CA Limoges, 1re ch. civ., 28 juin 1994, n° 269-94
LIMOGES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Lombard (ès qual.)
Défendeur :
Sechuitti
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Foulquie
Conseillers :
MM. Leflaive, Thierry
Avocat :
Me Nougues
LA COUR,
Daniel Sechuitti qui exerçait la profession d'électricien, a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire en vertu d'un jugement du 8 décembre 1992 puis dune liquidation judiciaire en vertu d'un jugement du 4 mai 1993 du tribunal de grande instance de Guéret, statuant en matière commerciale.
Son épouse née Gisèle Perruchet a présenté le 7 janvier 1994 au tribunal d'instance de Guéret une requête tendant à voir surseoir à la vente d'un immeuble appartenant aux époux et ouvrir une procédure de redressement judiciaire civil.
Le liquidateur de Sechuitti a conclu au débouté de la demande.
Par jugement du 4 février 1994 le tribunal d'instance de Guéret, agissant en qualité de juge de l'exécution, a ouvert une procédure de redressement judiciaire civil au profit de Gisèle Perruchet, et suspendu pour une durée de deux mois renouvelable une fois les voies d'exécution et notamment la procédure de saisie immobilière diligentée par le liquidateur sur l'immeuble situé à Saint Sulpice Le Gueretois au lieudit la Métaierie et cadastré sous les numéros 147 et 149 de la section F.
Maître Lombard, le liquidateur, a relevé appel de ce jugement le 8 février 1994.
Par conclusions déposées à l'audience il demande à la cour de débouter Gisèle Perruchet de sa demande, de dire que par application de la loi du 25 janvier 1985 la totalité du patrimoine des époux Sechuitti-Perruchet doit être réalisée et que Gisèle Perruchet doit rendre compte de l'intégralité du passif sur l'intégralité du patrimoine commun et de condamner Gisèle Perruchet à lui payer une indemnité de 3 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Il expose l'argumentation suivante au soutien de ses prétentions.
L'ordonnance du juge commissaire autorisant la vente n'a fait l'objet d'aucun recours et a été publiée au bureau des hypothèques de Guéret le 5 novembre 1993. La procédure de la vente est régulière.
La demande de Gisèle Perruchet est irrecevable car elle n'est pas débitrice à l'égard de la liquidation judiciaire et aucune poursuite n'a été introduite à son encontre.
Contrairement à ce qu'a dit le tribunal le redressement judiciaire civil de Gisèle Perruchet paralyse totalement la liquidation judiciaire du mari puisque les époux sont mariés sous le régime de la communauté et que la totalité du patrimoine est commun. Le jugement du 4 février 1994 prive de tout effet l'ordonnance du juge commissaire du 29 septembre 1993. On ne peut pas juxtaposer sur les mêmes dettes des procédures issues des lois du 25 janvier 1985 du 31 décembre 1989 lorsque la procédure de la loi du 31 décembre 1989 a pour effet de paralyser celle issue de la loi du 25 janvier 1985.
Contrairement à ce qu'a dit le tribunal le prix de vente de l'immeuble ne sera pas absorbé par le créancier hypothécaire, qui est personnel. En effet la recette divisionnaire des impôts a inscrit une hypothèque le 29 juin 1992, et les créances salariales nées après le redressement judiciaire bénéficient d'un privilège général et doivent être payées sur le prix de vente de l'immeuble.
Le jugement du 4 février 1994 porte atteinte à l'autorité de la chose jugée de l'ordonnance du 29 septembre 1993 et ne peut pas imposer à une liquidation judiciaire des modalités de réalisations du patrimoine, contrairement à l'article 155 de la loi du 25 janvier 1985.
Gisèle Perruchet n'a pas comparu.
Sur quoi. la cour
Attendu que la vente de l'immeuble suspendue par le jugement dont appel a été ordonnée le 29 septembre 1993 par le juge commissaire de la liquidation judiciaire de Daniel Sechuitti suivant la procédure prévue par l'article 154 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985
Que Sechuitti a été régulièrement convoqué devant le juge-commissaire, a formulé ses observations et n'a pas contesté son ordonnance, laquelle a été mise à exécution
Attendu qu'aucune disposition des articles L. 332-1 et suivants du code de la consommation n'autorise le juge de l'exécution, saisi en application de l'article L. 332-3 dudit code, à suspendre l'exécution d'une décision du juge-commissaire relative à la réalisation de l'actif d'un débiteur relevant de la loi n° 85-98 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises
Que les circonstances que le conjoint du débiteur n'est pas commerçant et peut bénéficier de la législation sur le surendettement des particuliers et que l'immeuble en cause n'est pas à usage professionnel ne permettent pas pour autant au juge de l'exécution d'entraver le déroulement d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire
Qu'il y a lieu en conséquence de dire n'y avoir lieu à suspendre la vente de l'immeuble
Attendu, que Gisèle Perruchet a sollicité l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire civil
Que l'ouverture d'une telle procédure n'implique par elle même aucune appréciation de la bonne foi du débiteur ni de sa situation de surendettement (en ce sens avis de la cour de cassation du il mars 1984, BICC 15 avril 1994 page 3) et il peut donc être fait droit à la demande
Attendu qu'il y a lieu de condamner Gisèle Perruchet aux dépens
Qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de l'appelant ses frais irrépétibles
Par ces motifs, LA COUR ; Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire, Confirme le jugement du tribunal d'instance de Guéret agissant en qualité de juge de l'exécution en date du 4 février 1994 en toutes ses dispositions à l'exception de celle suspendant la procédure de saisie immobilière diligentée par Maître Lombard concernant l'immeuble situé à Saint Sulpice le Guérétois au lieu dit la Métairie cadastré sous les numéros 147 et 149 de la section F ; Statuant à nouveau ; Dit n'y avoir lieu à suspendre la procédure diligentée suivant les formes de la procédure en matière de saisie immobilière par Maître Lombard ès qualités de liquidateur de Daniel Sechuitti en vue de la vente de l'immeuble situé à Saint Sulpice le Guérétois (Creuse) au lieudit la Métairie et cadastré sous les numéros 147 et 149 de la section F ; Déclare Maître Lombard mal fondé en ses prétentions contraires ou plus amples et l'en déboute ; Condamne Gisèle Perruchet épouse Sechuitti aux dépens d'appel.