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Décisions

CA Paris, 1re ch. H, 4 avril 2006, n° ECOC0600149X

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Etablissements Horticoles Georges Truffaut (SAS), Normandie Loir Distribution (SARL), Alpadis (SAS), Canidis (SA), Cazenave (SARL), Fapac Tivadis (SAS), Ferrat Distribution (SA), Galetou-Sodegal (SARL), Garibaldi (SAS), Rhonaldis (SARL), Royal Canin (SA), Georges Delbard (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Carre-Pierrat

Conseillers :

M. Le Dauphin, Mouillard

Avoués :

SCP Duboscq & Pellerin, SCP Calarn & Delaunay, SCP Fisselier Chiloux Boulay, SCP Monin-Auriac de Brons

Avocats :

Mes Ponsard, Jolly, Bourgeon, Vogel, SCP Uettwiller Grelon Gout Canat & Associés, SCP Baille-Bali-Gosselin-Jolly-Picard, SCP Threard Leger Bourgeon Meresse & Associés, SCP Vogel & Vogel

CA Paris n° ECOC0600149X

4 avril 2006

Le 29 décembre 2000, le ministre de l'Economie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la société Royal Canin et son réseau de distribution.

Le 1er avril 2004, les griefs suivants ont été notifiés :

1 - aux sociétés Royal Canin, Fapac-Tivadis, Normandie Loir Distribution, Sodiamal, Sodegal, Cazenave, Rhonaldis, Alpadis, Canidis, Cocipa, Ferrat, Garibaldi,

D'avoir, de manière concertée, fixé des prix de vente imposés aux grossistes-distributeurs, restreint la clientèle à laquelle les grossistes-distributeurs peuvent vendre en la limitant aux réseaux spécialisés et aux réseaux de prescripteurs, mis en place un système de remontée d'informations permettant à Royal Canin de connaître et contrôler le détail de l'activité commerciale des grossistes-distributeurs;

2 - aux sociétés Royal Canin, Fapac-Tivadis, Normandie Loir Distribution, Sodiamal, Sodegal, Cazenave, Rhonaldis, Alpadis, Canidis, Cocipa, Ferrat, Garibaldi, Gamm Vert, Truffaut, Apex, Tripode, Delbard, Mille Amis, Univert Bourges, Jardin de Pacy, Idéal Canin Valdoie, Loisirs et Jardin,

D'avoir mis en œuvre de façon concertée des actions ayant pour objet la fixation, l'application, la surveillance et le respect de prix imposés de vente aux consommateurs.

- à la société Royal Canin,

D'avoir exploité abusivement sa position dominante en instaurant une politique de remise fidélisante à l'égard des grossistes-distributeurs, des centrales d'achat et des revendeurs détaillants et en mettant en œuvre les pratiques décrites dans les griefs 1 et 2.

Par décision n° 05-D-32 du 22 juin 2005, le Conseil de la concurrence a décidé :

" Article 1er : Il n'est pas établi que les sociétés Gamm Vert, Apex, Mille Amis, Univert Bourges, Sodiamal, Cocipa, Garibaldi, J&B Cazenave et Ferrat aient participé à l'entente sur les prix de détail, et aient enfreint de ce chef les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.

Article 2 : Il n'est pas établi que la société Royal Canin ait commis une pratique de remises abusive à l'égard de ses grossistes-distributeurs et ait enfreint de ce chef l'article L. 420-2 du Code de commerce.

Article 3 : Il est établi que les sociétés Royal Canin, Fapac-Tivadis, Normandie Loir Distribution, Sodiamal, Sodegal, Cazenave, Rhonaldis, Alpadis, Canidis, Cocipa, Ferrat, Garibaldi, Truffaut, Tripode, Delbard, Jardin de Pacy, Ideal Canin Valdoie et Loisirs et Jardin ont, en participant à une entente concernant soit les offres de gros, soit les offres de détails, enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce

Article 4 : Il est établi que la société Royal Canin, du fait d'une part de pratiques de prix imposés et de restriction de clientèle, d'autre part de pratiques de remises de fidélité à l'égard des centrales d'achat, a enfreint les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce.

Article 5 : Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

- à la société Royal Canin une sanction de 2 500 000 euro

- à la société Normandie Loir Distribution une sanction de 89 000 euro

- à la société Sodiamal une sanction de 1 000 euro;

- à la société Sodegal une sanction de 24 000 euro;

- à la société J&B Cazenave une sanction de 37 000 euro;

- à la société Ferrat une sanction de 71 000 euro;

- à la société Garibaldi une sanction de 29 000 euro;

- à la société Fapac-Tivadis une sanction de 34 000 euro;

- à la société Rhonaldis une sanction de 98 000 euro;

- à la société Alpadis une sanction de 60 000 euro;

- à la société Canidis une sanction de 65 000 euro;

- à la société Tripode une sanction de 210 000 euro;

- à la société Truffaut une sanction de 1 500 000 euro;

- à la société Delbard une sanction de 279 000 euro;

- à la société Les Jardins de Pacy une sanction de 4 000 euro;

- à la société Ideal Canin Valdoie une sanction de 1 000 euro."

LA COUR :

Vu les recours formés:

- le 6 juillet 2005 par la SA Georges Delbard,

- le 20 juillet 2005 par la société Normandie Loir Distribution SARL,

- le 22 juillet 2005, par les sociétés Alpadis SAS, Canidis SA, Etablissements J&B Cazenave SARL, Fapac Tivadis SAS, Ferrat Distribution SA, Galetou-Sodegal SARL, Garibaldi SAS et Rhonaldis SARL,

- le 26 juillet 2005 par la société Etablissements Horticoles Georges Truffaut SAS (ci-après la société Truffaut)

- le 26 juillet 2005 à titre principal, le 4 août 2005 à titre incident, par la société Royal Canin;

Vu le mémoire déposé le 24 août 2005 par la société Georges Delbard à l'appui de son recours, soutenu par son mémoire en réplique du 16 janvier 2006, par lequel cette dernière demande à la cour de :

- annuler la décision pour défaut de motifs en ce qui concerne l'exception de prescription;

- juger que les faits qui lui sont reprochés sont prescrits compte tenu du délai écoulé entre la date de saisine du Conseil de la concurrence et la date de notification des griefs et la mettre hors de cause;

- annuler la décision pour violation des droits de la défense et des principes fondamentaux de la procédure, tels que prévus par l'article préliminaire du Code de procédure pénale, et applicables à la procédure devant le Conseil et la mettre hors de cause;

- réformer la décision en ce qu'elle a jugé qu'elle avait participé à une entente prohibée avec la société Royal Canin sur les prix de vente aux détails des produits des gammes RCCI Size et Premium et la mettre hors de cause,

- en toute hypothèse, réformer la décision au regard de la sanction pécuniaire;

Vu le mémoire déposé le 17 août 2005 par la société Normandie Loir Distribution à l'appui de son recours, par lequel cette dernière demande à la cour de :

Sur la procédure

- à titre principal, annuler la décision et juger que la prescription des griefs notifiés lui est acquise;

- à titre subsidiaire, juger que, compte tenu de la durée excessive de la procédure, le préjudice subi par elle sera justement réparé par l'annulation de la proclamation de sa participation à une entente prohibée et l'annulation de la sanction pécuniaire infligée;

Sur le fond

- à titre principal, annuler et réformer la décision;

- à titre subsidiaire, annuler la sanction pécuniaire prononcée contre elle,

- à défaut, dire que la sanction pécuniaire qui lui est infligée ne saurait être supérieure à 30 000 euro;

