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Décisions

Cass. com., 7 mars 2006, n° 04-15.300

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Daimler Chrysler France (SA)

Défendeur :

Garage Gremeau (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Tric

Avocat général :

M. Feuillard

Avocats :

SCP Peignot, Garreau, SCP Ghestin

Cass. com. n° 04-15.300

7 mars 2006

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt déféré (Dijon, 1er avril 2004), qu'en 2002, la société Daimler Chrysler France a réorganisé son réseau de distribution, supprimant de nombreux distributeurs et créant de grandes "plaques" de distribution à l'échelon départemental ou régional; qu'elle a ainsi décidé au préalable de regrouper deux concessions situées en Côte-d'Or pour créer une zone Bourgogne; que, le 25 juin 2001, elle a notifié à la société Garage Gremeau, concessionnaire exclusif à Chenôve, la résiliation de son contrat de concession avec un préavis de deux ans venant à échéance au 30 juin 2003; que le règlement d'exemption alors en vigueur ayant été remplacé par le règlement CE n° 1400-2002 du 31 juillet 2002, la société Garage Gremeau a, par courrier recommandé du 28 septembre 2002, notifié à son concédant sa candidature officielle pour un contrat de réparateur agréé Mercedes Benz; que, le 18 février 2003, la société Daimler Chrysler France a transmis le projet de contrat de réparateur agréé; que, le 31 mars suivant, la société Daimler Chrysler France lui a envoyé les informations et la méthodologie nécessaires pour préparer sa candidature à l'audit qualitatif de sélection ; que reprochant ensuite à la société Garage Gremeau des violations du contrat de concession en cours, la société Daimler Chrysler France lui a notifié par courrier du 6 juin 2003 qu'il ne lui serait pas proposé de contrat de réparateur agréé Mercedes Benz;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Daimler Chrysler France reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à agréer la société Garage Gremeau en qualité de réparateur agréé, avec exécution provisoire et sous astreinte de 100 000 francs par jour de retard à compter du troisième jour suivant le prononcé de la décision, alors, selon le moyen : 1°) qu'en application de l'article 2-3 du contrat de concession, pour qu'une vente soit valable, il convient qu'elle intervienne directement entre un acheteur final et le concessionnaire, ou, en cas d'utilisation d'un mandat de recherche de véhicules donné par un acheteur final à un tiers, que la vente et la facturation afférente interviennent directement entre le concessionnaire et l'acheteur final, sans vente ni facturation intermédiaire, de sorte qu'en estimant que la société Garage Gremeau n'avait pas commis de faute en vendant des véhicules à la société Prestige autos 21, quand bien même celle-ci ne pouvait lui acheter pour son propre compte les dix-huit véhicules, qui les lui facturait, puis les revendre à la société Mikicar, qui n'était ni l'acheteur final mais un intermédiaire, ni même un mandataire disposant d'un mandat valide, la cour d'appel a violé l'article 2-3 du contrat de concession et du règlement CE n° 1475-95 du 28 juin 1995; 2°) qu'en retenant que pour chacune des ventes, il avait été produit un mandat ne contenant pas d'irrégularité flagrante et n'imposant pas au vendeur de procéder à des investigations complémentaires, sans constater l'antériorité desdits mandats, quand bien même la société Daimler Chrysler France faisait valoir, preuve à l'appui, que plusieurs mandats des prétendus acheteurs finals avaient été signés postérieurement aux commandes passées par la société Mikicar à la société Prestige auto 21 mais aussi que la mention " lu et approuvé " qui aurait dû être indiquée en italien l'avait été en français et enfin que d'autres ne comportaient pas de date ni de numéro, contrairement aux factures afférentes postérieurement établies par la société Prestige auto 21, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et, partant, a violé l'article 2-3 du contrat de concession et du règlement CE n° 1475-95 du 28 juin 1995; 3°) qu'en retenant que l'opération concernant les dix-huit ventes était apparemment licite et que le caractère frauduleux n'avait été révélé que par la suite après une longue et onéreuse enquête qui ne pouvait être effectuée par la société Garage Gremeau, sans répondre au moyen péremptoire de société Daimler Chrysler France faisant valoir que les sociétés Garage Gremeau et Prestige auto 21 étaient toutes deux dirigées par M. Laurent Gremeau, ce qui démontrait que la société Garage Gremeau ne pouvait ignorer les agissements frauduleux litigieux, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; 4°) qu'en se fondant sur