles dispositions légales ils fondent leur recours en indemnité. Il apparaît qu'ils demandent l'application par voie d'analogie des dispositions de l'article 34, alinéa 7, du statut du personnel prévoyant l'octroi d'une indemnité en cas de résiliation d'engagement " pour exigence de service ", parce que les mesures prises par l'Assemblée commune équivaudraient à une rupture du lien qui unit l'assemblée à ses agents.
Dans la duplique, la partie défenderesse fait valoir que les requérants n'ont pas invoqué l'article 40 du traité (responsabilité pour faute de service), que ce moyen est donc irrecevable et que du reste une interprétation erronée du texte peu clair de l'article 78 du traité ne saurait constituer une faute de service.
La Cour décide qu'il n'y a pas, en l'espèce, faute contractuelle, car le 12 décembre 1955 la remise des arrêtés avait remplacé les contrats par l'admission au statut. L'article 34, alinéa 7, du statut du personnel n'est pas applicable en l'espèce par voie d'analogie, et cela en raison du fait que le lien entre l'assemblée et les demandeurs n'a pas été rompu.
L'article 40 du traité, par contre, constitue la base juridique des recours. Il est vrai qu'il n'a pas été invoqué expressément par les requérants, mais les éléments de fait soumis par eux dans leur recours et leurs conclusions justifient son application. Le statut (article 22) et le règlement de la Cour (article 29, paragraphe 3) n'obligent pas la partie requérante à citer les articles qu'elle invoque ; il suffit que " les faits et moyens et les conclusions de la partie requérante " s'y trouvent, exigence satisfaite en l'espèce.
2. L'assemblée commune a-t-elle commis une faute de service au sens de l'article 40 du traité ?
D'accord avec M. l'Avocat général, la Cour estime que la réponse ne peut être qu'affirmative. La partie défenderesse savait que la Commission des présidents se proposait d'arriver à une harmonisation des traitements pour les agents des différentes institutions exerçant une activité comparable, et elle s'était déclarée prête à y collaborer. Dans ces conditions, la remise des arrêtés du 12 décembre 1955, le jour même où la Commission des présidents, dans une séance à laquelle le président de l'Assemblée commune prenait part, avait unanimement reconnu la nécessité de cette harmonisation - même si elle était inspirée du désir d'accorder une situation bien définie aux requérants - n'aurait pas dû être faite avant que l'issue des travaux d'harmonisation fut connue. Cette remise prématurée et intempestive constitue une faute de service, par le fait qu'elle a créé une situation fausse sous des apparences légales.
En outre, le retrait de l'admission au statut ayant été illégal, il constitue également une faute de service, faute donnant droit, selon l'article 40 du traité, à la réparation du préjudice résultant de cette mesure.
Il n'est pas nécessaire de trancher dans le présent litige la question de savoir si la faute de service, au sens de l'article 40 du traité, présuppose le dol ou tout au moins une négligence coupable, ou si toute attitude illégale - même inconsciente - de la part d'une institution peut tomber sous le coup de ladite notion. En effet, si l'adoption d'une interprétation erronée de l'article 78 du traité ne constitue pas nécessairement une faute génératrice de responsabilité, une telle faute résulte en l'espèce du fait que l'assemblée n'a sollicité ni le consentement ni l'avis de la Commission des présidents, quoique ce devoir lui fut imposé aussi bien par l'article 43 de son règlement que par l'article 2, paragraphe 4, de son règlement administratif intérieur. Au surplus, ce devoir était précisé à l'article 62 du statut du personnel, dans sa rédaction adoptée le 12 décembre 1955. Enfin, la Cour estime que les tergiversations de la partie défenderesse envers les demandeurs constituent également une faute de service.
3. Quant aux dommages résultant des fautes de service
A. Préjudice matériel
a) La révocation illégale de leur admission au statut et leur remise illégale sous contrat temporaire, annulées par le présent arrêt, n'ont pas causé un préjudice pécuniaire aux requérants.
b) La révocation de leur classement les prive du droit aux traitements supérieurs, prévus aux arrêtés révoqués. Cependant, ce fait n'est pas la conséquence de fautes de service, puisque la révocation du classement est légale ; par conséquent, ladite privation ne donne pas lieu à réparation.
