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Décisions

CA Rouen, 1re et 2e ch. civ. réunies, 11 juin 1996, n° 9402273

ROUEN

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Herbelin

Défendeur :

Cofibail (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Falcine

Conseillers :

Mme Valantin, MM. Charbonnier, Grandpierre, Dragne

Avoués :

SCP Colin-Voinchet-Radiguet, Me Reybel

Avocats :

Mes Mor, Badina.

C. cass, du 8 mars 1994

8 mars 1994

Faits, procédure et moyens des parties

Selon une offre acceptée en date du 12 mars 1987 la société Cofibail a donné en location avec option d'achat à la société Ambulances Montbrison un véhicule automobile.

Monsieur Jean Raymond Herbelin est intervenu dans l'acte pour se porter caution solidaire de la société Ambulances Montbrison à hauteur de 101 356 F plus frais de location.

La société Ambulances Montbrison a été déclarée en liquidation judiciaire le 12 janvier 1988.

Le 10 janvier 1989 la société Cofibail a mis en demeure Monsieur Herbelin de lui payer la somme de 42 770,40 F, montant de sa créance.

Par jugement du 5 décembre 1990 le tribunal de grande instance de Nanterre a condamné Monsieur Herbelin à payer à la société Cofibail la somme de 42 770,40 F et débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Par arrêt du 11 décembre 1991 la Cour d'appel de Versailles a confirmé ce jugement.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 8 mars 1994, a cassé cette décision mais seulement en ce qu'elle a condamné Monsieur Herbelin à payer les loyers non encore échus à la date de son prononcé.

Monsieur Herbelin demande à la Cour d'appel de Rouen, désignée comme cour de renvoi de :

- dire que la déchéance du terme résultant de la liquidation judiciaire du débiteur principal est inopposable à la caution à défaut de clause contraire et constater qu'une seule échéance était due à la date du prononcé du jugement de liquidation judiciaire du 12 janvier 1988 ;

- dire et juger que la société Cofibail se doit d'établir qu'elle a déclaré régulièrement sa créance dans le délai de 3 mois à compter de la publication du jugement de liquidation judiciaire du 12 janvier 1988 au BODACC ;

- dire qu'à défaut, la dette principale est éteinte et qu'en vertu des articles 2013 et 2036 du Code civil et 53 de la loi du 25 avril 1988, la caution est eu droit d'opposer l'extinction de la créance principale ;

- à titre subsidiaire ;

- voir constater que la société Cofibail n'apporte pas la preuve de l'exactitude du montant de sa créance et l'en débouter ;

- réduire, en tout état de cause, le montant de l'indemnité de résiliation à la somme de 1 franc en application de l'article 1152 du Code civil ;

- dire également que la société Cofibail sera déchue du droit à intérêts en vertu de l'article 48 de la loi du 1er mars 1984,

- accorder, à tout le moins, à Monsieur Herbelin les plus larges délais de paiement pour s'acquitter de sa dette en vertu de l'article 1244-1 du Code civil ,

- dire que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital puis ensuite sur les éventuels intérêts ;

- réduire le montant des intérêts au taux légal ;

- condamner la société Cofibail à régler la somme de 20 000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

Monsieur Herbelin invoque les moyens nouveaux suivants :

- la société Cofibail ne justifie pas avoir déclaré sa créance puisque le document versé aux débats émane de la société Cofica ;

- le montant de la dette n'est pas suffisamment déterminé et aucun décompte ne permet de vérifier les calculs.

La société Cofibail demande à la cour de condamner Monsieur Herbelin à lui payer la somme principale de 78 879,60 F avec intérêts de droit, outre 4 000 F à titre de dommages-intérêts et 4 000 F par application de l'article 700 du NCPC.

Elle expose que, par l'effet de la cassation partielle Monsieur Herbelin ne peut plus remettre en cause son obligation à paiement des loyers échus avant le 11 décembre 1991 et qu'en tout état de cause toutes les mensualités sont aujourd'hui exigibles puisque le bail expirait le 20 avril 1992.

Sur la validité de la déclaration de créance, elle soutient que celle-ci étant unique et sa validité étant acquise pour les loyers échus antérieurement à l'arrêt, elle ne peut être critiqué pour le surplus.

Elle fait valoir également que l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 est inapplicable au contrat de location-vente.

Motifs de l'arrêt

Attendu que par l'effet du caractère partiel de la cassation intervenue, il est définitivement jugé que Monsieur Herbelin est tenu au paiement des loyers échus à la date du 11 décembre 1991 ;

Que la cour de renvoi n'est saisie que du sort des loyers non échus à cette date ;

Attendu que le contrat de location-vente est arrivé à son terme le 20 avril 1992 ;

Que dès lors il n'y a plus lieu de s'interroger sur l'opposabilité de la déchéance du terme à la caution ;

Que de même la Cour d'appel de Versailles a écarté le moyen tendant à voir dire que la créance était éteinte par application de l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Que cette disposition de l'arrêt n'a pas été cassée ;

Que la société Cofibail ayant remis au représentant des créanciers une déclaration de créance unique visant les loyers échus et les loyers non échus, Monsieur Herbelin ne peut plus discuter cette déclaration de créance définitivement admise pour les loyers échus ;

Attendu que Monsieur Herbelin sera débouté de sa demande de ce chef ;

Attendu sur le montant des sommes dues qu'à l'égard de Monsieur Herbelin le contrat est arrivé à son terme et tous les loyers sont échus ;

Que la première mensualité impayée est celle du 20 décembre 1987 ;

Que jusqu'au 20 avril 1992, 53 échéances n'ont pas été réglées ;

Que la dette s'élève à 2 459,29 x 53 = 130 342,37 F ;

Attendu que de cette somme doit être déduit le produit de la vente ;

Attendu que le véhicule a été vendu 61 000 F TTC ;

Que sur cette somme Cofibail, a, conformément au contrat, reversé une somme de 9 537,30 F au titre de la TVA ;

Que doit donc être déduite une somme de 51 462,70 F ;

Que sa créance s'élève à 78 879,67 F ;

Attendu que la demande de réduction de l'indemnité de résiliation est sans objet puisque le paiement d'une telle indemnité n'est pas sollicité par Cofibail ;

Que l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 ne s'applique pas à un contrat de location vente ;

Qu'ainsi Monsieur Herbelin doit être condamné au paiement de la somme de 78 879 F ;

Attendu que Monsieur Herbelin n'a effectué aucun versement en cours de procédure alors qu'une partie de sa dette était définitivement arrêtée ;

Qu'il n'y a pas lieu de le faire bénéficier de délais supplémentaires, ni de faire application des autres dispositions de l'article 1244-1 du Code civil ;

Attendu que la preuve du caractère abusif de la résistance de Monsieur Herbelin n'est pas rapportée ;

Que la demande de dommages-intérêts formulée par Cofibail sera rejetée ;

Attendu qu'aucune considération d'équité ne justifie l'application de l'article 700 du NCPC ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant dans les limites de la cassation ; Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau ; Déclare Monsieur Herbelin irrecevable à contester la régularité de la déclaration de créance ; Condamne Monsieur Herbelin à payer à la société Cofibail la somme de soixante dix huit mille huit cent soixante dix neuf francs (78 879 F) avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ; Déboute la société Cofibail de ses demandes de dommages-intérêts et d'indemnité ; Déboute Monsieur Herbelin de ses demandes de délais ; Condamne Monsieur Herbelin aux dépens exposés devant les juridictions du fond. Dit que les dépens exposés devant la Cour d'appel de Rouen seront recouvrés par Maître Reybel avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC.