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Décisions

Cass. crim., 11 janvier 2006, n° 04-85.230

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

Mme Desgrange

Avocat général :

Charpenel

Avocats :

SCP Célice, Blancpain, Soltner, SCP Nicolay, de Lanouvelle, Me Ricard

TGI Paris, JLD, du 7 juill. 2004

7 juillet 2004

LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par : la société X, la société Y1-Y2, contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris, en date du 7 juillet 2004, qui a autorisé l'Administration de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, à effectuer des opérations de visite et de saisie de documents, en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; - Joignant les pourvois, en raison de la connexité ; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ; - Sur le premier moyen de cassation proposé pour la société Y1-Y2, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, 6, 8 et 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, 592 et 593 du Code de procédure pénale, excès de pouvoir, défaut de motifs, et manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a autorisé des visites et saisies domiciliaires à l'encontre de la société Y1-Y2 dans les locaux qu'elle occupe <adresse> Rueil-Malmaison Cedex ;

"alors que ne satisfait pas aux conditions essentielles de son existence légale, au regard des exigences de l'article L. 450-4 du Code de commerce, l'ordonnance qui n'est que la reproduction littérale, matérielle et typographique, d'un texte rédigé par l'Administration et qui, étant l'œuvre exclusive de cette dernière et non celle du juge judiciaire, procède d'une motivation préétablie par la demanderesse ; qu'en l'espèce, il apparaît de son rapprochement et de ses similitudes avec la requête que l'ordonnance attaquée n'est que la reproduction littérale, matérielle et typographique, d'un texte rédigé par l'Administration ; qu'ainsi, en autorisant les visites et saisies litigieuses, sur le fondement d'une motivation préétablie par la demanderesse, le juge n'a pas légalement justifié sa décision ;

"alors que, à supposer que, nonobstant l'existence de similitudes entre la requête et l'ordonnance du juge autorisant les visites domiciliaires, les motifs de la décision soient réputés être établis par le juge qui l'a signée, il en est autrement lorsque la preuve contraire résulte des pièces du dossier officiel et notamment des propres mentions de la décision entreprise, démontrant l'impossibilité matérielle, pour le juge, de s'être approprié les motifs d'un texte prérédigé par la demanderesse ; qu'en l'espèce, il résulte de l'ordonnance attaquée, rendue le 7 juillet 2004, que le magistrat, saisi la veille, ne pouvait matériellement examiner et analyser la totalité des nombreuses pièces du dossier et rédiger l'ordonnance dont la motivation reproduit la forme et les termes de la requête de l'Administration ; qu'ainsi, méconnaît les exigences de l'article L. 450-4 du Code de commerce et le principe de la séparation des pouvoirs l'ordonnance attaquée qui, compte-tenu du laps de temps laissé au juge, n'a pu être intellectuellement l'œuvre de ce dernier ;

"alors que, selon les dispositions combinées des articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, ni excessif, ni trop bref, par un tribunal indépendant et impartial, et toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la Convention ont été violés a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles ; que le recours en cassation, voie de recours extraordinaire prévue par l'article L. 450-4 du Code de commerce à l'encontre d'une ordonnance d'autorisation de visites et saisies domiciliaires rendue sur requête et suivant une procédure non contradictoire, n'offre pas à la personne, objet de ces visites, un recours effectif au sens de la Convention, dès lors que le juge de cassation ne contrôle pas l'existence des présomptions et des faits retenus par le premier juge ni la fraude éventuellement commise par l'Administration ; que, dans ces conditions, l'article L. 450-4 du Code de commerce ne prévoyant qu'un contrôle de cassation contre une telle ordonnance n'organise qu'un contrôle trop limité pour assurer le respect des libertés individuelles, telle l'inviolabilité du domicile, et méconnaît ainsi les exigences des articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme ; qu'ainsi, en autorisant des visites domiciliaires sur le fondement de l'article L. 450-4 du Code de commerce, l'ordonnance attaquée, rendue non-contradictoirement le lendemain même du dépôt de la requête, a violé les textes précités" ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour la société Y1-Y2, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 32, 486 et 592 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée ne fait aucune mention de la présence du Ministère public ;

"alors que le Ministère public est représenté auprès de chaque juridiction répressive, et la preuve de sa présence doit résulter à peine de nullité des mentions de la décision ; qu'en statuant pourtant hors la présence du Ministère public, qui ne résulte pas des mentions de l'ordonnance attaquée, le juge des libertés et de la détention a violé les textes précités" ;

Sur le troisième moyen de cassation proposé pour la société Y1-Y2, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, et manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a autorisé à l'encontre de la société Y1-Y2, dans les locaux qu'elle occupe <adresse> Rueil-Malmaison Cedex, des visites et saisies de tous documents nécessaires à la recherche de la preuve des agissements qui entrent dans le champ des pratiques prohibées par les points 2 et 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce et 81-1 du traité de Rome relevés dans le secteur de la distribution des laits infantiles ainsi que toute manifestation de cette concertation prohibée ;

