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Décisions

Cass. soc., 15 février 2006, n° 03-47.363

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Robert Four (SA)

Défendeur :

Guilloux

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mazars (faisant fonctions)

Rapporteur :

Mme Martinel

Avocat général :

M. Maynial

Avocats :

SCP Masse-Dessen, Thouvenin, SCP Waquet, Farge, Hazan

Paris, 21e ch., du 9 oct. 2003

9 octobre 2003

LA COUR : - Attendu que M. Guilloux a été engagé le 18 mars 1998 par la société Robert Four en qualité de VRP exclusif à temps partiel; qu'au cours du mois de septembre 1999, l'employeur lui a proposé une modification du mode de rémunération qu'il a refusée; que le 17 juillet 2000, le salarié a pris acte de la rupture en contestant le procédé consistant à exclure des concours organisés par la société les représentants n'ayant pas voulu signer le nouveau contrat et en faisant valoir que la journée du premier mai n'avait pas été rémunérée ; qu'estimant que la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes à titre de rappel de primes de résultat des deux concours, d'indemnité de préavis, d'indemnité spéciale de rupture et d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse;

Sur le moyen unique du pourvoi principal pris en sa première branche et sur le moyen unique du pourvoi incident : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi;

Sur le moyen unique du pourvoi principal pris en ses deuxième et troisième branches : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 9 octobre 2003) d'avoir dit que la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné l'employeur au paiement d'une indemnité de préavis, d'une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité spéciale de rupture, alors, selon le moyen, que : 1°) que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, la cour d'appel doit examiner si les faits invoqués étaient ceux qui avaient motivé la prise d'acte de la rupture; que dans la lettre de démission en date du 17 juillet 2000, M. Guilloux n'invoquait, au titre des manquements reprochés à son employeur, que l'exclusion des deux concours, le non-paiement de la journée du 1er mai et l'absence de salaire fixe, de remboursement de frais et de délégués du personnel dans l'entreprise; que la cour d'appel, qui a constaté que ces griefs n'étaient pas fondés mais a dit la rupture imputable à l'employeur à raison de l'imputation du crédit gratuit sur le chiffre d'affaires réalisé, motif qui n'était pas invoqué dans la lettre de rupture, a violé l'article 1134 du Code civil, L. 122-9 et L. 122-14-4 du Code du travail; 2°) qu'il appartient au juge, en cas d'inexécution partielle de ses obligations par l'une des parties, d'apprécier d'après les circonstances de fait si cette inexécution a eu suffisamment d'importance pour justifier la rupture du contrat; qu'en disant la rupture du contrat par le salarié justifiée sans caractériser la gravité de la non-exécution partielle par la société Robert Four de son obligation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du Code civil;

Mais attendu que l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige; que le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit;

Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait modifié le contrat de travail du salarié en appliquant les nouvelles règles posées en matière d'imputation de crédit gratuit sur le chiffre d'affaires, et que ce grief, dont le salarié n'avait pas fait état dans sa lettre de prise d'acte de la rupture, justifiait cette rupture, a légalement justifié sa décision;

Par ces motifs : Rejette les pourvois tant principal qu'incident; Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens.