CA Bourges, 1re ch., 1 février 1988, n° 76-86
BOURGES
arrêt
PARTIES
Demandeur :
Planque
Défendeur :
Compagnie Générale de Location (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Solinhac
Conseillers :
MM. Hérald, Mercier
Avoués :
Me Tracol, SCP Rahon-Pluvinage
Avocats :
Mes Laudet, Suguenot.
M. Planque a signé le 3 mai 1985 auprès de la Maison Borde, concessionnaire de la firme Leyland à Pougues Les Eaux, un bon de commande d'un véhicule automobile où il était précisé que la livraison interviendrait dans le délai de 15 jours ;
En fait, le véhicule ne fut livré que deux mois plus tard ;
Pour en assurer le financement, M. Planque a accepté le 9 août 1985, l'offre préalable de location avec promesse de vente moyennant le paiement de 47 mensualités de 2 359,03 F que lui a faite la Compagnie Générale de Location d'Equipements (CGL) ;
M. Planque ne s'est acquitté d'aucune mensualité et a donné son accord à la CGL pour le véhicule, objet de contrat de location qui se trouvait toujours au garage Borde où il avait été livré, soit vendu à un tiers au mois de décembre 1985 ;
La CGL a réclamé à M. Planque le paiement de la somme de 50 603,85 F résultant de l'addition des loyers impayés du 15 septembre 1985 au 15 septembre 1989 et de l'indemnité de résiliation du contrat (119 991,85 F) sous déduction du prix de vente du véhicule (67 788 F) ;
M. Planque ayant laissé ces réclamations sans suite a été assigné devant le Tribunal de commerce de Nevers et a été condamné à payer à la CGL la somme de 50 603,85 F outre 2 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveaux Code de procédure civile ;
M. Planque a relevé appel de cette décision et a indiqué que le retard apporté par le vendeur à la livraison du véhicule commandé avait été tout intérêt à son acquisition puisque, dans le courant du mois de mai et juin 1985 sa situation professionnelle et celle de la société qui l'employait ont été modifiées et que pour cette raison il n'avait pas pris possession du véhicule ni procédé à son immatriculation ;
Il a précisé avoir signé en blanc l'offre de la CGL qui, d'après M. Borde qui fit le nécessaire, n'était qu'une formalité préalable à la vente du véhicule à un tiers, le contrat de financement devant être annulé par la suite ;
Il considère en conséquence que le contrat le liant à la CGL est nul puisqu'il n'a jamais été en possession d'un exemplaire signé des deux parties et n'a donc pas été mis en mesure d'exercer son droit de rétractation ;
A titre subsidiaire, il fait valoir que le préjudice réel de la CGL est limité aux deux loyer~non honorés avant la résiliation et que le surplus de la demande doit être considérée comme une clause pénale non justifiée ;
La CGL a conclu à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de M. Planque à une nouvelle indemnité de 2 000 F au titre de l'article 700 du nouveaux Code de procédure civile ;
CECI EXPOSE LA COUR,
Attendu qu'il est constant que M. Planque n'a pris l'initiative d'aucune action en résiliation de la vente du véhicule qui ne lui a pas été livré dans les conditions prévues au contrat ;
Attendu donc que le contrat de vente constitue le support valable du contrat conclu avec la CGL ;
Attendu que si M. Planque soutient avoir signé en blanc ce dernier contrat et n'avoir jamais eu d'exemplaire de la convention il n'en rapporte aucunement la preuve ;
Attendu que la Cour trouve au dossier de l'intimée la copie de l'offre acceptée comprenant des indications précises sur le prénom du conjoint du débiteur ou le numéro de son compte bancaire qui n'ont pu être donnés que par lui ;
Attendu donc que la convention liant M. Planque à la CGL doit recevoir application ;
Attendu toutefois que cette convention a été établie par référence à la loi du 10 janvier 1978, relative à l'information et à la protection des consommateurs dans le domaine de certaines opérations de crédit ,laquelle a permis au prêteur de prévoir le versement d'indemnités par l'emprunteur défaillant, sans préjudice de l'application de l'article 1152 du Code civil ;
Attendu que par application de ce dernier texte, le juge peut, même d'office, modérer la clause pénale qui a été convenue si elle est manifestement excessive ;
Attendu qu'en l'espèce, la CGL ne conteste pas, même si ce fait ne lui est pas opposable, que M. Planque a reçu livraison du véhicule au moment où il n'en avait nul besoin et que c'est sur les conseils du concessionnaire Borde, non présent à la procédure, qu'il a contracté avec elle pour régulariser le financement de son acquisition ;
Attendu qu'il apparaît que M. Planque est un débiteur de bonne foi et que l'application stricte des obligations figurant au contrat aurait pour lui des conséquences financières manifestement excessives ;
Attendu qu'il y a donc lieu de dire que M. Planque reste redevable à la CGL de la somme de 5 095,50 F représentant les loyers et l'indemnité pénale de 8 % due contractuellement avant la résiliation du bail ;
Attendu que compte tenu des éléments de la cause, la Cour estime fixer à 5 000 F la somme due par M. Planque aU titre de la clause pénale ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la CGL la charge des frais irrépétibles qu'elle a exposés dans la présente affaire ;
Par ces motifs, LA COUR, Reçoit M. Planque en son appel ; Réforme le jugement rendu le 8 octobre 1986 par le Tribunal de commerce de Nevers ; Condamne M. Planque à payer à la CGL la somme de 10 095,50 F avec intérêts de droit à compter du 9 juillet 1986 à concurrence de 5 095,50 F et à compter du présent arrêt pour le surplus ; Déboute la CGL de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveaux Code de procédure civile ; Condamne M. Planque aux dépens et alloue à Maître Tracol, le bénéfice de l'article 699 du nouveaux Code de procédure civile.