Cette conclusion résulte également de la constatation que les requérants n'ont pas droit au maintien d'une situation illégale et valablement retirée.
c) Les requérants ont prétendu, dans la procédure écrite, avoir refusé des offres d'emploi venant de l'extérieur, parce qu'ils auraient eu confiance dans les promesses de l'Assemblée commune. Aucune preuve n'a cependant été apportée, ni même offerte à cet égard. A ce point de vue, aucun préjudice ne peut donc être constaté.
L'existence d'un dommage pécuniaire causé par les fautes de service imputables à la partie défenderesse n'est donc pas établie.
B. Préjudice moral
L'attitude fautive de la partie défenderesse, à savoir le retrait illégal de l'admission des requérants au statut et le fait d'avoir intempestivement remis les arrêtés du 12 décembre 1955, ce qui devait amener leur retrait partiel ultérieur, a cependant causé aux requérants un dommage moral.
a) Les requérants, placés dans une position à laquelle leurs mérites professionnels les désignaient et qui pour eux présentait toutes les apparences de la stabilité et de la durée, se sont trouvés, sans faute de leur part, devant la perspective d'un renvoi qui signifiait la fin d'une carrière sur laquelle ils pouvaient légitimement compter.
L'émotion causée par cette attitude, le trouble et le malaise qui en résultaient pour les intéressés, ont donc causé aux requérants un dommage moral, dont ceux-ci peuvent demander réparation.
b) Par contre, la Cour estime que la diminution de grade ne constitue pas un dommage moral appréciable et ne saurait porter atteinte au prestige social des requérants.
c) Quant au montant à accorder à titre de réparation du préjudice moral, il ne faut pas perdre de vue que le geste de l'Assemblée commune leur accordant jusqu'à la décision de la Cour le bénéfice matériel des arrêtés du 12 décembre 1955 n'a été que le résultat de l'action en justice et ne pouvait effacer les appréhensions quant à l'avenir.
Au vu de ces considérations, la Cour fixe l'indemnité pour chacun des requérants à 100 unités de compte UEP.
Quant aux dépens, il y a lieu de tenir compte du fait qu'à la suite de la décision sur le recours en annulation les recours sont devenus sans objet pour autant qu'une indemnité avait été demandée à cause du retrait de l'admission au statut des requérants. Cependant, ce résultat est la conséquence du fait que, dans le recours en annulation, la partie défenderesse a succombé en ce chef.
Il ne fait donc pas obstacle à la condamnation de la partie défenderesse à la totalité des dépens, conformément à l'article 60, paragraphe 1, du règlement de la Cour.
LA COUR, Rejetant toutes autres conclusions plus amples ou contraires, déclare les présents recours recevables et arrête :
I - Sur le recours en annulation 7-56
1) les décisions contenues dans la lettre, adressée aux requérantes le 12 juillet 1956 par M. Vanrullen, vice-président de l'Assemblée commune, sont annulées.
2) la décision du bureau de l'Assemblée commune, pour autant qu'elle retire aux requérants l'admission au bénéfice du statut, est annulée.
3) la requête en annulation, formée contre la décision du bureau de l'Assemblée commune, pour autant qu'elle retire aux requérants les grades et rangs qui leur avaient été accordés par les arrêtés du 12 décembre 1955, est rejetée.
4) pour autant que les décisions du vice-président, M. Vanrullen, et du bureau de l'Assemblée commune sont annulées, l'affaire est renvoyée devant l'Assemblée commune.
5) les parties requérantes ont droit au remboursement des quatre cinquièmes de leurs dépens par la partie défenderesse, celle-ci supportant ses propres dépens.
II - Sur les recours en indemnité 3 à 7-57
La partie défenderesse est condamnée à payer à chacun des requérants la somme de 100 unités de compte UEP.
Les dépens sont mis à la charge de la partie défenderesse.