"aux motifs qu'une première partie des documents communiqués à nous par l'Administration à l'appui de sa requête a été remise par les responsables des hôpitaux de Bayonne, Bordeaux, Caen, Blois, Limoges, Poitiers et Toulouse sur demande des Directions Départementales de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes des Pyrénées-Atlantiques, de la Gironde, du Calvados, du Loir-et-Cher, de la Haute-Vienne, de la Vienne et de la Haute-garonne, en application des articles L. 450-2, L. 450-3 et L. 450-7 du Code de commerce ; qu'une seconde partie des documents à nous communiqués par l'Administration à l'appui de sa requête a été transmise par l'autorité nationale de concurrence italienne (AGCM) en application des articles 12 et 22 du règlement n° 1-2003 ; que la première partie des pièces présentées à l'appui de la requête a une origine apparemment licite et que celles-ci peuvent être utilisées pour la motivation de la présente ordonnance puisqu'elles émanent de la consultation de sites et banques de données électroniques accessibles au public, mais également de l'exercice par l'Administration de son droit de communication, qui semble en avoir usé de manière régulière ; que la seconde partie des pièces présentées à l'appui de la requête a également une origine apparemment licite et que celles-ci peuvent être utilisées pour la motivation de la présente ordonnance puisque l'AGCM est une autorité nationale de concurrence d'un Etat membre de l'Union européenne ; qu'elle a fait état d'indices, de constatations et de conclusions fondés, soit sur des documents accessibles au public tels que communiqué et article de presse et décision de l'autorité nationale de concurrence publiée, soit sur l'exercice par l'AGCM ou la brigade financière (Guardia di Finanza) de pouvoirs d'enquête dont la régularité ne semble pas avoir été contestée ; que s'agissant des indices de pratiques anticoncurrentielles relevés en France, les marchés de distribution de laits infantiles pour lesquels il existe des présomptions d'ententes ne sont pas isolés, les marchés mentionnés n'étant que des illustrations de la pratique dont la preuve est recherchée dans le secteur concerné ; que le centre hospitalier de Blois a lancé un appel à la concurrence concernant la fourniture de préparations à destination des nourrissons pour l'année 2004 ; que Marc Louis, directeur des achats, des équipements et de l'hôtellerie de l'hôpital de Blois indique dans son courrier du 2 décembre 2003 (annexe à la requête n° 6) que " l'établissement a lancé un appel à la concurrence auprès des sociétés Z4, Z3, Z1, X, Y2, Z2, Y1 et Z5. Je tiens à vous signaler que pour les lots 1 et 2, tous ces fournisseurs, comme les années précédentes depuis 1999, ont proposé le même prix unitaire (0,23 euro hors taxes en 2004) pour les 24 000 nourrettes de lait 1er âge et les 7 000 nourrettes de lait hypoallergéniques. Je vous précise...que vos services ont été régulièrement informés de cette anomalie, constatée par tous les acheteurs hospitaliers " ; que les tableaux joints (annexe à la requête n° 6-1) font apparaître une identité de prix des soumissions pour l'ensemble des candidats ; que la même constatation est effectuée par l'une des responsables du centre hospitalier de Bayonne ; que Nathalie Celotto, praticien hospitalier, précise dans son envoi du 31 mars 2003 (annexe à la requête n° 7) que "dès la première proposition, il faut constater l'égalité des prix proposés quel que soit le fournisseur et quel que soit le type de lait : 0,23 euro hors taxes le mini-biberon" ; que lors de la mise en compétition organisée par l'hôpital de Bayonne, on retrouve en qualité de candidates les entreprises Z4, Z3, Z1, X, Y2, Z2 et Y1 ; que la passation par le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen d'un des marchés portant sur l'approvisionnement 2003 en laits infantiles et substitutifs - Aliments destinés à des fins médicales spéciales pour adultes et enfants lancé et publié au BOAMP le 28 novembre 2002 avec annonce rectificative du 5 décembre 2002 semble confirmer les faits d'entente présumée entre les principaux soumissionnaires notamment en ce qui concerne les lots 4 à 7 laits pour nourrissons 1er âge (annexe à la requête n° 8) ; que le tableau récapitulatif des offres (annexe à la requête n° 8-1) montre un prix uniforme de 0,23 euro hors taxes le biberon proposé par l'ensemble des candidats intéressés par ces lots, à savoir les sociétés X, Z1, Y2, Z2, Y1 et Z3 ; que le même constat est opéré par le CHU de Bordeaux (annexe à la requête n° 9) ; que le rapport technique du 24 juillet 2002 qui accompagne le bordereau de transmission, de documents à la DGCCRF du 25 septembre 2003 précise que "les sociétés de production de laits infantiles ont passé un accord national entre elles sur la vente de laits dans les maternités" ; que la nourrette fait l'objet d'une offre de prix équivalente à 0,23 euro hors taxes par les entreprises X, Z1, Y2, Z2, Y1 et Z3 s'agissant en particulier des laits standard des lots 1 et 2 ; que le procès-verbal du 9 juin 2004 (annexe à la requête n° 3) établi par Françoise Perier et Patrick Drouet, respectivement commissaire et inspecteur principal des services déconcentrés de la DGCCRF, recueillant les déclarations de Christian Lalande, ingénieur en chef chargé du pôle hôtelier du CHU de Toulouse mentionne que " Depuis 1999, nous lançons des consultations pour nos approvisionnements en nourrettes. Nous avons constaté que le tour de rôle (tour de lait) se poursuit. Dans le cadre de la rationalisation des achats qui me sont confiés, la situation n'était pas satisfaisante, nous avons lancé une consultation en procédure adaptée en janvier 2004. Nous avons reçu 7 propositions tarifaires identiques au prix de 0,23 euro hors taxes la nourrette (seul le conditionnement variait propositions à 100 ml et 5 à 90 ml). Ces offres ne permettant pas de procéder à un choix, nous avons adressé une invitation à l'ensemble des offreurs par courrier pour une réunion le 22 avril 2004 " ; que Christian Lalande a également déclaré dans ce même procès-verbal que " 5 des offreurs invités se sont présentés, les absents ayant fait savoir qu'ils seraient représentés par les présents... J'ai fait connaître mon étonnement aux personnes présentes quant à leurs offres tarifaires ne me permettant pas de faire mon choix...que leur attitude s'apparentait à une entente et que la seule solution pour choisir un offreur était le tirage au sort. Les interlocuteurs se sont montrés étonnés de ma réaction et m'ont précisé que cette procédure d'achat était généralisée en France et que la manière dont ils répondaient était parfaitement légale. Je leur ai demandé de m'adresser le texte qui autorisait de telles pratiques, celui-ci ne m'a toujours pas été transmis " ; que Christian Lalande indique dans le procès-verbal précité que les entreprises présentes à la réunion du 22 avril 2004 ont refusé expressément ou tacitement la solution du tirage au sort ; que l'on retrouve pour cette mise en compétition organisée par l'hôpital de Toulouse et concernant le lait infantile les entreprises X, Z1, Y2, Z2, Y1 et Z3 ; que ces déclarations confirment les éléments d'information recueillis lors des procès-verbaux établis par les agents de la DGCCRF le 15 septembre 2003 (annexe à la requête n° 4) et le 5 novembre 2003 (annexe à la requête n° 5) où on retrouve respectivement comme candidates, dans le cadre de la consultation mise en œuvre par le CHU de Limoges, les sociétés X, Z1, Z4, Y2, Y1 et Z3 et pour celle lancée par le CHU de Poitiers, les sociétés X, Z1, Y2, Z4, Z2, Y1 et Z3 ; que pour le lait nourrettes 1er âge, ces deux consultations sont marquées de la même manière par une proposition généralisée à 0,23 euro hors taxes le mini-biberon ; que les entreprises qui interviennent dans le secteur du lait infantile appartiennent à une même organisation professionnelle, le syndicat français des aliments de l'enfance et de la diététique (SFAE) ; que les sociétés X, Z5, Y2, Z2, Y1 et Z3 figurant parmi les membres de ce syndicat (annexe à la requête n° 10-1) ; que Z4 et X qui appartiennent au groupe W sont situées à la même adresse ; que les laboratoires Z1 sont situés à la même adresse que Z3 ; que le SFAE apparaît ainsi comme une structure susceptible de favoriser la concertation entre les entreprises lors de la passation de marchés concernant les laits infantiles ; qu'au vu de tous ces éléments, il peut être constaté une situation de concurrence déficiente dans les consultations successives relatives au marché de distribution de laits infantiles marquées à la fois par des présomptions d'échanges d'informations entre soumissionnaires pour en favoriser un, chacun à son tour, et par la possibilité d'envisager l'hypothèse d'un rééquilibrage des attributions entre eux sur d'autres marchés du secteur d'activité considéré ; que l'ensemble de ces agissements peut avoir été favorisé par des échanges d'informations entre les entreprises, que nous pouvons ainsi présumer une concertation prohibée par l'article L. 420-1 2 et 4 du Code de commerce et par l'article 81-1 du traité de Rome qu'il convient de qualifier ; que s'agissant du 2 de l'article L. 420-1 du Code de commerce, à savoir, la pratique prohibée qui consiste à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ; que les différents procès-verbaux et autres documents produits mettent en exergue l'absence totale de concurrence par les prix entre les différents soumissionnaires ; que dans sa décision 00-D-66 du janvier 2001, le Conseil de la concurrence a relevé que les laits infantiles sont équivalents et parfaitement substituables entre eux ; que dans la décision précitée, le Conseil de la concurrence avait reconnu que la " participation des fournisseurs de laits infantiles à la pratique du tour de lait saurait être considérée