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Décisions

CJCE, 27 octobre 1992, n° C-240/90

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

République fédérale d'Allemagne

Défendeur :

Commission des Communautés européennes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Due

Présidents de chambre :

MM. Kakouris, Rodríguez Iglesias, Zuleeg, Murray

Avocat général :

M. Jacobs

Juges :

MM. Mancini, Joliet, Schockweiler, Moitinho de Almeida, Díez de Velasco, Kapteyn

CJCE n° C-240/90

27 octobre 1992

LA COUR,

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 1er août 1990, la République fédérale d'Allemagne a demandé, en vertu de l'article 173, premier alinéa, du traité CEE, l'annulation de l'article 6, paragraphe 6, du règlement (CEE) n° 3007-84 de la Commission, du 26 octobre 1984, portant modalités d'application de la prime au bénéfice des producteurs de viande ovine (JO L 283, p. 28), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 1260-90, du 11 mai 1990 (JO L 124, p. 15), et de l'article 13, paragraphe 3, sous b) et c), du règlement (CEE) n° 3813-89 de la Commission, du 19 décembre 1989, portant modalités d'application du régime d'aides transitoires au revenu agricole (JO L 371, p. 17), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 1279-90, du 15 mai 1990 (JO L 126, p. 20).

2 Ces dispositions établissent des sanctions à appliquer par les autorités nationales aux opérateurs qui ont commis des irrégularités lors de l'introduction d'une demande visant à l'obtention d'une aide financière prévue par des règlements du Conseil. Ces sanctions consistent soit dans le paiement d'une majoration calculée sur le montant de l'aide indûment versée, soit dans l'exclusion de l'opérateur du bénéfice de l'aide ou du régime d'aides pendant la campagne qui suit celle au cours de laquelle l'irrégularité a été constatée.

3 La première disposition attaquée, l'article 6, paragraphe 6, du règlement n° 3007-84, se rapporte à l'organisation commune des marchés dans le secteur des viandes ovine et caprine mise en place par le règlement (CEE) n° 3013-89 du Conseil, du 25 septembre 1989 (JO L 289, p. 1, ci-après "premier règlement de base"). L'article 5 de ce règlement prévoit l'octroi, à certaines conditions, d'une prime aux producteurs de viande ovine.

4 En application du paragraphe 9, troisième tiret, de l'article 5, précité, la Commission est habilitée à arrêter, selon la procédure des comités de gestion prévue à l'article 30 du même règlement, les modalités d'application de l'ensemble de cet article et notamment celles relatives à la présentation des demandes de prime et à leur versement.

5 C'est sur la base de cette disposition que le règlement n° 1260-90, précité, a modifié l'article 6 du règlement n° 3007-84, du 26 octobre 1984 (ci-après "premier règlement d'application"). Cet article 6, tel que modifié, prévoit en son paragraphe 1 que, si le nombre d'animaux effectivement éligibles résultant du contrôle visé à l'article précédent est inférieur à celui pour lequel la demande de primes a été déposée, aucune prime ne sera en principe versée. L'article 6, paragraphe 5, dispose ensuite que les montants versés indûment seront recouvrés, augmentés d'un intérêt à déterminer par l'État membre à compter de la date du versement de la prime jusqu'à son recouvrement. Au cas où il serait constaté que l'écart découle d'une fausse déclaration faite délibérément ou par négligence grave, le paragraphe 6 de la même disposition instaure alors la sanction suivante: le producteur est également exclu du bénéfice de la prime pour la campagne de commercialisation postérieure à celle pour laquelle l'irrégularité est constatée.

6 Les autres dispositions litigieuses ont trait au régime d'aides transitoires au revenu agricole institué par le règlement (CEE) n° 768-89 du Conseil, du 21 mars 1989 (JO L 84, p. 8, ci-après "second règlement de base"). Ce règlement a créé la possibilité d'octroyer une aide transitoire aux agriculteurs remplissant certaines conditions. L'article 12 de ce règlement dispose que les modalités d'application de ce règlement seront arrêtées selon la procédure des comités de gestion prévue à l'article 13 du même règlement.