Vu les mémoires déposés le 26 août 2005 par les sociétés Alpadis, Canidis, Fapac Tivadis, et Rhonaldis à l'appui de leurs recours, soutenus par leur mémoire en réplique du 16 janvier 2006, par lesquels ces dernières demandent à la cour de :

- à titre principal, annuler la décision pour violation de l'article 6 de la CEDH et de l'article L. 463-1 du Code de commerce;

- à titre subsidiaire, la réformer et constater que leur implication dans une entente anticoncurrentielle n'est pas établie ni au stade de la vente en gros, ni au stade de la vente au détail;

- très subsidiairement, réformer la sanction pécuniaire qui leur a été infligée;

Vu les mémoires déposés le 26 août 2005 par les sociétés J&B Cazenave, Ferrat Distribution, Galetou-Sodegal, et Garibaldi à l'appui de leurs recours, soutenus par leur mémoire en réplique du 16 janvier 2006, par lesquels ces dernières demandent à la cour de :

- à titre principal, annuler la décision pour violation, de l'article 6 de la CEDH et de l'article L. 463-1 du Code de commerce;

- à titre subsidiaire, la réformer et constater que leur implication dans une entente anticoncurrentielle n'est pas établie au stade de la vente en gros,

- très subsidiairement, réformer la sanction pécuniaire qui leur a été infligée;

Vu le mémoire déposé le 16 août 2005 par la société Truffaut à l'appui de son recours, soutenu par son mémoire en réplique du 16 janvier 2006, par lequel cette dernière demande à la cour de :

- à titre principal, juger que le Conseil a violé l'article L. 420-1 du Code de commerce en déclarant que les pratiques d'ententes étaient établies à son encontre et annuler la décision frappée d'appel;

- à titre subsidiaire, annuler ou à titre plus subsidiaire réformer la décision pour ce qui concerne la sanction pécuniaire qui lui est infligée;

- en conséquence, ordonner la restitution des sommes payées par elle à ce titre,

- condamner le ministre de l'Economie à lui payer une somme de 30 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Vu le mémoire déposé le 26 août 2005 par la société Royal Canin à l'appui de son recours, soutenu par son mémoire en réplique du 16 janvier 2006, par lequel cette dernière demande à la cour de :

Sur la légalité externe de la décision

- juger que la décision du Conseil vient en violation des règles de procédure en vigueur devant lui et porte atteinte au principe du contradictoire ;

- juger que la décision du Conseil porte atteinte au principe du contradictoire et aux droits de la défense;

- juger que la décision du Conseil porte atteinte à la présomption d'innocence et au principe de proportionnalité de la sanction;

- annuler en conséquence la décision du Conseil de la concurrence;

Sur la légalité interne de la décision

- juger que le grief de remises fidélisantes est infondé;

- juger que le grief de restriction de clientèle est infondé;

- juger que le grief d'entente sur les prix au stade du commerce de gros est infondé;

- juger que, au regard des précisions apportées par la jurisprudence communautaire et nationale sur la notion d'accord de volonté dans le cadre d'une entente verticale, le grief d'entente sur les prix au stade du commerce de détail est infondé;

- en conséquence, annuler, et subsidiairement, réformer la décision du Conseil de la concurrence;

- la mettre hors de cause au titre de l'ensemble des griefs qui lui ont été notifiés;

- ordonner la restitution de toutes les sommes versées qu'elle aurait eu à verser au titre de la décision notifiée avec intérêt au taux légal à compter de leur versement;

Vu les observations écrites du Conseil de la concurrence en date du 10 novembre 2006;

Vu les observations écrites du ministre chargé de l'Economie, déposées le 17 novembre 2006;

Vu les observations écrites du Ministère public, mises à la disposition des parties à l'audience;

Ouï à l'audience publique du 31 janvier 2006, en leurs observations orales, les parties ou leurs conseils, ainsi que le représentant du ministre chargé de l'Economie et le Ministère public, chaque partie ayant été mise en mesure de répliquer et la société requérante ayant eu la parole en dernier;

Sur ce :

Considérant que la société Royal Canin ayant épuisé, par l'exercice qu'elle en avait fait le 26 juillet 2005, le droit de recours dont elle disposait contre la décision n° 05-D-32 du 22 juin 2005, le recours incident formé par elle le 4 août 2005 contre cette même décision est irrecevable;

I Sur les moyens de procédure et de forme

A - sur la prescription

Considérant qu'aux termes de l'articles L. 462-7 du Code de commerce, le Conseil de la concurrence ne peut connaître des faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur constatation, à leur recherche ou à leur sanction; qu'un acte tendant à la recherche, la constatation ou la sanction de pratiques anticoncurrentielles, même s'il ne concerne que certaines des entreprises incriminées ou une partie seulement des faits commis, interrompant la prescription à l'égard de toutes les entreprises concernées et pour l'ensemble des faits dénoncés dès lors que ceux-ci présentent entre eux un lien de connexité;

Considérant que, reprenant leur argumentation développée devant le Conseil de la concurrence au regard du principe susvisé, les sociétés Normandie Loir Distribution et Georges Delbard font valoir qu'aucun acte interruptif de prescription, accompli entre la saisine du Conseil de la concurrence du 29 décembre 2000 et la notification de griefs du 1er avril 2004, ne leur est opposable, la demande de renseignements adressée à la société Royal Canin le 14 novembre 2003 ne visant qu'un abus de position dominante, dépourvu de lien de connexité avec les pratiques qui lui sont reprochées ; que la société Georges Delbard ajoute que la décision du Conseil de la concurrence doit être annulée pour défaut de motivation à cet égard;

Mais considérant que c'est à juste titre que, pour écarter l'exception de prescription invoquée, le Conseil, motivant par là même sa décision, s'est fondé sur la demande de renseignements adressée à la société Royal Canin le 14 novembre 2003 ; qu'il résulte en effet de la lettre du 29 décembre 2000 que le Conseil était saisi d'un ensemble de faits, présentés a priori comme un abus de position dominante, affectant les modalités de détermination des prix de revente des produits de la société Royal Canin tant au niveau des grossistes qu'à celui des consommateurs finals, le ministre soulignant qu'en définitive, les distributeurs respectaient les prix de vente fixés par société Royal Canin ; qu'il suit de là, le Conseil de la concurrence étant saisi in rem, que la prescription a été interrompue, pour l'ensemble de ces faits et à l'égard de toutes les entreprises sanctionnées, par la demande adressée à la société Royal Canin en vue de recueillir divers renseignements sur sa situation personnelle, sur ses relations avec ses distributeurs, et sur le marché français des aliments pour chiens et chats, avant même que ne soient qualifiées les pratiques en cause au regard tant de l'article L. 420-1 que de l'article L. 420-2 du Code de commerce dans le cadre de la notification des griefs;

B - sur la durée de la procédure

Considérant qu'eu égard à la difficulté du dossier dont le Conseil était saisi, s'agissant de pratiques anticoncurrentielles affectant le secteur de la distribution, au plan national, des aliments pour chiens, au nombre des entreprises concernées et à la complexité des pratiques en cause, commises de 1998 à 2000, c'est à juste titre que la décision retient que la durée globale de la procédure n'apparaît pas excessive;

