Cass. crim., 20 novembre 2001, n° 00-86.414
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
Mme Ferrari
Avocat général :
M. Chemithe
Avocats :
SCP Piwnica, Molinié
LA COUR : - Rejet du pourvoi formé par X Jean-Pierre, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du 13 septembre 2000, qui, sur renvoi après cassation, l'a condamné, pour tromperie, à 30 000 francs d'amende, a ordonné une mesure de publication et prononcé sur les intérêts civils. - Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, lors d'un contrôle effectué en mai 1994 sur les marchandises mises en vente par un grossiste du marché d'intérêt national de Rungis, les agents de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes ont relevé que, parmi un lot de colis de pêches en provenance d'Espagne, une part importante des fruits présentait un calibre inférieur à celui indiqué sur l'emballage en application de la réglementation communautaire ; que les colis de pêches lui avaient été fournis par Jean-Pierre X, dirigeant de la société du même nom, commissionnaire en fruits et légumes au marché international de Perpignan, qui en avait reçu plusieurs centaines d'une société espagnole ;
Attendu que, poursuivi pour tromperie, Jean-Pierre X a été relaxé par un arrêt infirmatif de la Cour d'appel de Montpellier qui a jugé que l'étiquetage européen avait été mis en place par le producteur espagnol et que la poursuite tendait à imputer l'origine de la fraude au commissionnaire français qui n'en était pas l'auteur ;
Attendu que cet arrêt a été cassé le 9 mars 1999 par la Cour de cassation, au motif que la mise en vente d'un produit non conforme aux qualités substantielles présentées sur l'étiquetage caractérise l'élément matériel du délit de tromperie et qu'il incombait au prévenu de s'assurer de la conformité du produit aux prescriptions relatives notamment à la loyauté des transactions commerciales ; que l'affaire a été renvoyée devant la Cour d'appel de Lyon, qui a statué par l'arrêt attaqué ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 213-1 du Code de la consommation, 3 du règlement CEE n° 2251-92 de la Commission du 29 juillet 1992 concernant les contrôles de qualité des fruits et légumes frais, 385, 427, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Pierre X coupable de tromperie ;
" aux motifs que le calibre d'un fruit est une de ses qualités substantielles ; que le contrôle auquel il a été procédé le 27 mai 1994 sur le MIN de Rungis, par les agents de la DGCCRF leur a permis de constater, selon les termes mêmes de leur procès-verbal du 17 octobre 1994, que 30 colis de pêches avaient été expédiés par la SA X sous la désignation "Valerita Melocoton Springcrest CAT I A 28" ; que, selon ces indications, ces pêches devaient satisfaire aux normes de qualité fixées par le règlement CEE n° 3596-90 du 12 décembre 1990 modifié par les règlements n° 1107-91 et 1169-93 et, notamment, présenter un diamètre compris entre 67 millimètres inclus et 73 millimètres exclus ; que les vérifications opérées ont révélé que, sur dix plateaux contenant 28 fruits pris au hasard dans le lot, 62,85 % des pêches étaient d'un diamètre inférieur à 67 millimètres et ne relevaient donc pas du calibre A annoncé, alors que la tolérance admise est de 10 % en nombre ou en poids de pêches s'écartant du calibre mentionné sur le colis ; et que l'exception de nullité de la procédure présentée par Jean-Pierre X et tirée de ce que le délit de tromperie qui lui est imputé n'aurait pas été constaté conformément aux prescriptions des règlements communautaires n° 1035-72 et 2251-92 est irrecevable par application de l'article 385 du Code de procédure pénale dès lors qu'elle n'a pas été invoquée avant toute défense au fond ;