7 Sur la base de ces dispositions, la Commission a arrêté le règlement n° 3813-89, du 19 décembre 1989 (ci-après "second règlement d'application"). L'article 13, paragraphe 3, de ce règlement, tel que modifié par le règlement n° 1279-90, précité, est rédigé dans les termes suivants:

"Lorsqu'une ARA (aide au revenu agricole) s'avère avoir été octroyée sur la base de données inexactes fournies et certifiées par l'agriculteur, l'État membre concerné adopte les mesures suivantes:

a) l'agriculteur est tenu de restituer le montant de l'aide indûment versée, majoré d'un intérêt courant à compter de la date du versement de l'aide, jusqu'à son recouvrement. Le taux d'intérêt appliqué est celui en vigueur pour des opérations de recouvrement analogues en droit national;

b) en outre, lorsque l'autorité compétente établit que le montant a été indûment versé par suite de graves irrégularités de l'agriculteur, l'État membre,

- soit, dans tous les cas, met à la charge de l'agriculteur un montant équivalent à 30 % du montant indûment versé,

- soit, de manière générale, met à la charge de l'agriculteur un montant équivalent à 30 % du montant indûment versé, mais se réserve d'appliquer, en fonction de la gravité du cas considéré, un montant non inférieur à 20 % et non supérieur à 40 % de l'aide indûment versée;

c) en outre, un agriculteur responsable de la communication de données inexactes donnant lieu à l'application des dispositions de la lettre b) est exclu du bénéfice de l'aide au titre de quelque PARA (programme d'aide au revenu agricole) que ce soit pendant une période de douze mois à partir de la date d'application desdites dispositions. En ce qui concerne les aides capitalisées, l'État membre concerné adopte les mesures nécessaires pour garantir un traitement équivalent à celui applicable au cas de non-capitalisation des paiements;

..."

Ce sont les lettres b) et c) de cette dernière disposition qui ont été mises en cause par le Gouvernement allemand dans le cadre du présent recours.

8 Ainsi qu'il a déjà été souligné, les dispositions attaquées doivent être rangées en deux catégories: d'une part, l'article 13, paragraphe 3, sous b), du second règlement d'application modifié de la Commission qui impose à l'agriculteur défaillant le paiement d'un montant qui s'ajoute au remboursement, avec intérêts, de la prime déjà payée (ci-après "majorations"); d'autre part, l'article 6, paragraphe 6, du premier règlement d'application et l'article 13, paragraphe 3, sous c), du second règlement d'application, modifiés, qui obligent les autorités nationales à exclure pendant un an les opérateurs du bénéfice de la subvention ou du régime de subventions concerné (ci-après "exclusions").

9 A l'encontre de ces mesures, le Gouvernement allemand invoque deux moyens. Le premier consiste à nier la compétence de la Communauté, le second, celle de la Commission.

Sur la compétence de la Communauté

10 A titre liminaire, il convient de constater que ce premier moyen ne concerne que les dispositions précitées relatives aux exclusions. En d'autres termes, le Gouvernement allemand ne conteste pas que la Communauté soit compétente pour instaurer des sanctions telles que le paiement des majorations prévues par l'article 13, paragraphe 3, sous b), du second règlement d'application.

11 A cet égard, il y a lieu tout d'abord de rappeler que le pouvoir d'instituer les sanctions qui sont nécessaires à l'application effective des réglementations existant dans le domaine de la politique agricole commune a été reconnu à diverses reprises par la Cour à la Communauté. Ce pouvoir est fondé sur l'article 40, paragraphe 3, et l'article 43, paragraphe 2, du traité.

12 De la jurisprudence, il résulte que ces sanctions peuvent revêtir différentes formes. Ainsi, par exemple, la Cour a-t-elle admis la licéité de mesures consistant à infliger à un opérateur le remboursement, majoré d'intérêts, d'un avantage indûment perçu (voir arrêt du 5 février 1987, Plange Kraftfutterwerke, 288-85, Rec. p. 611) ou encore la perte de la caution équivalant à cet avantage (voir notamment arrêt du 27 novembre 1991, Italtrade, C-199-90, Rec. p. I-5545). De la même manière, elle a estimé que l'abandon d'une caution constituait une sanction conforme au droit communautaire dans des hypothèses où cette caution servait seulement à garantir l'obligation d'exporter, contractée par les intéressés, et où ceux-ci n'avaient reçu aucun avantage pécuniaire de la Communauté (voir arrêts du 17 décembre 1970, Internationale Handelsgesellschaft, 11-70, Rec. p. 1125, et du 18 novembre 1987, Maizena, 137-85, Rec. p. 4587).

13 Ce pouvoir de sanction implique que, dans le domaine de la politique agricole commune, la Communauté est habilitée à édicter des sanctions applicables par les autorités nationales à l'encontre des opérateurs économiques qui se sont rendus coupables de fraude.