Qu'au demeurant, la société Normandie Loir Distribution, les sociétés Alpadis, Canidis, Etablissements J&B Cazenave, Fapac Tivadis, Ferrat Distribution, Galetou-Sodegal, Garibaldi et Rhonaldis, ainsi que la société Georges Delbard n'ont pas souffert d'une atteinte irrémédiable aux droits de la défense par suite de l'impossibilité où elles prétendent s'être trouvées de produire la totalité de leurs prospectus publicitaires, contemporains des pratiques en cause, de tels documents, contrairement à ce qu'elles soutiennent, n'étant pas nécessaires à la démonstration de leur politique tarifaire, objet des griefs essentiels, dont elle sont plus à même de justifier par la production des factures et de tous documents comptables que l'article L. 123-22 du Code de commerce leur impose de conserver pendant dix ans; que cette obligation rend inopérant le moyen de la société Truffaut tiré de son changement de système informatique en 2001, non justifié au demeurant ; qu'enfin, l'invocation, sans précision concrète et circonstanciée, de l'impossibilité de recourir à des témoignages de tiers, collaborateurs ou interlocuteurs, ne suffit pas à caractériser l'atteinte alléguée;

C - sur le principe de la contradiction

Considérant que, tenu de statuer en droit et en fait sur les griefs notifiés, le Conseil de la concurrence n'a pas méconnu le principe susvisé pour avoir retenu, quant au marché pertinent dont la définition était contestée devant lui, une analyse différente de celle proposée par le rapporteur, dès lors qu'il ne s'est fondé pour ce faire sur aucun élément qui n'eût été soumis au débat contradictoire ; qu'en l'espèce, le comportement à l'achat du consommateur, les comportements de vente, structures commerciales et logistiques séparées consistant à proposer des gammes et des marques à des prix différents, retenus par la décision, étaient visés dès la notification de griefs et figuraient au dossier;

Que, de même, aucune violation du principe de la contradiction ne résulte de ce que le Conseil de la concurrence a précisé, à propos du grief dit de "restriction de clientèle", que les clauses des contrats conclus avec les grossistes-distributeurs limitant la clientèle servie à la distribution spécialisée, aux éleveurs professionnels et aux vétérinaires, s'inscrivaient dans des accords plus larges d'exclusivité réciproque, de territoire et d'approvisionnement, dès lors que l'aspect particulier de cette pratique était dénoncé dans la notification de griefs, en page 14, au point 1.1 décrivant les pratiques à qualifier au chapitre des relations de Royal Canin avec les grossistes-distributeurs et en page 34, au point 2.2.2 consacré au caractère anticoncurrentiel des conditions commerciales appliquées aux grossistes-distributeurs, qui fondaient le grief notifié et que, ce faisant, le Conseil n'a fait que caractériser l'effet de forclusion de la pratique de restriction de clientèle reprochée sans statuer sur un grief additionnel;

Qu'ainsi, les moyens de la société Royal Canin et des sociétés Alpadis, Canidis, Etablissements J&B Cazenave, Fapac Tivadis, Ferrat Distribution, Galetou-Sodegal, Garibaldi et Rhonaldis ne sont pas fondés;

D - sur les autres moyens de la société Royal Canin contestant la légalité externe de la décision

Considérant que la décision du Conseil étant motivée en droit et en fait, aucune nullité ne saurait résulter de ce qu'il n'a pas suivi la société Royal Canin dans le détail de son argumentation, que celle-ci a du reste tout loisir de soumettre à nouveau à la cour au soutien de son recours de pleine juridiction, qu'il s'agisse d'éléments non écartés expressément par la décision ou selon elle retenus à tort en ce qu'ils seraient erronés ou dénués de pertinence; qu'enfin, la société Royal Canin n'est pas fondée à invoquer une atteinte à la présomption d'innocence au motif inopérant que le Conseil se serait fondé sur des données fournies par la société Gamm Vert, mise hors de cause, pour apprécier le dommage à l'économie, seule important la pertinence des éléments ainsi retenus au soutien de cette appréciation

Qu'il résulte de ce qui précède que les moyens d'annulation ne sont pas fondés;

II Sur le fond

A - sur le marché pertinent

Considérant que la décision retient à cet égard :

- que les aliments industriels secs, ou croquettes, pour chiens sont par leur nature, leur mode de fabrication et l'espèce d'animaux auxquels ils sont destinés, différents des autres aliments industriels pour animaux de compagnie;

- que la distribution des croquettes s'effectue selon trois circuits distincts : en grande surface alimentaires (ci-après GSA), en magasins spécialisés jardineries, animaleries, libres-services agricoles, magasins de bricolage, chez les vétérinaires ou les éleveurs;

- que les gammes de croquettes sont différentes selon les circuits et font l'objet de politiques de marketing distinctes, les gammes dites " nutritionnelles ", comportant des produits adaptés à la morphologie des animaux et à leur activité, étant presque exclusivement commercialisées, sur la période en cause, dans les magasins spécialisés et chez les vétérinaires et éleveurs, ces produits étant présentés commue conçus "sur mesure" pour répondre aux besoins particuliers de chaque animal et un rôle de conseil étant assigné aux prescripteurs et aux revendeurs, à qui sont proposés des stages de formation, en correspondance avec la sensibilité nutritionnelle forte des consommateurs concernés, les consommateurs à faible sensibilité nutritionnelle achetant des aliments humides ou secs standard dans le cadre de la distribution alimentaire;

- que les comportements d'achat des consommateurs différent aussi selon les circuits, l'acte d'achat en GSA étant banalisé, assimilé à celui des autres produits de consommation courante, alors qu'il revêt un caractère autonome en magasin spécialisé, où le consommateur se rend pour cette acquisition précise;

- que les comportements de vente sont également différents, le produit était simplement proposé en rayon en GSA, alors qu'il fait l'objet d'une présentation et d'un balisage permanent dans les magasins spécialisés, Royal Canin offrant d'ailleurs trois configurations-types à ses détaillants, la plus complète pouvant aller jusqu'à trois niveaux de 1,33 m de longueur sur 80 cm de profondeur;

- qu'en ce qui concerne l'approvisionnement, les GSA sont livrés par camions complets et assurent une partie de la fonction logistique, notamment d'entrepôt, alors que cette fonction n'est qu'exceptionnellement assurée par les magasins spécialisés;

- que les magasins spécialisés adhèrent à des centrales d'achat nationales et lès vétérinaires et éleveurs sont approvisionnés par des centrales d'achat régionales, Royal Canin ayant d'ailleurs mis en place des structures commerciales et logistiques séparées pour les magasins spécialisés d'une part, approvisionnés par des grossistes, et pour les GSA, d'autre part, qu'il gère en direct;

- que le circuit de la distribution spécialisée, organisé autour d'un réseau élaboré de grossistes couvrant l'intégralité du territoire et assumant des fonctions d'information et de répercussion des directives de Royal Canin à ses distributeurs, est étanche par rapport à celui de la grande distribution;

- que si des phénomènes de report vers la distribution alimentaire seraient susceptibles de se manifester en cas de hausse nette de prix dans les magasins spécialisés, il reste qu'au moment des faits, il existait un différentiel de prix permanent entre les deux formes de distribution et que la stratégie des producteurs, notamment de Royal Canin, qui ont différencié les marques selon les canaux les rend encore moins substituables aux yeux des consommateurs;

