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Décisions

Cass. crim., 7 mars 2006, n° 05-84.730

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

Mme Guihal

Avocat général :

M. Frechede

Avocats :

SCP Choucroy, Gadiou, Chevallier, Me Jacoupy

TGI Avignon, ch. corr., du 31 janv. 2005

31 janvier 2005

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par X Adrian, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, en date du 24 mai 2005, qui, pour publicité de nature à induire en erreur et tromperie, l'a condamné à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et 4 000 euro d'amende, a ordonné une mesure de publication et d'affichage, et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6 et L. 213-1 du Code de la consommation, 1350 et 1351 du Code civil, des articles préliminaire et 593 du Code de procédure pénale, et 6.2 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Adrian X coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur ;

"aux motifs que le plaignant soutient qu'il a cru acheter un véhicule 4X4 tel que figurant dans la revue "4X4 Magazine", ce à quoi le vendeur Adrian X réplique que ce n'est pas le même véhicule qui lui a été vendu ; que, pour autant, force est de constater que le prévenu ne justifie toujours pas de ses allégations ni ne rapporte davantage la preuve de la vraie destination du véhicule ayant fait l'objet de la publicité ; qu'une telle carence persistante s'explique d'autant plus que le prévenu a lui-même reconnu devant la cour qu'il n'avait aucun moyen permettant de déterminer à tout moment l'état de son stock de véhicules neufs, les entrées et sorties du stock, les types, modèles et effectifs des véhicules avec tous justificatifs appropriés ; qu'ainsi que les premiers juges l'ont relevé à juste titre, le véhicule vendu au plaignant et celui, objet de la publicité, présentaient les mêmes caractéristiques et que, faute pour le vendeur de justifier de l'existence de deux 4X4 Ssang Yong Musso en mars 2000, il y avait lieu de considérer qu'Eddie Y a effectivement acquis le véhicule figurant sur la publicité, publicité comportant des allégations manifestement fausses ; que, quant à l'année modèle 2000, au nombre de places et à la puissance fiscale, le véhicule ayant été fabriqué le 5 février 1997 ne comportait pas 7 mais 5 places et qu'aucun modèle année 2000 n'offrait de motorisation de 12 chevaux mais seulement 9 chevaux ainsi qu'il résultait des éléments factuels soumis aux débats ;

"alors que, d'une part, en matière de publicité mensongère, comme pour toutes les infractions, c'est aux parties poursuivantes, Ministère public et partie civile qu'il incombe de rapporter la preuve que le prévenu a commis l'infraction poursuivie et non à ce dernier qu'il appartient de rapporter la preuve de son innocence qui est présumée en vertu des articles préliminaire du Code de procédure pénale et 6.2 de la Convention européenne des Droits de l'Homme ; que, dès lors, en déclarant le demandeur coupable de publicité mensongère parce qu'il ne rapportait pas la preuve que le véhicule vendu n'était pas celui qui avait fait l'objet de la publicité litigieuse, les juges du fond ont renversé la charge de la preuve et violé le principe de la présomption d'innocence ;

"alors, d'autre part, que les juges du fond qui ont eux-mêmes constaté que le véhicule vendu différait sensiblement de celui ayant fait l'objet de la publicité litigieuse, tant en ce qui concerne son année de fabrication, son nombre de places, sa puissance fiscale et de motorisation et qui n'ont pas non plus tenu compte de la différence des prix des deux véhicules, se sont mis en contradiction avec leurs propres constatations en décidant néanmoins, dans ces conditions, que le véhicule vendu à la partie civile était celui qui avait fait l'objet de la publicité litigieuse, pour décider qu'elle présentait un caractère mensonger" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 213-1, L. 216-2 et L. 216-3 du Code de la consommation, de l'article 593 du Code de procédure pénale, des articles 1350 et 1351 du Code civil, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Adrian X coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité de la marchandise ;

"aux motifs que le vendeur se réfère à cet égard à toutes les informations qu'il prétend avoir données lors de la transaction mais de manière "purement verbale" ; qu'à ce flou qualifié d'artistique par le Ministère public, il rajoute la référence à un bon de commande du 15 mars 2000 censé comporter toutes indications utiles pour l'acheteur, mais bon de commande que le plaignant conteste avoir signé et que le vendeur - qui devrait en détenir l'original - n'a jamais été en mesure de produire qu'en photocopie ; que l'appelant procédant par affirmations de pure convenance soutient également que l'expert judiciaire ayant examiné le véhicule litigieux dans le cadre du procès civil s'est trompé, de même d'ailleurs que les services administratifs Drire-Mines ; mais qu'en tout état de cause, il résulte des pièces de la procédure et notamment du rapport d'expertise que le vendeur n'a pas informé le cocontractant de la situation exacte du véhicule et notamment de son immatriculation en Belgique ; qu'en effet, le véhicule 4X4 année 1997 ayant fait l'objet d'une immatriculation RXA 595 en Belgique (en raison de l'absence de quota d'importation imposé dans ce pays) ne pouvait prétendre à l'appellation administrative de véhicule neuf employée par le vendeur ; que celui-ci, professionnel de la vente, n'a pas davantage justifié avoir informé l'acheteur du parcours atypique de ce véhicule, véhicule qui aurait été vendu neuf mais avec l'obligation très particulière d'être immatriculé d'abord en Belgique avant de pouvoir l'être en France, si l'on se réfère au bon de commande dont le prévenu se prévaut ; qu'il est constant que la carte grise délivrée par la préfecture de l'Hérault à l'acheteur du "véhicule neuf" mentionne l'immatriculation belge et une première mise en circulation, ce qui exclut définitivement et en toute hypothèse la qualification de neuf ; que, de surcroît, l'expert a constaté que le véhicule vendu à Eddie Y ne comportait pas 7 places comme indiqué sur le bon de commande litigieux invoqué par le prévenu mais seulement 5 ; qu'en conséquence, les premiers juges ont retenu à bon droit Adrian X dans les liens de la double prévention de tromperie sur les qualités substantielles et de publicité mensongère, l'énormité des fausses allégations reprochées à ce professionnel de la vente étant exclusives de bonne foi ;

"alors que les juges du fond, qui se sont référés au bon de commande du 15 mars 2000 précisant que le véhicule devait être immatriculé en Belgique avant d'être immatriculé en France ainsi qu'à la carte grise délivrée par la préfecture de l'Hérault, pour en déduire que le véhicule vendu comme neuf par le prévenu avait fait l'objet d'une première immatriculation en Belgique en sorte qu'il ne pouvait prétendre à une telle qualification, ont entaché leur décision d'une contradiction de motifs flagrante en déclarant le prévenu coupable de tromperie sous prétexte qu'il n'aurait pas informé son cocontractant de la situation exacte du véhicule et notamment de son immatriculation en Belgique effectuée, selon la carte grise précitée, le 20 mars 2000, soit postérieurement à la signature du bon de commande qualifiant à juste titre le véhicule de neuf" ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ; d'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.