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Décisions

CJCE, président, 17 décembre 1998, n° C-364/98 P(R)

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Emesa Sugar (Free Zone) NV ; Gouvernement d'Aruba

Défendeur :

Commission des Communautés européennes ; Conseil de l'Union européenne ; Royaume d'Espagne ; République française

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Avocat général :

M. Ruiz-Jarabo Colomer

Avocats :

Mes van der Wal, Bos, Slotboom

CJCE n° C-364/98 P(R)

17 décembre 1998

LE PRÉSIDENT DE LA COUR,

1. Par requête déposée au greffe de la Cour le 9 octobre 1998, Emesa Sugar (Free Zone) NV a formé, conformément à l'article 50, deuxième alinéa, du statut CE de la Cour de justice, un pourvoi contre l'ordonnance du président du Tribunal de première instance du 14 août 1998, Emesa Sugar/Commission (T-44-98 R, non encore publiée au Recueil, ci-après l'"ordonnance attaquée"), par laquelle celui-ci a rejeté sa demande en référé.

2. La requérante demande l'annulation de l'ordonnance attaquée et, à titre principal, à ce qu'il soit fait droit à sa demande telle qu'elle a été présentée en première instance, ou, à titre subsidiaire, le renvoi de l'affaire devant le président du Tribunal afin qu'il statue à nouveau, ainsi que la condamnation de la Commission aux dépens des deux instances.

3. Par actes déposés au greffe les 30 octobre et 10 novembre 1998, le Conseil et le Royaume d'Espagne ont présenté leurs observations écrites devant la Cour. La Commission et le gouvernement d'Aruba ont fait de même par actes déposés le 17 novembre 1998. La République française n'a pas présenté d'observations dans le délai imparti.

Cadre juridique, faits et procédure

4. Le cadre juridique et les faits qui sont à l'origine du litige sont exposés dans l'ordonnance attaquée dans les termes suivants:

"1 L'île d'Aruba fait partie des pays et territoires d'outre-mer (ci-après 'PTOM) associés à la Communauté. L'association des PTOM à la Communauté est réglée par la quatrième partie du traité CE ainsi que par la décision 91-482-CEE du Conseil, du 25 juillet 1991, relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté économique européenne (JO L 263, p. 1, ci-après 'décision PTOM), prise en application de l'article 136, second alinéa, du traité.

2 L'article 133, paragraphe 1, du traité prévoit que les importations originaires des PTOM bénéficient à leur entrée dans les États membres de l'élimination totale des droits de douane intervenue entre les États membres conformément aux dispositions du traité.

3 Dans sa version initiale, l'article 101, paragraphe 1, de la décision PTOM disposait:

'Les produits originaires des PTOM sont admis à l'importation dans la Communauté en exemption de droits de douane et de taxes d'effet équivalent.

4 L'article 102 de cette même décision prévoyait:

'La Communauté n'applique pas à l'importation des produits originaires des PTOM de restrictions quantitatives ni de mesures d'effet équivalent.

5 L'article 108, paragraphe 1, premier tiret, de la décision PTOM renvoie à l'annexe II de celle-ci (ci-après 'annexe II) pour la définition de la notion de produits originaires et des méthodes de coopération administrative qui s'y rapportent.

6 En vertu de l'article 1er de l'annexe II, un produit est considéré comme originaire des PTOM, de la Communauté ou des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ci-après 'États ACP) s'il y a été soit entièrement obtenu, soit suffisamment transformé.

7 L'article 6, paragraphe 2, de la même annexe précise que, lorsque des produits entièrement obtenus dans la Communauté ou dans les États ACP font l'objet d'ouvraisons ou de transformations dans les PTOM, ils sont considérés comme ayant été entièrement obtenus dans les PTOM. En vertu de cette règle, dite de 'cumul d'origine ACP/PTOM, le sucre originaire des États ACP qui avait subi une certaine ouvraison ou transformation dans les PTOM pouvait donc être librement importé dans la Communauté en exemption de droits de douane.

8 Selon l'article 240, paragraphe 1, de la décision PTOM, celle-ci est applicable pour une période de dix années à compter du 1er mars 1990. Or, le paragraphe 3, sous a) et sous b), du même article prévoit que, avant l'expiration de la première période de cinq ans, le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission, arrête, le cas échéant, outre les concours financiers de la Communauté pour la seconde période de cinq ans, les modifications éventuelles de la décision PTOM souhaitées par les autorités compétentes des PTOM ou éventuellement proposées par la Commission sur la base de sa propre expérience ou du lien avec des modifications en cours de négociation entre la Communauté et les États ACP.

9 Dans une communication au Conseil sur la révision à mi-parcours de l'association des PTOM à la Communauté européenne [document COM(94) 538 final, du 21 décembre 1994], la Commission a recommandé divers ajustements de cette association.

10 Le 16 février 1996, elle a présenté au Conseil une proposition de décision portant révision à mi-parcours de la décision PTOM (JO C 139, p. 1). Aux sixième et septième considérants de cette proposition, elle soutenait que le libre accès pour tout produit originaire des PTOM et le maintien de la règle de cumul d'origine ACP/PTOM avaient conduit à constater l'existence d'un risque de conflit entre les objectifs de deux politiques communautaires, à savoir le développement des PTOM et la politique agricole commune.

11 Soucieux de résoudre ce risque de conflit, le Conseil a adopté la décision 97-803-CE, du 24 novembre 1997, portant révision à mi-parcours de la décision 91-482-CEE relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté économique européenne (JO L 329, p. 50, ci-après 'décision 97-803).

12 Dans le septième considérant de cette décision, il a relevé:

'[...] il convient de prévenir de nouvelles perturbations au moyen de mesures propres à définir un cadre favorable à la régularité des échanges et en même temps compatibles avec la politique agricole commune.

13 A cette fin, la décision 97-803 a inséré dans la décision PTOM les articles 108 bis et 108 ter, qui admettent le cumul d'origine ACP/PTOM respectivement pour le riz et le sucre, à concurrence d'une quantité annuelle déterminée.

14 Ainsi, l'article 108 ter, paragraphes 1 et 2, de la décision PTOM dispose:

'1. [...] le cumul d'origine ACP/PTOM visé à l'article 6 de l'annexe II est admis pour une quantité annuelle de 3 000 tonnes de sucre.

2. Pour la mise en œuvre des règles de cumul ACP/PTOM visée au paragraphe 1, sont considérés comme suffisants pour conférer le caractère de produits originaires des PTOM le moulage de sucre en morceaux ou la coloration.

15 La décision 97-803 a également modifié les articles 101, paragraphe 1, et 102 de la décision PTOM, lesquels sont désormais libellés comme suit:

'Article 101

1. Les produits originaires des PTOM sont admis à l'importation dans la Communauté en exemption de droits à l'importation.

[...]

Article 102

Sans préjudice des articles 108 bis et 108 ter, la Communauté n'applique pas à l'importation des produits originaires des PTOM de restrictions quantitatives, ni de mesures d'effet équivalent.

16 Le 17 décembre 1997, la Commission a adopté le règlement (CE) n° 2553-97, relatif aux modalités de délivrance des certificats d'importation pour certains produits relevant des codes NC 1701, 1702, 1703 et 1704 cumulant l'origine ACP/PTOM (JO L 349, p. 26, ci-après 'règlement d'application). Ce règlement, entré en vigueur le 19 décembre 1997, n'a toutefois été applicable qu'à partir du 1er janvier 1998.

17 Un régime transitoire a été prévu par l'article 8, troisième alinéa, dudit règlement, qui dispose:

'[...] les certificats d'importation pour lesquels les demandes ont été présentées entre le 10 et le 31 décembre 1997 sont délivrés par les autorités des États membres après autorisation préalable des services de la Commission, selon l'ordre de leur présentation et dans la limite de la quantité maximale de 3 000 tonnes pour la Communauté.

Faits et procédure

18 Depuis le mois d'avril 1997, la requérante exploite une usine sucrière, située sur l'île d'Aruba, et exporte du sucre vers la Communauté.

19 Le sucre n'étant pas produit à Aruba, la requérante achète du sucre blanc dans des raffineries de sucre de canne établies dans les États ACP. Le sucre acheté est transporté à Aruba, où il fait l'objet d'opérations d'ouvraison et de transformation, à l'issue desquelles le produit est considéré comme fini. Ces opérations consistent à épurer le sucre, à le moudre (opération dite de 'milling: le sucre est porté au calibre souhaité en fonction des spécifications données par le client) et à l'emballer. L'usine de la requérante a, selon celle-ci, une capacité minimale de traitement de 34 000 tonnes de sucre par an.

20 Le 19 décembre 1997, la requérante a, en vertu de l'article 8, troisième alinéa, du règlement d'application, déposé auprès de l'autorité nationale compétente une demande visant à la délivrance de certificats d'importation pour 3 010 tonnes de sucre. Cette demande a été transmise à la Commission le 22 décembre 1997.

21 Par décision du 23 décembre 1997 (VI/51329, ci-après 'décision attaquée) adressée à l'autorité nationale compétente, la Commission a rejeté cette demande comme irrecevable, au motif qu'elle portait sur une quantité supérieure à la quantité maximale prévue par l'article 8, paragraphe 3, du règlement d'application."

5. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 10 mars 1998, la requérante a demandé l'annulation de la décision attaquée.

6. Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 10 avril 1998, elle a en outre introduit, en vertu de l'article 185 du traité CE, une demande de sursis à l'exécution de la décision attaquée, jusqu'à ce que le Tribunal ait statué sur le fond et, en vertu de l'article 186 du traité CE, une demande de mesures provisoires visant à faire interdire à la Commission d'appliquer, pendant la même période, les dispositions du règlement d'application et/ou de l'article 108 ter de la décision PTOM, dans la mesure où ces dispositions ont pour effet de limiter l'importation dans la Communauté de sucre originaire des PTOM.

L'ordonnance attaquée

7. Par l'ordonnance attaquée, le président du Tribunal a, après avoir examiné la condition relative à l'urgence, rejeté la demande en référé.

8. A titre liminaire, "Afin de déterminer les exigences de preuve en l'espèce" (point 63 de l'ordonnance attaquée), le président du Tribunal a rappelé l'objet de la décision 97-803 et le cadre général dans lequel elle s'inscrivait. Il a ensuite déclaré, au point 66, que "le Conseil, en arrêtant la décision 97-803, a fait usage de son pouvoir discrétionnaire quant au choix de la mesure la plus appropriée pour prévenir des perturbations sur le marché communautaire du sucre".

9. Selon le point 67 de l'ordonnance attaquée, "Afin d'éviter que le juge des référés, en octroyant un sursis à l'exécution de la décision attaquée mettant en œuvre les dispositions de l'article 108 ter de la décision PTOM, ne porte atteinte à ce pouvoir discrétionnaire, la demande de la requérante ne peut être accueillie que si l'urgence apparaît incontestable".

10. Partant de cette prémisse, le juge des référés a ensuite procédé à l'examen du préjudice prétendument subi par la requérante. Il a constaté que ce préjudice revêtait un caractère purement financier. Le juge des référés a donc considéré que le préjudice allégué pouvait en principe être chiffré et, le cas échéant, faire l'objet d'une réparation ultérieure, en sorte qu'il ne pouvait, sauf circonstances exceptionnelles, être regardé comme irréparable.

11. Il ressort de l'ordonnance attaquée qu'il a ensuite été examiné, pour apprécier si de telles circonstances exceptionnelles étaient présentes en l'espèce, si l'intéressé risquait d'être placé dans une situation susceptible soit de mettre en péril son existence même, soit de modifier de manière irréparable ses parts de marché.

12. En ce qui concerne la survie économique de l'entreprise, le juge des référés a estimé, au point 78 de l'ordonnance attaquée, que la requérante n'avait pas fourni suffisamment d'informations sur sa situation patrimoniale et sur sa rentabilité, ni par les pièces du dossier ni par les "nombreux documents produits à peine une semaine avant l'audience - et qui ont d'ailleurs été rejetés, étant donné que leur présentation tardive n'a pas été motivée". Le juge des référés en a conclu, au point 80, que la requérante n'avait pas rapporté la preuve, dont la charge lui incombe, qu'elle était menacée de faillite.

13. Le juge des référés a ajouté, aux points 81 à 83, que, en toute hypothèse, la dissolution forcée de la société et la réalisation forcée de ses actifs n'entraîneraient qu'un préjudice supplémentaire purement financier, puisque l'application de la décision attaquée avait déjà conduit à la cessation temporaire des activités et à la fermeture de l'entreprise, entraînant la mise au chômage technique des salariés, de telle sorte que même la menace de faillite, à supposer qu'elle soit établie, ne pouvait justifier le sursis à exécution demandé.

14. S'agissant du risque de modification irréparable des parts de marché, la requérante n'a fourni, selon le point 84 de l'ordonnance attaquée, aucune indication permettant de supposer qu'elle ne serait pas en mesure, à la suite d'un éventuel arrêt d'annulation de la décision attaquée, de retrouver des débouchés dans la Communauté et d'y récupérer sa part de marché.

15. Ayant conclu que la condition relative à l'urgence n'était pas remplie en l'espèce, le juge des référés a rejeté, au point 87, la demande sans examiner les autres moyens et arguments invoqués par la requérante pour justifier l'octroi des mesures sollicitées.

Arguments de la requérante et du gouvernement d'Aruba

16. Outre un certain nombre d'observations liminaires relatives aux différentes procédures au fond actuellement pendantes devant les juges communautaires et nationaux ainsi qu'un exposé sur le préjudice qu'elle subirait en raison de l'adoption de la décision attaquée, la requérante invoque onze moyens distincts à l'appui de son pourvoi, regroupés, d'une part, en quatre moyens de procédure et, d'autre part, en sept moyens de fond. Le gouvernement d'Aruba soutient les arguments avancés par la requérante, en particulier en ce qui concerne le deuxième moyen.