Que le Conseil en a déduit que la vente de croquettes sèches pour chiens en magasins spécialisés, lieux de rencontre d'une offre et d'une demande spécifique avec des gammes de produits propres, constitue un marché pertinent, tant au niveau des marchés intermédiaires, où se rencontrent des vendeurs situés à différents niveaux de la chaîne verticale, comme les grossistes-distributeurs et les détaillants, qu'au niveau du détail, où des détaillants s'adressent aux consommateurs finals, ce marché, organisé au plan national, étant de dimension nationale;

Considérant que la société Truffaut critique cette appréciation en ce qu'elle exclut les produits humides, faisant valoir que la nature des aliments ne peut justifier la segmentation du marché entre les produits secs et humides pour chiens au stade de la commercialisation, ces produits étant des aliments industriels pour chiens répondant à un même usage, commercialisés ensemble dans les linéaires de toute la distribution et parfois par les mêmes producteurs, et les études sur 1998 et 1999 révélant un repli des produits humides au profit des produits secs, ce qui démontre qu'ils sont concurrents ; qu'elle souligne à cet égard qu'il existe des produits semi-humides, certes sur une faible part de marché, mais qui démontre que les catégories, en qualité, ne sont pas aussi étanches que le Conseil l'a considéré ; qu'elle conteste aussi l'exclusion des GSA et des prescripteurs, fondée selon elle sur des motifs erronés, alors que les circuits spécialisés ne réalisent pas la majorité des ventes de produits secs, que les circuits qualifiés de spécialisés recouvrent en fait des types de distribution très diversifiés, non spécialisés en alimentation animale, soit des jardineries grandes surfaces de bricolage, libres-services agricoles, que les produits économiques, moyens et haut de gamme sont commercialisés dans tous les réseaux, que le comportement d'achat du consommateur ne varie pas selon les circuits, que les modalités de distribution choisies par Royal Canin, à supposer qu'elles caractérisent une étanchéité entre les circuits de distribution, ne suffit pas à délimiter un marché, enfin que les modes d'approvisionnement des GSA sont proches de celles des autres commerces;

Que, pour sa part, la société Royal Canin soutient que le marché pertinent est le marché des aliments secs pour chiens, en faisant valoir essentiellement que l'offre des produits, large et variée sans rupture de qualité et de prix autre que celles résultant de positionnement marketing, ne permet pas de retenir la qualité supposée des produits comme un critère pertinent, ainsi que la commission européenne l'a décidé le 15 février 2002, à l'occasion de l'opération de concentration Masterfoods/Royal Canin, que les aliments secs pour chiens ne présentent pas de spécificités organiques, fonctionnelles ou juridiques, qui les rendraient non substituables entre eux aux yeux des consommateurs, que d'ailleurs les possesseurs de chiens changent régulièrement d'aliment pour leur animal, en particulier lors du passage à l'âge adulte, ce que confirme d'ailleurs l'évolution des parts de marché des aliments humides et secs, le lancement réussi de nouveaux produits et l'augmentation rapide des parts de marché de certains opérateurs, qu'enfin l'appareil de production est très flexible, pouvant produire sans coûts supplémentaires des produits ayant des positionnements variés ; qu'elle objecte enfin que le Conseil n'était pas autorisé ni même fondé à s'écarter de la définition du marché retenue par la Commission européenne dans la décision précitée;

Considérant, tout d'abord, qu'il ne saurait être reproché au Conseil, statuant sur des pratiques anticoncurrentielles relevées entre 1998 et 2000, de ne pas avoir repris l'analyse de la Commission européenne à l'occasion de l'opération de concentration Masterfoods/Royal Canin, cette analyse ne s'imposant pas à lui dès lors que, ainsi qu'il l'a relevé avec pertinence (points 161 à 163), elle a été rendue dans le cadre du contrôle d'une concentration internationale et qu'elle prend en compte, non seulement la situation constatée en 2001 et 2002 mais également les effets de la concentration ainsi qu'éventuellement les facteurs d'évolution ultérieurs;

Considérant, ensuite que les aliments secs pour animaux se distinguent substantiellement des aliments humides, en raison tant de leur mode de production (extrudation ou conserve) et de leur composition (80 % d'eau pour les aliments humides) que de leur prix (le prix de revient par repas est deux à trois fois supérieur pour les produits humides); que le fait qu'ils soient parfois commercialisés côte à côte et que la part des produits secs soit en augmentation démontre seulement, ainsi que la société Truffaut elle-même le souligne, qu'ils répondent à un même usage et témoigne aussi de l'accroissement global des parts des aliments secs pour animaux familiers, réalisé principalement aux dépens de l'alimentation humide, sans qu'il puisse en être déduit que ces produits sont substituables dans l'esprit des consommateurs ; qu'enfin, la pratique décisionnelle de la Commission européenne, citée par le Conseil de la concurrence dans ses observations devant la cour, distingue les deux marchés, ce dont témoigne encore la décision Masterfoods/Royal Canin (points 11), invoquée par ailleurs par les parties;

Considérant, encore que, s'il n'existe pas de classification des aliments pour chiens ni de normes de qualité pré-définies, il est constant néanmoins que le choix des matières premières utilisées (viandes fraîches), leur digestibilité et leur appétence constituent autant de critères de qualité reconnus et que les aliments dits "nutritionnels" sont réputés être de meilleure qualité que les aliments standard et produits bas de gamme, tant dans la présentation qu'en font les fabricants, sauf à considérer qu'il y ait tromperie, que dans l'esprit des consommateurs qui, à défaut de pouvoir juger par eux-mêmes des qualités du produit - le degré de satisfaction de leur chien est difficilement appréciable - doivent s'en remettre à son positionnement sur le segment haut de gamme ; qu'une qualité nutritionnelle supérieure justifie une tarification plus élevée et que les objections de la société Royal Canin quant au continuum de prix et de qualité ne sont pas pertinentes dès lors que les tableaux produits au soutien de son argumentation (pages 33 et 34 de son mémoire) ne concernent que le circuit des distributeurs spécialisés, voire les libres-services agricoles, qui commercialisent essentiellement des produits nutritionnels ; qu'au surplus, son propre directeur général, décrivant la stratégie de l'entreprise au moment des faits, a expressément souligné qu'elle produisait, à l'intention des GSA, "des produits spécifiques différents des autres gammes tant au niveau de la composition (...) que du conditionnement, (...) produits de formulation plus simple, généralistes, utilisables par tous types de chiens" ajoutant que "les gammes doivent être simples et vendues sans conseil au consommateur" ; que le Conseil n'a d'ailleurs pas considéré que les catégories étaient totalement étanches, relevant seulement que les produits humides et les produits secs " premier prix " sont essentiellement distribués en GSA tandis que les produits nutritionnels le sont principalement dans les circuits spécialisés (points 13 et 14), de sorte que les contestations des parties requérantes, en ce qu'elles se fondent sur l'existence de cas contraires, peu significatifs, ne contredisent pas utilement ses appréciations;

Que si, en l'espèce, les circuits spécialisés sont opposés aux GSA, c'est en ce qu'ils se situent en dehors du circuit de la grande distribution alimentaire, sur un créneau non généraliste, peu important que la spécialité qu'ils exercent à titre principal ne soit pas l'animalerie, les observations du Conseil quant au comportement et aux attentes du consommateur à leur égard demeurant tout aussi pertinentes dans le cas de spécialités autre que l'animalerie;

Qu'il a été constaté au moment des faits que les offres de produits haut de gamme n'étaient pas disponibles en GSA, ce dont ont témoigné deux négociateurs chez Carrefour (point 153) : " A l'heure actuelle, nous ne disposons pas dans nos magasins d'offre équivalente à celle proposée par les circuits spécialisés. Ces derniers proposent majoritairement des produits secs haut de gamme";