14 Dans le cadre du présent recours, le Gouvernement allemand soutient que la compétence de sanction de la Communauté qui vient d'être évoquée ne s'étend pas aux exclusions. Les motifs qu'il invoque à cet égard sont de trois ordres.

15 Tout d'abord, les exclusions seraient des mesures trop différentes de celles qui sont énumérées à l'article 40 pour être couvertes par la norme d'habilitation contenue dans cette disposition. A cet égard, il souligne que, dès lors qu'ils sont exercés dans le domaine des sanctions, les pouvoirs de la Communauté doivent être interprétés de manière restrictive.

16 De l'article 87, paragraphe 2, sous a), du traité, le Gouvernement allemand déduit ensuite que les amendes et les astreintes sont les seules sanctions autorisées en droit communautaire. Vu que leurs conséquences ne sont pas quantifiables pour les opérateurs économiques concernés, les exclusions, à la différence des majorations, ne pourraient être assimilées à ces deux types de sanctions.

17 Le Gouvernement allemand fait enfin valoir que les exclusions constituent des sanctions pénales que ni le Conseil ni la Commission n'ont le pouvoir d'instituer. Ces sanctions seraient en effet l'expression d'un jugement dépréciatif porté sur l'opérateur qui a commis l'irrégularité.

18 Cette argumentation ne saurait être accueillie. Au premier argument invoqué par le Gouvernement allemand, il convient en effet de répondre, d'une part, que les mesures énoncées par l'article 40, paragraphe 3, n'ont qu'une valeur d'exemple et que, d'autre part, les exclusions satisfont à la seule condition que pose cette disposition pour relever des pouvoirs de la Communauté, à savoir que les mesures envisagées soient nécessaires à la réalisation des objectifs de la politique agricole commune.

19 A cet égard, il y a lieu de souligner que, comme le Gouvernement allemand le reconnaît lui-même, les exclusions, comme d'ailleurs les majorations, sont destinées à lutter contre les nombreuses irrégularités qui sont commises dans le cadre des aides à l'agriculture et qui, en grevant lourdement le budget de la Communauté, sont de nature à compromettre les actions entreprises par les institutions dans ce domaine pour stabiliser les marchés, soutenir le niveau de vie des agriculteurs et assurer des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs.

20 Il y a lieu d'ajouter, par ailleurs, qu'il appartient au seul législateur communautaire de déterminer les solutions qui sont les plus adéquates en vue de la réalisation des objectifs de la politique agricole commune. En l'occurrence, ce législateur, en prévoyant des exclusions pour réprimer les irrégularités commises par les opérateurs dans le cadre des régimes de subvention dont il est question dans le présent recours, n'a pas dépassé les limites de ses pouvoirs.

21 Il convient d'observer à cet égard que, les demandes de subventions étant trop nombreuses pour être soumises à des contrôles systématiques et complets, un renforcement des contrôles existants est difficilement envisageable. De même, l'application de sanctions nationales ne permettrait pas de garantir l'uniformité des mesures appliquées aux fraudeurs.

22 Il y a lieu, par conséquent, de conclure que rien dans l'article 40, paragraphe 3, du traité ne permet de soustraire les exclusions du pouvoir de sanction que détient la Communauté dans le domaine de la politique agricole commune.

23 Les deux autres arguments invoqués par le Gouvernement allemand ne sont pas plus pertinents. A l'argument déduit de l'article 87, paragraphe 2, sous a), du traité, il convient d'objecter que cette disposition ne concerne que les sanctions qui sont déterminées et infligées directement par les institutions communautaires. Étant donné que les exclusions litigieuses sont destinées à être appliquées par les autorités nationales conformément aux dispositions uniformes du droit communautaire, l'article 87, paragraphe 2, sous a), du traité ne saurait servir de point de référence dans le cadre du présent recours.

24 S'agissant du dernier argument avancé par le Gouvernement allemand, il convient, tout d'abord, de faire observer qu'il n'y a pas lieu, dans le cadre du présent litige, de se prononcer sur la compétence de la Communauté dans le domaine pénal.

25 En effet, les exclusions litigieuses ne constituent pas des sanctions pénales. A cet égard, le Gouvernement allemand, qui n'a pas contesté le pouvoir de la Communauté d'établir des majorations telles que celles qui sont contestées dans le présent recours, n'a pas démontré qu'il existait une différence fondamentale entre la sanction consistant à infliger à un opérateur le paiement d'une telle majoration et celle consistant à priver ce même opérateur du droit de bénéficier d'un avantage pendant une certaine période. Dans les deux hypothèses, la personne visée subit une perte financière qui va au-delà du simple remboursement, éventuellement augmenté d'intérêts, des prestations indûment perçues.