comme une pratique contraire aux dispositions du livre IV du Code de commerce dès lors, d'une part, que cette participation aux tours de lait était la seule possibilité pour chacun d'entre eux d'assurer sa présence sur le marché compte tenu des demandes formulées par les maternités et que, d'autre part, aucun élément du dossier ne suggère que les fabricants se seraient entendus explicitement ou tacitement pour pérenniser cette pratique " ; que les indices et présomptions présentés semblent actuellement conforter l'hypothèse d'une entente entre les fabricants pour pérenniser cette pratique du tour de lait et annihiler toute velléité de concurrence entre les soumissionnaires par le prix dès lors que les laits proposés sont équivalents entre eux en raison de la réglementation ; que de tels comportements ne peuvent que faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ; que s'agissant du 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce, à savoir la pratique prohibée qui consiste à répartir les marchés ; que du fait même de la présomption précédente, portant sur une action concertée visant à restreindre le libre jeu de la concurrence en faveur des entreprises X, Z5, Y2, Z2, Y1, Z4, Z1 et Z3 se déduit la volonté de ces entreprises de se répartir les marchés, présomption de la pratique prohibée visée au point 4 de l'article L. 420-1 du Code précité ; que les difficultés rencontrées lors des procédures d'attribution des différents marchés visés à titre d'illustration des pratiques prohibées recherchées peuvent permettre d'envisager l'hypothèse d'un rééquilibrage des attributions sur d'autres marchés entre ces entreprises concernant le secteur de la distribution des laits infantiles ; que pour les marchés de distribution de laits infantiles des CHU de Bayonne, Bordeaux, Caen, Blois, Limoges, Poitiers et Toulouse, les agissements des entreprises candidates paraissent coordonnées ; que l'ensemble de ces comportements laisse en conséquence présumer l'existence de pratiques concertées au sens du point 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce ; que s'agissant des indices de pratiques anticoncurrentielles relatifs au marché italien, l'AGCM a demandé par courrier en date du 28 juin 2004 à son homologue française de bien vouloir mener une inspection afin de rechercher les preuves éventuelles d'une entente entre principaux fabricants européens de laits infantiles (annexe à la requête n° 2) ; que des interventions similaires sont également prévues à la demande de l'AGCM de manière simultanée dans d'autres Etats membres de l'Union européenne ; que l'AGCM demande à la DGCCRF de bien vouloir procéder à des investigations inopinées aux sièges français de trois fabricants de laits infantiles ; que les sociétés Z3, Y1 et Y2 qui commercialisent leurs produits en Italie sont visées par cette demande d'enquête ; que l'enquête menée par la DGCCRF dans le secteur de la distribution de laits infantiles vise également ces trois fabricants ; qu'il y a donc lieu de joindre les deux demandes d'enquête, qui ont pour objet la recherche des preuves de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la distribution de laits infantiles, la première sur le marché français aux fins de l'application de l'article L. 420-1, 2 et 4 du Code de commerce, la seconde sur le marché italien à la demande de l'AGCM aux fins de l'application de l'article 81-1 du traité de Rome, afin d'éviter une disparition inéluctable des éléments de preuve recherchés en cas d'intervention différée ; que l'AGCM dispose d'indices lui permettant de présumer une entente entre principaux fabricants européens de laits infantiles qui viserait à maintenir les prix du lait infantile artificiellement élevés sur le marché italien ; que le marché italien du lait infantile est caractérisé par une entrée récente des entreprises de la grande distribution dont Carrefour et Auchan ; que l'enquête menée par la Guardia di Finanza (police financière) montre que les prix de la grande distribution, sont bien plus élevés en Italie que dans les autres pays européens, que des plaintes de consommateurs et des articles de presse confirment cette situation ; que l'AGCM précise qu'aucune explication économique ne peut être avancée sérieusement pour justifier cette différence flagrante entre pays voisins, ni les coûts de transport ni ceux de réétiquetage des produits italiens ; que la présence du tour de lait dans les maternités et l'habitude des consommateurs d'acheter de préférence le lait conseillé par le pédiatre ne peuvent justifier la totale absence de concurrence ; que l'absence d'importations parallèles mais aussi la différence de marques et d'emballages pour un même fabricant laissent présumer une stratégie de segmentation des marchés nationaux et notamment du marché italien ; que des obstacles sont vraisemblablement posés par les fabricants pour empêcher les exportations en Italie des laits infantiles commercialisés en France par de grands distributeur comme Carrefour et Auchan présents également dans la péninsule ; que l'absence de commerce parallèle transalpin et de volonté de peser sur les prix de la part des grands distributeurs français fait présumer une entente horizontale entre fabricants couvrant l'ensemble du territoire d'un Etat membre, pratique prohibée par l'article 81-1 du traité de Rome ; qu'ainsi la portée de nos présomptions est suffisante au regard des qualifications prévues à l'article L. 420-1 du Code de commerce dans ces points 2 et 4 et 81-1 du traité de Rome ; que la recherche de la preuve de ces pratiques nous apparaît justifiée ; par ailleurs que l'utilisation des pouvoirs définis à l'article L. 450-3 du Code de commerce ne paraît pas suffisante pour permettre à l'administration de corroborer ses soupçons ; qu'en effet, les actions concertées, conventions ou ententes qui ont pour effet de faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché ou se répartir les marchés sont établies suivant des modalités secrètes, et les documents nécessaires à la preuve des pratiques prohibées, sont vraisemblablement conservées dans des lieux et sous une forme qui facilitent leur dissimulation ou leur destruction en cas de vérification ; que le recours aux pouvoirs de l'article L. 450-4 du Code de commerce constitue donc le seul moyen d'atteindre les objectifs recherchés ; qu'en outre, les opérations de visite et de saisie sollicitées ne sont pas disproportionnées compte-tenu que les intérêts des entreprises et du syndicat de fabricants concernés sont garantis dès lors que les pouvoirs de l'administration sont utilisés sous notre contrôle ; qu'il convient de rechercher les lieux où se trouvent le plus vraisemblablement les documents nécessaires à l'apport de la preuve des pratiques présumées ; qu'il est vraisemblable que les documents utiles à l'apport de cette preuve se trouvent dans les locaux des entreprises Laboratoires Z1, Z3 France, Y2, Y1, X, Z4, Z2, Z5 et du syndicat de fabricants SFAE qui apparaissent au coeur des pratiques relevées dans le secteur de la distribution de laits infantiles ; qu'en outre existent des informations concordantes sur leur comportement ; que dès lors que ces locaux sont situés en des lieux différents, il est nécessaire de permettre aux enquêteurs d'intervenir simultanément dans ceux-ci afin d'éviter la disparition ou la dissimulation d'éléments matériels ; que des interventions sont également prévues de la part de l'autorité nationale de concurrence italienne sur son territoire et d'autres autorités nationales de concurrence de l'Union européenne sur leur territoire respectif de manière simultanée ; que la pluralité des locaux à visiter nécessite la désignation de plusieurs enquêteurs habilités par l'arrêté du 22 janvier 1993 complété par celui du 11 mars 1993 modifié ; que la collaboration des effectifs de la Direction Nationale d'Enquêtes de Concurrence, de Consommation et de Répression des Fraudes (DNECCRF), de la brigade interrégionale d'enquêtes de concurrence (BIEC) Bourgogne Franche-Comté Rhône-Alpes Auvergne, de la brigade interrégionale d'enquêtes de concurrence (BIEC) Nord, Pas-de-Calais, Picardie, et des directions départementales des Hauts-de-Seine, de l'Oise et de Seine-et-Marne est nécessaire ; que les directeurs régionaux qui ont respectivement autorité sur la DNECCRF et les BIEC Bourgogne Franche-Comté Rhône-Alpes Auvergne et Nord Pas-de-Calais Picardie occupent l'emploi de directeur régional tel que prévu par l'article 1er du décret n° 2002-593 du 24 avril 2002 ; qu'ils sont en conséquence fonctionnaires de catégorie A et habilités à procéder aux opérations prévues à l'article L. 450-4 susvisé, en application ,de l'arrêté du 22 janvier 1993 ; que les directeurs départementaux qui ont respectivement autorité sur les directions départementales des Hauts-de-Seine, de l'Oise et de Seine-et-Marne sont titulaires de l'un des grades prévus à l'article 2 du décret du 2 août 1995 modifié ; qu'ils sont en conséquence fonctionnaires de catégorie A et habilités à procéder aux opérations prévues à l'article L. 450-4 précité en application de l'arrêté du 22 janvier 1993 ; que certaines de ces opérations doivent avoir lieu en dehors du ressort territorial de ce tribunal, qu'il convient de délivrer une commission rogatoire aux juges des libertés et de la détention aux Tribunaux de grand instance de Nanterre, Meaux, Compiègne et Villefranche-sur-Saône dans le ressort desquels lesdites opérations auront lieu afin qu'ils puissent designer les officiers de police judiciaire et exercer le contrôle prévu par l'article L. 450-4 du Code de commerce ; que la requête de Serge Fraichard, directeur régional à Paris, chef de la brigade interrégionale d'enquêtes de concurrence Ile-de-France, Basse-Normandie, Haute-Normandie, Réunion, Saint-Pierre-et-Miquelon, nous apparaît fondée ;

