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Décisions

Cass. crim., 7 février 2006, n° 05-82.892

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

Mme Guihal

Avocat général :

M. Di Guardia

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan, SCP Célice, Blancpain, Soltner

TGI Nîmes, ch. corr., du 7 mai 2004

7 mai 2004

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par X Nicolas, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, en date du 5 avril 2005, qui, pour exercice illégal de l'art dentaire et publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 5 000 euro d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 4141-1, L. 4161-2, L. 4161-5, R. 665-24 du Code de la santé publique, ensemble la loi du 5 juillet 1996, et des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Nicolas X coupable d'exercice illégal de la profession de chirurgien-dentiste, en répression, l'a condamné à une amende délictuelle de 5 000 euro et, sur l'action civile, l'a condamné à payer à chacune des parties civiles la somme de 1 000 euro à titre de dommages-intérêts;

"aux motifs qu'il résulte du dossier de la procédure que Nicolas X est titulaire d'un diplôme en prothèse faciale et d'un autre en prothèse dentaire; que le diplôme de denturologie qu'il excipe n'est pas reconnu en France et ne peut dès lors légitimer des actes réalisés à ce titre ; que le prothésiste est un artisan qui n'a pour seule vocation que de fabriquer sur prescription médicale et empreintes prises par le chirurgien-dentiste la prothèse buccale qui lui est commandée; que toute autre pratique, impliquant intervention en bouche, lui est interdite, particulièrement la prise d'empreintes, les ajustements, les réparations, la conception même de la prothèse; qu'il résulte du témoignage de M. Valière, que Nicolas X a pratiqué des actes en bouche sur sa prothèse, puisqu'en intervenant une première fois "pour redresser", puis une seconde fois pour "parfaire la prothèse", il a nécessairement dû effectuer une adaptation de la prothèse en bouche et donc un diagnostic buccal de son client ; que l'inscription "démontage et remontage en position plus linguale des dents..." sur la facture remise à M. Valière suffit à attester cette intervention en bouche; qu'au demeurant le prévenu a lui-même reconnu les faits qui lui sont reprochés devant le juge d'instruction en reconnaissant prendre des empreintes dans la bouche des clients, prendre des mesures, fabriquer la prothèse et la placer; qu'ainsi et conformément à ce qu'ont relevé les premiers juges, même s'il n'a pas pratiqué d'actes chirurgicaux, Nicolas X en effectuant des diagnostics qui dépendent du seul art dentaire, en procédant à des empreintes ainsi qu'en posant et réparant des prothèses sans directives, ni contrôle d'un chirurgien-dentiste, a exercé illégalement l'art dentaire" (arrêt p. 6);

"1°) alors que, d'une part, en présence d'une pathologie préalablement diagnostiquée et traitée par un chirurgien-dentiste, la pose, l'ajustement et la réparation de prothèses, qui ne supposent aucun diagnostic, ni aucun traitement, sont des opérations mécaniques ne relevant pas de l'art dentaire qu'un prothésiste dentaire peut légalement réaliser; qu'en se fondant, pour retenir le prévenu dans les liens de la prévention, sur le témoignage de M. Valière, qui, après avoir consulté un chirurgien-dentiste, s'était adressé à Nicolas X pour redresser et parfaire sa prothèse, circonstances exclusives de tout exercice de l'art dentaire, la cour d'appel a violé les textes précités;

"2°) alors que, d'autre part, en présence d'un diagnostic préalablement posé par un chirurgien-dentiste, le prothésiste dentaire peut légalement réaliser une prise d'empreintes et procéder à l'essayage d'un appareil dentaire dès lors que de tels actes ne comportent ni diagnostic ni traitement de maladies de bouche réelles ou supposées ; qu'en reprochant cependant à Nicolas X d'avoir pris des empreintes et d'avoir posé des prothèses, pour le déclarer coupable d'exercice illégal de l'art dentaire, la cour d'appel violé les textes précités;

"3°) alors qu'enfin, un prothésiste dentaire peut légalement fabriquer, sur prescription d'un praticien, des dispositifs médicaux sur mesure invasifs non actifs, auxquels appartiennent les prothèses dentaires amovibles ; qu'en reprochant à Nicolas X la fabrication de prothèses, pour le retenir dans les liens de la prévention, sans constater que les fabrications litigieuses avaient été réalisées en l'absence de prescription d'un praticien, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un manque de base légale au regard des textes précités;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation, 121-1 du Code pénal et des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale;

"en ce que l'arrêt a déclaré Nicolas X coupable de publicité mensongère, en répression, l'a condamné à une amende délictuelle de 5 000 euro et, sur l'action civile, l'a condamné à payer à chacune des parties civiles la somme de 1 000 euro à titre de dommages-intérêts;

"aux motifs que "les annonces publicitaires diffusées par Nicolas X dans la presse locale en 2000 sont de nature à induire en erreur le public susceptible de les lire tant sur la nature des prestations que sur la qualité professionnelle de l'intéressé; qu'en effet, le tribunal a à bon droit relevé que les documents litigieux portaient notamment mention selon laquelle "les prises d'empreintes et poses d'appareils sont effectuées par un homme de l'art, conformément à l'article L. 373 du Code de la santé", laissant ainsi croire que Nicolas X exerce la profession de chirurgien-dentiste ou de médecin stomatologiste habilité à pratiquer des soins en bouche, alors qu'il n'en est rien; qu'il en est de même également de la mention "diplômé en denturologie" qui tend à laisser penser que ce titre est reconnu en France, alors que le prévenu a reconnu devant le magistrat instructeur être conscient que ce diplôme ne l'était pas; que concernant le terme "cabinet" souligné par les premiers juges, s'il ne peut à lui seul constituer le délit en laissant supposer qu'il fait référence à une activité médicale libérale, il permet, ajouté à l'ensemble des constats précités, de conforter le caractère mensonger de l'activité promue par Nicolas X auprès du public" (arrêt p. 7);

"1°) alors que, d'une part, Nicolas X faisait valoir que, dans leur ensemble, les publicités litigieuses précisaient, pour éviter toute ambiguïté, que le denturologiste n'est pas un dentiste et ne pratique aucun soin, et que ces précisions étaient exclusives de toute publicité mensongère; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée par le demandeur, si cette précision n'était pas de nature à exclure la qualification de publicité mensongère, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de motifs;

"2°) alors que, d'autre part, Nicolas X indiquait dans ses conclusions d'appel ne pas être l'auteur de la mention "les prises d'empreintes et les poses d'appareils sont effectués par un homme de l'art conformément à l'article L. 373 du Code de la santé", mention qui avait été ajoutée par le diffuseur suite à la mise en garde du conseil départemental de l'Ordre des chirurgiens-dentistes ; qu'en se fondant sur le caractère trompeur de ladite mention, sans répondre aux conclusions du demandeur, auquel ne pouvait être reprochée une mention dont il n'était pas l'auteur, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs";

Les moyens étant réunis ; - Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.