" alors que la discussion relative à la valeur d'un élément de preuve est un moyen de fond qui peut, en tant que tel, être soulevé à tout moment devant la juridiction de jugement ; que dans ses conclusions régulièrement déposées devant la cour de renvoi, Jean-Pierre X faisait valoir que, pour avoir une valeur probante, l'échantillon prélevé lors du contrôle en conformité effectué par sondage doit être effectué selon la procédure fixée par l'article 3 du règlement CEE n° 2251-92 concernant les contrôles de qualité des fruits et légumes frais et que tel n'avait pas été le cas en l'espèce du contrôle exercé par les agents de la DGCCRF ; que ce moyen ne tendait pas à voir prononcer la nullité des poursuites mais à voir constater que le procès-verbal dressé par les agents de la DGCCRF n'établissait pas la matérialité de l'infraction eu égard à la composition de l'échantillon prélevé et qu'en le déclarant irrecevable pour n'avoir pas été soulevé in limine litis, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé " ;
Attendu que, devant la cour d'appel de renvoi, le prévenu a conclu à sa relaxe en faisant notamment valoir que faute, pour les agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, d'avoir respecté la méthodologie du contrôle de qualité des fruits et légumes frais prescrite par la réglementation communautaire, aucune non-conformité ne pouvait être établie à la charge de l'opérateur économique intervenu en amont du détenteur de la marchandise contrôlée à Rungis ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation, l'arrêt retient qu'elle constitue une exception de nullité de procédure, irrecevable, en application de l'article 385 du Code de procédure pénale, pour ne pas avoir été présentée avant toute défense au fond ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision, dès lors que l'argumentation du prévenu tend, en réalité, à voir déclarer nul le procès-verbal de constatations des enquêteurs, qui fait foi jusqu'à preuve contraire ; que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-3 et 122-4 Code pénal, L.213-1 du Code de la consommation, 28, 30 et 33 du traité de Rome modifié par le traité d'Amsterdam, 8 du règlement CEE n° 1035-72 du Conseil du 18 mai 1972 portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes, 6 du règlement n° 2251-92 de la Commission du 2 juillet 1992 concernant les contrôles de qualité des fruits et légumes frais, 6 et 7 de la Convention européenne des Droits de l'homme, 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, des principes généraux de nécessité, de proportionnalité et de confiance mutuelle entre les autorités des Etats membres tels que dégagés par la Cour de justice des Communautés européennes, du principe de sécurité juridique, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Pierre X coupable de tromperie ;
" aux motifs que, par arrêt, en date du 11 mai 1989, la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit qu'en l'état du droit communautaire applicable, une disposition imposant au responsable de la première mise sur le marché national d'un produit de vérifier, sous peine d'engager sa responsabilité pénale, la conformité de ce produit aux prescriptions en vigueur sur ledit marché et relatives à la sécurité et à la santé des personnes, à la loyauté des transactions commerciales et à la protection des consommateurs, est compatible avec les articles 30 et 36 du traité CEE, à la condition que son application aux produits fabriqués dans un Etat membre ne soit pas assortie d'exigences qui dépassent ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif visé, compte tenu, d'une part, de l'importance de l'intérêt général en cause, d'autre part, des moyens de preuve normalement disponibles pour un importateur ; que s'agissant, en particulier, de la vérification des informations sur la composition d'un produit, fournies aux consommateurs lors de la mise en vente de ce produit, l'importateur doit pouvoir se fier aux certificats délivrés par les autorités de l'Etat membre de production ou par un laboratoire reconnu à cet effet par ces autorités ou, si la législation de cet Etat n'impose pas la production de tels certificats, à d'autres attestations présentant un degré de garantie analogue" ; que cette jurisprudence concerne les cas où la réglementation nationale (française) soumet les marchandises introduites à des normes particulières et spécifiques (en matière de santé et de sécurité des personne ou visant à assurer la loyauté des transactions commerciales et la protection des consommateurs), pourvu qu'elles ne soient pas contraires aux articles 30 et 36 du traité