"alors que, si le juge a retenu des présomptions circonscrites à certains agissements déterminés, il ne saurait autoriser des visites et saisies ayant un objet général et indéterminé ; qu'en l'espèce, les présomptions relevées par le juge des libertés et de la détention étaient circonscrites aux appels d'offres lancés par les centres hospitaliers de Blois, de Bayonne, de Caen, de Bordeaux, de Toulouse et de Limoges et enfin au marché italien ; qu'en considérant que ces marchés n'étaient que des illustrations de la pratique dont la preuve était recherchée dans le secteur concerné pour s'affranchir de l'obligation qui lui incombait de préciser les appels d'offre sur lesquels devaient porter les recherches autorisées, le juge des libertés et de la détention qui a étendu l'autorisation au-delà des marchés visés dans l'ordonnance n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé" ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour la société Y1-Y2, pris de la violation des articles L. 420-1, 2 et 4, du Code de commerce, 81-1 du traité de Rome, L. 450-4 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, et manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a autorisé des visites et saisies domiciliaires à l'encontre de la société Y1-Y2 dans les locaux qu'elle occupe <adresse> Rueil-Malmaison Cedex ;

"aux motifs qu'une première partie des documents communiqués à nous par l'Administration à l'appui de sa requête a été remise par les responsables des hôpitaux de Bayonne, Bordeaux, Caen, Blois, Limoges, Poitiers et Toulouse sur demande des Directions Départementales de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes des Pyrénées-Atlantiques, de la Gironde, du Calvados, du Loir-et-Cher, de la Haute-Vienne, de la Vienne et de la Haute-garonne, en application des articles L. 450-2, L. 450-3 et L. 450-7 du Code de commerce ; qu'une seconde partie des documents à nous communiqués par l'administration à l'appui de sa requête a été transmise par l'autorité nationale de concurrence italienne (AGCM) en application des articles 12 et 22 du règlement n° 1-2003 ; que le première partie des pièces présentées à l'appui de la requête a une origine apparemment licite et que celles-ci peuvent être utilisées pour la motivation de la présente ordonnance puisqu'elles émanent de la consultation de sites et banques de données électroniques accessibles au public, mais également de l'exercice par l'administration de son droit de communication, qui semble en avoir usé de manière régulière ; que la seconde partie des pièces présentées à l'appui de la requête a également une origine apparemment licite et que celles-ci peuvent être utilisées pour la motivation de la présente ordonnance puisque l'AGCM est une autorité nationale de concurrence d'un Etat membre de l'Union européenne ; qu'elle a fait état d'indices, de constatations et de conclusions fondés, soit sur des documents accessibles au public tels que communiqué et article de presse et décision de l'autorité nationale de concurrence publiée, soit sur l'exercice par l'AGCM ou la brigade financière (Guardia di Finanza) de pouvoirs d'enquête dont la régularité ne semble pas avoir été contestée ; que s'agissant des indices de pratiques anticoncurrentielles relevés en France, les marchés de distribution de laits infantiles pour lesquels il existe des présomptions d'ententes ne sont pas isolés, les marchés mentionnés n'étant que des illustrations de la pratique dont la preuve est recherchée dans le secteur concerné ; que le centre hospitalier de Blois a lancé un appel à la concurrence concernant la fourniture de préparations à destination des nourrissons pour l'année 2004 ; que Marc Louis, directeur des achats, des équipements et de l'hôtellerie de l'hôpital de Blois indique dans son courrier du 2 décembre 2003 (annexe à la requête n° 6) que "l'établissement a lancé un appel à la concurrence auprès des sociétés Z4, Z3, Z1, X, Y2, Z2, Y1 et Z5. Je tiens à vous signaler que pour les lots 1 et 2, tous ces fournisseurs, comme les années précédentes depuis 1999, ont proposé le même prix unitaire (0,23 euro hors taxes en 2004) pour les 24 000 nourrettes de lait 1er âge et les 7 000 nourrettes de lait hypoallergéniques. Je vous précise que vos services ont été régulièrement informés de cette anomalie, constatée par tous les acheteurs hospitaliers " ; que les tableaux joints (annexe à la requête n° 6-1) font apparaître une identité de prix des soumissions pour l'ensemble des candidats ; que la même constatation est effectuée par l'une des responsables du centre hospitalier de Bayonne ; que Nathalie Celotto, praticien hospitalier, précise dans son envoi du 31 mars 2003 (annexe à la requête n° 7) que "dès la première proposition, il faut constater l'égalité des prix proposés quel que soit le fournisseur et quel que soit le type de lait : 0,23 euro hors taxes le mini-biberon" ; que lors de la mise en compétition organisée par l'hôpital de Bayonne, on retrouve en qualité de candidates les entreprises Z4, Z3, Z1, X, Y2, Z2 et Y1 ; que la passation par le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen d'un des marchés portant sur l'approvisionnement 2003 en laits infantiles et substitutifs - Aliments destinés à des fins médicales spéciales pour adultes et enfants lancé et publié au BOAMP le 28 novembre 2002 avec annonce rectificative du 5 décembre 2002 semble confirmer les faits d'entente présumée entre les principaux soumissionnaires notamment en ce qui concerne les lots 4 à 7 laits pour nourrissons 1er âge (annexe à la requête n° 8) ; que le tableau récapitulatif des offres (annexe à la requête n° 8-1) montre un prix uniforme de 0,23 euro hors taxes le biberon proposé par l'ensemble des candidats intéressés par ces lots, à savoir les sociétés X, Z1, Y2, Z2, Y1 et Z3 ; que le même constat est opéré par le CHU de Bordeaux (annexe à la requête n° 9) ; que le rapport technique du 24 juillet 2002 qui accompagne le bordereau de transmission, de documents à la DGCCRF du 25 septembre 2003 précise que "les sociétés de production de laits infantiles ont passé un accord national entre elles sur la vente de laits dans les maternités" ; que la nourrette fait l'objet d'une offre de prix équivalente à 0,23 euro hors taxes par les entreprises X, Z1, Y2, Z2, Y1 et Z3 s'agissant en particulier des laits standard des lots 1 et 2 ; que le procès-verbal du 9 juin 2004 (annexe à la requête n° 3) établi par Françoise Perier et Patrick Drouet, respectivement commissaire et inspecteur principal des services déconcentrés de la DGCCRF, recueillant les déclarations de Christian Lalande, ingénieur en chef chargé du pôle hôtelier du CHU de Toulouse mentionne que " Depuis 1999, nous lançons des consultations pour nos approvisionnements en nourrettes. Nous avons constaté que le tour de rôle (tour de lait) se poursuit. Dans le cadre de la rationalisation des achats qui me sont confiés, la situation n'était pas satisfaisante, nous avons lancé une consultation en procédure adaptée en janvier 2004. Nous avons reçu 7 propositions tarifaires identiques au prix de 0,23 euro hors taxes la nourrette (seul le conditionnement variait propositions à 100 ml et 5 à 90 ml). Ces offres ne permettant pas de procéder à un choix, nous avons adressé une invitation à l'ensemble des offreurs par courrier pour une réunion le 22 avril 2004 " ; que Christian Lalande a également déclaré dans ce même procès-verbal que " 5 des offreurs invités se sont présentés, les absents ayant fait savoir qu'ils seraient représentés par les présents... J'ai fait connaître mon étonnement aux personnes présentes quant à leurs offres tarifaires ne me permettant pas de faire mon choix que leur attitude s'apparentait à une entente et que la seule solution pour choisir un offreur était le tirage au sort. Les interlocuteurs se sont montrés étonnés de ma réaction et m'ont précisé que cette procédure d'achat était généralisée en France et que la manière dont ils répondaient était parfaitement légale. Je leur ai demandé de m'adresser le texte qui autorisait de telles pratiques, celui-ci ne m'a toujours pas été transmis " ; que Christian Lalande indique dans le procès-verbal précité que les entreprises présentes à la réunion du 22 avril 2004 ont refusé expressément ou tacitement la solution du tirage au sort ; que l'on retrouve pour cette mise en compétition organisée par l'hôpital de Toulouse et concernant le lait infantile les entreprises X, Z1, Y2, Z2, Y1 et Z3 ; que ces déclarations confirment les éléments d'information recueillis lors des procès-verbaux établis par les agents de la DGCCRF le 15 septembre 2003 (annexe à la requête n° 4) et le 5 novembre 2003 (annexe à la requête n° 5) où on retrouve respectivement comme candidates, dans le cadre de la consultation mise en œuvre par le CHU de Limoges, les sociétés X, Z1, Z4, Y2, Y1 et Z3 et pour celle lancée par le CHU de Poitiers, les sociétés X, Z1, Y2, Z4, Z2, Y1 et Z3 ; que pour le lait nourrettes 1er âge, ces deux consultations sont marquées de la même manière par une proposition généralisée à 0,23 euro hors taxes le mini-biberon ; que les entreprises qui interviennent dans le secteur du lait infantile appartiennent à une même organisation professionnelle, le syndicat français des aliments de l'enfance et de la diététique (SFAE) ; que les sociétés X, Z5, Y2, Z2, Y1 et Z3 figurant parmi les membres de ce syndicat (annexe à la requête n° 10-1) ; que Z4 et X qui appartiennent au groupe W sont situées à la même adresse ; que les laboratoires Z1 sont situés à la même adresse que Z3 ; que le SFAE apparaît ainsi comme une structure susceptible de favoriser la concertation entre les entreprises lors de la passation de marchés concernant les laits infantiles ; qu'au vu de tous ses éléments, il peut être constaté une situation de concurrence déficiente dans les consultations successives relatives au marché de distribution de laits infantiles marquées à la fois par des présomptions d'échanges d'informations entre soumissionnaires pour en favoriser un, chacun à son tour, et par la possibilité d'envisager l'hypothèse d'un rééquilibrage des attributions entre eux sur d'autres marchés du secteur d'activité considéré ; que l'ensemble de ces agissements peut avoir été favorisé par des échanges d'informations entre les entreprises, que nous pouvons ainsi présumer une concertation prohibée par l'article L. 420-1, 2 et 4 du Code de commerce et par l'article 81-1 du traité de Rome qu'il convient de qualifier ; que s'agissant