Qu'au demeurant, la Commission européenne elle-même, dans sa décision M.2544 Masterfoods/Royal Canin du 15 février 2002, relève que les produits bon marché de type économique sont vendus dans les commerces d'alimentation générale cependant que les produits de qualité supérieure sont vendus exclusivement sur des points de vente autres (§ 13 de la traduction produite par la société Royal Canin) et souligne (§ 53) la fidélité aux marques, importante, de la part des propriétaires de chiens et le caractère incontournable de ces dernières pour les détaillants;

Considérant qu'il suit de là que les moyens des sociétés Truffaut et Royal Canin ne sont pas fondés;

Considérant en revanche que c'est à juste [titre] que la société Normandie Loir Distribution reproche au Conseil d'avoir écarté du marché pertinent les prescripteurs, qui avaient été retenus par la notification de griefs, laquelle visait le marché des aliments secs pour chien haut de gamme, dès lors que les vétérinaires comme les éleveurs répondent aux critères énoncés ci-dessus, en ce qu'ils offrent également des produits haut de gamme aux consommateurs à forte sensibilité nutritionnelle et peuvent, le cas échéant, jouer le rôle de conseil, peu important à cet égard qu'ils jouissent d'un réseau d'approvisionnement quelque peu différent (centrales d'achat régionales) et qu'ils ne soient pas concernés par les dispositifs de présentation à la clientèle propres aux magasins spécialisés, cas caractéristiques apparaissant secondaires au regard des critères retenus au titre de l'analyse de substituabilité;

Qu'il résulte de ce qui précède que le marché pertinent est celui de la vente de croquettes sèches pour chiens dans la distribution spécialisée, soit en magasins spécialisés et chez les éleveurs et vétérinaires, sur le territoire national;

B - Sur la position de Royal Canin sur ce marché

Considérant qu'il résulte des informations communiquées à l'occasion de l'opération Masterfoods/Royal Canin que la part de marché de Royal Canin dans la distribution spécialisée (magasins spécialisés et prescripteurs) était, en valeur, de 39 % en 1998, 41 % en 1999 et 42 % en 2000, cependant que le deuxième fabricant sur le réseau, Ralston Purina, pesait moins du tiers de Royal Canin (respectivement 10 %, 12 % et 14 %) et que le troisième, Mars, en représentait moins du quart (8 %, 7 % et 6 %);

Que le caractère incontournable de la marque pour les détaillants sur le marché français, déjà signalé ci-avant en termes généraux à propos de la fidélité des consommateurs constatée par la Commission européenne dans sa décision du 15 février 2002, résulte encore, en ce qui concerne Royal Canin, des déclarations concordantes des responsables du magasin Vilmorin à Fain et de celui des Jardins de Lucie, relatées au point 171 de la décision, selon lesquelles ils ne pouvait se passer des produits phares, notamment de "RCCI Size";

Que cette caractéristique, qui implique pour tout entrant sur le marché des investissements élevés, constitue une barrière à l'entrée;

Que la société Royal Canin dispose de toute façon d'une forte notoriété, en tant qu'opérateur historique, notamment sur le créneau des aliments nutritionnels dont elle a été le précurseur en France, ainsi que la Commission européenne l'a également relevé en 2002 (point 50 de la décision Masterfoods/Royal Canin);

Que son réseau de 19 distributeurs couvrant le territoire et sa présence dans près de 13 000 lieux de vente lui assure, à l'époque considérée, une présence incomparable sur le marché, alors qu'elle bénéficie d'une présentation privilégiée auprès des grands magasin spécialisés, comme Gamm Vert par exemple;

Qu'enfin, et même si elle ne détient que 3,6 % des parts de marché dans le circuit des vétérinaires, (contre 48 % pour Hill's), elle est fortement présente auprès des prescripteurs, entretenant un contact permanent avec 50 % d'entre eux, puisqu'elle démarche régulièrement les vétérinaires par l'intermédiaire de " délégués vétérinaires Royal Canin " (une vingtaine pour la France) et conclut des conventions de partenariat avec les éleveurs, ces derniers s'engageant à conseiller la marque et à lui communiquer des informations sur les acheteurs de chiots, situation aussi décrite par la Commission européenne dans sa décision Masterfoods/Royal Canin (§ 50 et 51);

Considérant que ces éléments, contrairement à ce que soutient vainement la société Royal Canin, caractérisent sa position dominante sur le marché pertinent;

C - Sur les griefs

1° : sur les pratiques à l'occasion des relations de la société Royal Canin avec les centrales d'achat, constitutives d'abus de position dominante

Considérant que c'est à juste titre que la société Royal Canin discute sa condamnation de ce chef; qu'en effet, le seul fait qu'elle soit en position dominante ne lui interdit pas, par principe, le recours à des remises purement quantitatives, en l'espèce des remises calculées sur l'année en fonction du chiffre d'affaires réalisé et des remises récompensant le taux de progression par rapport à l'année précédente, calculé également en fonction du chiffre d'affaires réalisé consenties aux centrales d'achat, dès lors que l'effet de forclusion de ces remises, dont il n'a pas été constaté qu'elles n'aient pas été accordées par les autres fabricants de produits haut de gamme, ni qu'elles aient conduit les détaillants à se détourner de cas derniers, alors qu'il est constant que le marché connaissait, à l'époque considérée, un développement significatif, ne résulte d'aucun élément du dossier et ne saurait se déduire du seul fait qu'elles ont accompagné d'autres pratiques restrictives de concurrence;

2° : sur les pratiques à l'occasion des relations de la société Royal Canin avec les grossistes-distributeurs, constitutives à la fois d'ententes et, en ce qu'elles sont commises par une entreprise en situation de domination, d'abus de position dominante

Considérant que le Conseil retient tout d'abord, au titre du grief de restriction de clientèle, que la société Royal Canin a conclu avec ses grossistes-distributeurs, notamment la société Normandie Loir Distribution et les sociétés Alpadis, Canidis, Etablissements J&B Cazenave, Fapac Tivadis, Ferrat Distribution, Galetou-Sodegal, Garibaldi et Rhonaldis, par le biais de contrats dits "Alliance-Service", des accords d'exclusivité réciproque, en vertu desquels elle leur consentait une exclusivité territoriale cependant que les grossistes s'interdisaient de distribuer des marques et produits concurrents et s'engageaient à ne servir que la distribution spécialisée, les éleveurs professionnels et les vétérinaires ; qu'il relève que ces exclusivités contractuelles ont été scrupuleusement observées, créant, à l'époque des faits, une totale étanchéité des réseaux de distribution entre eux et une absence des croquettes haut de gamme Royal Canin dans la grande distribution; qu'il écarte enfin l'exemption invoquée par la société Royal Canin, tirée du règlement n° 2790-1999 du 22 décembre 1999, au motif, notamment, qu'elle détient une part de marché supérieure à 30 %;

Considérant que la société Royal Canin et les grossistes discutent cette analyse, selon eux entachée d'erreurs de droit et de fait;

Considérant cependant que, les contrats Alliance Service énumérant, sous le titre "les clients servis" (p. 11), la distribution spécialisée, des éleveurs professionnels, des vétérinaires et autres prescripteurs, il s'en déduit une limitation, de fait, de la clientèle des grossistes à ces catégories de distributeurs, même s'ils n'édictent aucune interdiction formelle ; qu'il n'est pas nécessaire qu'un refus de vente aux GSA soit constaté, les éléments du dossier révélant sans ambiguïté que les GSA, à qui étaient vendues du reste des gammes différentes, disposaient d'un circuit de distribution distinct, géré directement par un service interne de la société Royal Canin; que le moyen de la société Royal Canin, tiré de l'absence d'interdiction de vente, est donc inopérant;