Les moyens de procédure

17. Selon la requérante, la procédure suivie en première instance est entachée de vices graves, qui violent le principe d'une bonne administration de la justice, le principe du procès équitable et le principe du contradictoire. Ces vices seraient également constitutifs d'une violation de l'article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et ils seraient tellement graves qu'ils justifieraient par eux-mêmes l'annulation de l'ordonnance attaquée.

18. Dans le cadre du premier moyen, la requérante fait valoir que les parties autorisées à intervenir dans la procédure n'ont pas été mises en mesure d'exposer par écrit les moyens sur lesquels elles fondaient leurs conclusions, alors que, dans les ordonnances faisant droit aux demandes d'intervention du Conseil, du Royaume d'Espagne et de la République française, le président du Tribunal avait indiqué qu'un délai leur serait accordé afin qu'ils exposent leurs moyens par écrit. Cette omission serait incompatible avec les intérêts de la requérante, puisque celle-ci était ainsi menacée de se voir prise au dépourvu par les arguments des parties intervenantes au cours de l'audience.

19. Selon le deuxième moyen, la requérante prétend que, contrairement à ce qui s'est passé avec les demandes d'intervention présentées à l'appui des conclusions de la Commission, il n'a pas été statué sur la demande d'intervention du gouvernement d'Aruba avant la procédure orale et le président n'a pas ordonné qu'un délai soit fixé pour la présentation de ses observations écrites. Il s'agirait d'une inégalité de traitement inacceptable, qui aurait tenu le gouvernement d'Aruba à l'écart de la procédure non seulement juridiquement, mais aussi pratiquement, puisqu'il n'aurait pas pu présenter de mémoire écrit ni expliquer sa position à l'audience, au cours de laquelle aucune question ne lui aurait été posée.

20. Le troisième moyen est fondé sur le caractère prétendument illégal de la manière dont le président du Tribunal a traité les preuves écrites produites ou offertes par la requérante. En effet, les documents que la requérante avait adressés au greffier du Tribunal par lettres des 15 et 16 juin 1998 auraient d'abord été retournés sans avoir été inscrits au registre. A la suite de ses protestations, le greffier aurait ensuite indiqué que ces documents pourraient être présentés au cours de l'audience et qu'il serait décidé à ce moment s'ils pouvaient encore, le cas échéant, être produits. Enfin, c'est dans l'ordonnance attaquée que le président du Tribunal aurait déclaré pour la première fois que les documents avaient été rejetés "étant donné que leur présentation tardive n'a pas été motivée" (point 78). Cette manière de procéder ne serait ni fondée sur la moindre règle (impérative) ni justifiée par des motifs liés au bon déroulement de la procédure. Il aurait donc été porté atteinte à la protection juridique à laquelle la requérante pouvait prétendre.

21. Dans le cadre du dernier moyen de procédure, la requérante prétend que le déroulement de la procédure orale a été inacceptable du point de vue de la protection juridique à laquelle elle peut prétendre dès lors que le principe du contradictoire et celui du procès équitable ont été enfreints. En effet, la procédure orale se serait limitée à des questions et réponses, les parties n'étant pas, en principe, autorisées à réagir à leurs réponses mutuelles ou en mesure de le faire. En particulier, aucune question n'aurait été posée à deux intervenants, les autres parties n'auraient pas pu s'écarter du cadre des questions posées, il n'aurait pas été statué immédiatement sur la production des documents évoqués par la requérante et les parties n'auraient pas pu présenter d'observations finales. En conséquence,la requérante n'aurait pas eu l'occasion de réagir oralement aux observations écrites de la Commission.

Les moyens de fond

22. Le cinquième moyen du pourvoi porte sur les points 63 à 66 de l'ordonnance attaquée, dans lesquels, "Afin de déterminer les exigences de preuve en l'espèce" (point 63), le juge des référés a examiné les objectifs poursuivis par la décision 97-803 et le pouvoir dont disposait le Conseil à cet égard. La requérante fait valoir, tout d'abord, que les exigences qu'il y a lieu de poser quant à la preuve de l'urgence ne sauraient varier selon les objectifs que poursuit l'acte querellé ou en fonction des conséquences de l'octroi d'une mesure provisoire. Le président du Tribunal aurait donc commis une erreur en mesurant à l'aune de l'intérêt de la Communauté et des objectifs qu'elle poursuit les exigences auxquelles est soumise la preuve de l'urgence dans le chef de la requérante.