du 2 de l'article L. 420-1 du Code de commerce, à savoir, la pratique prohibée qui consiste à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ; que les différents procès-verbaux et autres documents produits mettent en exergue l'absence totale de concurrence par les prix entre les différents soumissionnaires ; que dans sa décision 00-D-66 du janvier 2001, le Conseil de la concurrence a relevé que les laits infantiles sont équivalents et parfaitement substituables entre eux ; que dans la décision précitée, le Conseil de la concurrence avait reconnu que la " participation des fournisseurs de laits infantiles à la pratique du tour de lait saurait être considérée comme une pratique contraire aux dispositions du livre IV du Code de commerce dès lors, d'une part, que cette participation aux tours de lait était la seule possibilité pour chacun d'entre eux d'assurer sa présence sur le marché compte tenu des demandes formulées par les maternités et que, d'autre part, aucun élément du dossier ne suggère que les fabricants se seraient entendus explicitement ou tacitement pour pérenniser cette pratique " ; que les indices et présomptions présentés semblent actuellement conforter l'hypothèse d'une entente entre les fabricants pour pérenniser cette pratique du tour de lait et annihiler toute velléité de concurrence entre les soumissionnaires par le prix dès lors que les laits proposés sont équivalents entre eux en raison de la réglementation ; que de tels comportements ne peuvent que faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ; que s'agissant du 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce, à savoir la pratique prohibée qui consiste à répartir les marchés ; que du fait même de la présomption précédente, portant sur une action concertée visant à restreindre le libre jeu de la concurrence en faveur des entreprises X, Z5, Y2, Z2, Y1, Z4, Z1 et Z3 se déduit la volonté de ces entreprises de se répartir les marchés, présomption de la pratique prohibée visée au point 4 de l'article L. 420-1 du Code précité ; que les difficultés rencontrées lors des procédures d'attribution des différents marchés visés à titre d'illustration des pratiques prohibées recherchées peuvent permettre d'envisager l'hypothèse d'un rééquilibrage des attributions sur d'autres marchés entre ces entreprises concernant le secteur de la distribution des laits infantiles ; que pour les marchés de distribution de laits infantiles des CHU de Bayonne, Bordeaux, Caen, Blois, Limoges, Poitiers et Toulouse, les agissements des entreprises candidates paraissent coordonnées ; que l'ensemble de ces comportements laisse en conséquence présumer l'existence de pratiques concertées au sens du point 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce ; que s'agissant des indices de pratiques anticoncurrentielles relatifs au marché italien, l'AGCM a demandé par courrier en date du 28 juin 2004 à son homologue française de bien vouloir mener une inspection afin de rechercher les preuves éventuelles d'une entente entre principaux fabricants européens de laits infantiles (annexe à la requête n° 2) ; que des interventions similaires sont également prévues à la demande de l'AGCM de manière simultanée dans d'autres Etats membres de l'Union européenne ; que l'AGCM demande à la DGCCRF de bien vouloir procéder à des investigations inopinées aux sièges français de trois fabricants de laits infantiles ; que les sociétés Z3, Y1 et Y2 qui commercialisent leurs produits en Italie sont visées par cette demande d'enquête ; que l'enquête menée par la DGCCRF dans le secteur de la distribution de laits infantiles vise également ces trois fabricants ; qu'il y a donc lieu de joindre les deux demandes d'enquête, qui ont pour objet la recherche des preuves de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la distribution de laits infantiles, la première sur le marché français aux fins de l'application de l'article L. 420-1, 2 et 4 du Code de commerce, la seconde sur le marché italien à la demande de l'AGCM aux fins de l'application de l'article 81-1 du traité de Rome, afin d'éviter une disparition inéluctable des éléments de preuve recherchés en cas d'intervention différée ; que l'AGCM dispose d'indices lui permettant de présumer une entente entre principaux fabricants européens de laits infantiles qui viserait à maintenir les prix du lait infantile artificiellement élevés sur le marché italien ; que le marché italien du lait infantile est caractérisé par une entrée récente des entreprises de la grande distribution dont Carrefour et Auchan ; que l'enquête menée par la Guardia di Finanza (police financière) montre que les prix de la grande distribution, sont bien plus élevés en Italie que dans les autres pays européens, que des plaintes de consommateurs et des articles de presse confirment cette situation ; que l'AGCM précise qu'aucune explication économique ne peut être avancée sérieusement pour justifier cette différence flagrante entre pays voisins, ni les coûts de transport ni ceux de réétiquetage des produits italiens ; que la présence du tour de lait dans les maternités et l'habitude des consommateurs d'acheter de préférence le lait conseillé par le pédiatre ne peuvent justifier la totale absence de concurrence ; que l'absence d'importations parallèles mais aussi la différence de marques et d'emballages pour un même fabricant laissent présumer une stratégie de segmentation des marchés nationaux et notamment du marché italien ; que des obstacles sont vraisemblablement posés par les fabricants pour empêcher les exportations en Italie des laits infantiles commercialisés en France par de grands distributeurs comme Carrefour et Auchan présents également dans la péninsule ; que l'absence de commerce parallèle transalpin et de volonté de peser sur les prix de la part des grands distributeurs français fait présumer une entente horizontale entre fabricants couvrant l'ensemble du territoire d'un Etat membre, pratique prohibée par l'article 81-1 du traité de Rome ; qu'ainsi la portée de nos présomptions est suffisante au regard des qualifications prévues à l'article L. 420-1 du Code de commerce dans ces points 2 et 4 et 81-1 du traité de Rome ; que la recherche de la preuve de ces pratiques nous apparaît justifiée ; par ailleurs que l'utilisation des pouvoirs définis à l'article L. 450-3 du Code de commerce ne paraît pas suffisante pour permettre à l'administration de corroborer ses soupçons ; qu'en effet, les actions concertées, conventions ou ententes qui ont pour effet de faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché ou se répartir les marchés sont établies suivant des modalités secrètes, et les documents nécessaires à la preuve des pratiques prohibées, sont vraisemblablement conservées dans des lieux et sous une forme qui facilitent leur dissimulation ou leur destruction en cas de vérification ; que le recours aux pouvoirs de l'article L. 450-4 du Code de commerce constitue donc le seul moyen d'atteindre les objectifs recherchés ; qu'en outre, les opérations de visite et de saisie sollicitées ne sont pas disproportionnées compte-tenu que les intérêts des entreprises et du syndicat de fabricants concernés sont garantis dès lors que les pouvoirs de l'administration sont utilisés sous notre contrôle ; qu'il convient de rechercher les lieux où se trouvent le plus vraisemblablement les documents nécessaires à l'apport de la preuve des pratiques présumées ; qu'il est vraisemblable que les documents utiles à l'apport de cette preuve se trouvent dans les locaux des entreprises Laboratoires Z1, Z3 France, Y2, Y1, X, Z4, Z2, Z5 et du syndicat de fabricants SFAE qui apparaissent au coeur des pratiques relevées dans le secteur de la distribution de laits infantiles ; qu'en outre existent des informations concordantes sur leur comportement ; que dès lors que ces locaux sont situés en des lieux différents, il est nécessaire de permettre aux enquêteurs d'intervenir simultanément dans ceux-ci afin d'éviter la disparition ou la dissimulation d'éléments matériels ; que des interventions sont également prévues de la part de l'autorité nationale de concurrence italienne sur son territoire et d'autres autorités nationales de concurrence de l'Union européenne sur leur territoire respectif de manière simultanée ; que la pluralité des locaux à visiter nécessite la désignation de plusieurs enquêteurs habilités par l'arrêté du 22 janvier 1993 complété par celui du 11 mars 1993 modifié ; que la collaboration des effectifs de la Direction Nationale d'Enquêtes de Concurrence, de Cconsommation et de Répression des Fraudes (DNECCRF), de la brigade interrégionale d'enquêtes de concurrence (BIEC) Bourgogne Franche-Comté Rhône-Alpes Auvergne, de la brigade interrégionale d'enquêtes de concurrence (BIEC) Nord, Pas-de-Calais, Picardie, et des directions départementales des Hauts-de-Seine, de l'Oise et de Seine-et-Marne est nécessaire ; que les directeurs régionaux qui ont respectivement autorité sur la DNECCRF et les BIEC Bourgogne Franche-Comté Rhône-Alpes Auvergne et Nord Pas-de-Calais Picardie occupent l'emploi de directeur régional tel que prévu par l'article 1er du décret n° 2002-593 du 24 avril 2002 ; qu'ils sont en conséquence fonctionnaires de catégorie A et habilités à procéder aux opérations prévues à l'article L. 450-4 susvisé, en application, de l'arrêté du 22 janvier 1993 ; que les directeurs départementaux qui ont respectivement autorité sur les directions départementales des Hauts-de-Seine, de l'Oise et de Seine-et-Marne sont titulaires de l'un des grades prévus à l'article 2 du décret du 2 août 1995 modifié ; qu'ils sont en conséquence fonctionnaires de catégorie A et habilités à procéder aux opérations prévues à l'article L. 450-4 précité en application de l'arrêté du 22 janvier 1993 ; que certaines de ces opérations doivent avoir lieu en dehors du ressort territorial de ce tribunal, qu'il convient de délivrer une commission rogatoire aux juges des libertés et de la détention aux Tribunaux de grande instance de Nanterre, Meaux, Compiègne et Villefranche-sur-Saône dans le ressort desquels lesdites opérations auront lieu afin qu'ils puissent designer les officiers de police judiciaire et exercer le contrôle prévu par l'article L. 450-4 du Code de commerce ; que la requête de Serge Fraichard, directeur régional à Paris, chef de la brigade interrégionale d'enquêtes de concurrence Ile-de-France, Basse-Normandie, Haute-Normandie, Réunion, Saint-Pierre-et-Miquelon, nous apparaît fondée ;