26 Il y a lieu, ensuite, de considérer que l'application d'une sanction à un opérateur économique suppose que, au préalable, ce dernier se soit vu reconnaître un droit. Celui-ci, dès lors qu'il se rapporte à un régime d'aides communautaire alimenté par des fonds publics et fondé sur une idée de solidarité, doit être subordonné à la condition que son bénéficiaire présente toutes les garanties de probité et de fiabilité. Dans cette perspective, la sanction attaquée constitue un instrument administratif spécifique faisant partie intégrante du régime d'aides et destiné à assurer la bonne gestion financière des fonds publics communautaires.

27 De ce qui précède, il résulte que le Gouvernement allemand n'a invoqué aucune raison qui justifierait de soustraire les exclusions du pouvoir de sanction que détient la Communauté dans le domaine de la politique agricole commune. Celle-ci doit, par conséquent, être considérée comme compétente pour les établir.

28 Il en va d'autant plus ainsi que, dans l'arrêt Internationale Handelsgesellschaft, précité, la Cour a, ainsi qu'il a déjà été rappelé, reconnu la licéité de sanctions qui, comme les exclusions et d'ailleurs les majorations, également contestées dans le cadre de ce recours, ne se limitent pas au simple remboursement, éventuellement augmenté d'intérêts, d'une prestation indûment versée.

29 Des considérations qui précèdent, il résulte que la Communauté est compétente pour établir des sanctions qui, comme les exclusions prévues par l'article 6, paragraphe 6, du premier règlement d'application et l'article 13, paragraphe 3, sous c), du second règlement d'application, vont au-delà de la simple restitution d'une prestation indûment versée.

Sur la compétence de la Commission

30 Dans le cadre de ce second moyen, le Gouvernement allemand considère que seul le Conseil a le pouvoir d'instituer des sanctions telles que les majorations et qu'en aucun cas cette compétence ne peut être déléguée à la Commission. A supposer que le pouvoir d'établir des exclusions soit reconnu à la Communauté, le Gouvernement allemand estime que la Commission ne saurait pas davantage être habilitée à l'exercer.

31 A l'appui de sa position, le gouvernement requérant fait tout d'abord valoir que le traité, lorsqu'il se réfère à l'institution de sanctions, ne mentionne que le Conseil. Tel serait le cas de l'article 87, paragraphe 2, sous a), qui invite le Conseil, et non la Commission, à prévoir des amendes et des astreintes dans les actes qu'il arrête en application de l'article 87, paragraphe 1, et de l'article 172 qui attribue compétence de pleine juridiction à la Cour en ce qui concerne les sanctions prévues dans les seuls règlements du Conseil.

32 Le Gouvernement allemand invoque, ensuite, le principe de la légalité, selon lequel l'institution de sanctions relève du seul pouvoir du législateur, et le principe de l'équilibre institutionnel. En sa qualité de législateur de la Communauté, le Conseil serait seul habilité à fixer les composantes essentielles des organisations communes de marché. Des sanctions qui, comme les exclusions et les majorations, vont au-delà du simple remboursement d'une prestation indue et touchent donc aux droits fondamentaux des individus feraient partie de ces composantes essentielles.

33 Enfin, selon le gouvernement requérant, l'institution de sanctions à l'encontre des opérateurs qui ont commis des irrégularités ne saurait être considérée comme l'exercice d'une compétence d'exécution au sens des articles 145 et 155 du traité. L'objectif de telles règles serait non pas d'exécuter les règlements de base du Conseil, mais de les compléter.

34 Pour répondre à cette argumentation, il y a lieu, tout d'abord, d'écarter les articles 87, paragraphe 2, sous a), et 172 du traité. Comme il a déjà été dit au point 23 pour l'article 87, paragraphe 2, sous a), l'article 172 ne concerne que les sanctions qui sont déterminées et infligées directement par les institutions communautaires. Or, tel n'est pas le cas des sanctions qui sont au centre du présent litige.