Considérant qu'il a été dit ci-avant que la part de Royal Canin, sur le marché en cause, excède 30 %, la privant du bénéfice de l'exemption qu'elle revendique;

Qu'en outre, la société Royal Canin produisant à l'intention des GSA des gammes de produits standard, notamment Royal Chien mentionné d'ailleurs en page 11 des contrats Alliance Service, distribués par un circuit distinct et géré par un de ses services (points 21 et 22), le grief d'entente au titre d'une limitation de clientèle conclue avec les grossistes-distributeurs, n'est pas incompatible, contrairement à ce que soutient cette société, avec l'acceptation par la Commission européenne, dans la décision Masterfoods/Royal Canin, de son engagement de retirer ses produits des points de vente alimentaires;

Qu'enfin, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte (points 32 à 41, 185 à 187) que le Conseil a estimé que, si ces contrats n'ont pas été signés par les grossistes-distributeurs, ils ont néanmoins fait l'objet d'un accord tacite de ces derniers dès lors qu'après qu'ils leur eurent été communiqués, en leur " version définitive, après plus de deux ans de concertation avec (eux) par la société Royal Canin, assortis d'un commentaire démontrant qu'ils étaient appelés à régir leurs relations commerciales futures (exemple en cote 101), ils ont reçu exécution, par des dispositions et mesures qui s'inscrivent nécessairement, en particulier les documents délimitant les zones d'intervention des grossistes, les contrats d'objectifs annuels visant des gammes de produits et repris aux plans d'action expressément visés en page 11 bis du contrat Alliance-Service;

Considérant que c'est [à] juste titre également que, statuant ensuite sur le grief de prix de vente imposés aux grossistes, le Conseil retient une pratique visant à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu de la concurrence au stade des ventes en gros, après avoir relevé que la société Royal Canin éditait, à l'intention de ses grossistes-distributeurs, des barèmes de prix de vente aux détaillants, dit "tarifs T0", pour les commandes de 300 à 999 kg, à leur en-tête, comportant une date d'entrée en vigueur commune et reprenant les tarifs qui avaient été arrêtés à l'issue de réunions organisées au plan national (les comités mixtes Royal Canin), et que ces tarifs étaient volontairement appliqués par l'ensemble des grossistes pour les commandes supérieures à 300 kg (points 51 à 54, 191 à 195) ; que les constatations sur lesquelles le Conseil s'est fondé, qui établissent une adhésion générale des grossistes-distributeurs au système proposé, ne sont pas utilement combattues par les sociétés Alpadis, Canidis, Etablissements J&B Cazenave, Fapac Tivadis, Ferrat Distribution, Galetou-Sodegal, Garibaldi et Rhonaldis, qui justifient seulement, pour la période en cause, d'une non-application ponctuelle du tarif T0, pour deux clients, en ce qui concerne la société Fapac Tivadis, et permanente mais partielle en ce qui concerne la société Rhonaldis qui appliquait exactement deux des séquences du tarif sur les cinq proposées (ainsi que l'a expliqué le dirigeant de cette société en cote 1676); qu'il n'importe en outre que n'aient pas été relevées de mesures de coercition, que la situation ne rendait pas nécessaires, ni, s'agissant d'une entente verticale, que les grossistes ne fussent pas sur une zone de chalandise commune, étant souligné à cet égard que les effets anticoncurrentiels de la pratique étaient réels dès lors que, même dans un système de distribution exclusive, une vente passive hors territoire doit être honorée et qu'en l'espèce, en l'état des accords en vigueur, un détaillant n'avait plus d'intérêt à s'adresser à un autre grossiste, qui lui aurait proposé le même prix;

Considérant enfin que le Conseil a retenu à juste titre que les effets anticoncurrentiels de ces pratiques étaient majorés par le fait qu'était instituée une remontée des informations, mensuelle, portant toutes les ventes réalisées par client et par produit, prévue par les contrats annuels d'objectifs Alliance Service et rémunérée par une prime de 0,10 % du chiffre d'affaires, et que la juxtaposition de pratiques de territoires exclusifs et d'exclusivité bilatérale entre Royal Canin et les grossistes ainsi que l'imposition d'un prix de revente aux grossistes-distributeurs avaient pour effet d'éliminer toute concurrence intra-marque sur les produits Royal Canin, les détaillants n'ayant d'autre choix que de s'adresser au grossiste prescrit par Royal Canin et à s'approvisionner au prix unique imposé;

3° : sur les pratiques nées des relations de Royal Canin et des grossistes-distributeurs avec les détaillants, constitutives d'entente sur les prix de détail et, en ce qu'elles sont commises par une entreprise en situation de domination, d'abus de position dominante

Considérant que, relevant que, lors de l'enquête préliminaire au cours de laquelle plus de 1 000 prix ont été relevés, il a été constaté, sur toute la France, un alignement général des prix de vente au détail sur les gammes RCCI et Premium, conforté par un relevé de prix effectué en novembre 1998 par l'équipe commerciale de Royal Canin pour la région Paris-Nord-Est, le Conseil, excluant, par une analyse motivée, un simple parallélisme du comportement et une entente horizontale entre les revendeurs, retient que cette homogénéité de prix ne peut s'expliquer que par une série d'ententes verticales entre Royal Canin, ses grossistes-distributeurs et les revendeurs autour d'un prix de revente déterminé par Royal Canin; que, constatant que cette dernière a établi et diffusé des prix publics indicatifs, que ces prix ont été respectés par les revendeurs et qu'a été mis en place un système de contrôle exhaustif des prix organisé au moins deux fois par en, il retient sa culpabilité ainsi que celle des entreprises du réseau de distribution-grossistes-distributeurs, centrales de franchisés, détaillants - à chaque fois que sont relevés des éléments positifs démontrant leur participation à cette entente, soit notamment, la société Georges Delbard, la société Truffaut et les sociétés Alpadis, Candis, Fapac Tivadis et Rhonaldis, les parties requérantes;

Considérant que la société Royal Canin, qui reconnaît avoir procédé à des recommandations unilatérales auprès des points de vente "en vue d'assurer un positionnement cohérent du produit auprès des consommateurs" et qui admet que des distributeurs ont pu attirer son attention sur le fait que certains prix pratiqués s'éloignaient sensiblement des prix conseillés, soutient qu'aucune contrainte ni sanction n'a alors été mise en œuvre et que les distributeurs demeuraient libres de pratiquer des prix différents, ce qui était le cas notamment de la société Jedima et des points de vente Bricomarché; qu'elle conteste également que les prix pratiqués aient été homogènes et produit divers relevés démontrant le contraire selon elle;

Que la société Normandie Loir Distribution discute également l'homogénéité des prix retenue par le Conseil et nie toute participation à l'entente, soulignant que les interventions qui ont pu avoir lieu du fait de ses commerciaux, à défaut de consigne en ce sens de sa part, sont le fruit d'initiatives personnelles et unilatérales de ces derniers, qui résistent difficilement aux demandes des revendeurs détaillants, responsables en définitives des comportements critiqués;