23. La requérante conteste également l'exactitude des considérations des points 64 et 65 de l'ordonnance attaquée relatives au marché du sucre et aux importations de sucre PTOM dans la Communauté. A cet effet, elle expose en détail les raisons pour lesquelles elle considère qu'il est erroné d'affirmer que les exportations de sucre PTOM provoquent une augmentation des dépenses en termes de restitutions à l'exportation, ont des conséquences sur les obligations qui résultent pour la Communauté de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) ou de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et entraînent des perturbations sur le marché communautaire du sucre.

24. Quant au pouvoir discrétionnaire du Conseil évoqué au point 66 de l'ordonnance attaquée, la requérante considère que ce pouvoir, d'une part, est indépendant des exigences de preuve auxquelles elle devrait satisfaire pour démontrer le risque de dommage irréparable et, d'autre part, n'est pas illimité et doit en particulier satisfaire au principe de proportionnalité. Sur ce dernier aspect, le Conseil ne serait pas habilité à adopter des restrictions structurelles aux importations de sucre PTOM sans violer le principe de proportionnalité.

25. Selon le sixième moyen, c'est à tort que, au point 67 de l'ordonnance attaquée, le juge des référés a jugé que, en raison de la nature discrétionnaire du pouvoir détenu par le Conseil, l'urgence des mesures sollicitées doit apparaître de manière incontestable. Selon la requérante, la référence faite à cet égard à l'ordonnance du Tribunal du 21 mars 1997, Antonissen/Conseil et Commission (T-179-96 R, Rec. p. II-425), est dénuée de fondement, car une urgence "incontestable" y avait été exigée uniquement parce qu'il s'agissait d'obtenir l'octroi d'une avance sur la réparation d'un dommage. Selon la requérante, en l'entourant d'exigences trop strictes, la protection juridique que garantit la procédure en référé risque d'être vidée de son contenu.

26. Par son septième moyen, la requérante fait valoir que c'est à tort et de manière juridiquement incompréhensible que le juge des référés a qualifié le préjudice allégué de préjudice financier dont la valeur peut, en principe, être chiffrée et qui, le cas échéant, peut être réparé ultérieurement et qu'il a déclaré qu'un préjudice purement financier ne peut pas être considéré comme irréparable. Selon la requérante, il s'agit d'une qualification juridique incorrecte des faits. En outre, la jurisprudence qui se fonde sur la possibilité d'une réparation du dommage en vertu de l'article 215 du traité CE méconnaîtrait la différence qui existe entre, d'une part, les critères de la responsabilité financière de la Communauté et, d'autre part, les critères d'annulation d'un acte communautaire contesté. En effet, une violation du droit communautaire qui entraîne l'annulation d'un acte ou la déclaration de son illégalité ne constituerait pas toujours une violation qualifiée du droit communautaire donnant droit à la réparation que permet l'article 215, paragraphe 2, du traité.

27. D'après le huitième moyen, c'est à tort que, au point 76 de l'ordonnance attaquée, il est indiqué que la requérante se serait bornée à affirmer que l'application de la décision attaquée ainsi que celle de la décision 97-803 et celle du règlement d'application avaient provoqué la cessation immédiate de ses activités et la fermeture totale de son entreprise.

28. La requérante considère ensuite, par son neuvième moyen, que c'est à tort qu'il est déclaré, aux points 78 et 80 de l'ordonnance attaquée, sur la base d'une appréciation d'éléments de preuve dont la production n'a pas été acceptée, que la requérante n'avait pas démontré qu'elle était menacée de faillite. Renvoyant aux moyens de procédure précédemment soulevés, la requérante expose que l'appréciation des éléments de preuve a été opérée d'une façon juridiquement incorrecte. En outre, selon elle, dans un cas comme le sien, il peut paraître foncièrement superflu de produire des données économiques ou comptables, puisqu'il s'agit d'une entreprise que les actes litigieux ont contraint à interrompre totalement ses activités, ce dont les parties conviendraient.

29. Selon le dixième moyen, le point 79 de l'ordonnance attaquée serait incorrect en ce qu'il y est fait grief à la requérante de n'avoir pas fourni des informations relatives à la rentabilité de son entreprise afin d'établir le volume annuel d'exportation de sucre qui serait nécessaire à sa survie. Ce serait également à tort qu'il a été refusé de faire droit à la demande de 34 000 tonnes au motif que ce volume était fondé sur une pure affirmation dont la réalité n'était pas établie. A cet égard, la requérante émet également certaines considérations annexes pour contester le souhait exprimé en première instance par le Conseil et la Commission que la mesure provisoire éventuellement accordée soit conditionnée à l'obligation pour la requérante de constituer une garantie égale à 50 % des droits de douane et du prélèvement agricole.

