CJCE, 21 juin 1973, n° 79-72
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Commission des Communautés européennes
Défendeur :
République italienne
LA COUR,
1. Attendu que, par requête déposée au greffe le 8 décembre 1972, la Commission a saisi la Cour, en vertu de l'article 169 du traité CEE, d'un recours visant à faire constater qu'en ne mettant pas en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions de la directive du Conseil 66-404 CEE du 14 juin 1966 concernant la commercialisation des matériels forestiers de reproduction (JO 1966, n° 125, p. 2326) dans le délai prévu à l'article 18 de cette directive, tel que modifié par la directive 69-64 CEE du Conseil du 18 février 1969 (JO 1969, n° L 48, p. 12), la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité ;
2. Attendu qu'ayant constaté que les différences existant entre les réglementations nationales visant à promouvoir l'utilisation de matériels forestiers de reproduction de haute qualité constituaient un obstacle aux échanges entre les Etats membres, le Conseil a, par la directive du 14 juin 1966, voulu instaurer des règles communes comportant des exigences communes quant à la commercialisation desdits matériels aussi bien entre les Etats membres que sur les marchés nationaux ;
Que cette directive avait fixé un délai pour la mise en œuvre des mesures nationales expirant respectivement les 1er juillet 1967, 1er juillet 1969 et 1er juillet 1971 pour les semences et parties de plantes des différentes espèces d'arbres définies à son article 18 ;
Que, par directive du 18 février 1969, l'échéance du premier délai a été reportée au 1er juillet 1969 ;
3. Attendu que la défenderesse admet l'inobservation de ces délais ;
Que cependant, elle expose qu'eu égard à l'état de la législation italienne applicable au commerce des semences et des plants forestiers, une loi était nécessaire pour adapter celle-ci aux dispositions de la directive ;
Qu'à cette fin un premier projet de loi aurait été présenté au Parlement, mais que la fin anticipée de la législature n'aurait pas permis de l'adopter en temps utile ;
Qu'un nouveau projet de loi, présenté en septembre 1972, n'aurait pu être adopté qu'au cours du mois de mai 1973 ;
Qu'ainsi le retard dans la mise en œuvre des obligations en cause serait essentiellement dû aux circonstances politiques imprévisibles de la fin de 1971 et du début de 1972 ;
4. Attendu que, dès l'adoption de la directive 66-404 CEE, tous les Etats membres savaient que, pour un premier groupe de semences et parties de plantes, ils étaient tenus de mettre en vigueur les mesures nécessaires au plus tard le 1er juillet 1967 ;
Que certains Etats membres n'étant pas parvenus à se conformer le 1er juillet 1967 aux dispositions de cette directive, la directive 69-64 CEE leur a accordé un délai supplémentaire, rappelant ainsi aux Etats membres en défaut leur obligation de prendre les mesures prévues ;
Que, dès lors, n'ayant pas mis en vigueur les dispositions exigées par la directive 66-404 CEE avant le 1er juillet 1969, la défenderesse a depuis cette date manqué aux obligations découlant de cette directive ;
5. Qu'elle ne saurait invoquer, pour sa justification, des empêchements ou circonstances qui ont surgi à une époque largement postérieure à celle où les obligations dont le manquement lui est reproché sont nées ;
Que la situation politique invoquée ne saurait donc, en tout état de cause, être admise comme justifiant ce retard ;
Que d'ailleurs, si ce projet de loi est présentement adopté, il ne s'ensuit pas que l'inobservation des dispositions de la directive a cessé, les mesures réglementaires et administratives pour son application n'ayant toujours pas été mises en vigueur ;
6. Attendu qu'au cours de la procédure orale, la défenderesse a encore invoqué qu'en l'occurrence il s'agit de la non-observation d'une directive pour en conclure qu'on ne saurait reconnaître aux dispositions d'une directive la même force obligatoire qu'à celles d'un règlement ;
7. Attendu qu'aux termes de l'article 189 du traité, la directive " lie " tout Etat membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et les moyens ;
Que l'exacte application des directives est d'autant plus importante que les mesures d'exécution sont laissées à la discrétion des Etats membres et que, faute d'atteindre dans les délais fixes les objectifs visés, de tels actes seraient privés d'efficacité ;
Que si, à l'égard des Etats membres destinataires, les dispositions d'une directive ont un effet non moins contraignant que celui d'une autre règle de droit communautaire, un tel effet appartient à plus forte raison aux dispositions relatives aux délais pour la mise en œuvre des mesures prévues ;
8. Attendu qu'il s'ensuit qu'en n'ayant pas adopté les dispositions, nécessaires pour se conformer à la directive du Conseil 66-404, concernant la commercialisation des matériels forestiers de reproduction, dans le délai prévu, tel que modifié par la directive 69-64, la République italienne a manqué à une obligation qui lui incombe en vertu du traité ;
9. Attendu qu'aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens ;
Que la partie défenderesse a succombé en ses moyens ;
La COUR,
Rejetant toutes autres conclusions plus amples ou contraires, déclare et arrête :
1) La République italienne, en n'ayant pas adopté les dispositions, nécessaires pour se conformer à la directive du Conseil 66-404, concernant la commercialisation des matériels forestiers de reproduction dans le délai prévu, tel que modifié par la directive 69-64, a manqué à une obligation qui lui incombe en vertu du traité ;
2) La partie défenderesse est condamnée aux dépens.