Mais considérant, d'une part, qu'ainsi que le ministre le relève à juste titre, les tableaux produits par les sociétés Royal Canin et Normandie Loir Distribution sélectionnent à dessein les 130 écarts de prix les plus importants, alors que l'enquête de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes portait sur plus de 1 000 prix ; que les conclusions chiffrées auxquelles ils parviennent ne peuvent donc être regardées comme significatives et pertinentes au regard des autres relevés effectués;

Que, d'autre part, l'ensemble des éléments retenus par le Conseil, et notamment les témoignages des revendeurs, dont le caractère probant n'est pas utilement discuté, révèlent que les tarifs étaient diffusés tous les ans par la société Royal Canin, que, s'ils étaient formellement présentés comme seulement indicatifs, ils étaient en réalité considérés par l'ensemble des détaillants comme impératifs (points 108 à 115), cette situation résultant du comportement des représentants de la marque et des grossistes, qui veillaient à la mise en œuvre uniforme de cette tarification, à la fois par un relevé régulier des prix de vente pour le compte de la société Royal Canin (point 57 à 59) mais également par des interventions ponctuelles sur place en cas de non-respect constaté ou dénoncé (points 60 à 74);

Que la société Normandie Loir Distribution n'est pas fondée à prétendre que les agissements de ses commerciaux étaient isolés et unilatéraux et qu'ils étaient finalement imputables aux détaillants, alors qu'il lui appartenait de donner toutes instructions claires à l'ensemble de son personnel sur le caractère prohibé de cette pratique et de veiller à leur application;

Qu'il n'est pas incompatible avec l'existence de l'entente que quelques entreprises aient refusé d'y adhérer et n'aient pas fait l'objet de mesures de rétorsion, dès lors que la société Royal Canin elle-même ne conteste pas que des pressions ont été exercées sur les détaillants récalcitrants -appels téléphoniques répétés et visites de ses représentants ou de ses distributeurs régionaux- afin de les inviter à se plier à la discipline commune, qui ont été suivies d'effet, ainsi que le Conseil l'a abondamment constaté (points 61 à 76);

Considérant que, si, en ce qui concerne la société Fapac-Tivadis, et contrairement à ce qu'énonce la décision (point 226), le représentant de la société exploitant l'enseigne Bricomarché à Cosne-sur-Loire ne s'est pas plaint d'un refus de vente de Royal Canin en raison du non-respect des prix publics imposés mais en raison de l'opposition "de la concurrence qui ne souhaitait pas voir s'élargir la distribution des produits Royal Canin sur ce secteur" (point 115 reprenant la pièce 3761), la participation active de ce grossiste-distributeur aux pratiques en cause résulte sans équivoque du plan d'action assortissant son contrat d'objectifs, conclu avec Royal Canin en 1999 (vote 250) et retenu à juste titre par le Conseil, qui prévoit le respect des prix publics indicatifs ("balisage-respect PVC", cette abréviation s'entendant comme le prix de vente aux consommateurs) et, surtout, de la déclaration du directeur du magasin Bricomarché à Varennes-Vauzelles (reproduite au point 74), dont la valeur probante n'est pas contestée, qui rapporte qu'il avait décidé en 1998, lors de l'ouverture de la jardinerie Les jardins de Lucie", de pratiquer une politique de prix plus agressive correspondant à celle de Bricomarché, en appliquant une remise de 10 % par rapport au prix public diffusé par Royal Canin mais qu'à plusieurs reprises, le responsable de l'animalerie a été contacté sur le point de vente par le représentant de la société Fapac-Tivadis, distributeur Royal Canin, qui lui conseillait de suivre les prix de vente publics diffusés par la société, de sorte qu'il avait fini par s'aligner sur les prix publics préconisés par Royal Canin mais qu'il regrettait ne pas disposer d'une plus grande liberté en la matière;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés Canidis et Alpadis, les éléments retenus par la décision à leur encontre (respectivement aux points 62 et 224 et aux points 58, 63, 64, 70, 221 et 222), établissent leur participation active, par des agissements positifs, à l'entente en cause;

Considérant qu'en ce qui concerne la société Georges Delbard, il est constant qu'elle n'est pas une centrale mais qu'elle gère en direct une quinzaine d'établissements dirigés par des directeurs salariés, ainsi que l'avait déclaré son chef de produit animalerie dès le début de l'enquête (cote 550 et s.); que, si cette circonstance n'est pas un obstacle en soi à ce qu'elle soit retenue, en qualité de détaillant indépendant, comme partie à une entente avec la société Royal Canin, encore faut-il que ses agissements en ce sens soient caractérisés, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, les éléments retenus par le Conseil à cet égard n'apparaissant pas suffisamment convaincants;

Qu'en effet, le rapprochement des déclarations du chef de produit mentionnées ci-dessus et de celles du responsable du magasin de Flins révèlent que, si les tarifs élaborés par Royal Canin sont repris à son compte par la société Georges Delbard et transmis à ses magasins pour qu'ils les appliquent, des modifications sont néanmoins possibles, sur décision du responsable du secteur, avec l'accord du chef de l'établissement concerné; que ces réserves expliquent que, contrairement à ce qu'énonce la décision, les trois jardineries dont les tarifs ont été relevés par l'équipe de la société Normandie Loir Distribution à Bénouville (14), Vernouillet (28) et Allonnes (72) ont pratiqué des prix notablement différents, le tableau reproduit au point 240, qui fonde la décision envers cette entreprise, étant entaché de plusieurs erreurs grossières, puisque des prix pratiqués par l'un des trois magasins, différents de ceux relevés chez les autres sont soit omis (SM 25 omission de 369 F pour Vernouillet, contre 339 F à Bénouville et Allonnes), soit inexacts (Premium Jr Croc : 289 F indiqué au lieu de 259 F à Vernouillet, contre 289 F aux deux autres - SGR 26 348 F indiqué au lieu de 289 F à Vernouillet, contre 348 F à Allonnes et 349 F à Bénouville - AGR 36 369 F indiqué au lieu de 317 F pour Vernouillet, contre 359 F à Bénouville et 369 F à Allonnes - OR 26 317 F indiqué au lieu de 348 F à Vernouillet, contre 317 F au deux autres) et que des prix identiques sont faussement indiqués alors que le produit n'était pas commercialisé (Ad Croc 259 F à Vernouillet, identique au deux autres); qu'ainsi, au total, sur les onze produits dont les tarifs sont comparés, six sont erronés, dans un sens défavorable à la société Georges Delbard ; qu'à défaut d'autre élément établissant la participation de la société Georges Delbard aux pratiques en cause, cette dernière doit être mise hors de cause;