30. Enfin, par son onzième et dernier moyen, la requérante expose que c'est à tort que, aux points 81 à 83 de l'ordonnance attaquée, il est jugé, en substance, que la faillite dont est victime une entreprise qui, dans l'attente d'une ordonnance de référé, a dû interrompre ses activités industrielles, ses ventes et ses exportations à la suite d'un acte communautaire n'est qu'un préjudice de nature purement financière, qui peut être ultérieurement réparé. La requérante renvoie en particulier à l'attitude différente qui aurait été suivie dans l'ordonnance de la Cour du 10 juin 1988, Sofrimport/Commission (152-88 R, Rec. p. 2931).

Arguments des autres parties à la procédure

Sur les moyens de procédure

31. A titre liminaire, le Conseil déclare, sans contester la référence à l'article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que, si toute personne a droit à un procès équitable, cela ne signifie cependant pas que cet article prive les instances judiciaires communautaires de l'autonomie dont elles disposent en matière de procédure.

32. S'agissant du premier moyen, le Conseil expose qu'il existe de nombreux précédents en matière de référés dans lesquels les autres parties n'ont pas eu l'occasion de présenter des observations écrites, ce qui s'explique par l'urgence caractérisant cette procédure. La Commission rappelle que les parties ont été invitées à l'audience et ont donc eu la possibilité de formuler des observations orales. Selon elle, s'il n'a pas été donné suite aux ordonnances autorisant les interventions, en ce qu'elles annonçaient la fixation d'un délai pour la présentation du mémoire en intervention, il ne s'agit pas, compte tenu des circonstances, d'une irrégularité de procédure. Le Royaume d'Espagne ajoute que son intervention avait pour objet de défendre la validité de la décision 97-803 et présentait donc peu d'importance dans le cadre de l'examen de l'urgence.

33. En ce qui concerne la demande d'intervention du gouvernement d'Aruba, qui est au centre du deuxième moyen, le Conseil et le Royaume d'Espagne font valoir que le traitement différent dont ce gouvernement aurait fait l'objet découle du fait qu'il ne s'agissait pas d'un intervenant visé à l'article 37, premier alinéa, du statut CE de la Cour de justice. Ils rappellent également que cette partie a assisté à l'audience, au cours de laquelle elle a été traitée de la même façon que les autres parties. La Commission souligne enfin que l'article 116, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal ne fixe pas de délai que le président devrait respecter pour statuer à l'égard d'une demande d'intervention.

34. Quant au troisième moyen, qui concerne le traitement réservé aux preuves écrites présentées par la requérante, le Conseil fait valoir qu'il appartient au président d'apprécier la valeur à accorder aux preuves qui lui sont soumises et que c'est à lui qu'il revient de déterminer celles sur lesquelles se fonde son ordonnance. Une limitation trop stricte de ce pouvoir discrétionnaire risquerait de porter atteinte à l'autonomie dont dispose le juge des référés en matière de procédure. Selon la Commission, la présentation tardive des documents n'avait effectivement pas été motivée et le renvoi des preuves documentaires relevait du pouvoir discrétionnaire du président. Le Royaume d'Espagne attire l'attention sur le point 78 de l'ordonnance attaquée, qui démontre que les documents litigieux ont en fait été pris en considération.

35. Le dernier moyen de procédure porte sur le déroulement de l'audience. Le Conseil relève que la procédure orale n'est pas obligatoire dans une procédure en référé et que le président a donc pu considérer que, sur la base des pièces communiquées et des réponses fournies aux questions posées durant l'audience, il disposait de tous les éléments nécessaires pour statuer. D'après la Commission, dans cette affaire, l'audience ne saurait être qualifiée de procédure orale au sens de l'article 18 du statut CE de la Cour de justice, mais devrait être considérée comme une mesure d'instruction pour laquelle le président dispose d'un pouvoir discrétionnaire.

Sur les moyens de fond

36. S'agissant des moyens de fond du pourvoi, le Royaume d'Espagne concentre l'essentiel de ses observations sur la question de la validité de la décision 97-803.

37. Pour leur part, le Conseil et la Commission abordent d'abord conjointement les cinquième et sixième moyens du pourvoi. Selon le Conseil, l'exigence d'une urgence incontestable lorsque l'acte litigieux est adopté dans le cadre d'un pouvoir discrétionnaire est consacrée par une jurisprudence constante. Il se réfère à cet égard à l'ordonnance du Tribunal du 2 mars 1998, Antilles néerlandaises/Conseil (T-310-97 R, Rec. p. II-455, point 65), ainsi qu'à l'ordonnance de la Cour du 21 mars 1997, Pays-Bas/Conseil (C-110-97 R, Rec. p. I-1795, points 32 et 33), également citée par la Commission. Cette dernière fait valoir que le lien effectué entre l'existence d'un pouvoir discrétionnaire et le degré d'urgence ne peut pas être considéré comme erroné en droit. Il serait peut-être plus conforme de considérer que ce raisonnement relève de la mise en balance des intérêts, mais en définitive cela reviendrait au même et signifierait que, pour des actes fondés sur un pouvoir discrétionnaire, le juge devrait conserver une certaine réserve.

38. Selon le Conseil, le septième moyen, qui concerne le caractère purement financier du préjudice, est manifestement irrecevable, car il concerne l'appréciation des faits par le président du Tribunal.

39. En ce qui concerne le huitième moyen, le Conseil et la Commission s'accordent pour affirmer que la constatation faite au point 76 de l'ordonnance attaquée reproduit de manière exacte la substance de la position de la requérante.

40. Quant au neuvième moyen, qui, selon la Commission, constituerait l'essentiel de la procédure, il serait irrecevable, au même titre que les dixième et onzièmemoyens, parce qu'ils contestent des motifs surabondants de l'ordonnance attaquée ou portent sur des appréciations de fait.

41. Dès lors que les observations écrites des parties contiennent toutes les informations nécessaires pour qu'il soit statué sur le pourvoi, il n'y a pas lieu de les entendre en leurs explications orales.

Appréciation

42. Il convient d'examiner conjointement les cinquième, sixième, neuvième et onzième moyens, lesquels, dans leur ensemble, mettent en cause les critères retenus dans l'ordonnance attaquée en vue de l'appréciation de la condition de l'urgence.

43. A titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le sursis à l'exécution et les mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s'il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu'ils sont urgents en ce sens qu'il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts du requérant, qu'ils soient édictés et sortent leurs effets dès avant la décision au principal. Ils doivent, en outre, être provisoires en ce sens qu'ils ne préjugent pas les points de droit ou de fait en litige ni ne neutralisent par avance les conséquences de la décision à rendre ultérieurement au principal [ordonnance du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C-149-95 P(R), Rec. p. I-2165, point 22].

44. Dans le cadre de cet examen d'ensemble, le juge des référés dispose d'un large pouvoir d'appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l'espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l'ordre de cet examen, dès lors qu'aucune règle de droit communautaire ne lui impose un schéma d'analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement (ordonnance Commission/Atlantic Container Line e.a., précitée, point 23).

45. En l'espèce, seule la condition relative à l'urgence a été examinée et les arguments des parties relatifs au fumus boni juris de la demande ne sont d'ailleurs pas mentionnés dans l'ordonnance. Ayant constaté, au point 85 de l'ordonnance attaquée, que la requérante n'avait pas établi qu'elle risquait de subir un préjudice grave et irréparable et, au point 86, que, dès lors, la condition de l'urgence n'était pas remplie, le juge des référés a, au point 87, rejeté la demande en référé sans examiner les autres moyens et arguments invoqués par la requérante pour justifier l'octroi du sursis à exécution sollicité.

46. Afin de déterminer, en l'espèce, les exigences de preuve relatives à l'urgence, le juge des référés, après avoir examiné, aux points 64 et 65, les objectifs de la décision 97-803, a souligné, au point 66, que "le Conseil, en arrêtant la décision 97-803, a fait usage de son pouvoir discrétionnaire quant au choix de la mesure la plus appropriée pour prévenir des perturbations sur le marché communautaire du sucre". Selon le point 67 de l'ordonnance attaquée, il s'ensuit qu'il ne peut être fait droit à la demande de la partie requérante que si l'urgence des mesures sollicitées apparaît incontestable.

47. A cet égard, il est constant que, les conditions liées à l'octroi d'un sursis à l'exécution ou d'une autre mesure provisoire étant cumulatives, la demande pouvait à bon droit être rejetée au seul motif que la condition de l'urgence faisait défaut.

48. Cependant, dans la mesure où elle établit, dans le cadre du seul examen de l'urgence des mesures sollicitées, un lien entre l'existence d'un pouvoir discrétionnaire dans le chef du Conseil et le degré d'urgence à prouver comme condition pour l'octroi d'une mesure provisoire, l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de droit.

