CA Riom, ch. civ. et com., 2 février 1994, n° 393-93
RIOM
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Crédit Immobilier de l'Allier (Sté)
Défendeur :
Collège Joseph Hennequin ; BNP (SA) ; Cofidis (Sté) ; Crédit Agricole Centre France (Sté) ; France Télécom (Sté) ; Obadia ; Parigot ; Quillet Diffusion (Sté) ; Savard (Epoux) ; Tixier (ès qual.) ; Trésorerie Principale de Vichy
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bardel
Conseillers :
MM. Despierres, Legras
Avocats :
Mes Blanc, Ribal, SCP Chassaing-Collet-de Rocquigny
Expose du litige
Par jugement du 18 janvier 1993 le Juge d'Instance de Gannat une procédure de redressement judiciaire civile au profit des époux Savard et organisé un plan d'apurement des dettes auquel la cour se réfère expressément et dont les modalités sont tenues pour reproduites.
La société Crédit Immobilier de l'Allier a relevé appel de cette décision. Elle demande à la Cour de :
- constater que le reliquat de sa créance s'élève à 340 347,68 F,
- dire que si ce reliquat est réduit, ce sera dans des proportions raisonnables et équitables,
- dire qu'un plan d'apurement de ce reliquat sera élaboré,
- dire qu'il sera tenu compte de la chronologie et de la hiérarchie des créances.
Elle reproche au premier juge de ne pas avoir motivé sa décision. Selon elle rien ne justifiait la réduction de la créancier à IF.
L'appelante estime qu'il doit être tenu compte de la hiérarchie et de la chronologie des créances. Elle déclare avoir agi avec sérieux et conformément aux usages de la profession. Elle considère qu'il serait inéquitable qu'elle subisse la sanction financière la plus lourde.
Le Crédit Agricole, M. Parigot et Me Tixier concluent à la confirmation du jugement déféré.
Les époux Savard concluent aux mêmes fins. Ils répondent :
- que la décision du Tribunal d'Instance est parfaitement motivée,
- que le Crédit Immobilier a fait souscrire un prêt dont le solde état de 490 347 F alors que la maison financée par l'emprunt s'est vendue 150 000 F ; qu'il n'a pas accepté le plan proposé par la Commission ;
- que la réduction est conforme à leurs capacités financières.
Les autres créanciers régulièrement convoqués par LRAR reçues par les destinataires, n'ont pas comparu.
Motifs de la décision
Attendu que le premier juge a exactement analysé la situation des époux Savard ; qu'il a considéré à juste titre que ces dernier, dont la mauvaise foi n'est pas alléguée, se trouvent en situation de surendettement ;
Attendu que les créances ont par ailleurs parfaitement été évaluées ; que la cour ne peut que reprendre les observations développées de ce chef ;
Attendu que la créance du Crédit Immobilier se décompose comme suit :
Dû au jour de la vente : 490 347,68 F
Montant de l'adjudication du 18 novembre 1992 : 150 000,00 F
Solde : 340 347,68 F
Attendu que la somme de 490 347,68 F comprend :
- pour 46 510,47 F les mensualités échues et impayées sur le prêt PAP,
- pour 395 176,26 F le capital restant dû,
- pour 7 437,44 F les mensualités échues et impayées sur le prêt complémentaire,
- pour 32 686,29 F le capital restant dû sur ce prêt ;
Que le solde soit 8 537,22 correspondant à des intérêts de retard et à l'indemnité contractuelle au jour de l'adjudication ;
Attendu que le montant des prêts s'élevaient à 424 920 F + 40 000 F = 464 920 F.
Attendu qu'en cas de vente forcée du logement principal du débiteur grevé d'une inscription bénéficiant à un établissement de crédit ayant fourni les sommes nécessaires à son acquisition, le Juge de l'Exécution peut, par décision spéciale et motivée, réduire le montant de la fraction des prêts immobiliers restant due aux établissements de crédit après la vente ;
Attendu que M. Savard, dont l'épouse ne travaille pas, perçoit un salaire mensuel qui s'élevait à 6 300 F par moi en novembre 1992 ; que le couple a quatre enfants à charge nés en 1979-1981-1983-1988 et perçoit à ce titre des allocations, soit 3 429 F par mois ;
Attendu qu'il n'est nullement justifié que la modicité du prix d'adjudication de l'immeuble serait imputable aux époux Savard ;
Attendu par ailleurs que le juge du redressement judiciaire civil n'est tenu d'assurer une égalité de traitement lorsqu'il détermine pour chacune des dettes les mesures qu'il convient d'appliquer ; qu'il ne lui incombe pas de statuer en fonction d'une hiérarchie chronologique des créances ;
Attendu qu'en l'espèce que les ressources ainsi analysées pour un foyer de 6 personnes, n'ont pas permis aux débiteurs d'honorer leurs engagements en raisin de leur surendettement ; qu'il apparaît que l'immeuble acquis à l'aide des prêts ne remplissait pas les conditions d'une revente à prix coûtant en cas de nécessité pour le prêteur de réaliser son gage dans une conjoncture économique difficile ; que l'organisme doit assurer sa part de risque ; que la réduction de sa créance à IF n'est cependant pas justifiée alors surtout qu'aucune faute ne peut lui être reprochée, les contrats de prêt pour un total de 464,90 F en capital ayant été consentis avec sérieux et conformément aux usages de la profession ;
Attendu que la réduction de la fraction du prêt à la somme de 100 000 F payable en 60 mensualités, somme indiquée au dispositif du présent arrêt, est seule compatible avec les ressources et charges du débiteurs, sans qu'il y ait lieu à application d'un intérêt, ces mesures étant l'unique moyen de limiter la charge de remboursement aux capacités financières des débiteurs surendettés ;
Attendu pour le surplus, que les mesures édictées par le premier juges seront confirmées étant observé :
- que deux acomptes de 100 F ont été versés à Me Tixier,
- que la créance du Collège Hennequin a été réglée,
- que le Trésorier Principal de Vichy a écrit que la dette des époux Savard était soldée.
Par ces motifs ; LA COUR, Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire ; Confirme le jugement entrepris en touts ses dispositions à l'exception de celle concernant le Crédit Immobilier de l'Allier ; Modifiant de seul chef : Réduit à la somme de cent mille francs (100 000 F) la créance du Crédit Immobilier de l'Allier ; Dit que son remboursement s'effectuera en soixante mensualités consécutifs dés notifications du présent arrêt, dans les conditions suivantes : - dans un premier temps dix mensualités de quatre cents francs (400 F), - ensuite 49 mensualités de cinq cents francs chacune, - enfin un versement (au soixantième mois) de soixante et onze mille cinq cents francs (71 500 F) ; Dit n'ay avoir lieu à intérêts sur cette créance ; Laisse les dépens à la charge des époux Savard.