de Rome, le responsable de la première mise sur le marché national restant tenu de l'obligation de vérifier la conformité desdites marchandises à ces normes ; que la présente espèce vise une situation différente puisqu'il ne s'agit pas de l'application de normes particulières mais de normes unifiées au niveau européen ; qu'en effet, les règles applicables au commerce des fruits et légumes au sein de l'Union européenne ont été harmonisées et que ce secteur spécifique a fait l'objet d'une organisation commune des marchés en vertu du règlement CEE n° 1035-72 du 18 mai 1972 ; qu'ont ainsi été fixées, sur cette base, les normes de qualité des fruits et légumes, ainsi que leur contrôle par sondage à tous les stades de la commercialisation et sur toute la filière à l'intérieur de l'Union ; que l'article 8 de ce règlement prévoit en effet : Pour constater si les produits pour lesquels des normes de qualité ont été fixées répondent aux dispositions des articles 3 à 7, un contrôle de conformité est effectué par sondage, à tous les stades de commercialisation ainsi qu'au cours du transport, par les organismes désignés par chaque Etat membre ; ce contrôle doit s'effectuer de préférence avant le départ des zones de production lors du conditionnement ou du chargement de la marchandise ; que le règlement n° 2251-92 de la Commission du 29 juillet 1992 qui organise ces contrôles de conformité précise que "quelle que soit la filière suivie par les fruits et légumes produits dans la communauté et soumis au contrôle de conformité, une seule méthode de contrôle dont les éléments sont définis doit leur être applicable tout au long de la filière ; que potentiellement chaque lot de marchandise concerné peut se voir contrôler..." ; que l'article 6 de ce règlement prévoit que "les opérateurs peuvent être exemptés des opérations de contrôle à l'expédition par l'organisme de l'Etat membre concerné qui leur délivre un certificat d'exemption lorsqu'ils offrent des garanties permettant d'assurer une qualité constante de la production qu'ils commercialisent" et lorsque certaines conditions qu'il énumère sont réunies ; que cet article précise que "l'opérateur exempté du contrôle appose sur chaque colis expédié un papillon dont le modèle figure à l'annexe III et mentionnant son numéro d'immatriculation au registre visé à l'article 11 paragraphe 3" ; que l'apposition du papillon prévu par la réglementation communautaire et portant la mention : "contrôle agréé n° 1120" ne signifie donc pas que la marchandise a fait l'objet d'un contrôle par un organisme agréé en Espagne mais seulement que l'opérateur espagnol a été exempté d'un tel contrôle ; que le fait que les pêches en cause avaient été conditionnées par un fournisseur dont un organisme officiel avait pu vérifier qu'il présentait toutes garanties pour assurer une "qualité constante" à sa production, ne dispensait donc pas le commissionnaire introducteur en France de ces produits d'en vérifier la conformité aux normes européennes ; que l'article 3-1 du règlement n° 1035-72 du 18 mai 1972 prévoit en effet que lorsque des normes de qualité ont été fixées, les produits auxquels elles s'appliquent ne peuvent être exposés en vue de la vente, mis en vente, vendus, livrés ou commercialisés de toute autre manière, à l'intérieur de la Communauté, que s'ils sont conformes auxdites normes ; que la SA X a bien introduit en France des pêches au calibre insuffisant, les a détenues, vendues et livrées à la SA Raphaël Primeurs ; qu'il importe peu que la SA X n'ait plus été détentrice de ces fruits au moment où en a été effectué le contrôle qui en a révélé la défectuosité ; qu'elle avait l'obligation de vérifier la conformité des produits aux prescriptions relatives notamment à la loyauté de transactions commerciales, prescriptions dont font partie les normes communes applicables aux fruits et légumes commercialisés à l'intérieur de l'Union et dont le règlement précité du 18 mai 1972 précise que l'application "devrait avoir pour effet d'éliminer du marché les produits de qualité non satisfaisante" ; qu'il appartient à chaque Etat membre de sanctionner les manquements aux obligations de respect des normes