des motifs inopérants tirés de ce qu'il ne pouvait être soutenu que la société Garage Gremeau avait procédé volontairement à des ventes hors réseau en ce qu'elles étaient intervenues à une époque où elle se trouvait en négociation avec le constructeur pour obtenir un agrément et de ce que l'immatriculation au nom de Prestige auto 21 rendait l'opération immédiatement décelable, pour confirmer la condamnation de la société Daimler Chrysler France à agréer la société Garage Gremeau en qualité de réparateur agréé, quand bien même la négociation d'un agrément n'était nullement exclusive de comportements frauduleux, la cour d'appel qui a procédé par pure affirmation, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 5°) que pour confirmer la condamnation de la société Daimler Chrysler France à agréer la société Garage Gremeau en qualité de réparateur agréé, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs inopérants tirés de ce que le grief n'avait pas paru suffisamment grave à la société Daimler Chrysler France pour entraîner la résiliation immédiate du contrat ou empêcher la conclusion d'un nouveau contrat de distribution et de services pour les véhicules de marque Smart, le 24 novembre 2003, quand bien même la société Daimler Chrysler France faisait valoir qu'elle n'était pas décisionnaire puisqu'elle ne faisait qu'exécuter les ordres de son mandant, la société Smart GmbH, la cour d'appel a méconnu l'effet relatif des contrats et partant violé l'article 1165 du Code civil; 6°) qu'en relevant l'existence d'une pratique peu orthodoxe de facturation sans en tirer les conséquences qui s'évinçaient, quand bien même il en résultait une faute imputable au concessionnaire justifiant le refus de son agrément en qualité de réparateur en raison du non-respect de ses obligations contractuelles, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et partant a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2-3 du contrat de concession et du règlement CE n° 1475-95 du 28 juin 1995; 7°) que pour confirmer la condamnation de la société Daimler Chrysler France à agréer la société Garage Gremeau en qualité de réparateur agréé, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que la société Daimler Chrysler France n'aurait pas donné suite aux constatations faites par son détective privé ayant relevé le 9 octobre 2003 l'arrivée chez Mikicar d'un chargement de voitures Mercedes et Smart, quand bien même elle avait sollicité de la cour d'appel qu'elle sursoie à statuer dans l'attente du jugement à intervenir du Tribunal de commerce de Versailles saisi aux fins de voir dire et juger que la société Garage Gremeau avait violé les dispositions du contrat de concession en revendant des véhicules neufs de la marque Mercedes Benz à la société Prestige auto 21 qui les avait ensuite cédés à la société Mikicar et produisait un rapport de détective indiquant qu'une enquête, et elle avait produit un rapport de son détective privé indiquant qu'une enquête était en cours en Italie et avait indiqué aux termes de ses conclusions qu'elle se réservait la possibilité d'agir en justice, en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu que l'arrêt relève que si la société Garage Gremeau a vendu dix-huit véhicules de marque Mercedes-Benz à la société Prestige auto 21, ces véhicules ont été finalement importés en Italie par l'intermédiaire d'une société Mikicar à destination de divers clients italiens; qu'il constate que, pour chacune des ventes, un mandat portant un tampon de la société Mikicar et la signature d'un mandant était produit; qu'il retient encore que le contrat de concession n'exigeait, pour que les ventes hors réseau soient licites, qu'un mandat de recherche écrit préalable, sans exiger la production de documents d'identité ni la facturation directe à l'utilisateur final et que les mandats ne contenaient pas d'irrégularités flagrantes et n'imposaient pas au vendeur de procéder à des investigations complémentaires tandis que le caractère frauduleux de l'opération n'a été révélé qu'après une onéreuse enquête qui a duré trois mois; qu'il conclut que les ventes interdites étant celles qui sont faites à des revendeurs en vue de la revente, ce n'est pas le cas des dix-huit ventes qui ont été faites dans le cadre d'une opération de vente à des clients finals par l'intermédiaire d'un mandataire; qu'ainsi la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre au moyen inopérant invoqué par la troisième branche, a, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les quatrième, cinquième et septième branches, fait l'exacte application des textes invoqués; que le moyen n'est pas fondé;

Et sur le second moyen : - Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.