"alors que le juge, qui autorise des visites domiciliaires et des saisies, ne peut se fonder sur une pièce jointe à la requête qu'il a dénaturée ; qu'était jointe à la requête la décision n° 00-D-66 du 7 janvier 2001 du Conseil de la concurrence ; que, pour justifier, nonobstant les termes de cette décision, les visites et saisies autorisées, le juge des libertés et de la détention n'en a retranscrit que l'extrait incomplet d'un seul paragraphe (p. 214) ; qu'en omettant de prendre en considération l'intégralité des termes clairs et précis de cette décision qui comporte 23 pages explicitant de manière détaillée l'impossibilité pour les fournisseurs de lait infantile, malgré leurs tentatives pour l'éliminer ou, en tout cas, la limiter, d'échapper à la pratique des tours de lait rendant impossible le jeu d'une concurrence par les prix, le juge des libertés et de la détention a manifestement statué au prix d'une dénaturation par omission de ladite décision ;

"alors que l'ordonnance doit retenir des éléments d'informations constituant des présomptions de pratiques anti-concurrentielles ; que la simple constatation que des entreprises s'abstiennent de se concurrencer et alignent régulièrement leurs prix les unes sur les autres ne peut suffire pour qualifier leur attitude d'entente tacite au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce ; qu'un parallélisme de comportement peut traduire un jeu tout à fait normal du marché ; qu'en l'espèce, il résulte de la décision du Conseil de la concurrence n° 00-D-66 du 7 janvier 2001 que l'absence de concurrence par le prix sur le marché des laits infantiles est le fruit d'un jeu tout à fait normal du marché ; qu'en retenant que les indices et présomptions présentés semblent actuellement conforter l'hypothèse d'une entente entre les fabricants pour pérenniser cette pratique du tour de lait aux fins d'annihiler toute velléité de concurrence entre les soumissionnaires par le prix et de répartir les marchés sans préciser en quoi ces indices et présomptions remettaient en cause les conclusions du Conseil de la concurrence dans sa décision du 27 janvier 2001 retenant que les sociétés Y1 et Y2 n'avaient pu enfreindre les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, le juge des libertés et de la détention, qui n'a pas, en l'état de ses constatations et énonciations, justifié d'une induction légitime de faits de pratiques anticoncurrentielles n'a pas légalement justifié sa décision ;

"alors que le juge des libertés et de la détention doit se référer en les analysant fût-ce succinctement aux éléments d'information fournis par l'Administration dont il tire les faits fondant son appréciation ; qu'il doit donc décrire les pièces soumises à son appréciation et ne pas se borner à énoncer que les informations fournies par l'Administration laissent présumer que l'entreprise a participé à des pratiques anticoncurrentielles ; qu'en se bornant à se référer, en ce qui concerne le marché italien, à l'appréciation par l'AGCM, autorité nationale de concurrence italienne, des indices relevés par celle-ci lui permettant de présumer une entente entre les principaux fabricants européens de laits infantiles sans procéder à une appréciation personnelle des indices ainsi relevés, celui-ci a méconnu les articles susvisés" ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour la société X, pris de la violation des articles L. 421-1 et L. 450-4 du Code de commerce, 111 de l'ordonnance de Villers-Cotterêts d'août 1539, 81 du traité de Rome, 22 du règlement 1-2003 du 16 décembre 2002, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée du 7 juillet 2004 a autorisé une visite domiciliaire dans les locaux de la société X afin de rechercher la preuve d'une entente dans le secteur de la distribution de laits infantiles ;

"aux motifs qu'une première partie des documents communiqués à nous par l'Administration à l'appui de sa requête a été remise par les responsables des hôpitaux de Bayonne, Bordeaux, Caen, Blois, Limoges, Poitiers et Toulouse sur demande des Directions Départementales de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes des Pyrénées-Atlantiques, de la Gironde, du Calvados, du Loir-et-Cher, de la Haute-Vienne, de la Vienne et de la Haute-Garonne, en application des articles L. 450-2, L. 450-3 et L. 450-7 du Code de commerce ; qu'une seconde partie des documents communiqués à nous par l'Administration à l'appui de sa requête a été transmise par l'autorité nationale de concurrence italienne (Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato, AGCM) en application des articles 12 et 22 du règlement n° 1-2003 ; que la première partie des pièces présentées à l'appui de la requête a une origine apparemment licite et que celles-ci peuvent être utilisées pour la motivation de la présente ordonnance puisqu'elles émanent de la consultation de sites et banques de données électroniques accessibles au public, mais également de l'exercice par l'Administration de son droit de communication, qui semble en avoir usé de manière régulière; que la seconde partie des pièces présentées à l'appui de la requête a également une origine apparemment licite et que celles-ci peuvent être utilisées pour la motivation de la présente ordonnance puisque l'AGCM les a transmises à la DGCCRF en application de l'article 12 du règlement précité; que l'AGCM est une autorité nationale de concurrence d'un Etat membre de l'Union européenne ; qu'elle a fait état d'indices, de constatations et de conclusions fondés soit sur des documents accessibles au public tels que communiqué et article de presse et décision de l'autorité nationale de concurrence publiée, soit sur l'exercice par l'AGCM ou la brigade financière (Guardia di Finanza) de pouvoirs d'enquête dont la régularité ne semble pas avoir été contestée ; que, s'agissant des indices de pratiques anticoncurrentielles relevés en France, les marchés de distribution de laits infantiles pour lesquels il existe des présomptions d'ententes ne sont pas isolés, les marchés mentionnés n'étant que des illustrations de la pratique dont la preuve est recherchée dans le secteur concerné; que le centre hospitalier de Blois a lancé un appel à la concurrence concernant la fourniture de préparations à destination des nourrissons pour l'année 2004 ; que Marc Louis, directeur des achats, des équipements et de l'hôtellerie de l'hôpital de Blois indique dans son courrier du 2 décembre 2003 (annexe à la requête n° 6) que " l'établissement a lancé un appel à la concurrence auprès des sociétés Z4, Z3, Z1, X, Y2, Z2, Y1 et Z5. Je tiens à vous signaler que pour les lots 1 et 2, tous ces fournisseurs, comme les années précédentes depuis 1999, ont proposé le même prix unitaire (0,23 euro en 2004) pour les 24 000 nougatines de lait 1er âge et les 7 000 nourrettes de lait hypoallergéniques. Je vous précise ...que vos services ont été régulièrement informés de cette anomalie, constatée par tous les acheteurs hospitaliers" ; que les tableaux joints (annexe à la requête n° 6-1) font apparaître une identité de prix des soumissions pour l'ensemble des candidats; que la même constatation est effectuée par l'une des responsables du centre hospitalier de Bayonne ; que Nathalie Celotto, praticien hospitalier, précise dans son envoi du 31 mars 2003 (annexe à la requête n° 7) que " dès la première proposition, il faut constater, l'égalité des prix proposés quel que soit le fournisseur et quel que soit le type de lait, 0,23 euro hors taxes le mini-biberon" ; que lors de la mise en compétition organisée par l'hôpital de Bayonne, on retrouve en qualité de candidates les entreprises Z4, Z3, Z1, X, Y2, Z2 et Y1 ; que la passation par le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen d'un marché portant sur l'approvisionnement 2003 en laits infantiles et substitutifs-aliments destinés à des fins médicales spéciales pour adultes et enfants lancé et publié au BOAMP le 28 novembre 2002 avec annonce rectificative du 5 décembre 2002 semble confirmer les faits d'entente présumée entre les principaux soumissionnaires notamment en ce qui concerne les lots 4 à 7 laits pour nourrissons 1er âge (annexe à la requête n° 8) ; que le tableau récapitulatif des offres (annexe à la requête n° 8-1) montre un prix uniforme de 0,23 euro hors taxes le biberon proposé par l'ensemble des candidats intéressés par ces lots, à savoir les sociétés X, Z1, Y2, Z2, Y1 et Z3 ; que le même constat est opéré par le CHU de Bordeaux (annexe à la requête n° 9) ; que le rapport technique du 24 juillet 2002 qui accompagne le bordereau de transmission de documents à la DGCCRF du 25 septembre 2003 précise que "les sociétés de production de laits infantiles ont passé un accord national entre elles sur la vente de laits dans les maternités " ; que la nourrette fait l'objet d'une offre de prix équivalente à 0,23 euro hors taxes par les entreprises X, Z1, Y2, Z2, Y1 et Z3 s'agissant en particulier des laits standard des lots 1 et 2 ; que le procès-verbal en date du 9 juin 2004 (annexe à la requête n° 3) établi par Françoise Perier et Patrick Drouet, respectivement commissaire et inspecteur principal des services déconcentrés de la DGCCRF, recueillant les déclarations de Christian Lalande, ingénieur en chef chargé du pôle hôtelier du CHU de Toulouse mentionne que " Depuis 1999, nous lançons des consultations pour nos approvisionnements en nourrettes. Nous avons constaté que le tour de rôle (tour de lait) se poursuit. Dans le cadre de la rationalisation des achats qui me sont confiés, la situation n'étant pas satisfaisante, nous avons lancé une consultation en procédure adaptée en janvier 2004. Nous avons reçu 7 propositions tarifaires identiques au prix de 0,23 euro la nourrette (seul le conditionnement variait, 2 propositions à 100 ml et 5 à 90 ml). Ces offres ne permettant pas de procéder à un choix, ... nous avons adressé une invitation à l'ensemble des offreurs par courrier... pour une réunion le 22 avril 2004..." ; Christian Lalande a également déclaré dans ce même procès-verbal que " 5 des offreurs invités se sont présentés, les absents ayant fait savoir qu'ils seraient représentés par les présents...J'ai fait connaître mon étonnement aux personnes présentes quant à leurs offres tarifaires ne me permettant pas de faire un choix... que leur attitude s'apparentait à une entente et que la seule solution pour choisir un offreur était le tirage au sort. Les interlocuteurs se sont montrés étonnés de ma réaction et m'ont précisé que cette procédure d'achat était généralisée en France et que la manière dont ils répondaient était parfaitement légale. Je leur ai demandé de m'adresser le texte qui autorisait de telles pratiques, celui-ci ne m'a toujours pas été transmis" ; que Christian Lalande indique dans le procès-verbal précité que les entreprises présentes à la réunion du 22 avril 2004 ont refusé expressément ou tacitement la solution du tirage au sort ; que l'on retrouve pour cette mise en compétition organisée par l'hôpital de Toulouse et concernant le lait infantile les entreprises X, Z1, Y2, Z4, Z2, Y1 et Z3 ; que ces déclarations confirment les éléments d'information recueillis lors des procès-verbaux établis par les agents de la DGCCRF le 15 septembre 2003 (annexe à la requête n° 4) et le 5 novembre 2003 (annexe à la requête n° 5) où on retrouve respectivement comme candidates, dans le cadre de la consultation mise en œuvre par le CHU de Limoges, les sociétés X, Z1, Z4, Y1 et Z3 et pour celle lancée par le CHU de Poitiers, les sociétés X, Z1, Y2, Z4, Z2, Y1 et Z3 ; que pour le lait nourrettes 1er âge, ces deux consultations sont marquées de la même manière par une proposition généralisée à 0,23 euro hors taxes le mini-biberon ; que les entreprises qui interviennent dans le secteur du lait infantile appartiennent à une même organisation professionnelle, le syndicat français des aliments de l'enfance et de la diététique (SFAE) ; que les sociétés X, Z5, Y2, Z2, Y1 et Z3 figurent parmi les membres de ce syndicat (annexe à la requête n° 10-1); que Z4 et X qui appartiennent au groupe W sont situées à la même adresse; que les laboratoires Z1 sont situés à la même adresse que Z3 ; que le SFAE apparaît ainsi comme une structure susceptible de favoriser la concertation entre les entreprises lors de la passation de marchés concernant les laits infantiles; qu'au vu de tous ces éléments, il peut être constaté une situation de concurrence déficiente dans les consultations successives relatives au marché de distribution de laits infantiles marquées à la fois par des présomptions d'échanges d'informations entre soumissionnaires pour en favoriser un, chacun son tour, et par la possibilité d'envisager l'hypothèse d'un rééquilibrage des attributions entre eux sur d'autres marchés du secteur d'activité considéré; que l'ensemble de ces agissements peut avoir été favorisé par des échanges d'informations entre les entreprises, que nous pouvons ainsi présumer une concertation prohibée par l'article L. 420-1, 2 et 4 du Code de commerce et par l'article 81-1 du traité de Rome qu'il convient de qualifier ; s'agissant du 2 de l'article L. 420-1 du Code de commerce, à savoir, la pratique prohibée qui consiste à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ;