européennes de qualité des fruits et légumes ; que loin de constituer la "violation flagrante du droit communautaire" qu'évoque le prévenu, les dispositions de l'article L. 213-1 du Code de la consommation, sur lequel est fondée la poursuite, tendent au contraire à en assurer la loyauté des transactions commerciales et la protection des consommateurs qui constituent des exigences impératives pouvant justifier une mesure de nature à entraver le commerce intra-communautaire, est applicable sans discrimination aux produits nationaux et aux produits importés ; qu'en effet, tout opérateur économique du circuit de distribution peut voir sa responsabilité pénale engagée, notamment pour fraude portant aussi bien sur un produit national que sur un produit introduit, dès lors qu'il est intervenu dans le processus de commercialisation et a commis une faute personnelle en ne procédant pas aux contrôles exigés ; que faire supporter à la personne qui introduit en France un produit en provenance d'un autre Etat de l'Union la responsabilité de la vérification de sa conformité aux normes communes en vigueur ne constitue pas une mesure disproportionnée compte tenu de l'intérêt général qu'elle vise à sauvegarder à travers le respect de la loyauté des échanges commerciaux et la protection des consommateurs ; que dispenser une telle personne de toute obligation de contrôle reviendrait à créer une discrimination au détriment des producteurs français, puisque, en cas d'infraction constatée sur des marchandises originaires d'un autre Etat membre, la loi française ne permettrait pas d'engager des poursuites à l'encontre du producteur ou fournisseur étranger et que, de plus, il n'existe aucune obligation pour un Etat membre d'exécuter une condamnation pénale prononcée par une juridiction d'un autre Etat membre ; que Jean-Pierre X ne saurait invoquer le principe général de confiance mutuelle entre les autorités des Etats membres qui veut qu'une marchandise introduite d'un Etat dans un autre n'a pas à être soumise dans l'Etat destinataire à des contrôles qui auraient déjà été opérés dans l'Etat d'origine et dont les résultats pourraient être utilisés par l'importateur, qu'il s'agisse de certificats officiels ou de documents présentant un degré de garantie analogue ; qu'en effet, le prévenu ne pouvait déduire de l'existence des papillons prévus par l'article 6 du règlement n° 2251-92, comme il l'écrit dans ses conclusions, que "les marchandises en cause avaient déjà fait l'objet de vérifications exhaustives de conformité par un conditionnement normalisé" que l'exemption des opérations de contrôle à l'expédition par l'organisme d'Etat espagnol concerné accordée, au vu des garanties qu'elle présentait, à la société Citran, productrice des pêches litigieuses, n'implique pas qu'elle ait procédé au contrôle du calibrage de ces fruits ; que l'assurance d'une "qualité constante" de sa production, que laisse présumer ladite exemption, ne saurait garantir la conformité du calibre des pêches ; que la SA X ne pouvait valablement se fier aux seules indications en provenance de la société productrice elle-même ; qu'il lui appartenait bien de mettre en œuvre un contrôle efficace ; qu'encore une fois en se contentant de n'affecter aux opérations de contrôle que deux salariés qui avaient la charge de vérifier quotidiennement quelques 13 500 cagettes de fruits et de légumes pour s'assurer non seulement de leur calibre mais aussi de l'ensemble des autres éléments entrant en considération dans leur classification selon les normes communes définies auxquelles ces produits devaient répondre, Jean-Pierre X, professionnel de la distribution, n'a pas pu ne pas avoir conscience de l'insuffisance manifeste du système de contrôle mis en place et a donc volontairement pris le risque de mettre sur le marché des marchandises aux qualités essentielles non conformes à leur étiquetage ; que sans aller jusqu'à déduire de l'affirmation, contenue dans les conclusions du prévenu, du caractère "homogène" du lot des 880 colis reçus du producteur espagnol que la proportion de fruits défectueux (62,85 %) relevée dans le lot contrôlé se retrouvait nécessairement dans l'ensemble du lot, il doit être retenu qu'un défaut de calibrage aussi important que celui constaté sur les pêches exposées à Rungis ne pouvait passer inaperçu aux yeux de professionnels normalement avisés et organisés, et tenus, en quelque sorte, dans l'appréciation de la validation des contrôles leur incombant, non pas d'une obligation de résultat mais au moins d'une obligation de moyens renforcée ;