49. Certes, l'existence d'un pouvoir discrétionnaire de la part du Conseil peut être un élément pertinent pour l'analyse du degré d'urgence dans le cadre d'une balance des intérêts en présence. De même, l'exigence d'une urgence manifeste - cumulée avec un fumus boni juris particulièrement solide - peut se justifier par la nature de la mesure provisoire sollicitée ou les effets qu'elle est susceptible de produire (voir, en ce sens, ordonnance de 29 janvier 1997, Antonissen/Conseil et Commission, C-393-96 P(R), Rec. p. I-441, point 41, qui se réfère à un type de mesure qui est plus que d'autres susceptible de produire, de fait, des effets irréversibles, et ordonnance Pays-Bas/Conseil, précitée, points 28 et 33, qui envisage la situation dans laquelle une décision du juge des référés prise dans l'urgence aurait en pratique des effets quasiment définitifs).

50. Toutefois, la seule existence d'un pouvoir discrétionnaire dans le chef de l'auteur de l'acte litigieux, en l'absence de toute considération sur le fumus boni juris et de toute balance des intérêts en présence, n'est pas de nature à déterminer la qualification des exigences relatives à la condition de l'urgence.

51. L'approche suivie dans l'ordonnance attaquée reviendrait à exclure ou, en tout cas, à réduire considérablement l'effectivité de la protection juridictionnelle provisoire dès lors qu'il s'agirait de mettre en cause un acte adopté dans l'exercice d'un large pouvoir d'appréciation. Elle risquerait de conduire en particulier à rejeter des mesures provisoires qui pourraient apparaître nécessaires pour préserver l'efficacité de l'arrêt au fond dans des hypothèses où le fumus boni juris serait particulièrement fort et où la balance des intérêts pencherait en faveur de la partie qui sollicite la mesure, et ce au seul motif que l'urgence ne serait pas incontestable.

52. C'est à la lumière de ces constatations qu'il convient d'examiner les objections du Conseil et de la Commission à la recevabilité des neuvième et onzième moyens du pourvoi.

53. A cet égard, il est exact, ainsi que l'ont rappelé le Conseil et la Commission, qu'un pourvoi doit être limité aux seules questions de droit, à l'exclusion de toute remise en cause de l'appréciation des faits à laquelle le juge des référés s'est livré (ordonnance Commission/Atlantic Container Line e.a., précitée, point 18). En outre, la Cour n'est, en principe, pas compétente pour examiner les preuves que le Tribunal a retenues à l'appui de sa constatation ou de son appréciation des faits [ordonnance du 25 juin 1998, Antilles néerlandaises/Conseil, C-159-98 P(R), Rec. p. I-4147, point 68].

54. Toutefois, en l'espèce, l'erreur de droit dont l'ordonnance attaquée est entachée, dans la mesure où elle entraîne l'exigence d'une urgence incontestable, est de nature à affecter la conclusion à laquelle le juge des référés est parvenu dans son appréciation du caractère grave et irréparable du dommage invoqué par la requérante.

55. A cet égard, la motivation de l'ordonnance attaquée confirme que cette appréciation a été déterminée par l'exigence de la preuve d'une urgence incontestable.

56. Ainsi, il ressort du point 78 de l'ordonnance attaquée (voir point 12 de la présente ordonnance) que la constatation du défaut d'urgence est partiellement fondée sur des conclusions tirées de divers documents présentés par la requérante, alors que ces documents n'ont pas été admis comme éléments de preuve et n'ont donc pu faire l'objet que d'un examen nécessairement très sommaire.

57. Enfin, il semble également ressortir de l'ordonnance attaquée que c'est en raison du critère de l'urgence incontestable qu'il a été fait une application particulièrement stricte de la jurisprudence en ce qui concerne le caractère grave et irréparable du dommage que risque de subir une entreprise dans un cas tel que celui de l'espèce. Il en va ainsi, en particulier, du raisonnement tenu aux points 81 à 83 de l'ordonnance attaquée, dont il découle, en substance, que la requérante ne pouvait plus obtenir le sursis à l'exécution de la décision attaquée au seul motif que cette dernière avait déjà conduit à la cessation temporaire de ses activités et à la fermeture de son entreprise, entraînant la mise au chômage technique des salariés.

58. Il convient dès lors de faire droit au pourvoi et d'annuler l'ordonnance attaquée.

59. En vertu de l'article 54, premier alinéa, du statut CE de la Cour de justice, lorsque le pourvoi est fondé, la Cour annule la décision du Tribunal. Elle peut alors soit statuer elle-même directement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d'être jugé, soit renvoyer l'affaire devant le Tribunal pour qu'il statue.

60. La présente affaire n'est pas en état d'être jugée. Elle doit donc être renvoyée devant le Tribunal pour qu'il statue.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA COUR

Ordonne:

1) L'ordonnance du président du Tribunal de première instance du 14 août 1998, Emesa Sugar/Commission (T-44-98 R), est annulée.

2) L'affaire est renvoyée devant le Tribunal de première instance.

3) Les dépens sont réservés.