que les différents procès-verbaux et autres documents produits mettent en exergue l'absence totale de concurrence par les prix entre les différents soumissionnaires ; que dans sa décision 00-D-66 du 7 janvier 2001, le Conseil de la concurrence a relevé que les laits infantiles standard sont équivalents et parfaitement substituables entre eux ; que dans la décision précitée, le Conseil de la concurrence avait reconnu que " la participation des fournisseurs de laits infantiles à la pratique du tour de lait ne saurait être considérée comme une pratique contraire aux dispositions du livre IV du Code de commerce dès lors, d'une part, que cette participation aux tours de lait était la seule possibilité pour chacun d'entre eux d'assurer sa présence sur le marché compte tenu des demandes formulées par les maternités et que, d'autre part, aucun élément du dossier ne suggère que les fabricants se seraient entendus explicitement ou tacitement pour pérenniser cette pratique... " ; que les indices et présomptions présentés semblent actuellement conforter l'hypothèse d'une entente entre les fabricants pour pérenniser cette pratique du tour de lait et annihiler toute velléité de concurrence entre les soumissionnaires par le prix dès lors que les laits proposés sont équivalents entre eux en raison de la réglementation ; que de tels comportements ne peuvent que faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse; s'agissant du 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce, à savoir, la pratique prohibée qui consiste à répartir les marchés; que du fait même de la présomption précédente, portant sur une action concertée visant à restreindre le libre jeu de la concurrence en faveur des entreprises X, Z5, Y2, Z2, Y1, Z4, Z1 et Z3 se déduit la volonté de ces entreprises de se répartir les marchés, présomption de la pratique prohibée visée au point 4 de l'article L. 420-1 du Code précité ; que les difficultés rencontrées lors des procédures d'attribution des différents marchés visés à titre d'illustration des pratiques prohibées recherchées peuvent permettre d'envisager l'hypothèse d'un rééquilibrage des attributions sur d'autres marchés entre ces entreprises concernant le secteur de la distribution de laits infantiles ; que pour les marchés de distribution de laits infantiles des CHU de Bayonne, Bordeaux, Caen, Blois, Limoges, Poitiers et Toulouse, les agissements des entreprises candidates paraissent coordonnés ; que l'ensemble de ces comportements laisse en conséquence présumer l'existence de pratiques concertées au sens du point 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce ; que, s'agissant des indices de pratiques anticoncurrentielles relatifs au marché italien, l' AGCM a demandé par courrier en date du 28 juin 2004 à son homologue française de bien vouloir mener une inspection afin de rechercher les preuves éventuelles d'une entente entre principaux fabricants européens de laits infantiles (annexe à la requête n° 2) ; que des interventions similaires sont également prévues à la demande de l'AGCM de manière simultanée dans d'autres Etats membres de l'Union européenne ; que l' AGCM demande à la DGCCRF de bien vouloir procéder à des investigations inopinées aux sièges français de trois fabricants de laits infantiles ; que les sociétés Z3, Y1 et Y2 qui commercialisent leurs produits en Italie sont visées par cette demande d'enquête ; que l'enquête menée par la DGCCRF dans le secteur de la distribution de laits infantiles vise également ces trois fabricants ; qu'il y a donc lieu de joindre les deux demandes d'enquête, qui ont pour objet la recherche de preuves de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la distribution de laits infantiles, la première sur le marché français aux fins de l'application de l'article L. 420-1, 2 et 4 du Code de commerce, la seconde sur le marché italien à la demande de l'AGCM aux fins de l'application de l'article 81-1 du traité de Rome, afin d'éviter une disparition inéluctable des éléments de preuve recherchés en cas d'intervention différée ; que l'AGCM dispose d'indices lui permettant de présumer une entente entre principaux fabricants européens de laits infantiles qui viserait à maintenir les prix du lait infantile artificiellement élevés sur le marché italien ; que le marché italien du lait infantile est caractérisé par une entrée récente des entreprises de la grande distribution, dont Carrefour et Auchan; que l'enquête menée par la Guardia di Finanza (police financière) montre que les prix dans la grande distribution sont bien plus élevés en Italie que dans les autres pays européens ; que des plaintes de consommateurs et des articles de presse confirment cette situation ; que l'AGCM précise qu'aucune explication économique ne peut être avancée sérieusement pour justifier cette différence flagrante de prix entre pays voisins, ni les coûts de transport ni celui de réétiquetage des produits en italien ; que la présence du tour de lait dans les maternités et l'habitude des consommateurs d'acheter de préférence le lait conseillé par le pédiatre ne peuvent justifier la totale absence de concurrence ; que l'absence d'importations parallèles mais aussi la différence de marques et d'emballages pour un même fabricant laissent présumer une stratégie de segmentation des marchés nationaux et notamment du marché italien ; que des obstacles sont vraisemblablement posés par les fabricants pour empêcher les exportations en Italie des laits infantiles commercialisés en France par de grands distributeurs comme Carrefour et Auchan présents également dans la péninsule ; que l'absence de commerce parallèle transalpin et de volonté de peser sur les prix de la part des grands distributeurs français fait présumer une entente horizontale entre fabricants couvrant l'ensemble du territoire d'un Etat membre, pratique prohibée par l'article 81-1 du traité de Rome ; qu'ainsi la portée de nos présomptions est suffisante au regard des qualifications prévues à l'article L. 420-1 du Code de commerce dans ces points 2 et 4 et 81-1 du traité de Rome ; que la recherche de la preuve de ces pratiques nous apparaît justifiée ;