" 1° alors qu'il se déduit tant des dispositions de l'article 122-4 du Code pénal que du principe de sécurité juridique que l'étendue de l'obligation de contrôle exigée par le juge répressif d'un agent économique en matière de consommation ne saurait excéder celle qui est définie par l'Administration chargée de vérifier le caractère effectif de ce contrôle ; que dans ses conclusions régulièrement déposées devant la cour d'appel, Jean-Pierre X faisait valoir que la procédure d'auto-contrôle par sondages suivie par lui était rigoureusement conforme à la procédure suivie en commun entre le syndicat des Importateurs-Introducteurs de Perpignan et la Direction Générale de la Consommation de la Concurrence et de la Répression des Fraudes telle qu'elle ressortait d'un échange de lettres versées aux débats par lui, procédure conforme avec les principes de droit interne en matière de contrôle de qualité et que la cour d'appel qui, en présence de ce chef péremptoire des conclusions du demandeur, ne s'est pas expliquée sur la conformité ou la non-conformité de la procédure par sondage suivie par Jean-Pierre X au regard des prescriptions de l'autorité réglementaire qu'est la DGCCRF, n'a pas légalement justifié sa décision de condamnation au regard du principe susvisé ;
" 2° alors que, si en matière de tromperie, les juges peuvent retenir comme constitutive de mauvaise foi l'absence de vérification par l'introducteur de la conformité du produit mis par lui sur le marché avec les normes européennes en vigueur, c'est à la condition qu'ils s'expliquent sans contradiction sur l'étendue de cette obligation de vérification et que l'arrêt qui, tout en admettant expressément qu'il ne pouvait être mis à la charge d'un introducteur réceptionnant quotidiennement dans son entreprise 10 000 kilos de marchandises représentant une quantité de 12 500 à 13 500 cagettes dans son magasin (et non 135 000 comme indiqué par erreur dans l'arrêt) une obligation de résultat quant à la conformité des fruits avec les prescriptions réglementaires, a cependant cru pouvoir retenir la mauvaise foi de Jean-Pierre X en se référant, d'une part, au résultat d'un contrôle portant sur 10 colis provenant d'un lot isolé de 880 colis, c'est-à-dire d'un contrôle portant sur une quantité infinitésimale de produits et, d'autre part, à l'obligation qui aurait été celle des salariés affectés dans l'entreprise au contrôle de vérifier chacune des 13 500 cagettes de fruits, c'est-à-dire de procéder à un contrôle exhaustif de l'ensemble des marchandises, a voué sa décision à une cassation certaine pour contradiction de motifs ;
" 3° alors que les éléments d'une infraction doivent être clairement définis ; que la cour d'appel a indiqué dans sa décision qu'il ne pouvait être mis à la charge de l'introducteur qu'est Jean-Pierre X une obligation de vérification s'assimilant à une obligation de résultat, mais seulement une obligation de moyen renforcée et qu'en ne s'expliquant pas sur la consistance de cette "obligation de moyen renforcée" la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 4° alors que le principe de la libre circulation qui s'applique selon les dispositions du traité de Rome aux fruits et légumes en provenance des Etats membres et le principe de proportionnalité impliquent que les contrôles de qualité mis à la charge des introducteurs ne soient pas assortis d'exigences qui dépassent ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif visé ; que le droit communautaire prescrit un contrôle par sondage des calibres de fruits (règlement CEE n° 1035-72 du Conseil du 18 mai 1972 et règlement n° 2251-92 de la Commission du 29 juillet 1992) ; que l'arrêt a admis que les cagettes de pêches en cause portant la mention "contrôle agréé n° 1120" avaient été conditionnées par