Considérant qu'en ce qui concerne la société Truffaut, les éléments retenus par le Conseil au titre d'une entente avec la société Royal Canin, n'emportent pas davantage la conviction; que le Conseil a en effet déduit la participation de cette société, en tant que centrale, du fait qu'elle avait intégré dans son "fichier de référencement articles" les prix publics indicatifs communiqués par la société Royal Canin le 12 janvier 1999, pour les appliquer à compter du 15 janvier suivant ainsi que son fournisseur le préconisait, et de ce que ces prix étaient considérés comme imposés par ses franchisés ; qu'il est constant cependant que la société Truffaut exploitait alors 24 magasins intégrés et seulement 5 magasins indépendants à Gisors, La Rochelle, Lorient, Quimper et Angoulême (dont les contrats figuraient au dossier aux cotes 477 et suivantes), pour lesquels elle négociait les conditions d'approvisionnement avec les fournisseurs ; qu'elle fait valoir, sans qu'aucun élément de dossier ne la contredise, qu'elle a repris, pour l'essentiel, les tarifs proposés par Royal Canin parce qu'ils lui semblaient correspondre aux prix du marché - ce que son directeur marketing pour l'animalerie avait déjà déclaré au cours de l'enquête, précisant qu'il prenait une marge comparable sur les produits concurrents - et que la date d'entrée en vigueur de ces nouveaux prix n'était que la conséquence de l'entrée en vigueur simultanée des nouveaux tarifs-fournisseurs T0 que lui appliquait la société Royal Canin et que cette dernière lui transmettait en même temps; que, se fondant sur les relevés figurant au dossier, elle justifie d'ailleurs que, pour une série de six articles, elle s'est éloignée sensiblement des prix conseillés par Royal Canin; qu'enfin, aucun élément à charge ne peut être tiré de la déclaration du responsable du magasin de Sainte Apolline-Plaisir, selon laquelle les prix que lui transmettait la société Truffaut, dont il dépendait directement, s'imposaient à lui, même si le représentant Royal Canin vérifiait régulièrement leur application, ni de celle du responsable du magasin de Rennes qui s'est borné à indiquer qu'il appliquait les prix conseillés; qu'en cet état, il n'est pas établi que la société Truffaut ait adhéré à l'entente sur les prix qui lui est reprochée;

C- Sur les sanctions

Considérant que, selon l'article L. 464-2, alinéas 3 et 4, du Code de commerce, en sa rédaction applicable aux faits de la cause, les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné, et le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos;

Considérant que les pratiques ayant pour objet ou pour effet de faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché et de favoriser artificiellement leur hausse sont, par nature, particulièrement graves, en ce qu'elles confisquent au profit des auteurs de l'infraction le bénéfice que le consommateur est en droit d'attendre d'un bon fonctionnement du marché et en ce qu'elles ont porté sur des produits auquel est attaché un fort investissement affectif, dûment exploité par la communication du fabricant (comme en atteste l'introduction du contrat Alliance-Service le chien n'est pas un enfant, pas une machine, pas un jouet, pas un objet que l'on jette quand il ne plaît plus, l'homme est responsable de son bien-être et de son éducation...), et pour lesquels la demande est relativement inélastique au prix;

Que le dommage à l'économie, même si les pratiques faisant obstacle à la libre fixation des prix de détail ne concernaient qu'une seule gamme de produits, doit être mis en relation avec la part représentée par les dépenses d'alimentation des animaux dans la consommation des ménages, supérieure à 1 %, et par le surprofit réalisé par les participants à l'entente, qui ont additionné des marges élevées aux différents stades de la structure verticale au détriment des consommateurs que toutefois, ainsi que le Conseil l'a retenu à juste titre, il convient de souligner que, pour l'essentiel, les pratiques sanctionnées ont porté sur la concurrence intra-marque;

Considérant que, bien que la société Royal Canin ne discute pas la proportionnalité de la sanction qui lui a été infligée par le Conseil, l'examen de cette dernière s'impose eu égard à l'abandon du grief d'abus de position dominante pour les remises fidélisantes ; que la responsabilité de cette entreprise dans les pratiques retenues ci-dessus apparaît particulièrement lourde compte tenu du fait qu'elle a été le maître d'œuvre des pratiques d'entente, établissant les tarifs appliqués aux différents stades de la distribution, amont, intermédiaire et aval, et contrôlant le respect des prix de vente tant par les grossistes-distributeurs que par les détaillants par les remontées d'information systématisées; qu'elle était en outre directement acteur des pratiques au stade du marché de gros au travers de ses sept centres de distribution régionaux intégrés et de sa filiale Royal Canin Distribution qui supervisait la distribution dans l'ensemble des circuits spécialisés; qu'enfin, ayant déjà été condamnée le 13 octobre 1998 (point 278) pour un refus de vente à une entreprise qui avait refusé d'appliquer les prix imposés, comportement non retenu par les présentes poursuites car prescrit, elle avait parfaitement connaissance du caractère prohibé de ses pratiques, qu'elle a néanmoins poursuivies après cette date; qu'en tenant compte de ces éléments, et du montant de son chiffre d'affaires en France au dernier exercice clos tel que déclaré au Conseil de la concurrence (139 049 000 euro), il convient de prononcer à son encontre une sanction de 2 300 000 euro;

Considérant que la société Normandie Loir Distribution a participé activement aux ententes, aussi bien à celle intéressant les différents grossistes-distributeurs et Royal Canin pour restreindre la concurrence et imposer des prix au stade du marché de gros, qu'à celle concernant le marché aval de détail ; qu'eu égard à son chiffre d'affaires déclaré pour le dernier exercice clos, (12 744 945 euro), la sanction de 89 000 euro prononcée par le Conseil de la concurrence est proportionnée et doit être maintenue;

Considérant qu'il en va de même pour les sociétés Alpadis, Canidis, Fapac Tivadis et Rhonaldis, grossistes-distributeurs qui ont pris une part active à l'entente sur les prix et sur la répartition de clientèle au niveau du marché de gros, ainsi qu'à l'entente sur les prix de vente imposés au stade du marché de détail et contre lesquelles le Conseil a prononcé des sanctions proportionnées, en tenant compte à bon droit, conformément à l'article susvisé, de leurs chiffres d'affaires déclarés pour le dernier exercice clos (points 286, 287, 288 et 289), sans être tenu de cantonner ce chiffre d'affaires à celui enregistré pour les produits objets de l'entente sur les prix de détail;

Considérant enfin que seront également maintenues les sanctions proportionnées prononcées par le Conseil contre les sociétés Etablissements J&B Cazenave, Ferrat Distribution, Galetou-Sodegal et Garibaldi, grossistes-distributeurs qui ont pris une part active aux pratiques d'entente avec Royal Canin en vue de restreindre la concurrence et d'imposer les prix au stade du marché de gros, cas sanctions, qui tiennent compte de leurs chiffres d'affaires déclarés pour le dernier exercice clos, mentionnés aux points 281, 282, 284 et 285 de la décision, apparaissant proportionnées au regard du principe posé à l'article susvisé ;

Et considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application en la cause des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Par ces motifs, Déclare irrecevable le recours incident formé par la société Royal Canin contre la décision n° 05-D-32 du 22 juin 2005 du Conseil de la concurrence; Sur les recours de la société Georges Delbard et de la société Truffaut, réforme la décision en ses articles 3 et 5 et, statuant à nouveau, dit qu'il n'est pas établi que ces entreprises aient enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et dit qu'il n'y a donc pas lieu à sanction à leur encontre; Sur le recours de la société Royal Canin, réforme la décision mais seulement en son article 4, en ce qu'il retient que cette entreprise a enfreint l'article L. 420-2 du Code de commerce pour avoir consenti des remises de fidélités à l'égard des centrales d'achat, et en son article 5 en ce qu'il prononce à son encontre une sanction de 2 500 000 euro et, statuant à nouveau, dit que ce grief n'est pas établi, rejette le recours pour surplus et réduit le montant de la sanction infligée à 2 300 000 euro; Rejette les recours des sociétés Alpadis, Canidis, Etablissements J&B Cazenave, Fapac Tivadis, Ferrat Distribution, Galetou-Sodegal, Garibaldi et Rhonaldis Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elles exposés, à l'exception des sociétés société Truffaut et société Georges Delbard dont les dépens seront supportés par le Trésor public.