"alors que, lorsque le juge des libertés et de la détention autorise une visite domiciliaire au sens de l'article L. 450-4 du Code de commerce, l'objet de l'enquête ne doit être ni général ni indéterminé quant aux agissements visés ; que les pièces produites par l'administration française ne concernaient que le marché spécifique de la distribution de laits infantiles, sous forme de nourrettes, auprès des maternités ; qu'en ayant retenu des présomptions et des agissements déterminés à l'encontre des sociétés intervenant sur ce seul marché, le juge ne pouvait autoriser les visites portant d'une manière générale sur la distribution en France de laits infantiles ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge a violé les articles visés au moyen ;

"alors qu'il en est d'autant plus ainsi que l'attribution des marchés de nourrettes de lait auprès des maternités repose sur une procédure d'appel d'offres de sorte qu'en étendant le champ de l'autorisation à l'ensemble des marchés de gré à gré portant sur la distribution de lait en France, l'ordonnance attaquée viole gravement les exigences des textes susvisés ;

"alors qu'en prenant prétexte d'une demande d'enquête émanant d'une autorité italienne dont était parallèlement saisie la Direction Française de la Concurrence, pour élargir, sous couvert d'une ordonnance unique, le champ de l'enquête demandée par le ministère de l'Economie et des Finances, laquelle ne visait que les procédures d'appel d'offres pour le marché des nourrettes de lait auprès des maternités, l'ordonnance attaquée méconnaît les textes susvisés ;

"alors, au surplus, qu'aux termes de l'article 22 du règlement CE n° 1-2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité, "une autorité de concurrence d'un Etat membre peut exécuter sur son territoire toute inspection ou autre mesure d'enquête en application de son droit national au nom et pour le compte de l'autorité de concurrence d'un autre Etat membre afin d'établir une infraction aux dispositions de l'article 81 ou 82 du traité. Le cas échéant, les informations sont communiquées et utilisées conformément à l'article 12 " ; qu'il ressort de ce texte que l'autorité nationale requise agit au nom et pour le compte de l'autorité requérante, de telle sorte qu'elle trouve son champ d'investigation limité par les termes mêmes de la demande d'assistance de l'autorité étrangère ; qu'au cas présent, la demande présentée par les autorités italiennes concernait le marché de la distribution de laits infantiles auprès des magasins de la grande distribution en Italie et ne visait que les sociétés Z3 et Y2 de sorte qu'en étendant l'autorisation des visites dans les locaux de la société X sur le marché de la distribution des laits infantiles, le juge, qui a autorisé des perquisitions dans les locaux d'une société non visée par la demande d'enquête émanant des autorités italiennes, a excédé les limites de sa saisine violant les articles visés au moyen ;

"alors qu'aux termes de l'article 111 de l'ordonnance de Villers-Cotterêts d'août 1539, applicable à toutes les procédures introduites devant les juridictions françaises, doivent être libellés en langue française les registres, enquêtes, contrats, commissions, sentences, testaments et autres quelconques actes et exploits de justice ; qu'en l'espèce, pour justifier du bien fondé de la demande d'enquête, les autorités de la concurrence italiennes ont produit des pièces exclusivement libellées en italien ; que, faute d'avoir été traduites, le juge des libertés et de la détention se devait de les écarter ; qu'en autorisant des perquisitions et saisies sur la base de prétendues présomptions que ces documents auraient permis de caractériser, le juge a violé les articles visés au moyen ;

"alors que le juge qui autorise une visite domiciliaire est tenu, en application de l'article L. 450-4 du Code de commerce d'examiner les pièces, fût-ce succinctement pour s'assurer du bien fondé de la demande ; que le juge qui prétend justifier de la nécessité de la mesure en se basant sur des pièces libellées en italien et non traduites ne met pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, violant les articles visés au moyen ;

"alors que le juge qui autorise une visite domiciliaire est tenu de s'assurer concrètement que les pièces ont été obtenues d'une manière licite ; que ne satisfait pas à cette exigence le juge qui déduit la licéité des pièces sur lesquelles il se fonde du seul fait qu'elles auraient été transmises par l'autorité italienne de la concurrence en vertu de l'article 12 du règlement 1-2003 ou de l'exercice par l'autorité italienne de ses pouvoirs d'enquête dont la régularité n'aurait pas été contestée, constatation qui ne permettait pas au juge de se prononcer sur la licéité des pièces en cause et ce, de surcroît, qu'elles n'avaient pas été traduites ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge a violé les articles visés au moyen ;

"alors qu'en tout état de cause, il appartient au juge de caractériser des présomptions d'entente ou de pratiques illicites ; que l'ordonnance attaquée, qui ordonne des perquisitions sur l'unique constatation d'une prétendue identité de prix proposé par les concurrents, et qui ne relève aucun élément pouvant laisser présumer que cette identité de prix serait le fait d'une concertation ayant pour but le maintien d'un certain niveau du prix et une répartition du marché, viole derechef les textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'ordonnance attaquée mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer qu'elle n'encourt pas les griefs allégués ;

Attendu qu'en premier lieu, les motifs et le dispositif de l'ordonnance sont réputés avoir été établis par le juge qui l'a rendue et signée ;

Attendu qu'en deuxième lieu, l'article L. 450 du Code du commerce ne prévoit aucun délai entre la présentation de la requête et le prononcé de la décision d'autorisation ; que le nombre de pièces produites ne saurait, en soi, laisser présumer que le juge s'est trouvé dans l'impossibilité de les examiner et d'en déduire l'existence de pratiques anticoncurrentielles ; que la circonstance que l'ordonnance a été rendue le jour même de la présentation de la requête est sans incidence sur sa régularité ;

Attendu qu'en troisième lieu, aucune disposition de l'article L. 450 du Code du commerce n'impose au juge des libertés et de la détention, de statuer en présence du Ministère public ;

Attendu qu'en quatrième lieu, l'ordonnance de Villers-Cotterêts ne concerne que les actes de procédure ; qu'il appartient au juge, dans l'exercice de son pouvoir souverain, d'apprécier la force probante des éléments de preuve qui lui sont soumis ;

Attendu qu'en cinquième lieu, le juge, s'étant référé, en les analysant, aux éléments d'information fournis par l'Administration, a souverainement apprécié l'existence des présomptions d'agissements frauduleux justifiant la mesure autorisée, toute autre contestation quant à la valeur des éléments retenus, relevant du contentieux dont peuvent être saisies les juridictions éventuellement appelées à statuer sur les résultats de la mesure autorisée ;

Attendu qu'en sixième lieu, en autorisant des visites et saisies de documents, en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la distribution de laits infantiles, telles qu'elles sont décrites et analysées, dans son ordonnance, qui visait les agissements anticoncurrentiels prohibés par l'article L. 420-1, 2 et 4, du Code de commerce, le juge des libertés et de la détention, qui n'a pas délivré une autorisation indéterminée, a respecté les prescriptions de l'article L. 450-4 dudit Code ;

Attendu qu'en septième lieu, l'ordonnance mentionne que les pièces produites à l'appui de la requête ont une origine apparemment licite; que toute contestation au fond sur ce point relève du contentieux dont peuvent être saisies les juridictions éventuellement appelées à statuer sur les résultats de la mesure autorisée ;

Attendu qu'enfin, les dispositions de l'article L. 450 du Code du commerce ne contreviennent pas à celles des articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, dès lors que, d'une part, le droit à un procès équitable est garanti tant par l'intervention du juge qui vérifie le bien fondé de la requête de l'administration de la concurrence que par le contrôle effectué par la Cour de cassation devant laquelle est exercé un recours effectif, et que, d'autre part, ces dispositions assurent la conciliation du principe de la liberté individuelle et des nécessités de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles ; d'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;

Rejette les pourvois.