35 Pour le surplus, il y a lieu de se référer au système législatif établi par le traité. Si l'article 43, paragraphe 2, troisième alinéa, attribue en principe compétence au Conseil pour adopter, sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, les règles relatives à une organisation commune de marché, les articles 145 et 155 permettent par ailleurs au Conseil de conférer à la Commission, dans les actes qu'il adopte, les compétences d'exécution des règles qu'il établit. L'article 145 prévoit toutefois que le Conseil peut, dans des cas spécifiques, se réserver l'exercice de ces compétences.

36 Ainsi qu'il résulte de l'arrêt du 17 décembre 1970, Koester, point 6 (25-70, Rec. p. 1161), les dispositions précitées établissent une distinction entre, d'une part, les règles qui, présentant un caractère essentiel pour la matière envisagée, doivent être réservées à la compétence du Conseil et, d'autre part, les règles qui, n'en étant que l'exécution, peuvent faire l'objet d'une délégation à la Commission.

37 En l'occurrence, les règles contestées par le Gouvernement allemand ne sauraient être qualifiées d'essentielles pour l'organisation commune de marché établie par le premier règlement de base et le régime d'aides institué par le second règlement de base. Cette qualification doit, en effet, être réservée aux dispositions qui ont pour objet de traduire les orientations fondamentales de la politique communautaire. Tel ne saurait être le cas de sanctions qui, comme les majorations ou les exclusions, sont destinées à garantir ces choix en assurant la bonne gestion financière des fonds communautaires devant servir à leur réalisation.

38 Enfin, il convient d'ajouter que l'inclusion du pouvoir de sanction dans les compétences d'exécution a déjà été admise par la Cour dans l'arrêt Koester, précité. Pour rappel, dans cet arrêt, il a en effet été jugé que les dispositions qui subordonnaient la délivrance d'un certificat d'exportation à la constitution d'une caution et qui prévoyaient la perte de cette caution lorsque l'obligation d'exporter n'était pas remplie dans les délais requis relevaient des compétences d'exécution de la Commission. Comme les majorations et les exclusions qui sont à l'origine du présent recours, cette sanction ne consistait pas dans la simple restitution d'une prestation indue.

39 En conséquence, il y a lieu de conclure que les mesures consistant à instituer des sanctions telles que des majorations et des exclusions pour le cas où l'opérateur économique concerné communiquerait de faux renseignements à l'administration n'excèdent pas le cadre de l'exécution des principes établis dans les règlements de base et que, dès lors que le Conseil ne se l'est pas réservée, cette compétence a pu faire l'objet d'une délégation à la Commission.

40 A titre subsidiaire, le Gouvernement allemand soutient que, à supposer que le pouvoir d'édicter les sanctions litigieuses ait pu faire l'objet d'une délégation à la Commission, l'article 5, paragraphe 9, troisième tiret, du premier règlement de base et l'article 12 du second règlement de base ont été rédigés dans des termes trop généraux pour produire cet effet. Il invoque à cet égard l'article 1er, premier alinéa, deuxième phrase, de la décision 87-373-CEE du Conseil, du 13 juillet 1987, fixant les modalités de l'exercice des compétences d'exécution conférées à la Commission (JO L 197, p. 33), selon lequel le Conseil précise les éléments essentiels des compétences d'exécution conférées à la Commission. En l'espèce, cette disposition aurait obligé le Conseil à habiliter expressément la Commission à établir des sanctions, voire à fixer la nature et le niveau maximum de celles-ci.

41 Cette argumentation n'est pas non plus pertinente. De l'arrêt Koester, précité, il ressort que, dès lors que le Conseil a fixé dans son règlement de base les règles essentielles de la matière envisagée, il peut déléguer à la Commission le pouvoir général d'en arrêter les modalités d'application sans avoir à préciser les éléments essentiels des compétences déléguées et que, pour ce faire, une disposition rédigée dans des termes généraux fournit une base d'habilitation suffisante.

42 Ce principe ne saurait être remis en cause par la décision précitée. Constituant un acte de droit dérivé, celle-ci ne peut, en effet, ajouter aux règles du traité, lesquelles n'obligent pas le Conseil à préciser les éléments essentiels des compétences d'exécution déléguées à la Commission.

43 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que la Commission est compétente pour établir les majorations et les exclusions prévues par les articles 6, paragraphe 6, du premier règlement d'application et l'article 13, paragraphe 3, sous b) et c), du second règlement d'application.

44 Il y a lieu, par conséquent, de rejeter le recours.

Sur les dépens

45 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. La République fédérale d'Allemagne ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté.

2) La République fédérale d'Allemagne est condamnée aux dépens.