un fournisseur espagnol dont un organisme officiel avait pu vérifier, conformément aux dispositions du règlement CEE n° 2251-92 de la Commission du 29 juillet 1992 qu'il présentait toutes garanties pour assurer une qualité constante à sa production (c'est-à-dire qu'il disposait selon l'article 6 de ce règlement des préposés au contrôle qui avaient reçu une formation agréée par l'organisme compétent, qu'il possédait des équipements adéquats à la préparation et au conditionnement des produits et qu'il possédait un registre contenant un relevé de toutes les opérations effectuées ; que selon cette constatation, les pêches reçues par la SA X étaient présumées être conformes aux normes européennes et que dès lors un contrôle autrement que par sondage par l'introducteur ne s'imposait pas et constituait une exigence dépassant ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif visé ;
" 5° alors qu'en application de l'article 234 du traité instituant les Communautés européennes, la Cour de cassation, dont les décisions ne sont susceptibles d'aucun recours juridictionnel de droit interne, sera en mesure de poser à la Cour de justice des Communautés européennes la question préjudicielle suivante : les stipulations du traité CEE, notamment ses articles 28 (ex 30), 30 (ex 36) et 33 (ex 39) et les principes généraux dégagés par la Cour de justice des Communautés européennes dans sa jurisprudence, le règlement CEE n° 1035-72 du Conseil du 18 mai 1972 portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et la Directive 89-397-CEE du Conseil du 14 juin 1989 relative contrôle officiel des denrées alimentaires, le règlement CEE n° 2251-92 de la commission du 29 juillet 1992 concernant les contrôles de la qualité des fruits et légumes frais doivent-ils s'interpréter en ce sens qu'il est permis à un Etat membre d'imposer à un introducteur de fruits et légumes, sous peine d'engager sa responsabilité pénale, de s'assurer personnellement et de manière exhaustive de la conformité des produits aux normes communautaires en vigueur relatives au calibrage, alors même que les produits en cause présenteraient le marquage prévu par le règlement CEE n° 2251-92 établissant la preuve que les produits proviennent d'un opérateur exempté des opérations de contrôle à l'expédition comme offrant des garanties permettant d'assurer une qualité constante de la production qu'il commercialise et réunissant les conditions édictées par l'article 6 dudit règlement " ;
Attendu que, pour imputer la tromperie à Jean-Pierre X, les juges d'appel retiennent qu'il appartenait au prévenu, tenu de vérifier la conformité de la marchandise aux normes de qualité applicables, de mettre en place, à cette fin, un contrôle efficace ; qu'en se bornant à n'affecter que deux salariés à la vérification quotidienne, non limitée au calibre, de quelque 100 000 kilogrammes de marchandises, le prévenu, professionnel de la distribution, n'a pas pu ne pas avoir conscience de l'insuffisance de son système de contrôle et a, ainsi, volontairement, pris le risque de mettre sur le marché des marchandises aux qualités essentielles non conformes à leur étiquetage ; que les juges ajoutent que le défaut de calibrage constaté sur 62,85 % des fruits exposés à la vente à Rungis, ne pouvait, au regard de son importance, passer inaperçu aux yeux de professionnels normalement avisés et organisés, tenus de s'assurer de l'efficacité des contrôles leur incombant ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance et procédant de l'appréciation souveraine, par les juges du fond, de la mauvaise foi du prévenu, la cour d'appel, sans méconnaître la réglementation communautaire, visée au moyen, prescrivant un contrôle par sondage du calibre des fruits frais, a justifié sa décision ; qu'en effet le contrôle de la conformité des fruits et légumes frais, effectué en application tant des dispositions des articles 3 et 8 du règlement 1035-72-CEE modifié du 18 mai 1972 que de l'article L. 213-1 du Code de la consommation, en vue d'assurer la loyauté des transactions commerciales, s'exerce à tous les stades de commercialisation de ces produits ; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi.